Date de publication : 18 septembre 2025https://www.mediscoop.net/index.php?pageID=a7a539d783098df1ae98cc081df838bc&id_newsletter=22447&liste=0&site_origine=revue_mediscoop&nuid=44baf5968540a6248a8065e80f2f7273&midn=22447&from=newsletter
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Hélène Vissière observe dans Le Figaro qu’« une réunion d’un important comité responsable de la politique vaccinale aux États-Unis se tient ces jours-ci à Atlanta. Elle pourrait avoir un impact majeur sur la vie de millions d’Américains ».
La journaliste indique ainsi qu’« on s’attend à ce que les experts de ce panel, chargés de conseiller les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), la plus grosse agence américaine de santé publique, modifient les directives sur le vaccin contre l’hépatite B. Jusqu’ici administré aux nourrissons, il pourrait désormais n’être injecté qu’à partir de l’âge de 4 ans ou encore être réservé aux seuls bébés nés de mères infectées. Un changement qui, selon les pédiatres, risque d’entraîner une recrudescence du nombre de cas ».
Hélène Vissière ajoute que « les médecins craignent aussi que les membres du comité, tous nommés par le ministre de la Santé, Robert F. Kennedy, ne limitent l’accès aux vaccins contre le Covid ainsi qu’à celui contre la rougeole, les oreillons, la rubéole et la varicelle combinés ».
La journaliste relève que « depuis sa nomination, Robert Kennedy, le neveu de JFK, a opéré une transformation radicale du ministère de la Santé. Il a limogé des milliers d’employés, réduit des programmes de lutte contre le cancer, l’infarctus et l’empoisonnement par le plomb, supprimé des millions de subventions à la recherche médicale… ».
« Cet hiver, alors que plusieurs États subissaient la plus grosse épidémie de rougeole depuis 30 ans et que deux enfants non immunisés sont morts, RFK a préféré vanter les mérites de la vitamine A et de l’huile de foie de morue comme traitement, plutôt que la vaccination », continue Hélène Vissière.
Elle note que « plus de 800 anciens et actuels employés du ministère ont signé une lettre l’accusant d’être «complice du démantèlement des infrastructures américaines de santé publique» et de propager «de manière répétée des informations erronées» ».
Hélène Vissière explique que « sa grande priorité est de refaçonner le système de vaccination. Après avoir remplacé tous les experts du comité sur les politiques d’immunisation par des alliés, pour certains antivax, il a demandé à la directrice des CDC de «préapprouver» leurs recommandations et de licencier certains hauts responsables de l’agence ».
« Le Dr Susan Monarez, en place depuis un mois, a refusé de céder à ses pressions qui allaient à l’encontre de «l’intégrité scientifique». Elle a été mise à la porte. […] Dans la foulée, quatre autres cadres ont démissionné en marque de protestation, ce qui a plongé les CDC dans le chaos », observe la journaliste.
Elle ajoute que « l’autre grande priorité de RFK est de «rendre à l’Amérique sa santé» (« Make America healthy again »). Le mouvement Maha […] veut limiter les maladies chroniques en s’attaquant aux industries agroalimentaires et pharmaceutiques ainsi qu’en promouvant une meilleure qualité de vie sans pesticides, additifs dans la nourriture et autre malbouffe ».
Hélène Vissière note en outre que « le corps médical craint maintenant que Robert Kennedy ne s’attaque aux entreprises pharmaceutiques. Il pourrait durcir la procédure d’approbation pour faire traîner les tests et décourager les laboratoires d’investir dans la recherche vaccinale »
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Le plan de Robert Kennedy Jr pour « rendre sa santé à l’Amérique » épargne les aliments gras, salés et sucrés, omniprésents aux Etats-Unis
La stratégie, très attendue par la communauté scientifique, se veut une réponse au déclin de la santé des enfants américains. Mais aucune mesure n’est prévue pour diminuer la présence d’aliments nocifs dans les assiettes ou l’imprégnation de la population par les produits chimiques.
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Le pays le plus riche du monde rend ses enfants malades, en a conscience, et ne compte pas faire grand-chose pour y remédier. C’est la conclusion qui s’impose à la lecture de la « stratégie MAHA », « Make America Healthy Again »(« Rendre sa santé à l’Amérique »), publiée mardi 9 septembre par Robert Kennedy Jr, le ministre de la santé de Donald Trump.
Le document de 20 pages était attendu par toute la communauté scientifique aux Etats-Unis. Il devait répondre à un rapport accablant publié au printemps par la même administration, qui décrivait par le menu « la sombre réalité du déclin de la santé des enfants américains ». Les données sont effarantes et les courbes sont toutes à la hausse : 40 % des 73 millions d’enfants américains (moins de 18 ans) ont une maladie chronique (asthme, allergies, obésité, maladies auto-immunes, troubles du comportement…).
La prévalence des cancers, du diabète, des maladies mentales est en hausse, l’espérance de vie est en baisse. Un chiffre résume le problème : dans la première puissance militaire mondiale, seul un jeune sur quatre (17 à 24 ans) serait apte à servir dans l’armée.
Quatre causes principales sont identifiées dans le rapport : une alimentation globalement déplorable, une exposition trop grande aux produits chimiques, un manque d’activité physique, et une surmédication. Les trois premières font relativement consensus aux Etats-Unis. La quatrième est beaucoup plus discutée parce que si elle dénonce le pouvoir beaucoup trop grand des laboratoires pharmaceutiques, elle sert aussi et surtout à justifier une croisade antivaccination, qui infuse dans le pays.
Nombreux renoncements
Le rapport avait provoqué un électrochoc au printemps. La publication du plan d’action a fait nettement retomber les attentes. Il comporte quelques avancées et de nombreux renoncements en rase campagne, notamment en matière d’alimentation. Le document annonce des mesures pour bannir les colorants synthétiques dans les produits vendus en supermarché, ce qui réjouit les experts. Il prévoit également une actualisation des exigences concernant les laits infantiles.
En revanche, le cœur du sujet, à savoir l’omniprésence des produits ultratransformés, trop gras, trop sucrés, trop salés, dans le régime des enfants, n’est pas abordé de front. Le rapport se contente d’annoncer une réflexion sur la définition exacte de ces aliments, un recul face aux grandes compagnies alimentaires qui dominent le marché américain.
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Les enfants aux Etats-Unis tirent environ 70 % de leurs calories des produits ultratransformés, selon les chiffres de la Food and Drug Administration. Et l’habitude perdure à l’âge adulte. Une étude menée par l’ONG Nourish Science, en partenariat avec Harvard et l’école de médecine de l’université de Californie San Francisco, montre qu’« aux Etats-Unis, plus de 86 % des Américains ont une alimentation de mauvaise qualité et près de la moitié ont une alimentation de très mauvaise qualité ».
Marion Nestle, professeure de nutrition et de santé publique à la New York University, y voit deux raisons principales. Le prix d’abord : « Ces produits sont beaucoup moins chers que les produits moins transformés, pour le nombre de calories qu’ils apportent. » La publicité ensuite : « Il y a eu énormément de marketing pour essayer de convaincre les gens que ces aliments sont appropriés. Ils sont formulés pour être absolument délicieux et irrésistibles. Les gens ne peuvent pas arrêter de les manger. C’est le but. »
La patte des lobbys
Autre sujet mis de côté par le rapport, la présence de pesticides et autres produits chimiques dans les aliments. Donald Trump veut à tout prix éviter de froisser les géants de l’agriculture aux Etats-Unis, très présents dans beaucoup d’Etats acquis à sa cause. La déception est profonde pour certains au sein du mouvement MAHA. David Murphy, directeur financier de la campagne présidentielle de Robert Kennedy Jr en 2024, cité par le Wall Street Journal, voit la patte des lobbys « introduits à la Maison Blanche qui court-circuitent intentionnellement la promesse de campagne que Trump a fait à des millions d’électeurs MAHA, qui l’ont aidé à revenir au pouvoir. »
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Robert Kennedy, émanation de la nébuleuse MAHA, est devenu l’incarnation de toutes ces ambiguïtés. Le fils de « Bobby » Kennedy et neveu de « JFK », détonne dans le paysage ministériel du second mandat de Donald Trump. Ancien démocrate, ex-avocat environnementaliste reconnu, complotiste chevronné, antivax notoire, il est l’un des seuls membres de l’administration à avoir une existence politique propre, quand les autres sont principalement des créatures trumpiennes.
L’abandon de sa candidature en 2024 et son ralliement au futur président ont pesé lourd dans la campagne. En retour, Donald Trump le traite comme un allié de premier plan et a promis de lui laisser une grande marge de manœuvre pour appliquer son programme, notamment sur la santé des enfants. La publication de cette stratégie porte néanmoins le sceau d’une reprise en main présidentielle.
Errements condamnés
Les scientifiques, de leur côté, condamnent les errements de Robert Kennedy Jr, notamment sur la question de la vaccination infantile, qui devrait faire l’objet d’un nouveau « cadre » à venir, selon le rapport. Robert Kennedy a suggéré à plusieurs reprises que ces injections pourraient avoir une responsabilité dans l’augmentation du cas d’autisme aux Etats-Unis, ce que les études ne montrent pas. Beaucoup de membres des agences de santé américaines ont été écartés ces derniers mois, à commencer par la directrice des Centres de prévention et de lutte contre les maladies, Susan Monarez, qui a refusé de se plier aux vues du ministre de la santé en la matière.
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Certains experts lui savent gré dans le même temps d’avoir mis la question de la santé et de l’alimentation des enfants sur le devant de la scène, avec son mouvement. « Je pense que ce que MAHA représente est une sorte de tournant aux Etats-Unis, une reconnaissance d’à quel point nous sommes malades », estime Jerold Mande, PDG de l’ONG Nourish Science, professeur de nutrition à Harvard et ancien secrétaire adjoint à la sécurité alimentaire sous Barack Obama. Dans une Amérique de plus en plus polarisée, ce constat est l’un des seuls à transcender les clivages partisans.