La criminalisation de l’activisme environnemental par le gouvernement

« Appartenir à un média axé sur l’environnement semble être devenu un indice de complicité ou de collusion »

Chronique

auteur

Stéphane Foucart

Des journalistes de « Reporterre », média dévolu à la question écologique, ont été verbalisés à plusieurs reprises et l’un d’eux est renvoyé devant le tribunal correctionnel. Il s’agit de l’une des conséquences de la criminalisation de l’activisme environnemental, estime dans sa chronique Stéphane Foucart, journaliste au « Monde ».

Publié le 04 décembre 2022 à 07h00  Temps de Lecture 3 min. 

https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/12/04/appartenir-a-un-media-axe-sur-l-environnement-semble-etre-devenu-un-indice-de-complicite-ou-de-collusion_6152886_3232.html

Grégoire Souchay est journaliste depuis dix ans, spécialiste d’environnement, d’énergie ou d’habitat. On peut lire son travail dans le journal en ligne Reporterre ou le quotidien Libération. On pourra le rencontrer, un jour non encore fixé du printemps 2023, au tribunal judiciaire de Rodez, où il comparaîtra pour avoir, le 10 novembre 2021, « frauduleusement soustrait des sacs contenant des semences de colza » et les avoir « volontairement dégradés ou détériorés ».

Le journaliste était bien présent ce jour-là dans les entrepôts du semencier RAGT, à Calmont (Aveyron). Mais il l’était pour couvrir une action du mouvement des Faucheurs volontaires – venus éventrer des sacs de semences de cultures rendues tolérantes aux herbicides –, non pour prendre part à leur action. Son article a paru deux jours plus tard.

Des consœurs et des confrères d’autres médias étaient aussi présents ce jour-là, mais seul le journaliste de Reporterre a été inquiété. Comme l’a raconté Aude Dassonville dans Le Monde, c’est la troisième fois que les journalistes du média consacré à l’environnement sont ainsi spécifiquement ciblés. En juin et en octobre 2020, de nombreux journalistes couvraient l’occupation de pistes des aéroports d’Orly et de Roissy : seuls ceux de Reporterre ont été verbalisés et-ou placés en garde à vue

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Soit ces journalistes sont victimes d’un hasard malheureux et extraordinaire, soit il se joue autre chose dans cette succession d’entraves à la liberté d’informer. Comment ne pas voir, dans cette discrimination manifeste, un dangereux amalgame ? Le seul fait d’appartenir à un média axé sur l’environnement semble être devenu, aux yeux des forces de l’ordre et du procureur, un indice de complicité ou de collusion.

Enregistrements effacés

Ce glissement ne doit pas surprendre. Il tient, d’abord, à la criminalisation rampante de l’activisme écologiste. Depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir en 2017, cette tendance n’a cessé de s’accentuer, en même temps que le spectre des actions potentiellement répréhensibles s’élargissait toujours plus. En 2019, une convention signée entre le ministère de l’intérieur et les syndicats agricoles productivistes gravait dans le marbre cette tendance, en créant la cellule de gendarmerie Demeter. Avec comme objectif non seulement de lutter contre les délits visant le monde agricole, mais aussi de prévenir « des actions de nature idéologique » pouvant n’être que de « simples actions symboliques de dénigrement ».

L’activité journalistique entre-t-elle dans cette dernière catégorie ? Il n’est en tout cas pas très étonnant que l’assignation des forces de l’ordre à de telles missions crée une sorte d’ambiance. Fin mars 2021, une journaliste allemande en reportage en Argoat, travaillant sur le modèle agricole breton, échange quelques mots désagréables avec un exploitant et enregistre. Elle voit avec stupéfaction des gendarmes débarquer le soir même à son hôtel, accompagnés de l’intéressé, lui intimer d’effacer ses enregistrements. Sous les insultes de son détracteur, elle doit s’exécuter. Cette histoire a été racontée dans Le Monde et ailleurs ; elle n’a soulevé aucun émoi particulier.

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La lente criminalisation des luttes écologistes a évidemment un impact sur la manière dont sont considérés les journalistes qui font métier d’en témoigner, perçus comme de simples supplétifs. Un peu comme l’on estimerait, à raison, pénalement répréhensible qu’un titulaire de la carte de presse soit informé d’un projet d’assassinat ou d’action terroriste, et qu’il se contente d’y assister aux côtés de ses architectes, pour rendre compte de son déroulement.

Carences de l’Etat

Ceux qui doutent qu’une telle criminalisation de l’activisme environnemental soit effectivement à l’œuvre peuvent se référer à l’extravagante démesure des moyens de police déployés dans l’enquête sur les opposants au projet d’enfouissement des déchets nucléaires de Bure (Meuse) – moyens généralement réservés à l’antiterrorisme ou à la lutte contre le grand banditisme. Ils peuvent aussi se référer aux déclarations du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui n’a pas hésité à parler d’« écoterrorisme » pour qualifier l’action des militants les plus radicaux opposés aux mégabassines.

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A bien des égards, cette escalade verbale et répressive est un rideau de fumée qui occulte commodément les carences de l’Etat lui-même. Car non seulement son action, sur une variété de dossiers environnementaux, est en contravention avec l’état de la connaissance scientifique, mais elle l’est aussi avec le droit. Nitrates, pollution de l’air, climat. Sur tous ces dossiers, l’Etat a été condamné par différentes juridictions et il est bien pratique que ceux qui le lui rappellent un peu trop bruyamment soient assimilés à des criminels

L’action des Faucheurs volontaires de novembre 2021 l’illustre bien. Derrière la destruction des semences de colza obtenues par mutagenèse pour tolérer des herbicides, se cachait ainsi une autre question. Dans une décision du 7 février 2020 interprétant un arrêt rendu en 2018 par la Cour de justice de l’Union européenne, le Conseil d’Etat faisait valoir que ces cultures devaient être soumises à la réglementation sur les OGM – ce qu’elles n’étaient, et ne sont toujours, pas. La haute juridiction a réitéré cette interprétation en novembre 2021.

Certes, l’action des Faucheurs volontaires est problématique au regard de la loi, mais, sur le même dossier, celle de l’Etat ne l’est pas moins. C’est aussi ce que rappelait Grégoire Souchay dans son article. Le 21 avril 2022, Le Monde a d’ailleurs demandé au cabinet du ministre de l’agriculture d’alors, Julien Denormandie, quelles avaient été les suites données aux décisions du Conseil d’Etat. La réponse devait être compliquée à formuler : elle ne nous est jamais parvenue.

Stéphane Foucart

*Le média « Reporterre » dénonce une nouvelle entrave à la liberté d’informer

Assimilé aux activistes anti-OGM dont il couvrait une action, un journaliste du site d’information indépendant doit comparaître, le 7 décembre, pour des faits de dégradation volontaire. 

Par Aude Dassonville

Publié le 29 novembre 2022 à 20h04, mis à jour le 30 novembre 2022 à 11h45

Temps de Lecture 2 min. 

Au printemps 2023*, Grégoire Souchay se rendra au tribunal de Rodez pour répéter ce qu’il a dit aux gendarmes qui l’ont auditionné le 24 février : s’il se trouvait, le 10 novembre 2021, dans les locaux du semencier RAGT à Calmont, dans l’Aveyron, c’est parce qu’il couvrait l’action des Faucheurs volontaires pour Reporterre. En tant que journaliste, il était là pour documenter et photographier les militants en train de mettre « hors d’état d’usage des semences de variétés rendues tolérantes aux pesticides », comme en attestent son article et ses photos mis en ligne le 12 novembre 2021 sur le site d’informations environnementales et sociétales

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Ces explications n’ont pas empêché la gendarmerie de reprocher à ce journaliste aux dix ans d’ancienneté, titulaire d’une carte de presse, pigiste pour Reporterre et Libération, d’avoir « frauduleusement soustrait des sacs contenant des semences de colza » et « volontairement dégradé ou détérioré plusieurs sacs de semence », l’assimilant ainsi à un activiste. « Il n’y a aucune raison de me poursuivre, si ce n’est pour nuire à un média », proteste M. Souchay.

Le journaliste rappelle que « le temps et l’argent perdus dans cette procédure » sont incompatibles avec « un travail journalistique » pour lequel les lecteurs accordent leurs dons à Reporterre« D’une certaine manière, on peut parler de procédure bâillon », abonde Hervé Kempf, le rédacteur en chef du site. « C’est de l’intimidation », ajoute Me Alexandre Faro, qui doit déjà défendre le média indépendant dans deux autres dossiers.

« Cela créerait un précédent »

En juin 2020, en effet, un journaliste avait passé dix heures en garde à vue et écopé d’une amende de 750 euros pour avoir suivi des manifestants sur la piste de l’aéroport Paris-Orly. Un recours hiérarchique auprès du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, était resté lettre morte. En octobre de la même année, deux reporters avaient été verbalisés d’une amende de 450 euros lors d’une action d’écologistes à l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.

D’autres journalistes présents (France 3, Mediapart, l’AFP…, selon les situations) n’ont pas été inquiétés, remarque l’avocat, qui s’agace de ces « entraves à la liberté d’informer », visant un « petit média », devant trois tribunaux différents (de police, pénal et correctionnel). « C’est la culture même de la liberté d’informer qui est menacée », estime Hervé Kempf.

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Celui-ci cite, en effet, en plus de ces procédures, les deux récentes décisions de justice empêchant Mediapart de publier une enquête sur le maire de Saint-Etienne, et Reflets.info de nouveaux articles sur Altice, fondés sur des données piratées (les décisions d’appel sont attendues mercredi 30 novembre). Si condamnation il devait y avoir, « en aucun cas nous n’accepterions, car cela créerait un précédent, et il n’en est pas question », ajoute Hervé Kempf. Une réunion d’information et de soutien est prévue, lundi 5 décembre, à la Bourse du travail de Paris.

*Initialement prévu le 7 décembre, le procès a été repoussé à mi-2023, a-t-on appris, mercredi 30 novembre dans la matinée. Maître Alexandre Faro devrait profiter de ce délai pour demander au procureur l’abandon des poursuites.

Aude Dassonville

**Les mégabassines, symbole d’un agrobusiness intenable ou réponse adaptée aux sécheresses ?

Les affrontements à Sainte-Soline, samedi, ont non seulement rappelé les problèmes de la gestion de l’eau dans la région, mais surtout l’opposition entre deux visions de l’agriculture. 

Par Martine Valo

Publié le 03 novembre 2022 à 17h00, mis à jour le 05 novembre 2022 à 06h06

https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/11/03/les-megabassines-symbole-d-un-agrobusiness-intenable-ou-reponse-adaptee-aux-secheresses_6148374_3244.html

Temps de Lecture 5 min. 

La réserve d’eau SEV17, à Mauzé-sur-le-Mignon (Deux-Sèvres), le 7 octobre 2022.
La réserve d’eau SEV17, à Mauzé-sur-le-Mignon (Deux-Sèvres), le 7 octobre 2022.  -/ AFP

La polémique sur les retenues d’eau à usage agricole est montée d’un cran après les manifestations à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, marquées par des heurts, samedi 29 octobre. « No bassaran ! » : avec ce slogan, le collectif Pas une bassine de plus ! réclame un moratoire. Environ 600 000 plans d’eau de toutes tailles constellent la métropole, bien que leur nombre exact reste inconnu. Essentiellement aménagés par les humains, beaucoup sont inutilisés, oubliés même. Toutefois, dans le contexte du changement climatique, des centaines de nouvelles grandes retenues sont en préparation pour l’irrigation. Certaines sont aménagées dans un certain consensus, d’autres volontairement endommagées comme en Vendée en août, plusieurs sont illégales, par exemple à Caussade, dans le Lot-et-Garonne. Tour d’horizon des questions posées par leur développement.

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« Mégabassine » ou « réserve de substitution ». Pour ses détracteurs, le modèle de réservoir prôné dans le Poitou est le symbole d’un agrobusiness intenable à l’ère du changement climatique. Pour ses promoteurs, il constitue au contraire une réponse adaptée aux sécheresses qui ne vont pas manquer de se multiplier, réduisant les rendements et laissant les agriculteurs démunis. Il se compose d’un bassin artificiel, excavé, rendu étanche par une membrane en plastique et entouré de digues. Celui de Sainte-Soline est le plus important des seize qui doivent équiper d’ici à 2025 le bassin de la Sèvre Niortaise-Marais poitevin – essentiellement situé dans le département des Deux-Sèvres. Il sera bordé de murs de 8 mètres de haut pour un volume total de 720 000 mètres cubes et une capacité officielle de 628 000 mètres cubes, et s’étendra sur 10,2 hectares. A raison d’un débit de 615 mètres cubes par heure, en provenance de sept forages ; il faudra une quarantaine de jours pour le remplir.

En effet, à la différence d’une retenue collinaire, qui récupère les précipitations ruisselant sur le sol, d’un barrage sur une rivière ou d’une dérivation partielle d’un cours d’eau, les grandes bassines sont remplies quasi exclusivement en puisant dans les nappes souterraines, en complétant éventuellement par le puisage de rivières. Des dispositifs de pompage fonctionnent en continu pendant des mois pour les remplir. Dans les Deux-Sèvres, les gestionnaires des réservoirs agricoles ont l’autorisation de pomper du 1er novembre au 31 mars, hors de la saison estivale.

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Le principe du stockage. Il consiste à thésauriser la ressource en la prélevant l’hiver, afin de réduire les volumes soustraits à l’environnement pendant la période chaude, où elle manque le plus. Il apparaît a priori vertueux. L’eau qui tombe en excès en hiver est perdue, et file directement à la mer : tel est en substance l’argumentaire des défenseurs de ce principe, au premier rang desquels figure la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles. La mettre de côté reviendrait à l’emprunter avant de la rendre au milieu. Mais les volumes consommés ne reviennent pas forcément là où ils ont été prélevés. Selon une étude rendue publique par le ministère de la transition écologique en juin, la ressource en eau renouvelable a diminué en France de 14 % depuis 1990.

Considérer les pluies d’hiver comme une ressource perdue revient à ne considérer que le point de vue agricole. Car la faune et la flore aquatiques ont besoin de débits suffisants toute l’année. De même, sur le littoral, les élevages des conchyliculteurs ne peuvent se développer sans apport d’eau douce, les plages ont elles-mêmes besoin d’être rechargées par les sédiments charriés par les rivières. Surtout, c’est à ce moment-là que les pluies peuvent s’infiltrer sans être absorbées par la végétation et donc recharger ainsi efficacement les nappes souterraines. Or, ce sont ces dernières qui soutiendront les sources en été.

La ressource à l’air libre. L’agriculture n’existe pas sans eau : tous les protagonistes s’accordent sur cette évidence. Mais Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne, complète la formule : « Sans eau dans les sols. » Le stockage à l’air libre expose la ressource au réchauffement et à l’évaporation, à la contamination par des cyanobactéries et au risque qu’un animal ne vienne s’y noyer. « Les nappes sont déjà en tension, elles risquent de l’être encore plus tôt si on les fait baisser année après année, avance le syndicaliste. Nous défendons un modèle qui favorise l’infiltration de l’eau : des praires, des haies et des cultures qui s’affranchissent des pesticides, ces pollueurs de la ressource. »

Un coût important. Les contrats de territoires encouragés par l’Etat doivent associer dans leur élaboration les différents usagers de l’eau : distributeurs de l’eau potable, associations environnementales, professionnels du tourisme, pêcheurs, et bien sûr agriculteurs… En retour, les agences de l’eau apportent jusqu’à 70 % de subventions à la création de stockage. Pour la Sèvre Niortaise, l’investissement s’élève à 60 millions d’euros : de quoi financer les seize lacs artificiels capables de réserver 5,5 millions de mètres cubes pour l’agriculture, alors que la zone a déjà suffisamment de bassins installés pour stocker 2 millions de mètres cubes. Le secteur en réclamait initialement dix-neuf, mais a dû revoir ses exigences à la baisse sous la pression des opposants aux mégabassineset après le rappel à l’ordre d’une mission d’inspection dépêchée par le gouvernement, en 2018. Celle-ci concluait à une surévaluation de ses besoins par la profession.

Une efficacité discutée. « La Vendée a commencé à s’équiper il y a quinze ans, elle a vingt-sept retenues, et cela fonctionne très bien, assure Thierry Boudaud, président de la Coop de l’eau 79, qui porte le projet de réserves dans les Deux-Sèvres. Il décrit la spécificité de son territoire, dont la nappe, peu profonde, est très réactive et se rechargerait rapidement. Selon lui, « passé les cent premiers millimètres de pluie, les suivants vont ruisseler de toute façon vers la mer ». Il rappelle qu’à terme les bassines vont conduire à l’abandon de 300 forages pour l’irrigation sur les 600 actuels, et qu’en contrepartie des financements publics importants, l’accès à l’eau est conditionné à des engagements des agriculteurs : plantation de haies d’ici à trois ans, maintien d’une couverture végétale, réduction de 50 % des pesticides. Ce dernier chiffre correspond à l’objectif national du plan Ecophyto« Nous, nous allons le faire », promet M. Boudaud.

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François-Marie Pellerin, vice-président de la Coordination pour la défense du Marais poitevin, est l’un des très rares défenseurs du projet parmi les membres d’associations environnementales. « Nous avons décidé d’accompagner cet outil, même s’il peut être amélioré, parce qu’il définit des règles collectives et que le sujet est tellement important. C’est un pari », résume ce militant.

Une répartition problématique de l’eau. L’un des principaux reproches fait aux bassines agricoles est leur iniquité. Car, si tous les agriculteurs qui irriguent doivent obligatoirement payer leur adhésion au dispositif, seules 230 exploitations seront raccordées aux bassines dans les Deux-Sèvres, ce qui représente 435 agriculteurs sur 847, selon la coopérative de l’eau. Le premier réservoir, réalisé à Mauzé-sur-le-Mignon, dessert six fermes. La deuxième, à Sainte-Soline, doit en alimenter de douze à quinze. Celles qui ne seront pas desservies vont continuer à puiser dans l’environnement. A moins d’être frappées par une interdiction préfectorale décidée en situation de crise durant l’été. Il leur faudra alors obtenir une éventuelle dérogation pour arroser. Les réservoirs déconnectés du réseau hydrographique, comme les mégabassines, échappent, eux, à ces arrêtés.

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Le modèle agricole en question. Les céréales représentaient encore plus de 70 % des surfaces irriguées du bassin de la Sèvre Niortaise en 2018. La chambre d’agriculture du département souligne que la part du maïs, très gourmand en eau en août, a été divisée par 2 depuis dix ans dans l’ancienne Poitou-Charentes, région très fréquemment frappée par de sévères sécheresses et par des arrêtés concernant des restrictions d’eau de longue durée. Les agriculteurs ont-ils déjà trop prélevé dans la nappe souterraine, ou celle-ci pâtit-elle uniquement d’un manque de pluie ? La région est en tout cas classée « zone de répartition des eaux » par l’Etat, ce qui signifie qu’elle connaît un « déséquilibre durablement installé entre la ressource et les prélèvements en eau existants ». Elle doit donc impérativement réfléchir à son approvisionnement et à sa façon de partager l’eau. Certains experts estiment que la sécurisation de l’approvisionnement pour l’irrigation a de grandes chances de ne répondre que ponctuellement aux défis du réchauffement, repoussant d’autant la mutation des pratiques et des cultures vers des modèles plus résilients.

Martine Valo

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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