L’impact du budget 2026 sur les plus pauvres aggrave leur situation alors que selon l’Insee le taux de pauvreté bat les records, chemin direct vers une dissolution et la victoire du RN qui ne viendra pas à leur secours .

Le locataire de Matignon n’est plus le même, mais les mesures concernant les plus pauvres ne sont guère différentes.

Pour la justice fiscale, sociale et écologique, le projet de budget 2026 doit être abandonné

Appel à rassemblement le 16 octobre à Paris

jeudi 16 octobre 2025, par  Attac France

Campagne > Un autre budget est vital !

Le projet de budget 2026 est austéritaire, injuste et inefficace, il doit être abandonné dans son ensemble. Dans les sondages, comme dans la rue, la majorité de la population rejette massivement la politique d’austérité menée et exige une véritable justice fiscale. Nous en sommes très loin.

Pour l’abandon de ce budget austéritaire et l’abolition des privilèges fiscaux et sociaux, préalables indispensables pour imposer une société juste, solidaire et démocratique, nous appelons à un rassemblement jeudi 16 octobre à partir de 18h à proximité de l’Assemblée nationale (RDV métro Invalides, angle rue Constantine et rue de l’Université).

Le projet de budget 2026 va aggraver les inégalités alors que le taux de pauvreté bat des records, et priver l’action publique (les écoles, les hôpitaux, les transports, le logement, etc) et les politiques climatiques de moyens essentiels, alors que les dividendes et patrimoines des grandes entreprises et des plus riches atteignent des records.

Ce budget va affaiblir profondément les services publics (suppression de plus de 3000 postes de fonctionnaires) et la protection sociale (doublement des franchises médicales, gel des prestations sociales). Cela va accroître la pauvreté et la précarité, et risque de créer une situation dont l’extrême droite ne peut que tirer profit.

Nous, organisations syndicales et associatives, refusons que l’effort pèse sur la population, notamment les précaires et victimes de discriminations qui en paieront le plus lourd tribut, tandis que les plus riches et les multinationales, bénéficiaires de baisses d’impôts et de cotisations sociales, continuent d’échapper à l’impôt et continuent de concentrer les richesses.

Pour l’abandon de ce budget austéritaire et l’abolition des privilèges fiscaux et sociaux, préalables indispensables pour imposer une société juste, solidaire et démocratique, nous appelons d’ores et déjà à participer à un rassemblement jeudi 16 octobre à partir de 18h à proximité de l’Assemblée nationale (RDV métro Invalides, angle rue Constantine et rue de l’Université). Nous nous y exprimerons pour porter nos analyses et revendications.

Ce rassemblement est organisé à l’appel de : 350.org, Attac France, Amis de la terre France, Egalités, Emmaüs France, Fondation Frantz Fanon internationale, Greenpeace France, FSU, Fondation Copernic, OST, Oxfam France, Solidaires finances publiques, Union syndicale Solidaires.

Les prises de parole permettront de mettre en évidence le caractère injuste, anti-écologique, sexiste et raciste de ce budget, et de présenter nos alternatives de justice fiscale :

  • Caroline Chevé, secrétaire générale de la FSU
  • Julie Ferrua, co-déléguée de l’Union syndicale Solidaires
  • Gabriel Malek, membre du Conseil fédéral des Amis de la Terre
  • Fanny Petitbon, responsable France de 350.org
  • Mireille Fanon-Mendès-France, Co-présidente de la Fondation Frantz Fanon internationale
  • Layla Abdelké Yakoub, responsable plaidoyer justice fiscale d’Oxfam France
  • Youlie Yamamoto, porte-parole d’Attac France

Budget 2026 : les domaines à risque pour les plus pauvres

Gel des prestations sociales, doublement des franchises médicales, fin des APL pour les étudiants extracommunautaires non boursiers, baisse des moyens pour le logement social… Le point sur les mesures qui auront un impact plus ou moins direct sur les ménages très modestes. 

Par  e… Publié le 17 octobre 2025 à 06h15, modifié le 17 octobre 2025 à 10h25 https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/10/17/budget-2026-les-domaines-a-risque-pour-les-plus-pauvres_6647542_3224.html

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Un usager de la caisse d’allocations familiales de Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), le 15 octobre 2025.
Un usager de la caisse d’allocations familiales de Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), le 15 octobre 2025. RAFAEL YAGHOBZADEH POUR « LE MONDE »

Trois mois après l’annonce par l’Insee d’une hausse record de la pauvreté en France en 2023, avec 15,4 % de la population concernée, les projets de lois de finances et de financement de la Sécurité sociale, rendus publics mardi 14 octobre, prévoient des mesures d’économies, qui risquent de faire encore augmenter le nombre et la part de personnes pauvres, et d’avoir un impact sur leur niveau de vie.

Si les crédits consacrés au pacte des solidarités, à l’aide alimentaire et à la lutte contre le sans-abrisme augmentent respectivement de 5 millions, de 10 millions et de 110 millions d’euros, la décision d’une « année blanche », consistant à geler les montants des prestations sociales indexées, a suscité de vives critiques des associations de lutte contre la pauvreté. Sont concernés le revenu de solidarité active (RSA) et la prime d’activité, les pensions de retraite, l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ex-minimum-vieillesse), l’allocation aux adultes handicapés (AAH), les aides au logement telles que les aides personnelles au logement (APL), les allocations familiales… Ce qui éviterait 3,8 milliards d’euros de dépenses.

Selon une étude, publiée en juin, du chercheur Pierre Madec à l’Observatoire français des conjonctures économiques, les plus pauvres seraient les plus affectés par cette absence de revalorisation, proportionnellement à leurs revenus, lesquels pourraient diminuer de près de 1 %. « Ce gel accentue le décrochage progressif des aides, met, par ailleurs, en perspective Christophe Robert, délégué général de la Fondation pour le logement (ex-Fondation Abbé Pierre). Le revenu minimum d’insertion représentait 41 % du smic à sa création, en 1988, contre 33 % pour le RSA aujourd’hui. Et, ces quinze dernières années, les APL ont augmenté deux fois moins vite que les loyers. »

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En plus du gel, le projet de budget prévoit de fermer l’accès aux APL aux étudiants étrangers extracommunautaires non boursiers. Or, parmi ces 266 000 personnes, originaires pour moitié d’Afrique, à 22 % d’Asie et d’Océanie et à 8 % du continent américain, très peu bénéficient des bourses sur critères sociaux versées par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires. Ce qui s’explique par des conditions restrictives : avoir une carte de séjour ou un statut de réfugié reconnu par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, tout en étant domicilié en France depuis au moins deux ans et en attestant d’un foyer fiscal de rattachement. Si la mesure de leurs ressources est complexe, compte tenu des transferts familiaux, ces étudiants sont toutefois surreprésentés parmi ceux qui se trouvent en grande précarité. « Le gouvernement veut désormais les mettre à la rue, commente le syndicat L’Union étudiante. Ce n’était pas déjà suffisant de leur imposer, à travers le plan Bienvenue en France des frais d’inscription jusqu’à 16 fois plus élevés que ceux de leurs homologues européens ? »

Le risque du renoncement au soin

L’une des mesures du projet de budget de la Sécurité sociale concentre les inquiétudes : le doublement des franchises médicales. Ces sommes, déjà doublées en 2024, restent à la charge des assurés sur les boîtes de médicaments, les actes paramédicaux, les transports sanitaires, ou encore les consultations chez le médecin – on parle alors de participation forfaitaire. Avec le risque du renoncement au soin, pour des raisons financières, particulièrement dans les catégories sociales défavorisées.

« On met le doigt dans un engrenage à contresens de la solidarité, dénonce Féreuze Aziza, à France Assos Santé, la principale fédération d’associations de patients. Et ce sont demain ceux qui ont le plus besoin de soins qui devront contribuer le plus. »

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Le gouvernement l’assure : la mesure doit épargner « les plus démunis », puisque 18 millions d’assurés sont exonérés de ces franchises. Parmi eux, les femmes enceintes, les mineurs et les 7,4 millions de bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S), financée par l’Etat pour les personnes disposant de très faibles ressources. Mais à peine plus de la moitié (56 %) des populations éligibles ont recours à cet équivalent de mutuelle, selon les statistiques nationales. Sans compter qu’un malade peut ne pas être éligible à la C2S, tout en étant très proche du seuil de pauvreté, rappelle-t-on dans les rangs de France Assos Santé.

« Les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés sont souvent juste au-dessus des plafonds qui permettent l’exonération des franchises et leur accès aux complémentaires est compliqué, observe Arnaud de Broca, président du Collectif Handicaps, qui regroupe 54 associations du secteur. Passer de 2 euros à 4 euros, ça a l’air anecdotique, mais pour des personnes dont les revenus vont être gelés, cela correspond à des montants importants. »

L’insertion par l’activité économique n’est pas épargnée

Certaines mesures plus spécifiques risquent d’avoir des répercussions encore mal évaluées pour les personnes handicapées, déjà plus touchées par la pauvreté que l’ensemble de la population. Ainsi, l’AAH, qui était, à certaines conditions, soumise au même abattement que les revenus professionnels pour toucher la prime d’activité, ne le sera plus, ce qui « contribuera à appauvrir les travailleurs en situation de handicap », selon le collectif interassociatif Alerte. La mesure pourrait aboutir à une économie de 225 millions d’euros pour l’Etat en année pleine. Les indemnisations perçues après des accidents ou des agressions devraient, elles, désormais être déduites des allocations personnalisées d’autonomie (APA) ou des prestations de compensation du handicap (PCH) versées par les départements.

Malgré la priorité donnée ces dernières années à l’emploi, les mesures d’économie n’épargnent pas l’insertion par l’activité économique (IAE). Elle verrait son budget amputé de 200 millions d’euros (− 14 %), ce qui conduirait à accompagner 60 000 personnes de moins, dont « la majorité vivent au-dessous du seuil de pauvreté au moment de leur entrée dans le parcours », met en avant un communiqué signé par les 10 réseaux du collectif national IAE.

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D’autres décisions auront un impact moins direct, mais réel, sur les plus modestes. L’Union sociale pour l’habitat, qui fédère les organismes HLM, a calculé que si le budget est voté en l’état, ses membres auront « 750 millions d’euros de moyens en moins pour entretenir, rénover et construire » des logements sociaux, lesquels permettent de se loger grâce à des loyers bien inférieurs à ceux du marché. La baisse des moyens accordés aux associations, notamment les 20 millions d’euros de moins en soutien de la politique de la ville, mise en place dans les quartiers pauvres, pèsera aussi.

Le budget prévoit d’augmenter les taxes payées par les étrangers lors de leurs démarches administratives

C’est une mesure grâce à laquelle le gouvernement espère récupérer 160 millions d’euros mais qui vaut plus pour sa dimension symbolique, car elle vise uniquement les ressortissants étrangers assujettis à une taxe ou un droit de timbre dans le cadre d’une délivrance de titre de séjour. Soit environ 1 million de personnes, selon les données de 2023 de la direction générale des étrangers en France (certains étrangers sont exemptés, à l’instar des mineurs, des réfugiés, des saisonniers ou encore des Algériens).

Si le budget est adopté, les étrangers devront payer, pour une demande de carte de séjour (ou son renouvellement), 350 euros de taxe et droit de timbre additionnés (contre 225 euros aujourd’hui), et 150 euros en cas de tarif minoré (contre 75 euros aujourd’hui). Pour un visa de régularisation, le tarif passerait de 200 euros à 300 euros (auquel s’ajoute ensuite la taxe de délivrance du titre). Pour demander la nationalité, le coût passera de 55 euros à 255 euros.

Le gouvernement prévoi, en outre, de créer une taxe de 40 euros pour les demandes d’échange d’un permis de conduire étranger contre un permis français. « Ces modifications visent à aligner les montants des droits de timbre perçus en France sur les montants médians constatés au sein des pays de l’Union européenne », justifie le gouvernement. D’après un rapport parlementaire de 2019, de la députée (non inscrite) du Maine-et-Loire Stella Dupont, ces taxes et droits de timbres ont rapporté un peu moins de 200 millions d’euros en 2017. L’élue estimait alors que la France se situait « dans une fourchette haute des tarifs pratiqués par les pays européens ».

Nicolas Duvoux, président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté, appelle à « revoir le projet de budget 2026 »

Dans un entretien au « Monde », le sociologue à la tête de l’organe consultatif rattaché à Matignon s’inquiète notamment de l’impact du gel des prestations sociales pour les personnes précaires, après une hausse record du taux de pauvreté. 

Propos recueillis par Claire AnéPublié le 17 octobre 2025 à 13h00, modifié le 17 octobre 2025 à 15h14 https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/10/17/nicolas-duvoux-president-du-conseil-national-des-politiques-de-lutte-contre-la-pauvrete-appelle-a-revoir-le-projet-de-budget-2026_6647755_3224.html

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Nicolas Duvoux, président du conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, à Nancy, le 30 septembre 2023.
Nicolas Duvoux, président du conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, à Nancy, le 30 septembre 2023.  CEDRIC JACQUOT/« L’EST RÉPUBLICAIN »/MAXPPP

Alors que l’Insee a publié, le 7 juillet, des chiffres inquiétants, le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE), rattaché à Matignon, a été chargé cet été par le premier ministre de l’époque, François Bayrou, de réfléchir à un objectif de réduction de la pauvreté à dix ans. Pourtant, avec le budget 2026, présenté mardi 14 octobre, « la pauvreté va mécaniquement s’aggraver de façon encore plus marquée », alerte le président de l’organe consultatif, le sociologue Nicolas Duvoux.

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L’Insee a annoncé le 7 juillet que 650 000 personnes ont basculé dans la pauvreté en 2023, et que le taux de pauvreté a atteint 15,4 %, un niveau inédit en presque trente années de mesure. Ces chiffres vous ont-ils surpris ?

Nous n’avons pas été surpris par la tendance. En effet, la pauvreté monétaire progresse depuis les années 2000, alors qu’elle avait considérablement diminué en cinquante ans, grâce à la montée en puissance des régimes de retraite obligatoires. En revanche, nous ne nous attendions pas à une hausse aussi spectaculaire entre 2022 et 2023, pour atteindre près de 9,8 millions de personnes en situation de pauvreté. Autre surprise : le niveau élevé du taux de pauvreté en conditions de vie, qui mesure des privations matérielles et sociales, depuis 2022. Il ne s’agit donc pas d’une variation annuelle.

Quelle a été la réaction des pouvoirs publics à ces chiffres inédits ?

J’ai entendu un grand silence, probablement lié au contexte d’instabilité politique et au fait que le premier ministre d’alors, François Bayrou, s’apprêtait à annoncer ses orientations budgétaires, en dramatisant la situation des déficits et de la dette. Cette quasi-disparition du sujet de la pauvreté est inquiétante, conjuguée aux mesures insuffisantes voire défavorables prises ces dernières années : les revalorisations du revenu de solidarité active [RSA] et des allocations pour le logement [APL] n’ont ainsi pas suffi à couvrir l’augmentation des dépenses des ménages modestes, notamment due à la forte inflation des prix de l’alimentation ; il y a eu la loi Kasbarian, qui a provoqué une hausse des expulsions locatives, la loi « plein-emploi », qui sanctionne les allocataires du RSA qui ne justifieraient pas de quinze heures d’activité hebdomadaire…

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Les associations de lutte contre la pauvreté ont néanmoins fait état d’un engagement pris par François Bayrou, quand il les avait reçues quelques jours avant la publication des chiffres de l’Insee.

En effet. L’ancien premier ministre était pressé par le collectif Alerte [qui regroupe 87 associations] de se conformer à un article de loi de 2008, qui prévoit que le gouvernement se dote d’un objectif quantifié de réduction de la pauvreté sur cinq ans. Lors d’une rencontre le 3 juillet, M. Bayrou a annoncé que notre instance, le CNLE, mènerait cette réflexion. La lettre de mission qui m’a été adressée le 13 août précise qu’il s’agit d’établir un objectif « chiffré, crédible et volontaire » de réduction de la pauvreté à dix ans, doublé d’une analyse sur les moyens d’y parvenir. C’est le signal, ténu, d’une prise de conscience des pouvoirs publics. Je leur adresse aujourd’hui ce message : pour que cette future trajectoire soit crédible, il est nécessaire d’agir dès maintenant, et de revoir le projet de budget 2026.

En quoi le texte actuel vous inquiète-t-il ?

Les données et analyses de l’Insee ont montré que l’arrêt des mesures exceptionnelles et la revalorisation insuffisante des prestations sociales en 2023 ont contribué à la hausse de la pauvreté. Or, le projet de budget 2026 prévoit de geler ces prestations. Les plus modestes seraient les plus affectés par un tel gel, proportionnellement à leurs revenus. La pauvreté va mécaniquement s’aggraver de façon encore plus marquée.

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Les mesures d’économies en matière de santé inquiètent aussi. Beaucoup de personnes éligibles à la complémentaire santé solidaire n’en ont pas fait la demande, et seront donc concernées par la baisse des remboursements des médicaments, consultations de médecins et de dentistes et des transports sanitaires.

S’ajoute à cela que 2026 sera la première année pleine d’application des sanctions à l’encontre des bénéficiaires du RSA qui ne justifieraient pas de quinze heures d’activité hebdomadaires, ce qui risque d’accentuer le non-recours à cette prestation, déjà élevé [30 % des bénéficiaires potentiels n’en font pas la demande].

Que préconisez-vous pour revoir le projet de budget ?

Le CNLE appelle de longue date à revaloriser les prestations sociales « de survie » que sont le RSA et les APL. Il faut au minimum les sanctuariser – c’est-à-dire les revaloriser à hauteur de l’inflation – dans le budget 2026. Cela représente environ 800 millions d’euros, d’après l’Observatoire français des conjonctures économiques, un montant qui est à notre portée, et finançable par le biais du projet de taxation de patrimoine. L’objectif de lutte contre la pauvreté est fédérateur, il doit devenir une priorité de toutes les forces politiques.

Quand et comment le CNLE définira-t-il une trajectoire de réduction de la pauvreté ?

La lettre de mission demande de rendre nos premières préconisations en juin 2026, à l’issue d’une large concertation, en nous appuyant sur les administrations et deux délégations interministérielles (prévention et lutte contre la pauvreté, hébergement et accès au logement). Nos membres – élus, associations, syndicats, patronat et personnes concernées par la pauvreté – ont exprimé leur mobilisation, leur vigilance et leur exigence. Le CNLE doit construire les conditions d’une réorientation de l’action publique, étayée par des données objectives.

Notre instance pourra s’appuyer sur ses constats. Ils ont montré que la baisse du chômage n’a pas permis, comme escompté, de faire baisser la pauvreté. Et aussi que la pauvreté est multidimensionnelle. Elle est liée à des difficultés d’accès multiples : aux droits, aux services publics, à la santé, au logement, à une alimentation de qualité… elle s’accompagne de sanctions à l’encontre des personnes, qui constituent une maltraitance institutionnelle, mise en évidence par ATD Quart Monde. Ce sont des atteintes à la dignité. Elles sont très mal vécues, d’autant que s’y ajoutent un manque d’attention et des discours stigmatisants.

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En quoi consisterait la réorientation envisagée ?

Il faut rompre avec la tendance actuelle à renvoyer la responsabilité de la pauvreté sur les personnes elles-mêmes : notre responsabilité est collective. Nous avons besoin d’un changement de discours, et de mesures transversales, au-delà des prestations sociales et des mesures d’accompagnement ciblées : agir sur les retraites, l’assurance-chômage, l’éducation, la lutte contre le changement climatique, le coût du logement, ce qui passe aussi par la création de logements très sociaux. Combattre la pauvreté est un moyen de combattre le populisme. Et c’est un marqueur de notre degré de civilisation.

Claire Ané

Voir aussi:

Injustice 

Budget 2026 : les plus précaires mis à très forte contribution par le gouvernement

Réservé aux abonnés

Gel de quasiment toutes les prestations sociales, doublement des franchises médicales… Les projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale contiennent une quantité de mesures qui vont affecter le niveau de vie des plus précaires. Et ce alors que le taux de pauvreté atteint des records en France.

Pour les plus précaires, comme Sandrine, 30 ans, en résidence sociale à Thiais, le budget du gouvernement Lecornu prévoit de soumettre la quasi-totalité des prestations sociales au gel des montants et des plafonds de ressources.
Pour les plus précaires, comme Sandrine, 30 ans, en résidence sociale à Thiais, le budget du gouvernement Lecornu prévoit de soumettre la quasi-totalité des prestations sociales au gel des montants et des plafonds de ressources. (Olivier Jobard/© Olivier Jobard / MYOP)

ParAnne-Sophie Lechevallier

Publié le 18/10/2025 à 20h47. https://www.liberation.fr/economie/budget-2026-les-plus-precaires-mis-a-tres-forte-contribution-par-le-gouvernement-20251018_DHXAIZFKVNE37NNFVFPDBSR6KM/

«Il n’est pas trop tard pour faire machine arrière», écrivaient les quelque 80 associations de solidarité regroupées dans le collectif Alerte à François Bayrou le 17 juillet, deux jours après la présentation des intentions budgétaires de l’ancien Premier ministre. Elles s’inquiétaient dans cette lettre des conséquences de nombreuses mesures d’économies visant les plus précaires, à commencer par l’année blanche. Elles n’étaient pas les seules. Une «injustice crasse»,tonnait par exemple le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Boris Vallaud, dans Libération.

Trois mois plus tard, les alarmes et les indignations n’y auront rien changé. Le locataire de Matignon n’est plus le même, mais les mesures concernant les plus pauvres ne sont guère différentes. Dans les projets de loi de finances (PLF) et celui de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour l’an prochain,  (Suite abonnés…)

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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