Une démineur de l’écologie ancien ingénieur des mines qui débarque à Matignon

Vincent Tejedor, le nouveau chef du pôle environnement de Matignon venu de l’industrie

Cet ingénieur des Mines, qui a contribué à rogner des avancées écologiques au ministère de l’industrie, arrive à un poste crucial pour la transition verte. 

Par Publié le 20 novembre 2025 à 19h14, modifié hier à 10h55 https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/11/20/vincent-tejedor-le-nouveau-chef-du-pole-environnement-de-matignon-venu-de-l-industrie_6654203_3244.html?random=122950354

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Vincent Tejedor, le 18 janvier 2023, à Paris.
Vincent Tejedor, le 18 janvier 2023, à Paris.  S.MICHEL/DGNUM

Accaparé par les discussions budgétaires au Parlement, Sébastien Lecornu est très silencieux sur ses ambitions en matière de politiques écologiques. Le premier ministre a donné un indice de sa vision du sujet en touchant à un poste important de l’organigramme de Matignon. Mercredi 19 novembre, Vincent Tejedor a été nommé chef du pôle environnement, énergie, transport et logement. A partir du 24 novembre, il remplacera Vincent Le Biez, en poste depuis septembre 2024.

Ancien directeur de cabinet du ministre de l’industrie Marc Ferracci (septembre 2024-octobre 2025), l’homme de 40 ans devra gérer de multiples thématiques éparpillées entre plusieurs ministères et travailler en coordination avec le secrétariat général à la planification écologique. Un rôle crucial alors que la France dévie peu à peu de sa trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre et que la transition écologique est entravée par le contexte politique et budgétaire.

Vincent Tejedor, qui n’a pas souhaité répondre aux questions du Monde, va devoir vite rassurer q. Ingénieur du corps des Mines, diplômé de l’Ecole normale supérieure, docteur en physique théorique et coauteur d’un livre, Les Cycles thermodynamiques des centrales nucléaires (Presses des Mines, 2010), il a lancé une start-up avant de devenir directeur général du numérique et des systèmes d’information et de communication du ministère des armées. Un profil multicarte orienté vers la « souveraineté, le numérique et l’industrie, mais sans appétence pour l’écologie », selon une source ministérielle.

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Au ministère de l’industrie, il avait œuvré en coulisses pour « assouplir » des avancées écologiques accusées de nuire à la compétitivité des entreprises industrielles installées en France. Lui et Marc Ferracci ont ainsi obtenu que les projets de sites industriels soient sortis du dispositif zéro artificialisation nette, qui prévoit une neutralité de l’artificialisation en France en 2050, notamment lors du vote du projet de loi sur la simplification de la vie économique, en juin.

« A l’écoute »

Jusqu’au départ de M. Ferracci du ministère, début octobre, ils avaient mis la pression, en accord avec l’Elysée, pour que l’objectif européen 2040 de réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre préserve au maximum les industries, en obtenant notamment une augmentation de la part des crédits carbone internationaux ou une clause de révision tous les deux ans si les puits de carbone s’effondraient. « La défaillance des puits de carbone ne doit pas peser sur les industries », expliquait-on au sein de la diplomatie française.

« Il a un profil très techno, mais il s’était montré plutôt ouvert à nos arguments quand nous l’avions rencontré, défend Anne Bringault, coordinatrice des programmes du Réseau Action Climat, dont les représentants avaient été reçus par Vincent Tejedor en décembre 2024. Il était à l’écoute avec une réelle préoccupation sur la décarbonation de l’industrie et sur le fait que la réindustrialisation et la décarbonation pouvaient aller de pair. »

Réputé pour avoir construit une relation exclusive avec son ministre, ce qui avait provoqué le départ de plusieurs membres du cabinet, Vincent Tejedor va devoir découvrir une fonction qui demande beaucoup de souplesse. La ministre de la transition écologique, Monique Barbut, veut absolument relancer la planification en s’appuyant sur la troisième stratégie nationale bas-carbone mais aussi en travaillant sur des thématiques comme la forêt, la pollution plastique, l’électrification des véhicules…

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Monique Barbut, qui a écrit une note à Sébastien Lecornu en ce sens, espère trouver une occasion après la fin de la 30e Conférence des parties sur le climat de Belem, au Brésil, tout en étant consciente de la complexité du contexte politique. La troisième programmation pluriannuelle de l’énergie, que François Bayrou avait validée durant l’été, n’a toujours pas été publiée, notamment à cause du risque de censure agité par le Rassemblement national. Ces textes, cruciaux pour la décarbonation et la planification écologique, sont toujours entre les mains de Matignon et de son nouveau chef du pôle vert.

*COP30 : Emmanuel Macron plus ambitieux à Belem que sur la scène nationale

Le président de la République française est apparu comme un fervent défenseur de la cause climatique, jeudi, en préambule de la COP30 au Brésil. Une position en décalage avec l’affaiblissement de la transition écologique, en France comme au niveau mondial. 

Par Publié le 07 novembre 2025 à 17h30, modifié le 07 novembre 2025 à 17h31

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Le président français, Emmanuel Macron, s’adresse à la presse lors de la COP30 à Belem, dans l’Etat du Para, au Brésil, le 6 novembre 2025.
Le président français, Emmanuel Macron, s’adresse à la presse lors de la COP30 à Belem, dans l’Etat du Para, au Brésil, le 6 novembre 2025.  LUDOVIC MARIN/AFP

A la fin de sa journée express à Belem (Brésil), jeudi 6 novembre, Emmanuel Macron répond longuement aux questions des journalistes lors d’un « micro tendu » organisé à la dernière minute. Il vient de délivrer à la tribune un des discours les plus ambitieux de ce sommet, préambule à la 30e Conférence des parties sur le climat (COP30). Alors, veut-il davantage s’impliquer sur ce sujet en France ? « Le président, par nature et par constitution, est le garant du long terme pour le pays, mais aussi le garant de son indépendance, et quand on parle de climat, on parle de ça », répond le chef de l’Etat, avant de défendre vigoureusement la planification écologique française, qui ne cesse pourtant d’être détricotée par ses différents gouvernements : « C’est un investissement de long terme, il ne faut pas le lâcher. »

A Belem, comme à chaque COP, Emmanuel Macron est apparu comme un fervent défenseur de la cause climatique. Hors de question de demander une « pause réglementaire », comme il l’avait fait en mai 2023 au sujet du pacte vert européen. Pas question non plus de réclamer plus de flexibilité dans les trajectoires de décarbonation de l’Union européenne, ce que la France vient d’obtenir auprès de ses partenaires avec, notamment, l’instauration de 5 % de crédits carbone internationaux dans le total de 90 % de baisse prévu d’ici à 2040.

Sur la scène politique française, l’Elysée est sous la pression de l’extrême droite. Sur la scène internationale, le président de la République, dont l’image s’est un peu ternie depuis 2017, année du « Make our planet great again », reste un des dirigeants les plus ambitieux. « Nous devons convoquer à nouveau l’esprit qui a présidé à l’adoption de l’accord de Paris : le choix du multilatéralisme face au repli sur soi, de la science face à l’idéologie et de l’action face au fatalisme »,a-t-il insisté à la tribune, appelant à protéger les scientifiques face aux « prophètes de désordre » qui « remettent en question les certitudes les mieux étayées ».

Par son discours et sa présence lors de ce sommet, auxquels peu de dirigeants ont assisté, Emmanuel Macron a donné le ton à la délégation française qui participera, au sein du contingent européen, aux discussions qui s’ouvrent lundi. Comme d’autres pays, notamment ceux qui sont réunis à ses côtés au sein de la High Ambition Coalition, la France aimerait que des mots plus forts sur l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre et la sortie des énergies fossiles soient de retour dans le débat.

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A Bakou, lors de la COP29, les Européens n’avaient pas réussi à imposer le terme de « transition hors des énergies fossiles » dans des textes annexes, comme si les pays les plus bloquants, telle l’Arabie saoudite, voulaient vite faire oublier l’acquis diplomatique immense de la COP28 de Dubaï. « Il faut qu’il y ait un message fort sur les contributions déterminées au niveau national [CDN] et sur les énergies fossiles, il ne s’agit pas de faire comme si ça n’avait pas existé il y a deux ans », glissait un négociateur, en amont du sommet.

Marges de manœuvre minces

Alors que le président brésilien a évoqué, jeudi, l’idée d’une « feuille de route » comprenant la sortie des énergies fossiles, les négociateurs français et européens peuvent jouer sur plusieurs leviers. Essayer de renforcer le vocabulaire diplomatique autour des CDN, plan d’action des parties et enjeu principal de cette COP ? Imaginer un mécanisme de suivi plus précis du « bilan mondial » de l’accord de Paris ? Glisser le terme « énergies fossiles » dans d’autres textes ? « L’idéal serait de ressortir de cette COP avec un engagement plus précis sur la façon dont tout le monde peut faire un peu plus », poursuit un autre négociateur.

De façon plus immédiate, Emmanuel Macron et d’autres dirigeants veulent agir contre les émissions de méthane, responsables d’un tiers du réchauffement climatique. « Cet objectif est essentiel dans notre combat. (…) Il est réalisable à moindre coût, en particulier dans le secteur énergétique, par des investissements qui permettent d’éviter les fuites », a déclaré le président français à la tribune, jeudi, tout en disant sa volonté de poursuivre des partenariats pour une transition énergétique juste afin d’accélérer la sortie du charbon. La France en a déjà signé avec l’Afrique du Sud, l’Indonésie, le Vietnam ou le Sénégal.

Mais, dans le contexte du retour de Donald Trump au pouvoir aux Etats-Unis, les marges de manœuvre des Français et des Européens sont très minces. « Sur l’atténuation, comme les négociations sont très ouvertes avec aucun texte prédéfini, il peut y avoir de l’espace, mais la question des financements reviendra tout de suite dans les débats », pronostique un membre de la délégation. Mercredi, les présidents de la COP30 et de la COP29 ont publié une feuille de route dite « de Bakou à Belem », afin de préciser comment l’enveloppe plus large de 1 300 milliards de dollars par an (soit environ 1 123 milliards d’euros) promise en 2035 aux pays en développement pourrait se concrétiser grâce au secteur privé. Mais beaucoup de pays du Sud veulent des engagements plus précis.

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Jeudi, Emmanuel Macron n’a pas évacué le sujet en évoquant le soutien de la France à une taxation de l’aviation d’affaires, tout en demandant un élargissement de la base des contributeurs pour que les aides de la Chine soient enfin comptabilisées dans l’enveloppe des pays développés. Le président de la République a aussi rappelé que la France consacrait un tiers de sa finance climat (7,4 milliards d’euros) à des projets d’adaptation. Pas anodin alors que les discussions sur cette thématique seront l’un des autres enjeux de la COP30. « Nous appelons la France à porter des positions réellement ambitieuses et porteuses de solutions, notamment à travers l’augmentation des financements nécessaires pour permettre une transition juste », a réagi Gaïa Febvre, responsable des politiques internationales au sein du Réseau Action Climat.

Enfin, la France espère pouvoir être active sur le front de la biodiversité, notamment en ce qui concerne forêts et océans. Mercredi, le chef de l’Etat a annoncé que le pays pourrait participer à hauteur de 500 millions d’euros au Tropical Forest Forever Facility, un fonds lancé par le président brésilien, et l’Elysée a renouvelé son « engagement en faveur du bassin du Congo », qui doit permettre d’apporter 2,5 milliards de dollars de financement aux pays qui abritent la deuxième forêt tropicale du monde. « La nature est surtout notre assurance pour adapter nos sociétés, créer des écosystèmes résilients, soutenir aussi nos agriculteurs, nos peuples autochtones, nos sociétés », a estimé M. Macron dans son discours. Des mots qu’aimeraient entendre les défenseurs de l’environnement lors des prises de parole du chef de l’Etat en France.

Positions internationales sur la COP30  (2 articles)

La vision chinoise, le combat américain contre la politique climat, la position de Macron 

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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