En Israël, d’anciens responsables sécuritaires demandent l’aide de Donald Trump pour arrêter la guerre à Gaza
Plus de 500 anciens responsables du Mossad, du Shin Bet et de la diplomatie ont appelé, lundi, le président américain à « guider Nétanyahou dans la bonne direction ». Ils estiment que le Hamas n’est plus « une menace stratégique » pour leur pays.

Un nouvel appel au secours pour les otages. Une nouvelle tentative de mettre fin à la guerre à Gaza. Et le constat que, seul, Donald Trump peut désormais infléchir la politique du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou. Plus de 500 anciens responsables de l’appareil sécuritaire en Israël, dont des figures connues et respectées du Mossad (renseignement extérieur), du Shin Bet (renseignement intérieur) ou de la diplomatie, ont explicitement demandé, lundi 4 août dans la matinée, au président américain d’intervenir pour obliger Israël à négocier un cessez-le-feu. « Nous vous exhortons à mettre fin à la guerre à Gaza. Vous l’avez fait au Liban. Il est temps de le faire à Gaza également », déclarent ces officiers et diplomates retraités, membres du mouvement Commandants pour la sécurité d’Israël (CIS), qui rassemble plusieurs centaines d’anciens responsables de haut rang.
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« Votre crédibilité auprès de la grande majorité des Israéliens renforce votre capacité à guider le premier ministre Nétanyahou et son gouvernement dans la bonne direction », écrivent les signataires. « Tsahal [l’armée israélienne] a depuis longtemps atteint les deux objectifs qui pouvaient être réalisés par la force : démanteler les formations militaires et le gouvernement du Hamas, soulignent les membres du CIS. Le troisième, et le plus important, ne peut être atteint que par un accord : ramener tous les otages chez eux. »
« Nous considérons, en tant que professionnels, que le Hamas ne représente plus une menace stratégique pour Israël », estiment-ils, contredisant les discours gouvernementaux sur la nécessité de poursuivre les frappes. A plus long terme, plaident-ils encore, une coalition régionale et internationale pourrait aider l’Autorité palestinienne à remplacer le Hamas à Gaza – une autre ligne rouge pour le gouvernement Nétanyahou.
Connu pour ses prises de position en faveur d’une solution à deux Etats ou contre toute volonté d’annexion de la Cisjordanie par Israël, le mouvement, apolitique, existe depuis près de vingt ans. En 2023, au nom de la défense de la démocratie et de l’Etat de droit, les Commandants pour la sécurité d’Israël avaient rejoint la mobilisation contre le projet de réforme judiciaire voulue par le gouvernement Nétanyahou, laquelle avait conduit des centaines de milliers de personnes à protester pendant plusieurs mois.
« Elle a cessé d’être une guerre juste »
Plusieurs de ses membres, dont les anciens patrons du Mossad Tamir Pardo (2011-2015) ou du Shin Bet Ami Ayalon (1996-2000) ont régulièrement pris position, de façon très critique, contre le gouvernement. « Nous avons le devoir de nous lever », alerte ainsi Ami Ayalon dans une vidéo de présentation de l’initiative diffusée sur les réseaux sociaux. « Cette guerre a commencé comme une guerre juste, une guerre défensive. Mais une fois tous ses objectifs militaires atteints et une brillante victoire militaire contre tous nos ennemis, elle a cessé d’être une guerre juste. Elle conduit l’Etat d’Israël à la perte de sa sécurité et de son identité », poursuit l’ancien chef du renseignement.
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La démarche témoigne de l’inquiétude face au sort des otages. Depuis l’attaque terroriste du 7 octobre 2023, qui avait provoqué la mort de plus de 1 200 Israéliens et la prise en otage de 251 personnes, 669 jours se sont écoulés. En dehors d’Edan Alexander, un citoyen israélo-américain libéré le 12 mai grâce aux négociations directes entre les Etats-Unis et le Hamas, les dernières libérations remontent à février, pendant le cessez-le-feu, rompu par Israël en mars. « La guerre a été relancée en mars avec l’intention affichée de détruire le Hamas, ses capacités militaires et ses capacités à gouverner. Les dommages causés au Hamas ont été significatifs. Mais le recours à la force n’a pas apporté de libération d’otages », explique au Monde l’ancien ambassadeur Jeremy Issacharoff, l’un des porte-paroles de la lettre ouverte.
La publication de vidéos dégradantes de deux otages, Evyatar David et Rom Braslavski, détenus par le Hamas et son allié, le Jihad islamique, a confirmé ce que répètent les familles : la situation mentale et physique des vingt derniers israéliens, encore en vie, retenus à Gaza ne cesse de se dégrader, menaçant leur intégrité et désormais leur vie. « Les éléments médicaux sont sans équivoque : les otages de Gaza sont dans un état de faim extrême et font face à un risque de mort immédiat », souligne ainsi le professeur Hagai Levine, médecin en chef du Forum des familles des otages, dans un rapport publié lundi.
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L’appel des officiers et diplomates intervient alors que le gouvernement réfléchit à changer de stratégie dans la guerre conduite à Gaza. Devant les membres de son gouvernement, lundi, Benyamin Nétanyahou a confirmé qu’il réunirait dans la semaine du 4 août le cabinet de sécurité, une instance réduite sur les questions militaires, pour décider d’une nouvelle extension des opérations terrestres dans l’enclave palestinienne, y compris dans des zones jusque-là moins frappées en raison de la présence probable d’otages.