La région Centre-Val-de-Loire, territoire à la plus faible densité de médecins généralistes de l’Hexagone, mise sur le salariat pour attirer les praticiens

69 médecins pour 27 000 patients suivis : la région Centre-Val-de-Loire dresse un premier bilan de ses centres de santé

Depuis 2019, la région Centre-Val-de-Loire, territoire à la plus faible densité de médecins généralistes de l’Hexagone, mise sur le salariat pour attirer les praticiens. Si l’objectif affiché de 150 médecins salariés en 2025 n’a pas été tenu, la région est néanmoins parvenue à embaucher 69 médecins en 6 ans.

08/09/2025 https://www.egora.fr/actus-pro/acces-aux-soins/69-medecins-pour-27-000-patients-suivis-la-region-centre-val-de-loire?utm_source=Newsletter&utm_medium=gms_egora&utm_campaign=En_Bref___Lundi_8_septembre_2025&utm_medium=gms_egora&utm_source=email&utm_campaign=En%20bref%202025-09-08%2020h20250908&sc_src=email_4633928&sc_lid=178568814&sc_uid=XYBlorZBtz&sc_llid=7423&sc_eh=5d463c22601bc0401

Par Sandy Bonin

Dans la région Centre-Val-de-Loire, 20 centres accueillent les 69 médecins salariés par la région. Dans celui de Patay, petit village de la Beauce de 2 190 habitants situé à 30 kilomètres d’Orléans, trois médecins se relaient pour assurer les consultations, telle Mathilde Pottier, 30 ans, qui a trouvé dans le salariat la possibilité de ne faire « que du médical ». « Dans le libéral, les contraintes horaires et du temps consacré à l’administratif étaient une charge », dit-elle. Avec des secrétaires médicales présentes au centre de santé, « j’ai vraiment pu me dégager ce temps-là », avec le sentiment de répondre à un « vrai besoin ».

Dans un autre centre à Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire), Belkacem Otsmane s’est lui aussi tourné vers le salariat après avoir été « lessivé par la paperasse ». « L’activité libérale est bien, mais elle m’épuisait. Quand on arrive ici, tout est mis à disposition du médecin pour qu’il puisse exercer : le centre, le secrétariat, le matériel médical », résume-t-il.

Lire aussi : En Occitanie, les 100 médecins généralistes salariés par la région suivent 31 000 patients

Historiquement, « beaucoup de médecins libéraux étaient installés » dans cette ville de la métropole de Tours, mais « beaucoup ont pris leur retraite, donc on a rapidement eu des plannings très chargés » pour répondre aux manques. En réinstallant des médecins dans des territoires « sous-dotés », le Dr Ostmane l’assure : « on évite plein d’hospitalisations en permettant aux gens d’être suivis ».

Selon la Région, le Centre-Val de Loire est la dernière en termes de densité médicale de médecins généralistes (101,8 pour 100.000 habitants contre 125,2 en moyenne à l’échelle nationale). Cinq départements sur six y sont en deçà de la moyenne de la France hexagonale et 25% des habitants ne disposent pas de médecin traitant. « Nous avons multiplié les initiatives ces dernières années pour tenter de combler ces manques », assure le président de la Région François Bonneau (PS).

Le Centre-Val de Loire a ainsi été la première région à salarier des professionnels de santé en 2019, sans parvenir toutefois à remplir la promesse de 150 médecins en 2025, pas plus que ne devrait l’être celle des 300 embauches en 2028. Un rapport de la chambre régionale des comptes en 2023 affirmait par ailleurs que ce modèle n’avait pas encore « démontré sa plus-value ».*

*https://www.ccomptes.fr/system/files/2023-02/GIP-PRO-SANTE-EQ-SANTE-ROD2-ET-REPONSE-2023.pdf

1 million d’euros en 2026

« Les objectifs étaient ambitieux, mais tout ceci monte en puissance », veut croire François Bonneau, indiquant que la participation auprès du Groupement d’intérêt public (GIP) régional, qui salarie les médecins, serait inférieure à un million d’euros en 2026.

Un salaire brut de 5.500 euros est proposé pour un médecin en début de carrière. Tous « les domaines en matière de santé sont aujourd’hui marqués par la difficulté de recrutement, et ce qui compte pour nous, c’est de mettre en avant des conditions de pratique », ajoute-t-il. « Nous avons été précurseurs : l’Occitanie et la région Auvergne-Rhône-Alpes avancent depuis dans ce sens », « preuve » selon lui de l’intérêt du projet, mais aussi forme de nouvelle concurrence pour attirer de nouveaux profils.

75.000 consultations ont déjà été réalisées en 2025 par les médecins salariés et ce sont plus de 27.000 habitants du Centre-Val de Loire qui disposent désormais d’un médecin traitant grâce à ce dispositif, selon la Région. « Il reste beaucoup à faire, bien sûr, mais face à une telle préoccupation, c’est assez significatif », conclut François Bonneau.

[Avec AFP]

Auteur de l’article

Sandy Bonin

Cheffe de rubrique Actualités

*Extraits du rapport de la cour régionales des comptes

https://www.ccomptes.fr/system/files/2023-02/GIP-PRO-SANTE-EQ-SANTE-ROD2-ET-REPONSE-2023.pdf

Les freins au déploiement des centres régionaux de santé

Le déploiement des centres régionaux de santé a été plus lent que prévu car il s’est heurté à un certain nombre d’obstacles juridiques et organisationnels. Parmi les freins au déploiement des centres de santé, la direction du GIP a notamment mis en avant les difficultés de recrutement médical en-dehors de la région, l’exercice limité à 20 heures par semaine dans les antennes et, enfin, la volonté des professionnels d’exercer à proximité des villes importantes et moins en milieu très rural.

Les freins au déploiement des centres régionaux de santé:

Le déploiement des centres régionaux de santé a été plus lent que prévu car il s’est heurté à un certain nombre d’obstacles juridiques et organisationnels. Parmi les freins au déploiement des centres de santé, la direction du GIP a notamment mis en avant les difficultés de recrutement médical en-dehors de la région, l’exercice limité à 20 heures par semaine dans les antennes et, enfin, la volonté des professionnels d’exercer à proximité des villes importantes et moins en milieu très rural.

Une montée en puissance plus lente que prévue

Créé en juin 2020, le GIP Pro santé a pour objectif d’ouvrir 50 centres de santé, et de recruter 300 médecins généralistes (29) à l’horizon 2028, constituant ainsi une équipe régionale de médecins généralistes salariés, travaillant localement en équipe, en lien avec les professionnels de santé du territoire. Les médecins sont recrutés en contrat à durée déterminée (CDD) de trois ans, renouvelable

Sur les cinq premières années d’existence du GIP, il était prévu la création de 30 centres de santé et le recrutement de 89 ETP de médecins salariés, dans trois types de centres de santé selon leur superficie, à savoir de type Ml d’une surface de 110 m2, de type M2 d’une surface de 130 m2 et de type M3 d’une surface de 175 m2

Au 31 décembre 2021, cinq centres de santé avaient été ouverts avec douze médecins et cinq secrétaires médicales. En juin 2022, le nombre de centres de santé ouverts dans cinq départements avait été porté à sept avec seize médecins30 et huit secrétaires médicales (31)

.Le budget pour l’année 2022 a été bâti sur une prévision d’ouverture de dix centres de santé avec le personnel correspondant, soit le recrutement de 30 médecins et 10 secrétaires médicales. Cette prévision trop optimiste a été revue à la baisse avec l’ouverture de seulement quatre nouveaux centres de santé en 2022.

Pour autant, l’ordonnateur a indiqué être satisfait des résultats obtenus après seulement quelques mois d’activité. À sa décharge, il a souligné que les délais de validation du projet et la difficulté à identifier les bons interlocuteurs au démarrage des premiers centres de santé ont été des facteurs de complexité et des causes de retard dans le déploiement du dispositif.

.Les difficultés à recruter en dehors de la région

Plus de 80 % des médecins recrutés par le GIP Pro santé exerçaient précédemment dans un des six départements de la région Centre-Val de Loire. Quelques médecins étaient auparavant en poste dans le secteur hospitalier, secteur qui est aussi confronté à une pénurie de professionnels dans certains services (32). En recrutant plusieurs médecins retraités, le GIP a permis à ces médecins de prolonger leur carrière, le plus souvent à temps partiel, en bénéficiant du dispositif de cumul emploi-retraite. Parmi les médecins recrutés par le GIP, certains étaient déjà salariés ou titulaires dans le secteur public local.

Ce constat témoigne des limites de l’action du GIP visant à attirer des praticiens en dehors de la région. Certes, l’action du GIP reste tributaire de l’évolution défavorable de la démographie médicale. Pour autant, pour accroître l’attractivité du territoire vis-à-vis des praticiens, les leviers d’action du GIP restent limités. Il déploie des efforts de communication mais sans autre possibilité que d’offrir, aux praticiens concernés, le statut de salarié.

Au moment du contrôle, dans une vision plus large de la problématique, le président du GIP a aussi relevé le manque d’efficacité de certaines aides existantes, qui toucheraient un public assez limité, et il s’est déclaré favorable à un conventionnement « différencié » et une tarification plus incitative pour les médecins s’installant dans les zones en sous-densité médicale. Il a plaidé pour une augmentation sensible du nombre d’internes dans la région Centre-Val de Loire.

29 Initialement, le projet se limitait au recrutement de 150 médecins. 30 Au 1er juin 2022, 16 médecins sont en poste : sur 21 médecins recrutés cinq médecins sont partis. 31 Source : Données du GIP. 32 Notamment les services d’urgences.

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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