Haro de l’Etat et de Hauts Fonctionnaires sur les petits Hôpitaux
Ce rapport qui épingle les « pertes de chance » des patients dans les hôpitaux peu actifs
A l’heure où le gouvernement s’inquiète de la performance des hôpitaux publics, les patients atteints de cancer de la prostate peuvent être moins bien soignés dans les services chirurgicaux les moins actifs, souligne un rapport récent de l’Assurance Maladie.

Publié le 11 août 2025 à 14:55Mis à jour le 11 août 2025 à 15:05 https://www.lesechos.fr/economie-france/social/ce-rapport-qui-epingle-les-pertes-de-chance-des-patients-dans-les-hopitaux-peu-actifs-2180924
Réservé à nos abonnés
De quoi donner envie de bien choisir son hôpital ou sa clinique avant d’aller se faire opérer. A l’heure où le gouvernement veut renforcer l’efficacité de l’hôpital,l’Assurance Maladie souligne dans un rapport publié en juin que la qualité et la sécurité des soins ont tendance à être moins bonnes dans les services de chirurgie tournant au ralenti.
L’organisme de Sécurité sociale s’est penché sur la prise en charge dans les établissements publics et privés et entre 2016 et 2020 du cancer de la prostate, le cancer le plus fréquent chez l’homme et le troisième cancer le plus létal pour eux. Résultat : le risque de complications, en cas d’enlèvement de la prostate (prostatectomie radicale), est notablement plus important dans les établissements qui pratiquent le moins ces interventions.
Suite abonnés ….
Commentaire Étienne Caniard anciens Directeur de la Mutualité Francaise
Comment s’étonner de la perte d’efficacité des hôpitaux lorsque tous les gouvernements depuis des décennies préfèrent l’étranglement budgétaire à la restructuration?
Lorsque les taux directeurs des dépenses hospitalières votés par le Parlement sont inférieurs plusieurs années de suite à l’évolution des salaires, quelle marge de manœuvre reste-t-il aux directeurs d’établissements?
On leur demande d’être des dirigeants d’entreprise sans avoir la maîtrise de leurs prix ni des dépenses de personnel qui représentent 70% de leurs coûts!
Les hôpitaux publics, même s’ils doivent être soucieux de leur efficacité, ne peuvent être assimilés aux acteurs d’un marché régulé par les seules lois de la concurrence.
Le rapport cité dans l’enquête des Echos sur l’efficacité de la prise en charge des cancers de la prostate vient s’ajouter aux nombreuses études qui toutes mettent en évidence les pertes de chance pour les patients en cas d’activité insuffisante pour les actes nécessitant technicité et environnement adapté.
Les conséquences à en tirer sont de la responsabilité des pouvoirs publics et d’eux seuls. Il faut arrêter de sacraliser la proximité pour des actes peu fréquents qui peuvent être assurés dans de meilleures conditions de sécurité dans des établissements spécialisés.
La Haute Autorité de Santé rappelle qu’en France, sur environ 6,5 millions d’interventions chirurgicales chaque année, surviendraient 60 000 à 95 000 événements indésirables graves, dont la moitié serait évitable!
6,5 millions d’interventions chirurgicales par an c’est en moyenne une tous les 10 ans pour chaque français. La qualité et la sécurité des soins ne justifient-elles pas d’accepter de renoncer à une proximité plus dangereuse que confortable … une fois tous les 10 ans pour celles et ceux qui vivent un peu plus loin des grands centres, une minorité de la population! L’exemple des maternités est parlant; diminuer la mortalité périnatale dépend avant tout du suivi de la grossesse et d’un accouchement dans un environnement sécurisé, notamment par la présence des professionnels de santé indispensables en cas de difficulté, présence impossible dans les trop petites maternités. Un suivi de qualité et de proximité n’est pas incompatible avec un accouchement sécurisé, même un peu plus loin de son domicile.
Mais il est tellement plus facile d’étrangler budgétairement les établissements que d’avoir le courage de fixer des règles pour restructurer l’offre en se souciant de l’organisation des déplacements.
On ne peut que faire sienne l’affirmation de Nicolas Revel, patron de l’APHP: « Il n’est plus raisonnable de maintenir en France autant de petites structures hospitalières médico-chirurgicales dotées de plateaux techniques sous-critiques en termes de nombre de médecins et, disons-le, de niveau de compétences »
Le ministère de la santé ne doit pas être le ministère de l’aménagement du territoire ni celui des élus professionnels de santé, il doit être avant tout celui des patients!
Point de vue de Nicolas Revel dans sa note de Mai dernier à Terra Nova
https://tnova.fr/site/assets/files/71419/terra_nova_-sante_des_francais-_26_05_2025.pdf?1xbql3
Faire le pari de la qualité des soins : comment passer des discours aux actes ?
Extrait: (page 14)
La première est d’avancer dans la voie de la mesure, de l’évaluation et de la transparence en matière de pratiques et de résultats cliniques, qu’il s’agisse des établissements de santé comme des professionnels libéraux. Cette culture de la donnée publique et des indicateurs d’évaluation de la qualité des prises en charge n’est pas naturelle et soulève toujours mille objections, qu’il s’agisse des indicateurs eux-mêmes, jamais totalement pertinents, ou du principe même de publier les résultats – en tous cas certains d’entre eux – de chaque équipe ou professionnel, supposé conduire à mille effets pervers. Par quelque bout qu’on prenne le sujet, tout démontre que la seule voie efficace pour faire progresser les pratiques professionnelles est de pouvoir les mesurer et les comparer entre structures équivalentes. L’objectif serait de pouvoir mieux étayer les choix des établissements de santé en termes de pilotage de l’activité, d’évaluation des responsables médicaux et chefs de service, mais aussi, pour une partie de ces indicateurs, dans le but de les rendre publics. Les campagnes de certification par la HAS constituent un premier progrès mais cela ne suffit pas. Est-il normal que ce soit les classements conçus par certains journaux ou les avis publiés sur google qui fassent office de portail de transparence ? Nous devrions nous doter d’un tel dispositif public, annuel et généralisé.
La deuxième condition est d’assumer que cette exigence de qualité et de sécurité des soins implique d’avancer dans l’ajustement de notre carte sanitaire. Il n’est plus raisonnable de maintenir en France autant de petites structures hospitalières médico-chirurgicales dotées de plateaux techniques sous-critiques en termes de nombre de médecins et, disons-le, de niveau de compétences. Tous les pays autour de nous ont réussi à avancer dans ce qu’on appelle la gradation des soins. Tout le monde sait en France que cette évolution est inéluctable mais nous n’avons pas su convaincre encore nos concitoyens que proximité ne rime pas toujours avec sécurité et qu’on est évidemment mieux pris en charge dans un centre chirurgical certes distant mais où le niveau d’expérience des praticiens, la taille des équipes, la robustesse des procédures, la qualité du suivi, la fluidité des parcours sont sans commune mesure. La contrepartie d’une telle évolution doit évidemment être de ne pas laisser les territoires concernés par la fermeture d’un service chirurgical sans accès ni solution, ce qui passe par le déploiement d’un système obligatoire et structuré de consultations avancées, comme évoqué plus haut.
Commentaire Dr Jean SCHEFFER
La solution miracle: proposer pour compenser la fermeture de chirurgie, maternité, urgences, … des consultations avancées !
C »est un peu court messieurs.
D’abord parce que dans les hôpitaux généraux 40% des postes sont vacants et on voit mal des spécialistes libéraux venir consulter dans nos établissements alors que la permanence des soins en libéral est déjà fragile.
Comment prendre en charge les urgences quand on assiste à la fermeture de lignes SMUR dans les divers centres hospitaliers et que l’hélicoptère n’est pas disponible la moitié du temps.
Ce sont des mentalités de haut fonctionnaire teintées de parisianisme ou de praticien universitaire, fort éloignés de nos réalités provinciales qui sont capables de rédiger de telles notes.