Loin des stratégies claires attendues, la commission de Bruxelles a des propositions ambivalentes sur l’avenir de l’automobile.

Automobile : un dialogue (stratégique) de sourds à Bruxelles

La Commission européenne a poursuivi son dialogue stratégique sur l’automobile, vendredi 12 septembre. Confrontée à des demandes contradictoires des parties prenantes, elle répond par des propositions ambivalentes. Loin des stratégies claires attendues.

Transport  |  16.09.2025  |  

https://www.actu-environnement.com/ae/news/dialogue-strategique-automobile-volet-trois-46779.php4#ntrack=cXVvdGlkaWVubmV8Mzg0OQ%3D%3D%5BNDExMDgz%5DN. Gorbatko

Envoyer par e-mail

Automobile : un dialogue (stratégique) de sourds à Bruxelles

© hcastSi les ventes de véhicules électriques progressent en Europe, une partie des constructeurs réclament toujours un assouplissement de l’interdiction de la vente des véhicules thermiques en 2035.

Plus que jamais, en matière de stratégie pour l’automobile, Ursula von der Leyen roule sur une ligne de crête. D’un côté, la présidente de la Commission européenne subit la pression d’une partie des constructeurs qui lui réclament avec insistance un report ou un assouplissement de l’interdiction de la vente des véhicules thermiquesen 2035. De l’autre, elle affronte les partisans de la voiture électrique – constructeurs, fabricants de batteries et autres gestionnaires de réseau – dont Charge France, qui l’incitent à « tenir bon » pour ne pas favoriser un retard impossible à rattraper ensuite face à la Chine.

« Renoncer dès 2025 à nous confronter sérieusement aux enjeux de la transition vers l’électrification, c’est acter la disparition de l’industrie automobile européenne avant 2035 », prévenait en août dernier sur Linkedin, le fondateur et P-DG du fabricant de batteries Verkor, Benoit Lemaignan. « Personne n’a plus d’enjeux dans le succès de la mobilité zéro émission que les constructeurs automobiles européens », assure pour sa part Ola Källenius, président de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (European Automobile Manufacturers Association, ACEA), également P-DG de Mercedes-Benz. Mais selon son association, un cadre politique mal « adapté à la réalité », en matière de CO2 pour les voitures et les camionnettes et des objectifs inatteignables, conduirait à un déclin brutal du secteur, à un gel des investissements et à des licenciements massifs.

Des réponses floues

Dans l’attente de conditions plus favorables, autrement dit d’aides à la hauteur, notamment pour les camions et les camionnettes, une énergie bon marché et des infrastructures de recharge suffisamment abondantes, ces constructeurs, majoritairement allemands mais récemment rejoint par Stellantis, réclament une révision des contraintes actuelles. Prise en ces deux feux, Ursula von der Leyen louvoie.

Mercredi 10 septembre, dans son discours sur l’État de l’Union, celle-ci vantait la réussite de la révision, en mai dernier, du règlement sur les émissions des véhicules en 2025, lissées sur trois ans. Un modèle qui « fonctionne », a-t-elle alors souligné, avant de confirmer le réexamen, le plus tôt possible, dès 2025, des règles prohibant la vente des véhicules à moteur thermique à l’horizon 2035, « en nous fondant sur le principe de neutralité technologique. » 

L’électrique en léger recul

En France, selon la Chambre syndicale des importateurs d’automobiles et de motocycles (CSIAM), les ventes de véhicules électriques neufs ont chuté de 6,6 % au premier semestre 2025, comparées aux ventes du 1er semestre 2024).

Une annonce confirmée à Bruxelles deux jours plus tard, devant les professionnels et les parties prenantes du secteur, à l’occasion du troisième dialogue stratégique sur l’automobile, mais sans préciser la nature et l’amplitude des mesures : simple aménagement ou réel retour en arrière. Parmi les options possibles figure notamment l’inclusion dans les solutions des véhicules hybrides rechargeables. Ils émettraient pourtant, selon la fédération d’ONG transport & Environment, cinq fois plus de CO2 en moyenne que ce que les tests officiels indiquent.

L’électrique toujours valorisé

Pourtant, les constructeurs automobiles européens, hormis Mercedes, sont sur la bonne route pour respecter leurs objectifs de baisse des émissions de CO2 entre 2025 et 2027, rapporte Transport & Environment. Sur les sept premiers mois de l’année, les ventes de voitures électriques des groupes européens auraient progressé de 38 %. « Alors que la technologie transforme la mobilité et que la géopolitique remodèle la concurrence mondiale, il ne peut y avoir de statu quo », indique la Commission. Mais sur quelle base ?“ Nous ne pouvons pas laisser la Chine et les autres concurrents s’emparer de ce marché, qu’on le veuille ou non, l’avenir sera électrique ”Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne

Dans son discours sur l’état de l’Union, la présidente de la Commission avait également insisté sur la nécessité de travailler avec l’industrie à la construction de voitures abordables et de petite taille : environnementales, économiques et européennes. « Parce que nous ne pouvons pas laisser la Chine et les autres concurrents s’emparer de ce marché, qu’on le veuille ou non, l’avenir sera électrique », avait-elle ajouté.

Lors du dernier dialogue stratégique, les discussions ont ainsi porté sur les textes règlementaires en discussion ou en cours de maturation, comme le verdissement des flottes automobiles, approuvé notamment par l’Union française de l’électricité (UFE), mais aussi, très largement, sur l’innovation : sur la sécurisation du « leadership » européen dans les véhicules électriques, sur le développement des véhicules connectés et autonomes et sur le renforcement de l’industrie européenne de la fabrication de batteries, notamment.

Les partenariats en renfort

Autant de secteurs dans lesquels « les entreprises de l’Union risquent de prendre du retard sur des technologies stratégiques clés », redoute la Commission. Selon la Chambre syndicale des importateurs d’automobiles et de motocycles (CSIAM), les fabricants européens de batteries seraient en effet « encore loin de pouvoir répondre à la demande de tous les constructeurs » en la matière. Vendredi 12 septembre, un protocole d’accord a donc été signé pour associer plusieurs programmes européens, tous liés à l’automobile électrique : le partenariat « 2Zéro », dévolu au transport routier à émissions nulles, le partenariat CCAM, spécialisé dans la mobilité connectée, coopérative et automatisée, et le partenariat BATT4EU, axé sur l’innovation dans la chaîne de valeur des batteries.

Dans la foulée, une Alliance européenne pour les véhicules connectés et autonomes (Ecava) a par ailleurs été lancée, afin de renforcer la coopération entre les parties prenantes et déterminer les priorités d’investissement : pour le développement des logiciels nécessaires, du matériel, des modèles d’intelligence artificielle ou des écosystèmes. Dans ce domaine, l’Europe accuse un net retard par rapport aux États-Unis. Une première réunion devrait se tenir le mois prochain sous la houlette de la vice-présidente exécutif, Henna Virkkunen. En août dernier, Benoit Lemaignan plaidait pour une stratégie « lisible, pragmatique et assumée ». Des progrès restent à faire en la matière.

Nadia Gorbatko, journaliste
Rédactrice spécialisée

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

Laisser un commentaire