Le RN à l’Assemblée : après la dédiabolisation, la notabilisation

A l’Assemblée nationale, un coup de pouce coupable à la notabilisation du RN

ÉDITORIAL

Le Monde

Laisser obtenir deux vice-présidences au Rassemblement national contribue à lui faire franchir une nouvelle étape par temps de majorité relative, avec à la clé d’importants moyens financiers et humains.

Publié aujourd’hui à 09h36, mis à jour à 10h25    Temps de Lecture 2 min. 

https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/07/01/a-l-assemblee-nationale-un-coupable-coup-de-pouce-a-la-notabilisation-du-rn_6132861_3232.html

L’entrée, cette semaine, de deux députés d’extrême droite au bureau de l’Assemblée nationale, l’instance chargée d’organiser le fonctionnement de la vie parlementaire, crée un légitime malaise. Sébastien Chenu (Nord) et Hélène Laporte (Lot-et-Garonne) ont été élus vice-présidents, mercredi 29 juin, dès le premier tour de scrutin, à la majorité absolue, en remportant respectivement 290 et 284 voix. Ils pourront à ce titre présider des séances publiques et participer aux décisions du bureau aux côtés de leurs quatre collègues issus du PS, d’Horizons, du MoDem et de LFI.

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Pour un parti qui défend la préférence nationale, un principe à rebours des valeurs républicaines telles que les définit la Constitution, cette intronisation vaut quasi-adoubement. En francs-tireurs, les écologistes ont tenté d’y faire barrage. Ils ont présenté à la dernière minute leurs propres candidats, mais leur incapacité à faire le plein des voix, y compris à gauche, montre à quel point le front républicain est devenu inopérant. En pleines tractations, les autres groupes étaient davantage soucieux de se répartir les postes que de faire barrage à un parti qu’ils ont tenté avec plus ou moins de vigueur de tenir en marge pendant plus de vingt ans.

Le comportement de la majorité présidentielle est encore plus confondant : une partie de ses élus a bel et bien voté à bulletin secret en faveur des deux députés RN, alors que l’objectif affiché par Emmanuel Macron depuis 2017 était de faire reculer l’extrême droite, et que le président doit en partie ses deux élections à un mécanisme de front républicain.

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Aurore Bergé, la présidente du groupe Renaissance, a justifié cette situation en déclarant que la majorité n’a pas « à choisir ses oppositions » mais « doit faire respecter la volonté des Français ». De fait, le RN vient de faire entrer 89 députés à l’Assemblée nationale, dans le cadre du scrutin majoritaire à deux tours, qui ne lui est, en principe, guère favorable. Il est la seule formation politique à avoir bénéficié d’une dynamique électorale pendant la campagne des élections législatives.

Certes, ostraciser les députés de ce parti expose au risque de conforter la stratégie de Marine Le Pen de dénonciation d’un « système » qui la rejette. Mais lui laisser obtenir deux vice-présidences contribue, à l’inverse, à lui faire franchir une nouvelle étape : après la banalisation, voilà le RN sur la voie de la notabilisation, avec à la clé d’importants moyens financiers et humains, et, plus encore, une sorte de reconnaissance publique par temps de majorité relative. C’est exactement ce que recherche sa cheffe de groupe.

Coupable cécité

Le mauvais choix devant lequel se sont trouvés les partis républicains résulte de leur coupable cécité. Année après année, ils ont baissé la garde, illusionnés par l’opportunisme de Marine Le Pen qui, au gré des publics et des circonstances, met en avant la défense du pouvoir d’achat et laisse dans l’ombre ce qui fonde toujours l’identité de son parti : le rejet de populations qui vivent en France.

Encore efficient lors de la dernière élection présidentielle, le front républicain s’est effondré à l’occasion des élections législatives. Certains, à droite, y ont renoncé parce qu’ils ne voyaient plus le problème ; d’autres, au sein de la majorité, l’ont fait par calcul électoral, dans le vain espoir de sauver quelques sièges ; d’autres encore, à gauche, l’ont contourné pour tenter de rouvrir le jeu politique.

La réalité, c’est que, année après année, le jeu a tendance au contraire à se refermer comme un étau, une situation toujours plus favorable au parti d’extrême droite.

Écouter aussi  Le RN à l’Assemblée : après la dédiabolisation, la notabilisation  *

Le Monde

Le RN à l’Assemblée : après la dédiabolisation, la notabilisation

PODCAST  https://www.lemonde.fr/podcasts/article/2022/06/30/le-rn-a-l-assemblee-apres-la-dediabolisation-la-notabilisation_6132644_5463015.html

Comment expliquer le succès du Rassemblement national aux élections législatives, avec 89 députés élus ? Qu’est-ce qu’un groupe parlementaire aussi puissant va changer dans la vie du Parlement, mais aussi du parti ? Le RN va-t-il parvenir à réaliser sa mue en parti de gouvernement ? Dans ce podcast, Franck Johannès revient sur les conséquences du score historique aux législatives de la formation d’extrême droite. 

Par Cyrielle Bedu

Publié hier à 05h00, mis à jour hier à 05h00

ECOUTEZ L’ÉPISODE DU 30 JUIN 2022

https://open.spotify.com/episode/0VzaRs42f0DfO64qJq7IdT?go=1&sp_cid=f7d42572e6c9c54a38a60cb948e52c4a&utm_source=embed_player_p&utm_medium=desktop

Le 22 juin, trois jours après le second tour des élections législatives, 89 députés Rassemblement national (RN) ont fait leur entrée à l’Assemblée nationale autour de Marine Le Pen, elle-même réélue députée de la 11e circonscription du Pas-de-Calais.

L’arrivée au Parlement d’un groupe aussi puissant a un goût de revanche pour la candidate malheureuse à l’élection présidentielle : son parti dépasse aujourd’hui largement son précédent record de 1986, où le Front national avait obtenu 35 députés à la proportionnelle.

Comment expliquer ce score plus élevé qu’attendu aux élections législatives ? La volonté de Marine Le Pen de transformer sa formation en parti de gouvernement qui joue le jeu des institutions va-t-elle ancrer durablement le RN dans le paysage politique ? Ou, au contraire, affaiblir son positionnement antisystème ?

Dans cet épisode du podcast « L’Heure du Monde », Franck Johannès, journaliste au service Politique du Monde, nous explique les conséquences de la percée bleu marine à l’Assemblée nationale.

Un épisode produit par Cyrielle Bedu, réalisé par Alexandre Ferreira et présenté par Jean-Guillaume Santi.

Voir aussi:

https://environnementsantepolitique.fr/2022/06/30/vous-avez-dit-de-diabolisation-du-rn-ex-fn-2-exemples-prouvant-le-contraire-cela-nempeche-pas-la-majorite-de-voter-pour-deux-vice-presidences-rn/

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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