Les rejets carbonés devraient progresser de 1,1 % cette année, tirés par une hausse du charbon, du pétrole et du gaz.

Les émissions de CO₂ liées aux énergies fossiles continuent d’augmenter en 2025

Les rejets carbonés devraient progresser de 1,1 % cette année, tirés par une hausse du charbon, du pétrole et du gaz. Les émissions liées à la déforestation baissent, en revanche, selon le Global Carbon Project. 

Par Publié hier à 06h00, modifié hier à 09h24 https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/11/13/les-emissions-de-co-liees-aux-energies-fossiles-continuent-d-augmenter-en-2025_6653224_3244.html

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La plate-forme pétrolière offshore Esther dans le brouillard au large des côtes californiennes, vue depuis Seal Beach (Californie), aux Etats-Unis, le 11 novembre 2025.
La plate-forme pétrolière offshore Esther dans le brouillard au large des côtes californiennes, vue depuis Seal Beach (Californie), aux Etats-Unis, le 11 novembre 2025.  MIKE BLAKE / REUTERS

Le pic des émissions de dioxyde de carbone (CO2) n’est toujours pas en vue. Ce moment où elles atteindraient un maximum avant de décroître tarde à se concrétiser, repoussant d’autant la perspective d’un ralentissement de la crise climatique. Les rejets de CO2 d’origine fossile devraient ainsi établir un nouveau record en 2025, en hausse de 1,1 % par rapport à 2024, selon le vingtième bilan du Global Carbon Project, un consortium de plus de 130 scientifiques internationaux travaillant sur le cycle du carbone. Leurs résultats sont publiés dans les revues Earth System Science Dataet Nature, mercredi 12 et jeudi 13 novembre, au moment où les pays tentent de faire progresser la lutte contre le réchauffement climatique à la COP30 au Brésil.

Les émissions mondiales de CO2, principal gaz à effet de serre et première cause du dérèglement climatique, devraient atteindre 42,2 milliards de tonnes en 2025 – un chiffre stable par rapport à 2024, mais assorti d’incertitudes. La majeure partie provient des énergies fossiles, avec 38,1 milliards de tonnes. Les rejets carbonés de tous les combustibles fossiles sont en hausse : charbon, pétrole et gaz. Le reste est lié aux changements d’usage des terres, des émissions qui devraient diminuer en raison de la réduction de la déforestation, notamment en Amérique du Sud. Les rejets de CO2 totaux ont toutefois augmenté plus lentement ces dix dernières années (+ 0,3 % par an) que lors de la décennie précédente (+ 1,9 %).

« Avec des émissions de CO₂ fossiles toujours croissantes, ne pas dépasser 1,5 °C est désormais impossible, avertit Pierre Friedlingstein, climatologue à l’université d’Exeter (Royaume-Uni), qui a dirigé l’étude. Les dangereux impacts du changement climatique vont continuer à s’aggraver. » Ces dernières semaines, nombre d’institutions onusiennes ont également communiqué sur le dépassement imminent de cet objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris. Au rythme actuel des émissions de CO2, le réchauffement pourrait dépasser 1,7 °C dans douze ans et 2 °C dans vingt-cinq ans.

Progrès chinois

La géographie des émissions fossiles montre en 2025 des divergences par rapport aux tendances de long terme. En Chine (32 % du total mondial), les émissions devraient augmenter de 0,4 % par rapport à 2024, soit une croissance très inférieure à celle enregistrée au cours de la dernière décennie, et ce pour la deuxième année de suite. Les rejets pourraient en réalité même baisser, compte tenu de la fourchette d’incertitude des résultats (entre − 0,9 % et + 2,0 %). Une analyse pour le site Carbon Brief montre également un plateau des émissions chinoises depuis dix-huit mois.

Ces progrès s’expliquent par l’essor spectaculaire des énergies renouvelables, qui ont permis à la fois « d’absorber toute la croissance de la demande en électricité et de remplacer une partie du charbon », explique Jan Ivar Korsbakken, chercheur au Centre de recherche internationale sur le climat et l’environnement, sis à Oslo. « Les perspectives d’avenir sont très incertaines », prévient-il toutefois, en raison de la baisse des incitations économiques en faveur des renouvelables et de la croissance prévue du recours au charbon dans la chimie. Une partie des experts jugent néanmoins le pic chinois imminent.

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Les rejets carbonés devraient également marquer le pas en Inde. La hausse pourrait être de 1,4 %, loin du rythme de la dernière décennie (+ 3,6 %). « Cela m’a beaucoup surpris, affirme Philippe Ciais, directeur de recherche au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement. Une mousson précoce a conduit à beaucoup moins de vagues de chaleur et a peut-être réduit la climatisation. » La forte croissance du solaire a aussi limité celle du charbon.

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Les résultats américains et européens sont en revanche moins bons qu’à l’accoutumée. Concernant les Etats-Unis (13 % des émissions mondiales), les rejets carbonés devraient augmenter de 1,9 % en 2025, alors qu’ils baissaient globalement depuis vingt ans. En cause : davantage de chauffage lié à un hiver plus froid, un recours accru au charbon en raison de la hausse des prix du gaz, combinés à une progression de la demande en électricité.

Croissance de la demande énergétique

L’Europe, qui pèse 6 % des rejets mondiaux, devrait voir une stabilité de ses émissions (+ 0,4 %, avec une fourchette de − 2,1 % à + 2,8 %), contrairement aux baisses importantes ces dernières années. Malgré la poursuite de la réduction du charbon et l’essor du solaire, l’usage du gaz a augmenté pour le chauffage, en raison d’un mois de février relativement froid. Une baisse des émissions très modeste est attendue en France (− 0,8 %), là où il faudrait aller cinq fois plus vite pour tenir les objectifs climatiques.

Si la décarbonation des systèmes énergétiques progresse largement – en Chine, dans l’Union européenne (UE) ou aux Etats-Unis –, elle n’est pas assez rapide pour compenser la croissance de la demande énergétique.

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Une lueur d’espoir réside dans les émissions issues des changements d’usage des terres. Elles restent élevées mais ont diminué depuis leur pic dans la fin des années 1990, en particulier lors de la dernière décennie. Elles proviennent essentiellement de trois pays : le Brésil, l’Indonésie et la République démocratique du Congo. D’autres Etats sont parvenus à mener de larges politiques de reforestation, comme en Chine et dans l’UE.

L’état des puits de carbone est crucial, alors qu’ils absorbent la moitié des émissions de CO2 humaines – 29 % pour les océans et 21 % pour les forêts et les sols. Alors que le puits de carbone terrestre avait chuté en 2023 et 2024, sous l’effet des vagues de chaleur et des sécheresses liées au phénomène El Niño, « il devrait se rétablir cette année », avertit Corinne Le Quéré, climatologue à l’université d’East Anglia (Royaume-Uni). Pendant la dernière décennie, il a toutefois été amoindri par le changement climatique. « Ce dernier, combiné à la déforestation, transforme les forêts tropicales d’Asie du Sud-Est et d’une partie de l’Amérique du Sud de puits de carbone en sources de carbone », prévient-elle. Du CO2 qui s’accumule alors dans l’atmosphère, où il aggrave le changement climatique.

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Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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