La « maladie du foie gras » en quête de traitements
Une soixantaine de médicaments sont en cours d’évaluation pour traiter la maladie, mais les règles hygiéno-diététiques restent la pierre angulaire de la prise en charge.
Par Pascale Santi
Le 12 septembre 2022 à 17h12, mis à jour à 16h58.Lecture 2 min.
Autrement appelée « maladie du foie gras » ou « maladie du soda », la NAFLD (non alcoholic fatty liver disease ou stéatose hépatique non alcoolique) est une accumulation de graisses dans le foie, principalement due à une alimentation trop riche et à une trop grande sédentarité. Selon une étude menée à partir de la cohorte Constances (Inserm), environ 18 % de la population adulte seraient concernés, soit entre 8 à 10 millions de personnes. Si cette surcharge de graisse dans le foie n’évolue généralement pas, elle va créer une inflammation dans 20 % des cas, qui peut évoluer en fibrose, voire en cirrhose ou en cancer.
Cette forme inflammatoire est appelée « stéatohépatite non alcoolique » (NASH). Elle concernerait jusqu’à 200 000 personnes en France. Dans les cas les plus sévères, une greffe hépatique est nécessaire.
« L’enjeu est de dépister les patients ayant une forme sévère de fibrose. Il faut aussi sensibiliser les médecins généralistes », a expliqué Laurent Castera, du service d’hépatologie de l’hôpital Beaujon (AP-HP), à Clichy (Hauts-de-Seine), lors d’un point presse à l’occasion du Paris NASH Meeting, qui s’est tenu à Paris les 8 et 9 septembre. Si ce spécialiste rassure en disant que « la plupart des personnes qui ont un foie gras n’évolueront pas vers une forme grave, le dépistage est important, car ces maladies progressent lentement et donnent peu de symptômes ». Cela passe par un dosage sanguin de transaminases (enzymes du foie), une échographie ou un Fibroscan, un examen non invasif qui permet de mesurer l’élasticité du foie.
Améliorer la santé cardiométabolique
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Les diabétiques de type 2 sont concernés au premier chef : près de 60 % d’entre eux sont atteints de stéatose, et la fréquence de la fibrose sévère est de 17 %. Pour l’heure, les sociétés savantes recommandent un dépistage chez les patients diabétiques, mais aussi chez les personnes obèses ou avec un syndrome métabolique et, inversement, de rechercher un diabète de type 2 chez les patients ayant une stéatose hépatique.
Quant au traitement, il n’existe aucun médicament disponible. La pierre angulaire repose sur des règles hygiéno-diététiques (activité physique, alimentation plus équilibrée, moins grasse moins sucrée), l’enjeu étant d’améliorer la santé cardio-métabolique.
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Une soixantaine de molécules sont en cours d’évaluation, avec quelque trois cents essais cliniques dans le monde, a annoncé Lawrence Serfaty, chef du service d’hépatologie de l’hôpital de Hautepierre à Strasbourg et président de cette conférence NASH Meeting.
Parmi les plus avancées, l’acide obéticholique, un acide biliaire synthétique agoniste du récepteur FXR (un récepteur nucléaire très exprimé au niveau du foie et de l’intestin), déjà approuvé dans la cholangite biliaire primitive – une maladie chronique du foie caractérisée par une inflammation des petites voies biliaires. Un essai clinique de phase 3 a montré des résultats significatifs en ce qui concerne l’amélioration de la fibrose hépatique. Un bémol, « les effets indésirables comme le prurit et l’augmentation du cholestérol sont trop importants », précise le professeur Serfaty. Ce produit est de nouveau en cours d’examen par les agences américaine et européenne du médicament.
D’autres molécules sont en cours d’évaluation dans des essais de phase 3, dont le lanifibranor, qui exerce une activité antifibrotique et anti-inflammatoire, le sémaglutide, un agoniste GLP-1 (une hormone ayant plusieurs effets sur la régulation du glucose et de l’appétit), déjà approuvé dans le diabète de type 2 et dans l’obésité.
D’autres essais plus préliminaires (phase 2) montrent une régression de la fibrose chez 29 % à 43 % des patients et une disparition des lésions de NASH chez 17 % à 59 % des patients, « avec une bonne tolérance », ajoute le professeur Serfaty.
Pascale Santi