Les actes et médicaments prescrits par des médecins non-conventionnés ne seront pas remboursés.

PLFSS : après le secteur 2, les députés s’attaquent au secteur 3

Quentin Haroche| 05 Novembre 2025 https://click.email.jim.fr/?qs=ef65768bc4194ae546f2efa6bc9f3028bff71fad30a6e2d8d4c1492ee61802555d710fccad71e50d21ae3406b201508b32404522eaffe411

Les députés ont voté un amendement au PLFSS prévoyant que les actes et médicaments prescrits par des médecins non-conventionnés ne seront pas remboursés.

Décidément, les députés semblent avoir une dent contre certains médecins libéraux. Dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2026 devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale la semaine dernière, ils sont ainsi voté plusieurs mesures pénalisantes visant les médecins de ville. Les praticiens du secteur 2, accusés de rendre plus difficile l’accès aux soins, ont particulièrement été pris pour cible, notamment via l’adoption de l’article 26 du PLFSS qui prévoit d’augmenter leurs cotisations sur les dépassements d’honoraires. Mais les parlementaires se sont également attaqués à des médecins qui seraient, en quelque sorte, encore plus fautifs : les praticiens en secteur 3.

Extrêmement peu nombreux (ils seraient, selon les derniers chiffres de la CNAM, seulement 927, soit moins de 1 % des praticiens en activité), les médecins de secteur 3 sont ceux qui ont refusé d’adhérer à la convention médicale. Ils sont ainsi libres de fixer leurs tarifs comme bon leur semble et n’ont aucune obligation envers la CNAM. En contrepartie, la Sécurité Sociale ne prend en charge qu’une partie dérisoire de leurs consultations, une somme appelé « tarif d’autorité » comprise entre 43 centimes et 1,22 euros (!) selon la spécialité et la ville d’exercice.

En revanche, les médicaments ou les actes médicaux prescrits par un médecin secteur 3 sont remboursés par l’Assurance Maladie, au même titre que ceux de n’importe quel praticien. C’est sur ce sujet que les députés entendent agir. En commission, ils ont adopté vendredi dernier un amendement à l’article 26 du PLFSS qui dispose que « les produits de santé, les actes et les prestations prescrits par les médecins » de secteur 3 « ne donnent pas lieu à remboursement par les organismes d’assurance maladie ». De quoi désinciter encore plus les patients de consulter ces médecins non-conventionnés. null

Les médecins de secteur 3 auront un an pour revenir dans la convention

Inspirée d’une proposition déjà formulée par la CNAM l’an dernier dans son rapport Charges et produits, l’amendement a été porté par un député de droite, Thibault Bazin, élu LR de Meurthe-et-Moselle et rapporteur du PLFSS. « Il y a un enjeu de responsabilisation des prescripteurs » explique-t-il dans l’exposé des motifs de l’amendement. « A l’heure où l’accès aux soins devient un combat dans de nombreux territoires, la réponse doit être collective et concertée : le conventionnement est le lien qui unit les médecins à la Sécurité Sociale qui finance leurs soins». nullnull

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L’amendement a globalement suscité peu de débats au sein de la commission, les députés l’adoptant largement. « Il apparaît cohérent que l’Assurance-maladie ne rembourse que les actes et prestations réalisées dans le cadre d’une relation conventionnelle entre le praticien et l’Assurance-maladie » a ainsi jugé le Dr Jean-François Rousset, député macroniste de l’Aveyron et lui-même co-auteur d’un rapport proposant d’encadrer davantage les dépassements d’honoraires

L’amendement prévoit que le déremboursement des actes prescrits par les médecins en secteur 3 ne prendra effet que le 1er janvier 2027. Le temps pour ces quelques brebis égarées de revenir dans le « droit chemin » et d’adhérer à la convention. « Il importe d’inciter beaucoup plus fortement les médecins à entrer dans cette démarche de conventionnement, ou à ne pas en sortir » explique Thibault Bazin.null

Le PLFSS poussera-t-il les médecins à se déconventionner ?

Si le député de Meurthe-et-Moselle se préoccupe du déconventionnement, qui constitue pourtant un phénomène assez mineur, c’est justement parce qu’il craint que les autres mesures portées par le PLFSS visant les médecins libéraux (et qu’il rejette) ne poussent des praticiens vers le secteur 3. Il estime ainsi que l’article 26 augmentant les cotisations sur les dépassements d’honoraires est « une invitation à se déconventionner et à sortir de l’Optam ». 

« On vous taxe les dépassements, on ne fait aucune différence que vous soyez conventionné ou pas ou entre ceux qui jouent la maîtrise des dépassements et qui font parfois seulement 15 % de dépassement sur 15 % de la patientèle » a déploré ce mardi le député lors d’un rendez-vous organisé par l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis). « Je suis persuadé que derrière une bonne intention, on va avoir des effets d’accélération du déconventionnement. Et qui paye à la fin ? Le patient». 

Le député estime par ailleurs que la hausse du recours aux dépassements d’honoraires par les médecins (56 % des spécialistes libéraux sont en secteur 2, contre seulement 37 % en 2000) s’explique par le gel des tarifs de certains actes. « Quand j’ai vu que l’appendicectomie n’avait pas évolué dans sa tarification depuis 20 ans, qu’un accouchement n’a pas évolué depuis 20 ans, je me suis posé des questions, il y a une forme d’hypocrisie de l’Assurance Maladie » plaide le député.

Le fait est cependant que, malgré le renforcement des contraintes visant les médecins libéraux, le déconventionnement reste un phénomène de niche. On se souvient que l’an dernier, alors que les négociations conventionnelles s’enlisaient, l’UFML du Dr Jérôme Marty avait lancé un appel au déconventionnement collectif. Mais alors que le syndicat revendiquait avoir collecté plus de 4 000 intentions de déconventionnement, le mouvement avait finalement avorté.

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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