Suicide d’un médecin conseil de l’assurance maladie du Bas-Rhin

« Je n’en peux plus » : la Caisse d’Assurance maladie jugée après le suicide d’une médecin

En décembre 2023, une médecin-conseil de l’Assurance maladie s’est suicidée en sautant du quatrième étage du Service médical du Bas-Rhin. Poursuivie pour homicide involontaire, la Caisse d’Assurance maladie a été jugée jeudi 9 octobre. Selon l’inspection du travail, la situation n’a pas été gérée « correctement ». 

La Caisse d’Assurance maladie a été jugée jeudi 9 octobre 2025 par le tribunal correctionnel de Strasbourg (Bas-Rhin) après le suicide d’une médecin-conseil en décembre 2023. Photo d’illustration.
La Caisse d’Assurance maladie a été jugée jeudi 9 octobre 2025 par le tribunal correctionnel de Strasbourg (Bas-Rhin) après le suicide d’une médecin-conseil en décembre 2023. Photo d’illustration. | EDDY LEMAISTRE / ARCHIVES OUEST-FRANCE

Ouest-France avec NewsGene

Publié le 10/10/2025 à 16h23 https://www.ouest-france.fr/societe/faits-divers/je-nen-peux-plus-la-caisse-dassurance-maladie-jugee-apres-le-suicide-dune-medecin-934c55fa-a5e2-11f0-997b-872c19911d86?fbclid=IwT01FWANXKldleHRuA2FlbQIxMAABHoYBOUtacZtWyONZUIdPNPKYtRQVP4kVMeslJTtadsM1_Jnh4X3Otg_hdsWH_aem_g1jqaKOgop7cCUeE2TziAg

La Caisse d’Assurance maladie a été jugée jeudi 9 octobre 2025 par le tribunal correctionnel de Strasbourg (Bas-Rhin) pour homicide involontaire après le suicide d’une médecin-conseil en décembre 2023, rapporte L’Alsace. Elle s’est défenestrée du quatrième étage du Service médical du Bas-Rhin.

Le procureur a dénoncé une « déshumanisation » des conditions de travail entraînée par une réorganisation en 2019 privilégiant la performance. « Je n’arrive pas à m’améliorer, je n’arrive pas à m’intégrer, je n’en peux plus. Je craque, je vous demande pardon », a écrit la victime sur son ordinateur avant de mettre fin à ses jours.

« Elle ne reconnaissait plus son métier »

Mère de trois enfants, la femme était revenue au sein de la Caisse d’Assurance maladie en mai 2023 après l’avoir quittée en 2016. Mais « elle ne reconnaissait plus son métier », selon une ancienne collègue citée par nos confrères.

De son côté, un porte-parole de la CNAM a affirmé que des changements ont été mis en place pour soutenir cette médecin « exigeante et perfectionniste » (réduction des consultations, assistance d’une collègue…). Mais d’après l’inspection du travail, la situation n’a pas été gérée « correctement ». Le procureur a requis une amende de 50 000 €, le jugement sera rendu le 13 novembre 2025.

Suicide d’une médecin-conseil : la CPAM jugée pour homicide involontaire

La caisse d’Assurance maladie du Bas-Rhin a été jugée, jeudi 9 octobre, par le tribunal correctionnel de Strasbourg pour homicide involontaire après le suicide d’une médecin-conseil. Le verdict est attendu le 13 novembre. 

13/10/2025 https://www.egora.fr/actus-pro/judiciaire/suicide-dune-medecin-conseil-la-cpam-jugee-pour-homicide-involontaire?utm_source=Newsletter&utm_medium=gms_egora&utm_campaign=En_bref___lundi_13_octobre_2025&utm_medium=gms_egora&utm_source=email&utm_campaign=2025-10-13-enbref20251013&sc_src=email_4658871&sc_lid=179939871&sc_uid=XYBlorZBtz&sc_llid=17832&sc_eh=5d463c22601bc0401

 Par Chloé Subileau

tribunal

Le 12 décembre 2023, une médecin-conseil de l’Assurance maladie du Bas-Rhin a mis fin à ses jours en se défenestrant du service médical, à Strasbourg. Elle avait laissé un mot sur son clavier d’ordinateur, confiant ne pas arriver à s’améliorer et à s’intégrer : « Je n’en peux plus. Je craque, je vous demande pardon. »

Une enquête sur les conditions entourant ce drame avait été ouverte en interne, tandis que le parquet de Strasbourg avait saisi l’inspection du travail, rapportent LesDernières Nouvelles d’Alsace. Le 9 octobre, la caisse d’Assurance maladie était ainsi jugée par le tribunal correctionnel de Strasbourg pour homicide involontaire.

Selon nos confrères, la médecin-conseil était mère de trois enfants. Elle avait travaillé comme médecin-conseil auprès de la direction régionale entre 2008 et 2016. Elle s’était ensuite tournée vers le libéral, puis la médecine du travail avant de devenir médecin collaboratrice à l’établissement français du sang. « Mais en sept ans, les conditions de travail avaient changé », peut-on lire dans le quotidien régional. « A partir de 2019, tout a été réorganisé pour de la performance entraînant une perte d’autonomie et de sens au travail« , d’après le procureur.

50 000 euros d’amende requis

Ainsi, quand la médecin est revenue auprès de la caisse d’Assurance maladie en 2023, elle n’a plus reconnu son métier. « Il y avait une surcharge de travail, des logiciels de travail pas adaptés… La réorganisation a tout cassé« , confie notamment une ancienne collègue.

Du côté de la caisse d’Assurance maladie, on assure pourtant avoir mis en place des solutions pour améliorer les conditions de travail de la médecin. « Une technicienne a renoncé à ses journées de télétravail pour l’assister, le nombre de ses consultations a été réduit, une alerte a été donnée par sa manageuse« , a détaillé Me Georges Holleaux, avocat de l’établissement, lors de l’audience.

L’inspection du travail estime, de son côté, que « l’établissement est passé à côté d’une situation grave et n’a pas traité l’alerte correctement ». D’autant que, juste avant son suicide, la victime avait reçu un nouveau planning, accroissant sa charge de travail, notent nos confrères.

A l’issue de l’audience, 50 000 euros d’amende ont été requis. Le verdict est attendu le 13 novembre prochain.

[avec Les Dernières Nouvelles d’Alsace]

Auteur de l’article

Chloé Subileau

Cheffe de la rubrique étudiants

Commentaires de Geneviève Henault (Psychiatre des hôpitaux)

Geneviève Henault • Psychiatre à l’hôpital public

Suicide à la Caisse d’Assurance maladie : « Je n’arrive pas à m’améliorer, je n’arrive pas à m’intégrer, je n’en peux plus. Je craque, je vous demande pardon » écrit une médecin avant de se défenestrer du quatrième étage du Service médical du Bas-Rhin.

Le procureur dénonce ici une « déshumanisation » des conditions de travail.

Le management aveuglement tourné vers la recherche de performance au détriment de la soutenabilité des conditions de travail entraîne des morts au travail.

La « charte pour la santé mentale au travail » lancée en grande pompe il y a quelques semaines par le Gouvernement (1) aura-t-elle quelque effet sur les méthodes de management qui tuent les salarié·es ? A suivre…

_________________________________________________________________

Il y a 1 mois Geneviève Henault

(1) https://lnkd.in/epbpvrct et https://lnkd.in/ep2aMX6F

La labellisation de la « Grande cause nationale santé mentale » dévoile de plus en plus clairement ses véritables intentions.

Après que Yannick NEUDER ait annoncé que le pseudo-plan psychiatrie ne comportait aucun investissement supplémentaire pour la discipline – pourtant reconnue par tous les acteurs très insuffisamment financée (1), le Gouvernement lance la première charte pour la santé mentale au travail (2). Et là, on ne peut plus entretenir le déni collectif : améliorer la « santé mentale » des Français, ça n’a strictement rien à voir avec une quelconque attention portée à notre santé.

❝ Le Gouvernement invite les entreprises à s’engager pour faire de la santé mentale un levier de performance durable et de bien-être collectif ❞

Il s’agit bien de soigner notre économie en assurant l’adaptation de l’individu aux exigences de performance et de productivité (3)

Faut-il y voir aussi, comme Arnaud Goulliart le propose, une volonté de « mental-washing » ? (4) Chacun·e appréciera l’effet hautement ambigu – pour ne pas dire provocateur – de cette néo-expression.


(1) Neuder, le 11 juin 2025 à propos de la hashtag#psychiatrie « on peut aussi mieux s’organiser avec ce qu’on a aujourd’hui » 👉 https://lnkd.in/ek-6Hujg
Et 👉 https://lnkd.in/eitTeP4N
(2) https://lnkd.in/ep2aMX6F
(3) Mathieu Bellahsen sur France Culture le 7 mai dans l’émission « Santé mentale : le mal du siècle ? »: « La santé mentale est aujourd’hui largement instrumentalisée par les logiques néolibérales : elle est devenue un marché, soutenu par des politiques publiques qui abandonnent les soins au profit du diagnostic et de l’évaluation, et qui laissent les institutions censées accueillir les plus vulnérables dans un état de défaillance dramatique. Ce cadre, promu lors des assises de 2021 par des groupes comme France Biotech, sert les intérêts du capital en adaptant les individus aux exigences de performance et de productivité, plutôt qu’en les aidant à se soigner véritablement. Il faut se méfier de cette santé mentale-là, qui fait disparaître les humains au profit de modèles numériques ou managériaux, et oublie que le soin exige des personnes humaines, des relations et du temps. »
🎧 https://lnkd.in/e6As-hHq
(4) https://lnkd.in/eSCgx758

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

Laisser un commentaire