Aux quatre coins de la France, la presse quotidienne régionale se fait l’écho de fermeture partielle de services hospitaliers, d’urgences, et de lignes SMUR.


La fermeture partielle des urgences l’été se banalise

Jean-Bernard GervaisAUTEURS ET DÉCLARATIONS 

6 août 2025 https://francais.medscape.com/voirarticle/3613196?ecd=WNL_mdplsfeat_250902_mscpedit_fr_etid7684551&uac=39940PJ&impID=7684551

Comme chaque été désormais, l’accès des patients aux urgences médicales est tendu. Dans certains départements, comme dans le Calvados (14), à compter du 1er juillet 2025, les patients qui pensent avoir besoin des urgences devront obligatoirement passer par le SAMU pour pouvoir s’y rendre. Dans d’autres régions, les services d’urgences ferment partiellement. Ces mesures estivales prises pour pallier le manque de soignants urgentistes pourraient se pérenniser – une situation que regrettent citoyens et professionnels de santé. Témoignages.

Hôpital vide / parking fermé

« J’étais avec ma fille à Aix-en-Provence. Nous avons mangé dans un restaurant proche de notre domicile, puis elle a eu une réaction allergique. J’ai dû rentrer pour lui administrer un traitement adapté. Ma fille ayant des allergies alimentaires, elle dispose de la médication nécessaire, notamment une injection d’adrénaline en cas de choc anaphylactique. Après l’injection, une surveillance hospitalière de 6 à 7 heures est recommandée afin de vérifier le risque de récidive, ce qui m’a conduit aux urgences. À mon arrivée, l’hôpital était vide et le parking fermé. Trois infirmières des urgences pédiatriques m’ont informée que les urgences et l’hôpital étaient fermés, sauf pour les situations vitales. Elles ont pris les constantes de ma fille et nous ont orientées vers l’hôpital Nord de Marseille », témoigne Anaïs Doal, qui vient de lancer un mouvement citoyen pour la réouverture des urgences pédiatriques. Elle ajoute, dans la même vidéo vue plus de 20 000 fois, que « d’autres parents ont vécu la même situation que moi. Il y a même des parents qui ont perdu leurs enfants dans des situations similaires ».

Filtrage, faute de personnels

De fait, comme chaque année depuis deux ans, les services d’urgence des hôpitaux sont ouverts partiellement, certains fermant même en nuit profonde, de minuit à huit heures, d’autres le week-end. Ce qui a le don d’irriter le Pr Antoine Pelissolo, qui a publié un billet de blog sur la question.* « Cet été (et parfois jusqu’à octobre), de nombreux services d’urgence ne sont pas accessibles directement le soir et la nuit. Il faut appeler le 15 avant de s’y rendre, ce qui permet une « régulation » ; en gros un filtrage, faute de personnels pour recevoir tout le monde. C’est le cas par exemple de plus de la moitié des services d’urgence en Bretagne, dont le CHU de Rennes, rien que ça… D’années en années, les pénuries exceptionnelles deviennent la norme », se désole le psychiatre (chef de service au CHU Henri-Mondor, Créteil). Pour autant, certaines pathologies s’aggravent durant la période estivale : « Nous voyons par exemple en ce moment beaucoup de troubles psychiatriques qui semblent aggravés et plus nombreux lors des canicules, avec aussi plus d’agressivité et de violences. De plus, en période de congés beaucoup de centres de consultation et de cabinets sont fermés, avec des risques d’interruptions de suivis. »

Pérennisation en Loire-Atlantique

Mais il semblerait que les directions hospitalières, par manque de personnel, n’aient pas d’autre choix que de fermer partiellement les services d’urgence. En Loire-Atlantique (44), ce dispositif de régulation des urgences a été pérennisé à compter du 15 juillet dernier : « Au regard des résultats positifs issus de l’évaluation de ce dispositif, l’Agence Régionale de Santé (ARS) Pays de la Loire, sur proposition des établissements de santé publics et privés accueillant des urgences en Loire-Atlantique, et après concertation avec les représentants de la médecine libérale et l’ADOPS44 d’une part et les représentants des usagers du système de santé d’autre part, a décidé de reconduire et de pérenniser ce dispositif de régulation nocturne de l’accès aux urgences à compter du 13 juillet 2025 pour une durée de 3 ans. »

Fermeture partielle dans tout l’Hexagone

Aux quatre coins de la France, la presse quotidienne régionale se fait l’écho de fermeture partielle de services hospitaliers. « Les urgences de l’hôpital de la Côte fleurie (14) seront fermées du samedi 26 juillet à 9 h au dimanche 27 juillet à 9 h. Une unité mobile hospitalière paramédicale sera opérationnelle », nous apprend actu.fr du pays d’Auge. « Lundi 28 juillet, de 9 à 21 heures, les urgences de la clinique Esquirol Saint-Hilaire (47) ne pourront pas accueillir de patients, pour cause de fermeture. Depuis plusieurs semaines, le service est contraint de fermer, « dans un contexte de difficultés de recrutement médical » et « en raison d’un personnel médical insuffisant », rapporte Sud-Ouest. « Dès ce mercredi 23 juillet 2025 et jusqu’au 31 août, les urgences de l’hôpital privé Saint-Martin, à Caen (14), seront fermées la nuit, entre 20 h et 8 h », informe encore une fois Ouest-France. « Le centre hospitalier de Landerneau (29) avait déjà prévenu du fort risque de ne pouvoir assurer les accueils de nuit de ses Urgences, du 11 juillet au 24 août 2025.  En dépit des efforts menés pour un remplacement, le CH réorganise temporairement le fonctionnement du service des urgences. Il sera fermé ce samedi 21 juin, de 20 h jusqu’à 8 h 30, le dimanche 22 juin », détaille le Télégramme .

En visite au Samu de Paris ce 22 juillet, le ministre délégué à la Santé Yannick Neuder a pour sa part vanté l’activité des services d’accès aux soins (SAS), qui permet d’éviter des hospitalisations dans 30 à 40 % des cas. Il a également jugé que la situation aux urgences était « plutôt maitrisé ». Un avis que ne partage pas le Pr Pelissolo : « Nous ne pouvons pas tolérer cette situation, tout doit être mis en œuvre pour renforcer les services d’urgence et les hôpitaux en général, en commençant par améliorer les conditions de travail des personnels pour favoriser leur recrutement et leur fidélisation. »

Campagne nationale d’information à l’attention du public

Signe de la pérennisation de ces mesures de filtrage et de fermeture, le gouvernement a jugé bon de lancer le 16 juillet une campagne nationale sur l’accès aux soins pour l’été dans l’objectif de « sensibiliser aux bons gestes afin de faciliter la prise en charge des soins non programmés ».

Cette campagne vise à sensibiliser aux bons gestes afin de faciliter la prise en charge des soins non programmés et de permettre à chacun une prise en charge adaptée à ses besoins. Elle rappelle les étapes pour orienter les patients: solliciter son médecin traitant en première intention; si celui-ci n’est pas disponible, le recours à la carte des lieux de soins, disponible sur Santé.fr; et si aucune offre n’est disponible, l’appel au 15 avant de se rendre aux urgences.

Détail du mode d’accès aux services d’Urgences de plusieurs départements français.

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LIENS

Antoine Pelissolo

Vers Wikipedia Antoine Pelissolo

*Urgences… à temps partiel

13 juillet 2025 https://www.antoinepelissolo.com/blog/urgences-a-temps-partiel

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Cet été (et parfois jusqu’à octobre), de nombreux services d’urgence ne sont pas accessibles directement le soir et la nuit. Il faut appeler le 15 avant de s’y rendre, ce qui permet une « régulation » ; en gros un filtrage, faute de personnels pour recevoir tout le monde.
C’est le cas par exemple de plus de la moitié des services d’urgence en Bretagne, dont le CHU de Rennes, rien que ça… D’années en années, les pénuries exceptionnelles deviennent la norme.

Pourtant, les maladies graves et les accidents de santé ne s’arrêtent pas pendant les vacances… Bien au contraire, notamment lors des pics de chaleurs, de plus en plus nombreux. Nous voyons par exemple en ce moment beaucoup de troubles psychiatriques qui semblent aggravés et plus nombreux lors des canicules, avec aussi plus d’agressivité et de violences. De plus, en période de congés beaucoup de centres de consultation et de cabinets sont fermés, avec des risques d’interruptions de suivis.

Certes, le Service d’accès au soins (SAS), adossé aux centres 15 du Samu, joue un rôle important pour trouver d’autres solutions de consultation quand cela est possible, mais ces restrictions d’accès aux urgences, encore impensables il y a 10 ans, représentent une défaillance majeure de notre système de santé, avec des risques non négligeables de pertes de chances pour certains patients.
Nous ne pouvons pas tolérer cette situation, tout doit être mis en oeuvre pour renforcer les services d’urgence et les hôpitaux en général, en commençant par améliorer les conditions de travail des personnels pour favoriser leur recrutement et leur fidélisation.

Voir aussi:

https://environnementsantepolitique.fr/2025/09/04/les-urgences-en-aquitaine-le-manque-de-lits-daval-provoque-un-effet-bouchon-qui-allonge-la-duree-de-passage-aux-urgences/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/09/04/reponse-des-praticiens-hospitaliers-daction-praticiens-hopital-aph-a-la-federation-hospitaliere-de-france-fhf-emanation-des-ca-des-hopitaux-publics/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/09/03/la-fhf-hopitaux-publics-appelle-a-des-choix-clairs-et-a-des-financements-adaptes/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/08/30/encore-des-cliniques-privees-lucratives-qui-pratiquent-des-fermetures-perlees-de-leurs-urgences-non-sanctionnees-par-lars/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/08/21/lobligation-de-passer-par-le-15-pour-acceder-aux-urgences-regulation-dite-perenne-de-lacces-aux-urgences-a-ete-un-echec-en-mayenne-hopitaux-des-laval-c/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/07/29/crise-des-urgences-le-ministere-prefere-minimiser-lampleur-de-la-crise-la-situation-actuelle-est-plutot-maitrisee/

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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