« Bonjour M. Bernard Arnault, la fébrilité n’autorise pas la calomnie. »(Gabriel Zucman)

CA FAIT DU BIEN DE LIRE ÇA.

Claude Mathieu 

LA RÉPONSE FOUDROYANTE DE GABRIEL ZUCMAN A BERNARD ARNAULT:

« Bonjour M. Bernard Arnault, la fébrilité n’autorise pas la calomnie. Les milliardaires ne paient pas ou presque d’impôt sur le revenu et 86% des français ont raison de vouloir mettre fin à ce privilège.

M. Arnault, j’ai été très surpris par le caractère caricatural de vos attaques. Vos propos me visant sortent du domaine de la rationalité et sont sans fondement.

Essayons de reprendre un peu de mesure. Contrairement à ce que vous affirmez, je n’ai jamais été militant dans aucun mouvement ni encarté dans aucun parti. Je n’ai pour seule activité que mon travail de chercheur et d’enseignant, en tant que professeur des universités à l’Ecole normale supérieure et à Berkeley

Depuis plus de 17 ans mon travail consiste à cartographier la richesse des grandes fortunes A étudier les paradis fiscaux Et à objectiver les techniques d’évasion fiscale et d’optimisation des grandes fortunes

Mes travaux sur la mondialisation et la redistribution font référence et sont reconnus partout dans le monde En parlant de « pseudo compétence universitaire », vous vous attaquez à la légitimité même d’une recherche libre de toute pression financière

Venant de l’un des hommes les plus riches du monde et dans un contexte où les libertés académiques sont remises en cause dans un nombre grandissant de pays, cette rhétorique — guère éloignée de celle d’un Trump ou d’un Musk — devrait tous nous inquiéter

Le constat sur lequel je me fonde — que les milliardaires paient très peu d’impôt sur le revenu proportionnellement à leur revenu — a été établi de façon indépendante et objective par les travaux de l’Institut des Politiques Publiques en France

Ainsi que par de nombreuses autres équipes de recherche aux Pays-Bas, au Brésil et aux Etats-Unis entre autres pays. M. Arnault : niez-vous ce constat ? En outre les grandes fortunes ont vu leur patrimoine exploser ces 30 dernières années. Selon Challenges, en 1996, le patrimoine des 500 plus grandes fortunes s’élevait à 80 milliards d’euros, soit 6,4% du PIB de l’époque. En 2024 : 1228 milliards d’euros, soit 42 % du PIB.

Mais ces grandes fortunes ne contribuent pas aujourd’hui à hauteur de ce qui est demandé aux autres catégories sociales — patrons de PME, salariés, cadres, etc. L’impôt plancher de 2% que je défends vise à corriger cette anomalie. Cette mesure ne concernerait que les foyers fiscaux possédant plus de 100 millions d’euros de patrimoine, au nombre de 1 800 environ. Elle est soutenue par de nombreux économistes de renommée internationale au-delà des clivages partisans. Sept Prix Nobel d’économie la soutiennent

Tous ces économistes veulent-ils aussi, selon vous, abattre l’économie de marché ? Sont-ils des militants d’extrême gauche aux « pseudo-compétences universitaires » ?

Cette mesure permettrait simplement de s’assurer que les milliardaires contribuent aux charges communes à la même hauteur que les autres citoyens : Principe fondamental d’égalité devant l’impôt affirmé par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 Cette mesure est plébiscitée par une écrasante majorité de Français (86%).

L ’impôt plancher est un instrument de justice, d’apaisement social et de stabilité budgétaire. Plus vite on l’adoptera, plus vite on débloquera la situation budgétaire.

M. Arnault : votre opposition caricaturale à nos principes d’égalité fondamentaux, inscrits dans notre Constitution, constitue une attaque contre notre contrat social.Quoi que vous en pensiez : le temps est venu de soumettre les milliardaires à un taux minimal d’imposition. »

Gabriel Zucman

L’envers du décor:

La France « prison fiscale » : quand l’économiste néolibéral et prix Nobel d’Economie, Philippe Aghion, interpellait Gabriel Zucman sur son projet de taxeinformation

fournie par BOURSORAMA AVEC MEDIA SERVICES •13/10/2025 à 17:23

Désigné co-lauréat du Nobel d’Economie 2025, l’économiste français Philippe Aghion s’est illustré par ses travaux sur la croissance et l’innovation. Ses positions ont été confrontées en septembre dernier à Gabriel Zucman sur la question de la taxation des plus riches.

Philippe Aghion, au Collège de France de Paris, le 8 juin 2021 ( AFP / ERIC PIERMONT )

Le Nobel d’économie 2025 a été décerné lundi 13 octobre à un trio, composé de l’Américano-israélien Joel Mokyr, du Canadien Peter Howitt, et du Français Philippe Aghion. Ce dernier, ponte du concept de « destruction créatrice », a exhorté l’Europe à investir dans l’innovation pour ne pas se laisser décrocher par la Chine et les Etats-Unis, dans sa première prise de parole en tant que prix Nobel.

Ecrivain et chroniqueur économique, Philippe Aghion s’est notamment illustré récemment sur la scène économique pour son opposition au projet de « taxe Zucman » appliquée à la seule sphère nationale, mettant en avant les risques de décrochage économique qu’une telle mesure pourrait engendrer dans le pays. Le journal Les Echos rapporte ainsi les propos d’un débat animé, organisé le 17 septembre dernier lors du « France Digitale Day », auquel ont pris part Philippe Aghion et Gabriel Zucman, défenseur de la contribution spéciale de 2% demandée aux plus riches.

Ne pas rater la nouvelle « révolution »

« On partage avec Gabriel le souci de ce qu’on souhaiterait, une économie prospère et redistributive », avait noté en préambule Philippe Aghion. « Le seul problème que j’ai avec le dispositif que propose Gabriel, c’est que ça inclut l’outil de travail. Est-ce que c’est juste de taxer un patrimoine professionnel dont la valorisation est très volatile et non réalisée? Si l’objectif est vraiment de contrer l’optimisation fiscale, qui passe beaucoup par le cantonnement des profits au sein de holdings patrimoniales, pourquoi viser des start-ups à forte valorisation mais pas encore profitable? », avait-il notamment demandé.

« Je ne voudrais pas que la France manque la révolution de l’IA parce que nous décourageons des gens comme Arthur Mensch ou d’autres », avait-il encore abondé, en référence au cas du fondateur de la licorne Mistral AI, valorisée à plus de 12 milliards d’euros mais pas encore cotée sur les marchés.

Relancé sur le sujet, Gabriel Zucman répond mentionnant l’exemple de Bill Gates à l’occasion de la création de Microsoft en 1975, alors soumis à de forts taux marginaux d’imposition. « Avec un impôt de 2% sur les grandes fortunes, on parle simplement de demander aux centi-millionaires de ne pas payer moins que le reste de la population. C’est difficile de voir quelque chose dans l’expérience historique ou internationale qui laisserait penser que ça va conduire à une forme de baisse de la croissance ou de l’investissement », fait-il valoir, avant que Philippe Aghion n’insiste sur un projet de taxe inapplicable à l’échelle nationale, préférant s’attaquer à l’utilisation « abusive » des holdings.

« Tu vas transformer la France en prison fiscale et tu vas faire tomber l’attractivité de la France »

« Là il y a un vrai sujet, je pense qu’il faut le traiter !. Il y en en France une utilisation abusive des holdings familiales ou patrimoniales pour échapper à l’impot sur les successions et sur le revenu. Mais (les Etats-Unis) n’ont jamais eu la taxe dont tu parles ! », rétorque Philippe Aghion, et surenchérit :

« Tu ne peux pas faire ta taxe Zucman en France seulement. Tu ne peux faire ta taxe que si tu la fais au niveau européen. Un des grands acquis des 10 dernières années, c’est que l’attractivité de la France a augmenté pour les investisseurs étrangers. (Si) tu mets ta taxe uniquement en France, tu vas transformer la France en prison fiscale et tu vas faire tomber l’attractivité de la France. Donc tu ne peux faire ça qu’au niveau européen ».

Zucman conteste le débat sur « l’illiquidité » des richesses

« Tout le débat, c’est dans les cas rares mais réels où de très grandes fortunes ne génèrent pas encore de liquidités. Comment s’assurer que les personnes puissent payer, c’est un débat important et il y a un tas de modalités dont il faut parler », admet pour sa part Gabriel Zucman. Mais « si vous avez un milliard, vous avez une capacité contributive. Vous ne pouvez pas sortir de la société. Il y a un moment où quand vous êtes à ce niveau de richesse, vous devez être dans le champ de la solidarité nationale », juge t-il, prenant ses distances avec le débat sur « l’illiquidité », et des richesses virtuelles qui ont a des « conséquences extrêmement réelles ».

« L’argument que la richesse n’existe pas et il n’y a que le revenu qui existe, il est faux ! », ajoute t-il. « Le dispositif que je propose, c’est pas le grand soir fiscal, c’est pas faire payer les riches, c’est pas décourager l’entrepreneuriat, ça n’a rien à voir avec ça ! C’est de mettre en conformité nos lois fiscales avec le principe fondamental d’égalité devant l’impôt, plaidant pour un « mécanisme correctif » de taux minimum.

Le débat extraits:

https://youtu.be/pVHZqCPUoLI?si=nEYtnl0KjKLTuwlR

Le débat intégral

https://www.youtube.com/watch?v=6pUgHTqctF0

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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