PLF 2026 : point d’étape sur les dispositions environnementales adoptées
L’Assemblée nationale a suspendu, ce lundi, l’examen du projet de loi de finances pour 2026. Focus sur ce que les députés ont voté en matière d’environnement et comment le texte a évolué depuis son dépôt, le 14 octobre dernier.
Gouvernance | 04.11.2025 | https://www.actu-environnement.com/ae/news/plf-2026-environnement-ecologie-assemblee-nationale-amendements-adoptes-seance-publique-47032.php4

© HJBC – stock.adobe.comL’examen du projet de loi de finances 2026 est suspendu jusqu’au 12 novembre.
Opaque. C’est le qualificatif qui peut être retenu à propos de l’avenir du projet de loi de finances pour 2026 (PLF 2026) que le Gouvernement a déposé, le 14 octobre dernier, sur le bureau de l’Assemblée nationale. Depuis, le texte a été examiné par la commission des finances qui avait notamment rétabli les niches fiscales supprimées par le Gouvernement (zones, humides, biocarburants, eau à Mayotte) et supprimé la taxe sur les emballages en plastique que ce dernier proposait. Mais, le 23 octobre, la commission a rejeté la première partie (recettes) du texte contenant ces évolutions.
Depuis le 24 octobre, le texte du Gouvernement est examiné en séance publique et la représentation nationale devait procéder au vote solennel sur la première partie ce mardi 4 novembre. Mais, compte tenu de la lenteur de l’examen lié à l’instabilité politique, les députés n’ont atteint que l’article 12 du texte (1) . Son examen est suspendu pour laisser la place au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et ne reprendra que le 12 novembre. Le vote solennel sur cette première partie est repoussé au 17 novembre, tandis que le vote sur l’ensemble du texte est programmé pour le 24 novembre. Mais ce report du calendrier laisse planer un gros doute sur les possibilités d’adopter le budget dans les délais constitutionnels, l’Assemblée disposant de quarante jours pour se prononcer en première lecture, et le Parlement, dans son ensemble, d’un délai de soixante-dix jours.
« Finalement, sauf adoption surprise par le Parlement, deux scénarios se dessinent pour le budget 2026 », estime Alexandre Guigue, professeur de droit public, dans une analyse publiée par le Club des juristes (2) . L’absence de compromis avec les oppositions pourrait conduire au vote d’une motion de censure du gouvernement Lecornu. Dans ce cas, « seule l’adoption avant le 11 décembre d’une loi de finances partielle », portant sur les recettes, ou « l’adoption avant le 19 décembre d’une loi de finances spéciale autorisant la perception des impôts existants », comme l’année dernière, permettra à l’État de fonctionner au 1er janvier 2026. « Le deuxième scénario est celui de l’ordonnance », prévu par la Constitution à défaut du respect du délai de soixante-dix jours. Dans cette hypothèse, le Gouvernement peut retenir la version de son choix, et donc prendre en compte les amendements votés par les députés. Examinons par conséquent ceux adoptés en séance publique dans le champ de l’écologie.
Crédit d’impôt pour débroussaillement
L’Assemblée a adopté un amendement qui crée un crédit d’impôt pour dépenses de travaux dans le cadre de l’obligation légale de débroussaillement (OLD). Ce crédit d’impôt est égal à 50 % des dépenses retenues, dans la limite de 3 000 euros par foyer fiscal. S’il excède l’impôt dû, l’excédent est restitué au contribuable. « Il s’agit d’un dispositif simple, équitable, cohérent avec les objectifs du Beauvau de la sécurité civile, et qui permet d’éviter des dépenses opérationnelles et une prise de risque humaine pour la sécurité civile », a vanté la députée Sophie Pantel et ses collègues dans leur amendement.
Les députés sont par ailleurs revenus sur deux niches fiscales que le Gouvernement prévoyait de supprimer. La première porte sur l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des zones humides. « La mission d’information sur l’artificialisation des sols, conduite au sein de la commission du développement durable (…), souligne l’importance de conduire une politique strictement à l’inverse de cette mesure », a fait valoir Sandrine Le Feur, présidente de la commission du développement durable et auteur de l’un des amendements de rétablissement.
Rétablissement des niches fiscales sur les agrocarburants
La seconde niche fiscale porte sur le biocarburant B100, constitué à 100 % de biogazole, qui bénéficie au secteur du transport routier ou ferroviaire, et sur le superéthanol E85, contenant jusqu’à 85 % de bioéthanol. Pas moins de 32 amendements identiques ont été votés pour acter son rétablissement. Un vote immédiatement salué par les filières françaises des biocarburants. « Le maintien de la fiscalité actuelle répond à la raison d’être de ces filières : décarboner les transports tout en renforçant le pouvoir d’achat des automobilistes et la compétitivité des transporteurs, mais également contribuer à la souveraineté énergétique et alimentaire (protéines et huiles végétales, sucreries et amidonneries), au revenu agricole et au dynamisme industriel des territoires », saluent huit organisations, FNSEA en tête, dans un communiqué commun.
Suramortissement vert dans le domaine des transports
Dans le domaine des transports toujours, deux amendements impactent le dispositif de suramortissement destiné à accompagner la transition écologique des véhicules professionnels. Le premier restreint le bénéfice de ce dispositif aux véhicules utilisés en France, renvoyant à un décret le soin de préciser son application. « Ce dispositif généreux (…) fait l’objet de pratiques abusives, justifie l’amendement de Christine Pirès Beaune et de ses collègues : certaines entreprises françaises peuvent mettre à disposition, via des contrats de location, des véhicules bénéficiant de cette aide fiscale à des entreprises opérant à l’étranger. Ce détournement aboutit à une situation paradoxale où l’État français finance indirectement l’utilisation de véhicules propres hors de son territoire. »
Le deuxième amendement modifie le dispositif de suramortissement vert bénéficiant aux navires et aux bateaux de transport de marchandises ou de passagers afin de « soutenir les investissements dans des flottes réellement décarbonées, en accompagnant davantage la propulsion vélique et les petites et moyennes entreprises », indique l’amendement de Jimmy Pahun et de ses collègues.
En matière d’énergie, les députés ont adopté par ailleurs un amendement instaurant un crédit d’impôt pour les installations de panneaux photovoltaïques chez les particuliers résidant en Outre-mer. « Le 1er janvier 2014, le crédit d’impôt pour une installation solaire photovoltaïque a été supprimé. Il n’existe donc plus de crédit d’impôt ni de prime rénovation pour ces installations », ont justifié Élie Califer et ses collègues dans l’exposé de leur amendement.
Modification du régime fiscal des invendus alimentaires et textiles
Dans le domaine de l’économie circulaire, enfin, les députés ont adopté un amendement qui modifie le régime fiscal applicable aux invendus alimentaires afin de favoriser le don plutôt que la destruction. « Les dons demeurent déductibles à hauteur de 60 % dans la limite de 0,5 % du chiffre d’affaires ou de 20 000 €, puis à 25 % au-delà de ce plafond. À l’inverse, les destructions ne sont plus déductibles de l’impôt sur les sociétés, sauf lorsqu’elles sont considérées comme « justifiées » », explique l’amendement de Guillaume Garot et de ses collègues.
Un autre amendement supprime, en revanche, l’avantage fiscal accordé aux entreprises qui donnent leurs stocks de vêtements invendus lorsque leurs pratiques industrielles et commerciales ont pour conséquence la diminution de la durée d’usage ou de vie des produits neufs. « Ce régime (…) a créé un effet d’aubaine pour de grandes entreprises étrangères et françaises de fast fashion », justifient Anne-Cécile Violland et ses collègues dans leur amendement.1. Télécharger le texte résultant des délibérations à l’Assemblée nationale
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-47032-plf2016-assemblee-nationale.pdf2. Consulter l’analyse d’Alexandre Guigue
https://www.leclubdesjuristes.com/economie/lorganisation-de-la-discussion-du-projet-de-loi-de-finances-un-jeu-dequilibrisme-politique-12734/
Laurent Radisson, journaliste
Rédacteur en Chef de Droit de l’Environnement