« Dans un contexte de canicule et de pénurie record de lits d’hospitalisation, aggravée par des fermetures estivales massives, le Gouvernement affirme que la situation est sous contrôle »

Urgences : les syndicats dénoncent une situation intenable

Quentin Haroche| 20 Août 2025 https://click.email.jim.fr/?qs=b02ac8d77385de2cbd376e14201d1a4098b2663688076b966a6ebd090c37e45b869d86d4c44bc391757f0ed3f838096fca1d5b50fe4c9a0ef352e9cd5228d7e2

Dans un communiqué particulièrement offensif, les deux principaux syndicats d’urgentistes rapportent l’épuisement des équipes et affirment entrer en résistance contre le gouvernement.

La tension continue de monter entre le gouvernement et les urgentistes qui, comme chaque été, s’opposent quant à la gravité de la situation aux urgences. Malgré les nombreuses alertes des syndicats, qui rapportent les grandes difficultés des services d’urgences, en manque d’effectifs, pour prendre en charge l’intégralité des patients, situation aggravée cette année par la canicule, l’exécutif préfère en effet minimiser la situation. Le ministre de la Santé Yannick Neuder a ainsi affirmé le 22 juillet dernier que « la situation actuelle aux urgences est plutôt maitrisée ». 

Une petite phrase qui est très mal passée chez les syndicats. Dans un communiqué commun publié ce lundi, les deux principaux syndicats d’urgentistes, Samu Urgences de France (SUdF) et l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), répondent au ministre et dénoncent « des conditions d’exercice des urgentistes pour l’été 2025 qui ne sont plus tenables». 

« Dans un contexte de canicule et de pénurie record de lits d’hospitalisation, aggravée par des fermetures estivales massives, le gouvernement affirme que la situation est sous contrôle.
Pourtant, pour SUdF et l’AMUF, la surcharge des services d’urgence encore ouverts et l’épuisement des équipes médico-soignantes atteignent des niveaux alarmants » écrivent les deux syndicats. null

Jusqu’à 96 heures de travail par semaine pour les urgentistes

Ils dénoncent notamment les horaires éreintants du personnel soignant. Certains urgentistes seraient ainsi contraints « d’enchaîner jusqu’à 96 heures hebdomadaires » alors même que la réglementation européenne limite la durée du temps de travail hebdomadaire à 48 heures. A ce titre, reprenant le combat mené depuis plusieurs années par les syndicats d’internes, les urgentistes affirment que nombreux sont les hôpitaux qui ne respectent toujours pas l’obligation de décompter fidèlement le temps de travail des soignants, malgré le rappel à l’ordre effectué par le Conseil d’Etat en 2022. 

Au-delà du problème de ces horaires intenables, les syndicats estiment que les urgentistes ne sont pas suffisamment rémunérés pour ces heures supplémentaires, qui sont payées selon « un forfait horaire de 33,76 € brut au-delà de 48 h, inférieur au taux horaire de base d’un praticien de premier échelon et loin des promesses présidentielles d’alignement avec le privé ». 

Pour illustrer leur propos, les syndicats prennent l’exemple du service des urgences du centre hospitalier d’Agen, « au bord de la rupture ». « Les urgentistes du Centre Hospitalier d’Agen ont cumulé plus de 10 000 heures de TTA (temps de travail additionnel) en 2024, soit l’équivalent de 30% de l’effectif médical en poste. En guise de remerciement pour ces efforts consentis, le doublement du forfait de TTA initialement convenu a été supprimé. Tous les médecins de cette équipe ont d’ores et déjà réalisé leur temps de travail pour le mois d’août. Certains cumulent plus de 250 heures extra-supplémentaires et sont épuisés » relatent les syndicats. Faute de médecins en nombre suffisant, les services des urgences, le SAMU et le SMUR d’Agen fermeront ce jeudi.null

Les syndicats « entrent en résistance » contre le gouvernement

Les urgentistes ne se contentent pas de dépeindre le tableau dramatique des urgences, ils se montrent également force de propositions. Ils demandent ainsi « le strict respect de la loi concernant le décompte du temps de travail » et « la mise en place des ratios de ressources médicales d’urgentistes ». Surtout, ils demandent que le maillage territorial des services d’urgences soit revu. Au vu du manque d’effectifs, ils estiment en effet irréaliste de maintenir ouvert plus de 650 services d’urgences à travers le pays et demandent donc que certains services soient regroupés, comme cela a pu être fait pour les maternités.

Pour le moment expliquent les syndicats, les services d’urgence ne tiennent que grâce au volontariat des médecins acceptant de faire des heures supplémentaires non rémunérées, « piégés dans un chantage affectif, moral et éthique, afin ne pas laisser une population sans accès aux soins urgents et éviter que leurs collègues soient seuls ». Une situation qui a trop duré estiment les syndicats, qui appellent tous les urgentistes de France à refuser désormais de travailler plus que les 48 heures hebdomadaires réglementaires.

Les syndicats expriment « leurs profonds regrets de devoir entrer en résistance contre un gouvernement et certaines directions hospitalières dans le déni » conscients que le refus de faire des heures supplémentaires aura des conséquences négatives sur l’accès aux soins. « Mais nous ne pouvons plus être complices de tels agissements, nous refusons d’être complices de pratiques indignes qui mettent en danger à la fois les soignants et les patients » concluent-ils.nullLISEZ LA SUITE CI-DESSOUS 

Déjà confronté à une fronde des pharmaciens et à une possible grève à l’AP-HP à la rentrée, le gouvernement de François Bayrou se retrouve face à un nouveau front de mécontentement sanitaire.

Les urgentistes entrent en résistance.

Le 18 août, les présidents de Samu-Urgences de France (SUdF) et l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf) annoncent dans un communiqué « entrer en résistance contre un Gouvernement et certaines directions hospitalières dans le déni »

Ils dénoncent la « mascarade » orchestrée par l’Etat : « Dans un contexte de canicule et de pénurie record de lits d’hospitalisation, aggravée par des fermetures estivales massives, le Gouvernement affirme que la situation est sous contrôle »

Alors que « la surcharge des services d’urgence encore ouverts et l’épuisement des équipes médico-soignantes atteignent des niveaux alarmants ».

Et dévoilent : « un temps de travail excessif et non conforme à la réglementation », avec des urgentistes « contraints d’enchaîner jusqu’à 96 heures hebdomadaires, dépassant très largement leurs obligations maximales ».

C’est donc une « équation insolvable » :
« 30 % des postes d’urgentistes vacants »
« la volonté des pouvoirs publics de maintenir les 650 services d’urgence du territoire français »

Le système « ne tient que par le volontariat des médecins acceptant de faire du [temps de travail additionnel], piégés dans un chantage affectif, moral et éthique, afin de ne pas laisser une population sans accès aux soins urgents et d’éviter que leurs collègues soient seuls pour assurer un flux normalement géré par 2 ou 3 médecins ».

SUdF et l’Amuf soutiennent « tous ceux qui décideront de ne plus être volontaires pour travailler dans des conditions dégradantes et non conformes » et appellent les urgentistes à « se protéger » en limitant leur temps de travail à leurs obligations maximales de services (48 heures par semaine), rappelant que « seulement 39 heures leur sont rémunérées ».

Communiqué :

Les conditions d’exercice et le temps de travail additionnel des urgentistes pour l’été 2025 ne sont plus tenables !!!

Publié le 18/08/2025 

SUdF et l’AMUF dénoncent :

Dans un contexte de canicule et de pénurie record de lits d’hospitalisation, aggravée par des fermetures estivales massives, le gouvernement affirme que la situation est sous contrôle.
Pourtant, pour SUdF et l’AMUF, la surcharge des services d’urgence encore ouverts et l’épuisement des équipes médico-soignantes atteignent des niveaux alarmants.

SUdF et l’AMUF dénoncent :

– Un temps de travail excessif et non conforme à la réglementation avec des urgentistes contraints d’enchaîner jusqu’à 96 heures hebdomadaires, dépassant très largement leurs obligations maximales, l’absence de contractualisation du temps de travail additionnel (TTA) pourtant obligatoire ;

– Le non-respect du cadre légal sur le décompte du temps de travail et l’absence de registre et de contrats de TTA malgré l’arrêté du 30/04/2003 et le rappel du Conseil d’État (22/06/2022), empêchant tout contrôle et toute mesure de prévention ;

– Une rémunération irrespectueuse : un forfait horaire de 33,76 € brut au-delà de 48 h, inférieur au taux horaire de base d’un praticien premier échelon et loin des promesses présidentielles d’alignement avec le privé ;

– La responsabilité des pouvoirs publics et de la FHF qui cautionnent les décisions de certaines directions hospitalières publiques ou privées aggravant la situation ;

– Une équation insolvable : 30% des postes d’urgentistes vacants et la volonté des pouvoirs publics de maintenir les 650 SU du territoire français ;

– Un système qui ne tient que par le volontariat des médecins acceptant de faire du TTA, piégés dans un chantage affectif, moral et éthique, afin ne pas laisser une population sans accès aux soins urgents et éviter que leurs collègues soient seuls pour assurer un flux normalement géré par 2 ou 3 médecins

 

Avec cette politique, le gouvernement Bayrou impose aux praticiens hospitaliers un nouveau paradigme: travailler toujours plus, au-delà du raisonnable, dans des conditions déplorables et inhumaines pour gagner moins. L’AMUF et SUdF dénoncent cette mascarade !

 

UN BEL EXEMPLE : Le SAMU-SMUR-SU d’AGEN au bord de la rupture
Les urgentistes du Centre Hospitalier d’Agen-Nérac ont cumulé plus de 10 000 heures de TTA en 2024, soit l’équivalent de 30% de l’effectif médical en poste. Rien que cet été, ce sont 5 700 heures de TTA qui ont été nécessaires pour assurer la continuité des soins sur le territoire.
En guise de remerciement pour ces efforts consentis, le doublement du forfait de TTA initialement convenu a été supprimé. Cette décision survient alors même que l’offre d’urgence du secteur est dégradée (fermeture des urgences de la clinique d’Agen, des urgences d’Auch, du SMUR de Moissac…) ce qui accentue encore la surcharge de l’équipe des urgences du CH d’Agen.
Tous les médecins de cette équipe ont d’ores-et-déjà réalisé leur temps de travail pour le mois d’aout. Certains cumulent plus de 250 heures extra-supplémentaires et sont épuisés.

SANS REPONSE DE LEUR DIRECTION AVANT LE 21 août, le SAMU 47, le SMUR et les Urgences du CH d’AGEN FERMERONT, faute de médecins.

L’AMUF et SUdF apportent leur soutien aux urgentistes du Centre Hospitalier d’Agen et plus largement à tous ceux qui décideront de ne plus être volontaires pour travailler dans des conditions dégradantes et non conformes.

Pour les tableaux de service des mois à venir, nous demandons à tous les urgentistes de se protéger en limitant leur temps de travail à leurs obligations maximales de service qui sont de 48 heures hebdomadaires alors que seulement 39 heures leur sont rémunérées.

 

SUdF et l’AMUF exigent du gouvernement et des directions hospitalières :

– Le strict respect de la loi concernant le décompte du temps de travail et la contractualisation du TTA ;

– L’arrêt immédiat des injonctions comminatoires vis-à-vis des urgentistes ;

– La mise en place des ratios de ressources médicales d’urgentistes, fondés sur le référentiel de SUdF afin de garantir des effectifs suffisants;

– La révision du maillage territorial des SU, seule solution réaliste pour regrouper certains SU, permettre aux professionnels de se recentrer sur leur cœur de métier, de consolider les équipes et d’éviter les fermetures brutales et itératives.

 

SAMU-Urgences de France et l’Association des Médecins Urgentistes de France expriment leurs profonds regrets de devoir entrer en résistance contre un gouvernement et certaines directions hospitalières dans le déni. Nous savons que cette position pourra avoir des conséquences sur l’accès aux soins de nos concitoyens et nous le déplorons. Mais nous ne pouvons plus être complices de tels agissements. L’absence de dialogue social, associé à un pilotage à vue du gouvernement, ne nous laisse plus d’autres choix. Nous refusons d’être complices de pratiques indignes qui mettent en danger à la fois les soignants et les patients.

Dr Marc NOIZET, Président SUdF
Dr Patrick PELLOUX, Président de l’AMUF

Voir aussi: https://environnementsantepolitique.fr/2025/08/05/la-regulation-liberale-de-medecine-generale-pierre-angulaire-de-cette-organisation-montre-des-signes-de-tension-preoccupants-avec-un-retentissement-sur-la-qualite-de-service-impactant-egalement-la-m/

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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