Smur sans docteur, régulation de l’accès aux urgences… Face à la crise, le député urgentiste Thomas Mesnier veut « secouer les tabous »
Par A.M. le 07-06-2022

Dans une interview accordée au Journal du dimanche, le député de la majorité, candidat à sa réélection en Charente, propose des solutions à la crise des urgences, n’hésitant pas à bousculer les « corporatismes ».
Co-rapporteur d’une mission sur les urgences en 2019, qui avait débouché en septembre sur le Pacte de refondation des urgences, le Dr Thomas Mesnier n’est pas à court d’idées. Dans une interview accordée au JDD,l’urgentiste-député de Charente, candidat du mouvement Horizons à sa réelection, estime que la crise actuelle « peut nous permettre de secouer les tabous ». « Pour passer le cap de l’été, il faut se remettre en mode gestion de crise, avec un pilotage par les ARS, des personnes dédiées à la recherche de lits disponibles au niveau de chaque département, voire un appel aux jeunes retraités de la réserve sanitaire pour juillet-août. »
A l’instar du Pr Philippe Juvin, du syndicat MG France ou de la Conférence nationale des URPS-médecins libéraux, Thomas Mesnier propose de généraliser la régulation de l’accès aux urgences par le 15, solution mise en place la nuit aux urgences du CHU de Bordeaux. « Ça fonctionne. C’est en place au Danemark depuis des années. Je l’évoquais en 2018. Généralisons-la pour recentrer les urgences sur leur vrai métier : les urgences vitales ! »
Se gardant de jeter la pierre aux médecins de ville, qui « assurent déjà la majorité des soins non programmés en ville », l’urgentiste rejette la solution de l’obligation de garde qui risque de « faire fuir » les médecins. « Pourquoi ne pas organiser des gardes de télémédecine, dans les maisons médicales, pour épauler le médecin d’astreinte sur place ? », avance-t-il. Le député loue par ailleurs le concept de « Smur paramédical » mis en place à Château-du-Loir, dans la Sarthe, pour pallier l’absence de médecins. « Le Smur sans docteurs, ça existe partout dans le monde et ça marche. Même si ça heurte un dogme français. »
« J’ai reçu une offre d’emploi à 10.000 euros pour une semaine »
Pour qu’en ville « la charge de travail soit mieux répartie », Thomas Mesnier suggère de « s’appuyer davantage sur les autres professionnels de santé » que sont les kinés (pour les entorses) et les pharmaciens (pour les infections urinaires) comme la loi le prévoit, en organisant un accès direct. « La crise peut nous permettre de secouer les tabous, les habitudes, les corporatismes. » Les infirmières en pratique avancée doivent pouvoir « s’implanter partout » et « se substituer aux médecins pour un nombre plus important de tâches », plaide-t-il encore.
Enfin, le médecin considère qu’« il est temps de casser la spirale inflationniste de l’intérim médical et infirmier ». « J’ai reçu une offre d’emploi à 10.000 euros pour une semaine de travail de 9 heures à 18 heures dans un établissement du centre de la France ! Comment les hôpitaux peuvent-ils rester attractifs pour les jeunes praticiens face à de tels tarifs ? », s’insurge Thomas Mesnier. « La loi limitant le paiement des contrats courts doit être appliquée. Faisons-le dès la rentrée, appelle-t-il. Les médecins mercenaires arrêteront peut-être d’exercer un temps, mais ils sont comme tout le monde, ils ont besoin de travailler et reviendront dans les services. »