A l’entrée des services d’urgences, la régulation par le SAMU s’étend sur le territoire
Après le CHU de Bordeaux fin mai, le dispositif de filtrage des patients s’est généralisé à une quarantaine d’établissements, en grande majorité en soirée et la nuit. Certains hôpitaux constatent un effet immédiat sur le nombre de patients entrants.
Aujourd’hui à 04h26, mis à jour à 06h58.Lecture 5 min.

C’est l’une des mesures les plus délicates déployées par le gouvernement cet été, face à la crise des urgences : permettre aux services de réguler l’entrée en filtrant les passages, principalement par le SAMU. Dès la fin mai, le CHU Pellegrin, à Bordeaux, a provoqué un coup de tonnerre en mettant en place ce fonctionnement la nuit, faute d’effectifs suffisants. Du jamais-vu dans un hôpital de cette taille, qui a fait appel aux bénévoles de la protection civile pour orienter les personnes qui se présenteraient tout de même en soirée, devant ses portes closes. Depuis, d’autres établissements ont emprunté cette voie, en ordre dispersé, avec une accélération à mesure que l’été avance.
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Ils sont une quarantaine, a estimé François Braun, le ministre de la santé, sur Franceinfo, le 27 juillet. Un chiffre en augmentation « importante ». « Ce n’est pas un filtrage, a-t-il cependant assuré. Le principe, c’est de dire que si [un problème de santé] ne relève pas d’un service d’urgence ou d’un plateau technique des urgences, vous serez mieux pris en charge, et plus vite, d’une autre façon. (…) Et c’est le travail de la régulation médicale (…) de vous réorienter. »
Une campagne de communication nationale a été lancée le 25 juillet, avec pour slogan « Avant d’aller aux urgences, si mon médecin traitant n’est pas disponible, j’appelle le 15 ». Les agences régionales de santé et de nombreux hôpitaux avaient déjà commencé à communiquer en ce sens depuis plusieurs semaines. L’objectif étant de sécuriser ainsi la prise en charge des urgences les plus graves.
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Au-delà de l’incitation générale, dans les hôpitaux où cette régulation est devenue obligatoire pour entrer aux urgences, plusieurs situations se superposent. Ce filtrage par le 15 concerne ainsi certains services obligés de « fermer » véritablement la nuit, avec seulement une présence médicale en cas d’urgence vitale, essentiellement dans les territoires ruraux ou les petites villes. Elle est aussi déployée dans de grands services d’urgence qui, derrière leurs portes « fermées », restent ouverts aux patients, mais seulement ceux envoyés par la régulation. A l’entrée, ce sont souvent des interphones qui mènent au 15, avec, d’un territoire à l’autre, des horaires qui diffèrent pour un système expérimenté en grande majorité sur la soirée et la nuit.
Le SAMU beaucoup plus sollicité
Ces derniers jours de juillet, la liste des établissements de santé qui l’ont déclenché s’est allongée, avec les modalités pratiques propres à chacun, égrenées dans les pages de la presse locale. Metz-Thionville, Troyes, Mâcon, les hôpitaux de Vendée, ceux du Lot-et-Garonne… se sont ajoutés à Sarlat certains jours, ou encore au centre hospitalier public du Cotentin tous les jours dès 15 heures.
De manière générale, les appels ont augmenté partout en direction du SAMU, selon Louis Soulat, vice-président du syndicat SAMU-Urgences de France. Favorable à cette nouvelle régulation, l’urgentiste rennais n’en voit pas moins les difficultés, avec un déploiement qui intervient dans l’urgence pour surmonter un été catastrophique dans les hôpitaux. « Parfois, il faut le reconnaître et c’est ce qu’on craignait, les temps d’attente sur les lignes du SAMU ne sont plus bons du tout », dit-il.
Ces nouveaux fonctionnements provoquent bien souvent aussi des réactions d’inquiétude dans la population et chez les élus, comme à Nice, où le maire, Christian Estrosi, s’est ému d’une « situation inacceptable » le 11 juillet. Non sans une certaine confusion : Pierre-Marie Tardieux, le chef des urgences adultes du CHU niçois – le plus grand de France avec 300 entrées par jour, tient encore à le répéter : « Les urgences restent ouvertes », sans régulation. Seulement, le 11 juillet, face à une trop forte affluence, il a enclenché le système de « délestage » décidé cet été avec l’agence régionale de santé et l’ensemble des autres hôpitaux du département, en cas de coup de chaud. « Nous avions plus de cent patients dans les murs, explique le docteur Tardieux.Durant quatre heures, nous avons demandé au SAMU d’orienter les patients vers d’autres services, et nous avons réorienté les personnes qui se présentaient aux portes des urgences, quand cela était possible. » Ce qui n’empêche pas l’urgentiste de penser que l’ensemble des services vont se diriger à l’avenir vers ce filtrage plus important par le 15.
A Montauban et à Moissac, où il manque la moitié des quarante médecins nécessaires pour fonctionner de manière normale, on expérimente, depuis le 1er juillet, le format le plus extrême, puisqu’il faut désormais passer par le 15 de jour comme de nuit pour accéder aux urgences. Ce « ticket à l’entrée », délivré par un appel téléphonique et via un interphone à l’entrée – un vert pour ceux qui ont déjà été régulés par le SAMU et peuvent entrer, un rouge pour les autres menant au 15 –, a eu l’effet escompté, selon l’urgentiste Dominique Coppin. « Le nombre d’entrées sur vingt-quatre heures a diminué d’environ 25 %, décrit le chef du service à l’hôpital de Montauban. Dans le même temps, les appels au SAMU ont augmenté de 50 %. » Le nouveau système semble ainsi avoir incité à passer par le 15 bien au-delà des simples personnes qui se présentaient jusqu’ici aux urgences, ce que confirment les nombreux appels qui portent sur un besoin de médecine générale. Si le SAMU doit encore être renforcé, de nouveaux postes d’assistant de régulation médicale et un soutien des médecins généralistes ont permis d’absorber le choc.
Mais un effet que l’urgentiste n’arrive pas à expliquer reste, lui, plus compliqué à gérer : « Paradoxalement, nous avons une activité nocturne plus forte qu’avant, c’est pourtant là où l’effectif médical est le plus réduit, donc nous avons des nuits excessivement difficiles… » Le chef de service le reconnaît sans difficulté : ce fonctionnement ne « résoudra pas tout », en premier lieu le besoin de retrouver ses effectifs de médecins, « mais c’est un changement de paradigme dans l’accès aux urgences qui est une bonne chose ».
Un été quand même compliqué
A Bordeaux, le bilan dressé à la fin juin, après plus d’un mois, a aussi été « positif », selon le chef de service à l’hôpital Pellegrin, Philippe Revel, qui constatait une réduction des flux d’entrée de 25 % à 30 %. Le ministre François Braun a confirmé, le 27 juillet, qu’une première enquête sur le site bordelais était « encourageante », permettant de voir qu’il n’y avait pas eu de « perte de chance »pour les patients ; il relève également « des prises en charge qui vont plus vite pour les problèmes qui ne nécessitent pas les urgences ». Le fonctionnement vient d’être étendu fin juillet au site Saint-André, à compter de 20 heures.
« Mais nous sommes maintenant au cœur de l’été et la situation se complique… », rapporte le docteur Revel, selon qui ces bénéfices d’une régulation renforcée risquent d’« être battus en brèche par l’incapacité des services d’urgence à rester ouverts ». Avec le manque d’effectifs, les fermetures se sont en effet multipliées dans les huit structures d’urgence publiques et privées de Gironde la nuit, le week-end, et même la journée sur quelques heures. Ce barrage pourrait ne plus suffire.
Si les appels au SAMU ont légèrement progressé, le problème est ailleurs : c’est leur « durée » et leur « complexité » qui devient un casse-tête, selon Philippe Revel : « On craint le moment où l’on ne sera plus en mesure de trouver une place à un patient qui en a besoin, et qu’il faudra laisser dans l’ambulance… »
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La grande pénurie de soignants est une réalité dans toute l’Europe
A Grenoble aussi, on est loin d’être serein, bien que le CHU fonctionne avec ce filtrage la nuit depuis la fin juin, tout comme les autres établissements du département. « Cela ne suffit pas car nous sommes le seul établissement de santé du Sud-Isère à recevoir des patients adressés par le centre 15 la nuit, explique Marc Blancher, chef des urgences adultes au CHU. Avec les vacances des médecins de ville, les fermetures supplémentaires de lits de médecine, de chirurgie et surtout de psychiatrie… nous restons totalement débordés aux urgences et nous sommes très inquiets pour la fin de l’été. »
Camille Stromboni
Publié le 02/08/2022
Premier bilan de la régulation systématique à l’entrée des urgences

Paris, le mardi 2 août 2022
https://hubtr.newsletter.jim.fr/clic132/7148/1244477/14?k=8bab0b2f8ddfefe33f1995b118148433
– Un peu plus de 40 centres hospitaliers auraient déjà mis en place une régulation systématique à l’entrée des urgences (de jour ou de nuit ou les deux) selon des déclarations du Dr François Braun à France Info le 27 juillet.
C’est le CHU Pellegrin, à Bordeaux qui a tiré le premier, fin mai, en mettant en place un tel dispositif la nuit alors qu’il était confronté à une pénurie de personnel. Ici, en plus de la régulation médicale du 15, des bénévoles de la protection civile orientent les patients devant les portes closes des urgences.
Comme le souligne Le Monde, ce filtrage correspond en effet à plusieurs situations différentes, il y a « certains services obligés de fermer véritablement la nuit, avec seulement une présence médicale en cas d’urgence vitale, essentiellement dans les territoires ruraux ou les petites villes. Elle est aussi déployée dans de grands services d’urgence qui, derrière leurs portes fermées, restent ouverts aux patients, mais seulement ceux envoyés par la régulation. A l’entrée, ce sont souvent des interphones qui mènent au 15, avec, d’un territoire à l’autre, des horaires qui diffèrent pour un système expérimenté en grande majorité sur la soirée et la nuit ».
Allongement des temps d’attente en ligne
Sans surprise cette régulation entraîne une augmentation des appels au 15.
Selon des données dévoilées par RTL ce matin, les appels au SAMU auraient augmenté de 10 à 20 % et jusqu’à 50 % à Tarbes, Montauban ou Moissac, ce qui entrainerait une augmentation du temps d’attente au téléphone.
« Parfois, il faut le reconnaître et c’est ce qu’on craignait, les temps d’attente sur les lignes du SAMU ne sont plus bons du tout » reconnaît Louis Soulat, vice-président du syndicat SAMU-Urgences de France pourtant favorable à la mesure (le syndicat SAMU-Urgences de France était dirigé par François Braun il y a peu…).
En outre, la « complexité » des appels se serait également accrue : « On craint le moment où l’on ne sera plus en mesure de trouver une place à un patient qui en a besoin, et qu’il faudra laisser dans l’ambulance… » rapporte ainsi le Pr Philippe Revel, urgentiste à Bordeaux.
Parallèlement, selon le collectif inter-hôpitaux le nombre de patients aux urgences n’aurait diminué que de 6 %.
A Bordeaux, le bilan dressé à la fin juin, après plus d’un mois, a été positif avec une réduction des flux de 25 % à 30 % aux urgences. Globalement l’attente se serait accrue en ligne mais aurait diminué en « présentiel ». Le ministre François Braun a expliqué qu’une première enquête menée à Pellegrin était « encourageante » et qu’elle n’avait pas mis en évidence de « perte de chance » (c’est heureux !).
F.H.
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Crise de l’hôpital : l’état de nombreux patients ne nécessite pas le recours aux urgences, 20% pour la cour des comptes
Alors que les services sont confrontés à des tensions inédites depuis plusieurs mois et qu’un système de filtrage à l’entrée est en train de se mettre en place, estimer le pourcentage de passages « évitables » est important mais difficile. Selon la Cour des comptes, environ 20 % des personnes ne devraient pas fréquenter ces structures.
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Combien sont-ils ? 20 % ? 30 % ? Les pourcentages reviennent régulièrement dans la bouche des médecins comme dans celle de décideurs publics pour évoquer la part de patients qui se rendraient aux urgences sans en avoir réellement besoin. Soit cette « bobologie » dont parlent parfois les urgentistes, en englobant toutes ces personnes qui pourraient être prises en charge ailleurs vu leur état.
Combien sont-ils, donc ? La question résonne plus fortement ces dernières semaines, alors que de nombreux hôpitaux sont confrontés à des tensions inédites. Au moins 120 services d’urgence font face à de grandes difficultés depuis la fin du mois de mai, selon le syndicat SAMU-Urgences de France, certains devant fermer la nuit ou le week-end, faute d’effectifs suffisants. Parmi les réponses du gouvernement pour tenter de faire baisser la pression figure la régulation à l’entrée, par le SAMU principalement, afin de filtrer les « vraies » urgences et de réorienter les autres.
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Pour connaître le profil des patients qui se présentent aujourd’hui à cette « porte d’entrée » de l’hôpital, il n’existe pas d’indicateur unique ou qui ferait l’unanimité pour savoir combien peuvent être écartés sans risque. Les rapports s’accumulent sur le sujet depuis des décennies, alors que la fréquentation des urgences n’a cessé d’exploser. D’environ 10 millions en 1996, le nombre de passages annuels y a atteint 21 millions en 2019, selon les dernières données statistiques, dans les 629 établissements de santé disposant de services d’urgence.
La part de patients dans les états les plus sévères n’évolue que peu, voire pas, au fil des années, selon le rapport du docteur Jean-Yves Grall, en 2015, sur la territorialisation des activités d’urgences. Les « cas graves » représentent ainsi environ 10 % des admissions, dont la moitié sont des urgences vitales. « Ce n’est pas tant la prise en charge des “vraies urgences” qui pose problème et provoque l’affluence que les demandes de soins non programmés, dont la nature est variée, reposant sur des situations diverses (maladies chroniques, personnes âgées, détresse psychique ou sociale, ressentis divers…) », écrit-il.
Un manque d’alternative
Mesurer et analyser « les passages évitables » paraît un « enjeu majeur » à la Cour des comptes, qui évoque le sujet dans son rapport annuel de 2019, où elle s’inquiète de voir les services d’urgence « toujours trop sollicités ». Autant pour des raisons médicales que financières, juge l’institution, qui chiffre le coût des passages annuels à 3,1 milliards d’euros.
L’instance tente d’évaluer la part de ces recours inappropriés. « En se fondant sur la classification clinique des malades aux urgences (CCMU), renseignée en France par l’urgentiste après la prise en charge du patient, il est permis d’estimer, de manière sommaire, que les 10 % à 20 % de patients n’ayant besoin d’aucun acte complémentaire d’imagerie ou de biologie médicale (CCMU 1), auraient pu donner lieu à une prise en charge en ville en médecine générale », peut-on lire dans son rapport.
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En tenant compte des exceptions et en ajoutant quelques pourcents de la catégorie la plus importante (de 60 % à 70 %), les « CCMU 2 », dont l’état est stable mais qui ont besoin d’examens complémentaires et qui pourraient en partie être pris en charge ailleurs, on aboutit à ce résultat : « Environ 20 % des patients actuels des urgences ne devraient pas fréquenter ces structures. »
« Si ces personnes viennent, ce n’est pas pour rien, c’est parce qu’elles ne trouvent pas de réponse ailleurs » – Sandrine Charpentier, cheffe de service à Toulouse
Mais c’est là que le bât blesse : « La réorientation des personnes qui n’ont pas besoin des urgences dépend de ce qu’on peut leur proposer comme alternative, souligne Louis Soulat, vice-président du syndicat SAMU-Urgences de France, évoquant la problématique essentielle des déserts médicaux et de l’accès aux soins non programmés sur de nombreux territoires. Le chef de service au CHU de Rennes évalue à 30 % les personnes venant aux urgences qui n’auraient rien à y faire, mais il peine à croire qu’on puisse diminuer d’autant les passages. « Nous expérimentons déjà depuis deux ans à Rennes un système avec une infirmière à l’entrée qui permet de renvoyer 10 % des personnes vers la médecine de ville », explique-t-il.
Aux urgences adultes toulousaines, de 30 % à 40 % des patients examinés sont classés dans la catégorie de ceux n’ayant besoin souvent que d’une simple consultation, explique la cheffe de service, Sandrine Charpentier. « Mais si ces personnes viennent, ce n’est pas pour rien, c’est parce qu’elles ne trouvent pas de réponse ailleurs, confirme-t-elle. Très peu viennent juste pour “consommer du soin”. » Cette question du consumérisme médical reste minoritaire, à entendre les urgentistes.
Un mauvais réflexe ?
Ce qui n’empêche pas le manque d’éducation à la santé et de connaissance du système. Selon une enquête menée en 2021 au CHU de Nantes pour connaître les démarches réalisées avant de venir aux urgences, près de la moitié des patients du circuit dit « debout » (soit les moins graves) n’avaient effectué aucune démarche en amont. Ni un appel aux numéros d’urgence, comme le 15, ni recours au médecin traitant, ni à la maison médicale de garde ou à d’autres dispositifs, comme SOS Médecins. « On remarque une très faible connaissance des alternatives », souligne l’urgentiste Nicolas Godiveaux, auteur de l’étude
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Une dernière dimension s’est par ailleurs aggravée ces dernières années : « Les urgences sont à l’intersection de la ville et de l’hôpital et récoltent tous les problèmes médicaux et sociaux ingérables, ceux qui ne peuvent pas être traités, ou dont personne ne veut s’occuper », souligne l’urgentiste Mathias Wargon, dans un livre intitulé Hôpital : un chef-d’œuvre en péril (Fayard, 180 pages, 17 euros). Le chef de service à l’hôpital Delafontaine, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), y met en avant ces publics que les urgences accueillent, même si elles sont loin d’être la réponse médicale la plus adaptée, qu’il s’agisse des personnes âgées ou des personnes souffrant de troubles psychiatriques, sans oublier la problématique sociale.
« Venir aux urgences, même s’il y a de l’attente, c’est accéder sans rendez-vous à la médecine, toute la médecine, c’est-à-dire à la consultation, mais aussi aux examens, à la radiologie, aux scanners, aux analyses, etc. sans avance de frais, et sans avoir à passer par des cabinets privés », écrit-il.
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Camille Stromboni
*Urgences : au CHU de Bordeaux, une restriction de l’accès à l’entrée au résultat jugé « positif »
A l’hôpital Pellegrin, le bilan après un mois de recours systématique au 15 la nuit pour accéder aux urgences, a permis une réduction du flux d’entrées. Une piste qui pourrait être appliquée au niveau national.
Temps de Lecture 2 min.

Il est fort probable que la solution figure dans la boîte à outils qui va être préconisée par la « mission flash » pour soulager les services d’urgence sous tension durant l’été. La fermeture des portes de ces services, voués à être ouverts à tous 24 heures sur 24, avec un accès désormais régulé systématiquement par le SAMU, s’est d’ores et déjà imposée dans certains hôpitaux qui souffrent du manque de médecins. Le CHU de Bordeaux a ainsi provoqué un coup de tonnerre en instaurant ce fonctionnement la nuit à l’hôpital Pellegrin dès le 18 mai. Une première. Le CHU de Grenoble s’y est résolu à compter du lundi 27 juin.
Avec 35 % de postes vacants dans l’équipe de médecins bordelais, il fallait « tenter quelque chose avant l’été », explique le chef de service, Philippe Revel : « On n’avait pas le choix, si on ne faisait rien, les départs de médecins allaient continuer. » Après plus d’un mois dans cette configuration, l’urgentiste en tire globalement un « bilan positif ». « Nous avons pu réduire l’activité de 25 % à 30 %, explique Philippe Revel. Nous avons moins de patients qui attendent, moins de malades dans les couloirs et de meilleures conditions de travail pour les soignants. » Pour le chef de service, cette nouvelle règle a permis « de ne sélectionner aux urgences que les patients qui en ont vraiment besoin ».
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Cette régulation à l’entrée systématique par un appel au 15 est défendue notamment par le syndicat SAMU-Urgences de France, auquel appartient le professeur François Braun, qui a été missionné pour rendre un rapport sur les « urgences et les soins non programmés » par le président de la République, attendu dans les jours qui viennent. Elle est loin cependant de faire l’unanimité dans la communauté soignante, certains dénonçant la restriction de l’accès aux soins qui en découle.
« On ne reviendra plus en arrière »
Quid des autres patients à Bordeaux, qui ne souffraient peut-être pas d’une détresse vitale mais étaient à la recherche de soins et n’ont pu accéder aux urgences ? La crise a eu comme conséquence positive l’installation d’un cabinet de médecine libérale juste à côté des urgences, avec une permanence de 14 heures à minuit. Philippe Revel écarte pour sa part la crainte de « rater » des urgences vitales : « Il y a toujours un risque, mais il est très faible, nos médecins régulateurs ont l’habitude d’interroger les patients, et nous n’avons eu aucun problème majeur à signaler. »
Si toutes les demandes de soins non programmés doivent trouver une réponse, il n’est plus possible, selon lui, de continuer à les faire toutes atterrir « par principe » aux urgences ; « on n’en a plus les moyens », dit-il. La prochaine étape dans son service sera sans doute d’étendre ce fonctionnement en journée. « En tout cas, on ne reviendra pas en arrière », assure-t-il.
Changer d’échelle, en déployant plus largement cet accès régulé, peut-être même au niveau national, ne manquerait pas de soulever plusieurs difficultés. Au premier rang celle du renforcement des personnels de SAMU, pour répondre à la masse d’appels qui en découlerait. A Bordeaux, l’augmentation n’a représenté qu’un petit volume d’appels supplémentaires à prendre en charge, alors qu’un seul site hospitalier est concerné et seulement la nuit. Ce qui a pu être absorbé grâce à l’aide d’une « cellule miroir »composée d’étudiants en santé. La réaction de la population et son adhésion à ces nouveaux réflexes font aussi partie des inconnues.
Un tiers de centres hospitaliers touchés par des fermetures des urgences « par à-coup »
Des services d’urgence fermés « par à-coup » dans un tiers des 111 hôpitaux répondants, des fermetures partielles la nuit de « lignes de garde » – soit une réduction du nombre de médecins en service – dans près d’un quart d’entre eux, un peu plus de la moitié des responsables qui estiment que la « situation actuelle des services d’urgence va se dégrader dans les prochaines semaines »…
Les résultats de plusieurs enquêtes menées par la Conférence nationale des présidents de commissions médicales d’établissements de centres hospitaliers, entre le 27 mai et le 14 juin, et rendus publics vendredi 24 juin, viennent confirmer l’ampleur de la crise qui bouleverse les urgences mais aussi la « dégradation majeure de tous les secteurs de l’hôpital public ». Ce dernier « menace de s’effondrer dans les prochains mois si des mesures d’urgence et structurelles ne sont pas prises à très courte échéance », alertent les représentants médicaux de ces centres hospitaliers.
« Nous ne sommes pas face à une crise des urgences mais bien de l’ensemble de l’hôpital et au-delà, de tout le système de santé », précisent-ils. Les fermetures de lits se multiplient en soins critiques (32 % des répondants en signalent), en périnatalité (20,7 %), en chirurgie (44 %) ou encore en médecine (74,1 %). Ils appellent, dans ce« contexte politique incertain », à « une union nationale pour donner au système de santé les moyens de répondre aux besoins de santé des Français ».
Camille Stromboni
**Une nuit aux urgences de La Roche-sur-Yon, qui filtre désormais les entrées en imposant aux patients un appel préalable au 15
Par Camille Stromboni (La Roche-sur-Yon, envoyée spéciale)Publié aujourd’hui à 15h00, mis à jour à 15h38

Temps de Lecture 7 min.
REPORTAGE
En Vendée, pour espérer une prise en charge, les patients doivent désormais passer par le 15 de 23 heures à 8 h 30. Objectif, préserver les urgences, en souffrance face au manque de soignants et à l’afflux de malades, particulièrement pendant l’été.
« Les journées se suivent mais ne se ressemblent vraiment pas » aux urgences, glisse Jordan Gendre, praticien hospitalier de 38 ans, le regard encore alerte malgré l’heure avancée. Les nuits encore moins, dans ces services hospitaliers qui accueillent des patients 24 h/24. C’est bien ce qui fait le sel du métier, pour les urgentistes de La Roche-sur-Yon installés autour d’une tarte aux fraises ce samedi 30 juillet, au sous-sol du Centre hospitalier départemental (CHD), à quelques pas de la salle du SAMU. Il est 2 h 30 du matin. Enfin, ils ont quelques minutes pour souffler et avaler un semblant de repas après un violent rush durant lequel tout s’est accéléré.
« Faut que les touristes aillent se coucher maintenant », lâche en riant un infirmier. Réflexion faite, ce ne sont que de « locaux »dont ce dernier s’est occupé ces dernières heures avec la structure mobile d’urgence et de réanimation (SMUR). Accident de moto, tentative de suicide médicamenteuse, hémorragie interne après un malaise… Tout semble s’être concentré autour de minuit, alors que la salle de régulation du SAMU, qui reçoit les appels au 15 et au 116 117 (médecine générale), était déjà en effervescence pour répondre aux nombreux appels estivaux de ce département touristique.
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L’année est particulière : les soignants vendéens assistent à une explosion par rapport à l’été précédent, avec 30 % d’appels en plus en juillet. Et des journées d’affluence aux urgences, comme ce lundi record du 18 juillet. Il est resté gravé dans la tête de nombreux soignants : « 233 entrées », dont « 76 dossiers juste la nuit ! », répète une aide-soignante.

Il y a une semaine, la décision a été prise : pour préserver les urgences, en souffrance face au manque d’urgentistes (40 postes sont vacants sur 100 dans le département), un filtrage à l’entrée des services est mis en place de 23 heures à 8 h 30. Depuis le 22 juillet, la population doit passer par les numéros d’appels d’urgence avant de pouvoir être admis. Ceux qui se présentent rencontrent portes closes, et doivent actionner le téléphone installé à l’entrée pour obtenir un feu vert du 15, ou être réorientés. Et ce, dans l’ensemble des services vendéens à La-Roche-Sur-Yon comme aux Sables-d’Olonne, ou encore à Challans, Fontenay-le-Comte et Luçon, où cela commence plus tôt en général, en fin d’après-midi, comme à Montaigu, dont le service est fermé la nuit.
« On n’est pas à l’abri de se tromper »
« C’était la pire régulation de ma vie », lâche l’urgentiste Camille Brunellière, qui revient d’une intervention auprès d’un homme victime d’un accident de moto, emmené depuis au bloc opératoire. Mais ce n’est pas pour cette raison que sa soirée a été rude, ni parce que la salle des urgences vitales, la « SAUV », s’est remplie en trente minutes à peine avec trois patients en même temps dont le sien, comme cela arrive rarement. Pour la médecin de 31 ans, « l’horreur », c’était avant : ces longues heures à devoir gérer un flux d’appels qui ne s’arrêtait plus. « On me demandait des choses dans tous les sens, c’était des interruptions de tâche permanentes », dit-elle. Aucun autre médecin ne pouvait l’aider, puisque ses deux collègues urgentistes étaient en intervention SMUR. Et il ne restait donc aucune équipe de SMUR à envoyer en cas de besoin. Il a fallu jongler.
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« Il y a des chats noirs dans les équipes », lâche-t-elle avec le sourire, tout en ne pouvant s’empêcher de repenser à certains cas de sa soirée, comme cet homme désormais en réanimation, « le translucide », qui a subi une hémorragie dont l’origine n’a pas encore été identifiée. « Quand on doit aller très vite, on n’est pas à l’abri de se tromper, ou de ne pas pouvoir poser assez de questions, pointe la jeune femme. Quand j’ai eu sa famille au téléphone, ils étaient rassurants, ils disaient qu’il avait fait un malaise, qu’il était juste un peu pâle, je n’ai pas envoyé de médecin, juste les pompiers… et quand ils ont fait le bilan, c’était la cata. » A-t-elle raté quelque chose ? Refaire l’histoire, « c’est toujours facile après, avec le recul », écarte Jordan Gendre, qui s’est occupé du patient.
Les urgentistes soutiennent ce nouveau filtrage la nuit, même si ce dispositif ajoute de nouveaux appelants sur les lignes du SAMU – elles ont été renforcées avec des assistants de régulation médicale, sans que cela ne soit suffisant. « Même si c’est horrible à dire et que je n’aime pas infantiliser les gens, il y a beaucoup de personnes à éduquer pour qu’elles ne viennent pas la nuit », souligne Camille Brunellière. Heureusement, ces dernières heures, la petite traumatologie ne s’est pas ajoutée au reste dans les couloirs des urgences de La Roche-sur-Yon.
A l’étage au-dessus, l’infirmier d’accueil et d’orientation, Alexandre Genaudeau évalue le niveau de gravité des personnes qui arrivent aux urgences. Il a pu ainsi aller donner des coups de main pour installer les patients en salle d’urgence vitale. « Ça commence juste à se poser », dit le jeune homme de 26 ans à 3 heures du matin. Il appréhendait un peu sa première nuit avec le filtrage, et redoutait les réactions des malades à l’entrée, mais cela se passe plutôt bien.
Plusieurs heures d’attente
Depuis 23 heures, une petite dizaine de personnes ont été bloquées devant les portes du service, obligées de décrocher le téléphone avant d’espérer une prise en charge. « C’est abuser », juge une femme de 29 ans installée à l’heure charnière sur l’escalier extérieur, avec son téléphone sur l’oreille branché sur le 116 117, après avoir été recalée. Sur ce numéro tenu par la médecine générale, consacré à ce qui ne relève pas de l’urgence, les temps d’attente dépassent régulièrement plusieurs heures. La jeune femme voulait un test au Covid-19 gratuit, disant avoir du « mal à respirer », mais avoir « perdu son papier de vaccination ». « Tout ce qui ne justifie pas les urgences, on réoriente », explique l’infirmier d’accueil, qui a vu la jeune femme juste avant la fermeture officielle des portes.
Un peu plus tard dans la nuit, vers 1 heure, une maman patiente nerveusement devant la porte avec le combiné du téléphone accroché au mur à la main, accompagné de son fils qui s’est coupé le pied avec du verre. « Je voulais juste savoir s’il fallait des points de suture », dit-elle. La famille est en ordre de bataille pour partir en vacances, bagages prêts dans la voiture, afin d’éviter la journée noire de ce week-end de chassé-croisé qui s’annonce. « On comprend bien qu’on n’est pas une urgence vitale mais ce serait bien juste si quelqu’un répondait, reprend-elle, après un quart d’heure de mise en attente. Il y en a des accros aux urgences, pas moi, je ne viens jamais, juste en dernier recours… tant pis, on s’en va ! »
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nécessite pas le recours aux urgences

« C’est pour une admission aux urgences », enchaîne poliment Alexis dans le téléphone, arrivé quelques minutes plus tard. Le jeune homme de 20 ans a reçu un choc sur le poignet et est venu à la fin de son service de cuisinier, comme la douleur persistait. « Il n’est pas près de passer, lui », lâche gentiment l’agent de sécurité, qui dit faire beaucoup « d’explication » depuis la mise en place du filtrage. Verdict une petite heure plus tard : « Le médecin m’a dit qu’il y avait beaucoup d’accidents de la route, donc qu’il fallait revenir demain matin, parce que là c’était six heures d’attente pour mon cas », indique-t-il un peu déçu, sans oser néanmoins la moindre critique. Le décalage est en effet saisissant avec les ambulances et les camions de pompiers qui continuent d’arriver à la chaîne, derrière lui. Et de décharger ici une jeune femme en crise d’angoisse qui n’arrive plus à respirer, là une dame âgée, entourée de pompiers harnachés des pieds à la tête, pour un Covid-19.
« A un moment, ça casse »
Installé seul dans une petite salle d’attente, Louis a pu entrer après régulation devant la porte, avec son arcade sourcilière en sang sous un bandage. Le jeune homme de 26 ans, qui a pris « un coup de boule », a quand même été déstabilisé par ce barrage d’un quart d’heure au téléphone : « je suis hémophile », pointe-t-il, tout en soulignant qu’une fois dans les urgences, « c’était très réactif ».
Pour François Brau, co-chef des urgences-SAMU-SMUR du CHD Vendée, s’il est trop tôt pour faire un bilan chiffré sur ce nouveau fonctionnement, il est certain que cela a permis de faire redescendre la pression. « Je récupère des sourires la nuit dans les équipes, alors que c’était le “nervous breakdown” la semaine dernière », dit le médecin de 48 ans. « On est arrivé au bout d’un système qui court à sa perte, ça fait quinze ans qu’on se prend 3 ou 4 % de passages en plus par an, on a beau avoir augmenté les lignes de garde [médecins et soignants], triplé la taille du service en 2015… ça ne suffit jamais, et à un moment, ça casse », ajoute-t-il.
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L’urgentiste a évolué face à ses convictions : « Il faut changer les mentalités et on ne peut pas compter sur la bonne volonté, c’est vain et c’est normal, estime-t-il. Il y a l’urgence d’une part, et l’inconfort d’une entorse, du lumbago qui fait mal, de la cystite… qui peuvent attendre le lendemain et qui relèvent de la médecine générale. On ne demande pas aux gens de s’auto-diagnostiquer, juste un peu de bon sens et s’ils sont en difficulté, ils appellent le 15. » Ces quelques patients en moins, c’est de la « charge en soins » et de la « pression dans le couloir » retirées aux urgentistes à un horaire où il faut à tout prix préserver un état de « concentration » et une « disponibilité » pour les vraies urgences.

Est-ce la communication autour du nouveau dispositif ou bien la chance ? La journée du vendredi 29 juillet à La Roche-sur-Yon – sans aucun filtrage pour le coup – a été incroyablement calme. Dès le matin, le responsable comptait seulement 23 patients aux urgences, contre près du double habituellement. « Ça fait un bien fou », souffle une soignante. Personne n’a pour autant chômé, entre une femme qui vomissait et avait des troubles de la conscience, un vieil homme avec une faiblesse brutale intervenue dans le bras, ou encore cette femme de 85 ans qui a fait un accident cérébral la veille. « On dit que les hôpitaux sont débordés, on hésite toujours à venir, on ne veut pas surcharger », dit-elle, installée sur un brancard. « Mais vous avez largement votre place aux urgences », lui répond l’infirmier d’accueil et d’orientation, Lucas Merlet, en insistant du regard. « Il y en a qui viennent alors qu’ils n’ont pas forcément besoin, et d’autres qui devraient, mais qui ne veulent pas déranger… », siffle sa collègue de 24 ans, Clémence Verdon.
Écouter aussi Crise aux urgences : l’été de tous les dangers Camille StromboniLa Roche-sur-Yon, envoyée spéciale
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Commentaires Dr Jean SCHEFFER:
Dans une étude publiée dans le British Médical Journal, seule 6 % des entrées aux urgences étaient injustifiées. Les vrais problèmes sont l’insuffisance en amont de prise en charge des soins non programmés la nuit et le jour par la médecine libérale, et en aval le manque de lits par trop de fermetures depuis 20 ans. Reste aussi le manque de prise charge en amont de tous les problèmes sociaux.
Quant au nombre d’hôpitaux appliquant les consignes du Dr Braun sur le filtrage à l’entrée par l’intermédiaire du centre 15 il reste encore très faible (40 centres hospitaliers sur 700 hôpitaux) . Et on attend avec inquiétude les premiers décès par refus de prise en charge ou par trop longue attente avec le 15.
Quand aux dires du ministre « Ce n’est pas un filtrage », voilà un beau mensonge, qui est confirmé par les témoignages de Bordeaux et de La Roche-sur-Yon.
Seulement 6% des passages aux urgences seraient inappropriés
- Par Johanna Hébert
Contrairement aux idées reçues, il y aurait peu de personnes se déplaçant aux urgences pour de mauvaises raisons. Elles seraient 6%, selon une nouvelle étude française.
- Publié 02.11.2019 à 10h30
L’engorgement des urgences et le manque de moyens pour accueillir les patients font partie des motifs pour lesquels un certain nombre de services sont en grève depuis plusieurs mois. Pour beaucoup, les urgences sont saturées en partie à cause de personnes qui se déplacent pour de mauvaises raisons: un simple rhume ou une consultation qu’un médecin généraliste pourrait simplement réaliser. Or, une étude française publiée dans la revue British Medical Journal Quality & Safety contredit cette idée.
Une mauvaise couverture santé en cause
En effet, seulement 6% des passages aux urgences seraient inappropriées, d’après ces travaux menés par des médecins urgentistes auprès de 30 000 patients. Pourtant, les études précédentes estimaient ce chiffre à 30%. Cette différence s’explique par le fait que les chercheurs de la présente étude ont affiné leurs critères. Par exemple, les auteurs de l’étude ont cherché à savoir si les actes pratiqués sur les patients aux urgences auraient pu être réalisés par un médecin généraliste. De plus, ils ont analysé les profils de ces patients dont le passage aux urgences est inapproprié. Il s’avère que ces personnes ont souvent une très mauvaise couverture santé. Elles expliquent également avoir des difficultés à prendre rendez-vous avec un médecin généraliste.
Aller aux urgences, faute de rendez-vous chez le généraliste
Cette étude fait écho à une enquête publiée par la Défenseur des droits en cette fin du mois d’octobre. Ce rapport dévoile que certains cabinets médicaux (dentistes, gynécologues et psychiatres) discriminent les patients les plus démunis, c’est-à-dire ceux qui bénéficient de la CMU-C ou de l’ACS. Ces personnes se voient refuser des rendez-vous et par conséquent refusent de se soigner ou décident d’aller aux urgences, faute de mieux. De plus, le problème de l’engorgement des urgences viendrait de la qualité du service en lui-même: “il est beaucoup plus dans une question de l’aval. (…) Il est plutôt sur une inadéquation entre la demande et notre difficulté à avoir des lits d’hospitalisation pour des patients”, conclut Diane Naouri, ancienne cheffe de clinique aux urgences de l’hôpital Saint-Antoine, à Paris, et autrice principale de l’étude.
