La promesse de créer une filière industrielle de l’hydrogène capable d’employer près de 100 000 personnes n’est pas évidente à réaliser

Hydrogène : « Si l’objectif est de décarboner notre économie, il faudra que la filière française soit compétitive, sinon les utilisateurs iront voir ailleurs »

CHRONIQUE

Philippe Escande

Le gouvernement entend investir 9 milliards d’euros d’ici à 2030 dans le secteur attrayant de l’hydrogène. Mais la promesse de créer une filière industrielle de haute technicité capable d’employer près de 100 000 personnes est plus complexe, estime Philippe Escande, éditorialiste économique au « Monde ».

Publié aujourd’hui à 11h52    Temps de Lecture 1 min. 

Elisabeth Borne, première ministre, accompagnée des ministres Bruno Le Maire, Agnes Pannier-Runacher, Roland Lescure et Laurence Boone et de Laurent Favre, PDG de Plastic Omnium, à Venette (Oise), le 28 septembre 2022.
Elisabeth Borne, première ministre, accompagnée des ministres Bruno Le Maire, Agnes Pannier-Runacher, Roland Lescure et Laurence Boone et de Laurent Favre, PDG de Plastic Omnium, à Venette (Oise), le 28 septembre 2022. ROMUALD MEIGNEUX/SIPA

En grand appareil, la première ministre Elisabeth Borne s’est déplacée dans l’Oise pour dire tout le bien qu’elle pense de l’hydrogène. Flanquée de quatre ministres, elle a profité de l’inauguration par la société Plastic Omnium d’une usine de fabrication de réservoirs à hydrogène pour dévoiler les dix premiers projets français autorisés par Bruxelles pour recevoir des subventions dans ce domaine. L’Etat va investir 2,1 milliards d’euros, qui viendront s’ajouter à 3,2 milliards d’investissement privé qui vont permettre de faire sortir de terre dix usines pour produire les éléments de la chaîne de l’hydrogène : des électrolyseurs pour extraire le gaz de l’eau, des réservoirs pour le stocker et des piles à combustibles pour retransformer ces molécules en électricité.

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Premier effet bénéfique, l’emploi promis de 5 200 personnes. Mais l’ambition va bien au-delà puisque le gouvernement entend investir un total de 9 milliards d’euros d’ici à 2030. La promesse de l’hydrogène est immense, elle est à la fois celle d’un gaz propre remplaçant ses équivalents fossiles pour propulser des avions et alimenter des hauts fourneaux, et celle du stockage et du transport de l’électricité, notamment celui produit par les éoliennes et le solaire et les sortir ainsi de la malédiction de l’intermittence.

Filière décimée

Mais il y a une autre promesse, vieille lune française, qui est de créer de toutes pièces une filière industrielle capable d’employer près de 100 000 personnes dans des métiers de haute technicité. Et dans ce domaine, la route sera longue. D’abord parce que la technologie de production d’hydrogène à partir de l’eau demande énormément d’électricité. Il faudra donc multiplier les infrastructures électriques, renouvelables ou nucléaires, alors que l’on en manque aujourd’hui. L’autre écueil est celui de la montée en puissance industrielle et de la baisse des coûts qui devra en découler. Car si l’objectif est de décarboner notre économie, il faudra que la filière française soit compétitive, sinon les utilisateurs, pressés par la contrainte réglementaire, iront voir ailleurs.

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Et ressurgit le spectre du désastre de la filière industrielle du solaire photovoltaïque en Europe, décimée en moins d’une décennie au tournant des années 2010 par la machine industrielle chinoise, ses subventions et ses effets d’échelle massifs. Avec ce dilemme cornélien : ralentir la compétition par des barrières pour protéger une filière nationale pénalise la pénétration de la technologie et en l’occurrence celle liée à la lutte contre le réchauffement climatique. Il faudra donc marier pertinence, constance et performance. Le secret d’une bonne politique industrielle en somme.

Philippe Escande

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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