Une goutte d’eau dans un verre d’eau: le dispositif de solidarité territoriale peine visiblement à décoller.

Solidarité territoriale : seuls 250 médecins généralistes se sont portés volontaires

Officiellement lancé le 1er septembre, le dispositif de solidarité territoriale peine visiblement à décoller. Seuls 250 médecins généralistes se sont inscrits pour aller exercer jusqu’à deux jours par mois dans l’une des 151 zones en tension identifiées par le Gouvernement.

05/12/2025 https://www.egora.fr/actus-pro/acces-aux-soins/solidarite-territoriale-seuls-250-medecins-generalistes-se-sont-portes?utm_source=Newsletter&utm_medium=gms_egora&utm_campaign=En_bref___Vendredi_5_décembre_2025&utm_medium=gms_egora&utm_source=email&utm_campaign=En%20bref%202025-12-05%2020h20251205&sc_src=email_4724719&sc_lid=183540724&sc_uid=XYBlorZBtz&sc_llid=23567&sc_eh=5d463c22601bc0401

 Par Louise Claereboudt

250 médecins généralistes ont rejoint le dispositif de solidarité territoriale « Un médecin près de chez vous », a indiqué la DGOS à Egora, ce vendredi, confirmant une information de RMC. Lancé en septembre dernier, le dispositif a vocation à apporter une solution aux patients de 151 zones en tension identifiées sur le territorial national. Concrètement, les médecins qui se portent volontaires s’engagent à exercer dans ces déserts jusqu’à deux jours par mois, moyennant une indemnité de 200 euros par jour. 

Sur le papier, le dispositif semble louable, mais les professionnels de terrain ont identifié, dès le départ, de nombreux freins. « C’est un dispositif qui a été construit au niveau du ministère sans connaissance réelle du fonctionnement d’un cabinet de médecine générale, autrement ça n’aurait pas été pondu comme ça« , pointait, auprès d’Egora, le Dr Pierre Bidaut, président de l’URPS Médecins libéraux Centre-Val de Loire, joint fin octobre.

Les Généralistes-CSMF observaient alors une baisse drastique du nombre de généralistes volontaires dans cette région, qui comporte pourtant « 21 zones vulnérables ». De 16, ils n’étaient alors plus que 3 à être d’accord pour quitter leur cabinet deux jours par mois au profit d’une zone plus en tension, selon le syndicat. En cause : des contraintes administratives (liées notamment à la plateforme d’inscription) et des difficultés logistiques (locaux, matériel, « logiciels non interopérables entre médecin accueillant et médecin volontaire »…).  

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« Le plus gros problème » du dispositif pour Pierre Bidaut est celui de « la continuité des soins« . « Le choix qui a été fait, qui est que le médecin arrive avec son logiciel métier, […] en termes de continuité des soins, c’est complètement inadapté. Si vous avez médecin qui utilise Weda, et qui prescrit des examens complémentaires qui arrivent sur son logiciel métier, et que les jours suivants, un autre médecin vient et utilise Doctolib, ça ne va pas…« 

« Il y a [aussi la question de] qui prend en charge les retours d’examens complémentaires du médecin X […] et d’un autre médecin Y ?« , soulevait le président de l’URPS. Et de rappeler que « le médecin qui a prescrit » ces examens « en a la responsabilité« . « Sauf que [celui-ci] est retourné à son cabinet médical, a ses [propres] patients à prendre en charge… Donc quid des suites données aux retours d’examens ? » « Ce sont des choses qui inquiètent beaucoup les potentiels volontaires« , indiquait-il, n’observant « pas de solutions à l’horizon« .

Pour Pierre Bidaut, la mission de solidarité territoriale pose un autre problème : celui de l’absence d’offre de soins dans les territoires lorsque les médecins qui y exercent partent travailler ailleurs dans le cadre du dispositif. En Centre-Val de Loire, « à côté d’une zone très sous-dotée il y a une autre zone très sous-dotée. On a plus de 90% de la région en ZIP ou en ZAC. Et les médecins [solidaires] doivent venir de la région… Et beh ça ne va pas le faire. On déshabille Pierre pour habiller Paul« .

« On nous dit ‘vous pouvez vous faire remplacer’, mais on ne trouve pas de remplaçants« , expliquait le président de l’URPS en octobre dernier, particulièrement sceptique. « Imaginer qu’en région Centre on ait la ressource, c’est complètement aberrant puisque on est la région de France avec la démographie médicale la plus faible, et les perspectives ne sont pas réjouissantes pour les années qui viennent. Si on avait la ressource, on n’aurait pas besoin du dispositif.« 

On est en phase de montée en charge

Contacté par Egora ce vendredi, le Dr Mickael Benzaqui, sous-directeur de l’accès aux soins et du premier recours à la DGOS, rappelle que le dispositif est toujours « en phase pilote ». « C’est quelque chose qu’on n’a jamais fait, c’est un nouvel objet en termes de politiques publiques, qui soulève des questions organisationnelles et techniques », avance le médecin de santé publique. Des ajustements se feront donc avant le déploiement du dispositif dans le cadre de la stratégie France santé. Pour l’heure, « une centaine de lieux accueillent des médecins » sur les 151 zones prioritaires identifiéesprécise-t-il.

« Comme on est en phase de montée en charge, il n’y a pas forcément un médecin tous les jours sur ces lieux », reconnaît-il, observant toutefois des signaux positifs : « On s’attendait à avoir un turn-over tous les jours de médecins différents. Or, on remarque qu’il y a souvent des médecins jeunes retraités qui viennent pour deux jours par semaine ou une semaine tous les mois. » Parmi les autres volontaires : des remplaçants à titre exclusif et « des médecins qui ont fait le choix de ne pas exercer à temps plein » et qui, « une journée par mois », « ont choisi de venir donner un coup de main dans certains territoires. »

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Cette « dynamique professionnelle met à mal l’idée que la profession ne serait pas en mesure de s’organiser pour répondre aux enjeux d’accès aux soins, qui sont immenses aujourd’hui », souligne Mickael Benzaqui.

Cet état des lieux établi, le représentant de la DGOS a tenu à répondre aux craintes des professionnels concernant la continuité des soins dans les zones en tension : « De façon transitoire, on a plusieurs solutions qui sont aujourd’hui proposées. » « S’il y a un besoin de suivi, celui-ci peut être assuré par le médecin traitant – car souvent les patients ont un médecin traitant, mais il n’est peut-être pas disponible ce jour-là ou est un peu plus loin. Dans ce cas, un lien se fait entre le médecin volontaire et le médecin traitant. »

En l’absence de médecin traitant, « soit le médecin volontaire fait une téléconsultation de suivi, au moment du rendu d’examens complémentaires par exemple, soit il y a un échange entre le médecin volontaire et le lieu d’accueil. Dans près de 85% des cas, le lieu de solidarité territoriale est en réalité déjà un lieu de soins – un cabinet de groupe, une MSP, un centre de santé… Le médecin volontaire fait le lien avec les médecins qui exercent dans ce cabinet de façon pérenne et qui acceptent de prendre en charge le patient ponctuellement » pour assurer le suivi, précise le médecin de santé publique.

Le Dr Benzaqui loue par ailleurs le « recours au DMP », rappelant que « les logiciels métier sont désormais interfacés avec le DMP ». « Soit le médecin vient avec son propre logiciel métier […] ou alors il a accès au logiciel du lieu de soins. On a travaillé avec les éditeurs de logiciels qui mettent à disposition gratuitement dans la plupart des cas des licences génériques pour la solidarité territoriale. La continuité se fait dans le logiciel métier du lieu de soins. Le médecin suivant a donc accès à l’ensemble de l’historique », à l’instar des « autres médecins de la structure ». Une modalité récemment déployée, selon le Dr Benzaqui.

Auteur de l’article

Louise Claereboudt

Commentaire Dr Jean SCHEFFER:

Vous savez à l’avance ce dont je vais parler ! Eh bien oui , après tous les bricolages dispendieux, dénoncés par la cour des comptes avec les multiples aides aux installations, il n’y a que trois moyens pour résoudre les déserts médicaux qui sont partout, dans tous les lieux de soins, d’activité médicale et dans toutes les spécialités (ce matin c’était les sages femmes à propos des 80 ans des centres de PMI)

1- Augmenter le Numerus Apertus mais sans trop pour raisons de capacité de formation et attirer les étudiants des classes moyennes et issus des milieux de pauvreté pour démocratiser ce milieu médical qui en a bien besoin.

2- En finir avec la liberté d’installation que seuls les médecins garde encore et pour commencer empêcher toute installation de généralistes et spécialistes en zone pourvue en refusant de conventionner.

3- Créer des centres de santé publics multi-professionnels dans tous les secteurs en grande difficulté qui seront remplis de médecins par la mesure 4

4- Créer le « Clinicat-Assistanat pour Tous » obligatoire pour tous les futurs généralistes et spécialistes de 2 à 3 ans, pour combler à court terme tous les manques de praticiens, à l’image de l’assistanat partagé entre CHU et CHG, financé par la suppression de toutes les aides à l’installation infructueuses.

Ce n’est qu’en réalisant conjointement ces quatre mesures que l’accès aux soins à la prévention, à l’éducation sanitaire de tous sera obtenue.

Voir: « Vision Globale -Solution globale »: https://1drv.ms/w/s!Amn0e5Q-5Qu_sAoKetf_T8OKk2Io?e=GfjeRj?e=4YzGt2

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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