Le cri d’alerte des pharmaciens et des Français

REPORTAGE. « Une décision de merde », « vaut mieux ne pas tomber malade » : dans les déserts médicaux, le cri d’alerte des pharmaciens et des Français

Santé,  Industrie pharmaceutique,  Société

Publié le 25/07/2025 à 19:01 https://www.ladepeche.fr/2025/07/25/reportage-une-decision-de-merde-vaut-mieux-ne-pas-tomber-malade-dans-les-deserts-medicaux-le-cri-dalerte-des-pharmaciens-et-des-francais-12844363.php

Yohan Lemaire

l’essentiel

À Gourdon, dans le Lot, pharmaciens et locaux ne masquent pas leur inquiétude face à la baisse annoncée de la rémunération sur les médicaments génériques et les conséquences que pourrait avoir cette décision dans leur quotidien. Reportage.

« C’est la mort des pharmacies, tout simplement. » Le constat dressé par Florence ce vendredi 25 juin est clair, le cri de détresse authentique. Cette pharmacienne de Gourdon (Lot) exprime un ressenti partagé par l’ensemble de ses confrères qui sont en grève depuis le début du mois de juillet. Le projet gouvernemental prévoit de réduire fortement les remises sur les médicaments génériques, comprimant la marge des pharmacies. Il inquiète fortement et risque de mettre en péril l’équilibre économique de nombreuses officines rurales.

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Au sein de la pharmacie des Cordeliers, un emploi serait en péril si le projet de loi venait à être voté. « Ça fait peur, confie Nathalie, une autre employée. Si on vient à nous baisser ce qui nous permettait de faire notre marge, des emplois seront supprimés, et pire encore, certaines pharmacies risquent de fermer. On ne va pas s’en sortir si on continue comme ça. Aujourd’hui, dans le Lot, mieux vaut ne pas être malade, car la médecine devient très compliquée », regrette-t-elle.

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« Une décision aberrante »

Dans le département, près d’un quart des pharmacies pourrait mettre la clé sous la porte à court ou moyen terme. Des officines en danger qui risquent de creuser les inégalités au sein du monde rural, où les déserts médicaux se multiplient chaque jour et où trouver un médecin équivaut à un parcours du combattant. « Ce chiffre fait peur. Dans les grandes villes, ce n’est pas si grave. Dans un département comme le nôtre, on va devoir rouler et continuer de rouler, juste pour se soigner », confie Guillaume, croisé devant une autre pharmacie de la sous-préfecture du Lot.

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« Les économies effectuées sur le dos des pharmacies… On veut trouver des millions en jouant sur notre santé, je trouve ça aberrant », enchérit Raymond, retraité. Guillaume poursuit et craint notamment pour la santé de ses aînés, eux qui n’ont pas forcément l’occasion de prendre la voiture pour se rendre dans ces pharmacies. « C’est une décision de merde, surtout dans un département comme le nôtre où il y a une bonne partie de la population qui est âgée. Ils ont besoin de médicaments. S’il n’y a plus de pharmacies, il n’y a plus de médicaments. Et s’il n’y a plus de médicaments, il n’y a plus de personnes âgées », explique le trentenaire.

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Le jeudi 17 juillet, aucune pharmacie de garde n’avait été officiellement réquisitionnée. Un couac administratif qui a provoqué une certaine angoisse dans le département. « On nous donne toujours plus de missions, et pourtant on veut nous mettre la tête sous l’eau. Cet épisode démontre notre rôle essentiel dans le système de santé », tenait à rappeler Caroline, une autre pharmacienne gourdonnaise.

ENTRETIEN. « Il va y avoir des déserts pharmaceutiques », prévient le président du conseil de l’Ordre des Pharmaciens

Santé,  Industrie pharmaceutique,  France – Monde

Publié le 26/07/2025 à 06:58 https://www.ladepeche.fr/2025/07/26/entretien-il-va-y-avoir-des-deserts-pharmaceutiques-previent-le-president-du-conseil-de-lordre-des-pharmaciens-12841878.php#:~:text=Oui%2C%20très%20clairement.,couvrir%20tout%20un%20secteur%20isolé.

Vanessa Abadie

l’essentiel

Depuis début juillet, les pharmaciens sont en grève pour protester contre la baisse annoncée de la rémunération sur les médicaments génériques. Alors que les discussions se poursuivent avec le ministère de la Santé, Bruno Galan, président du Conseil de l’Ordre des pharmaciens d’Occitanie, analyse pour la Dépêche du Midi les conséquences d’une réforme qu’il juge dévastatrice.

La Dépêche du Midi : Comment les mesures annoncées vont-elles impacter les pharmaciens ?

Très durement. On s’attaque au pilier économique de l’officine. Depuis des années, les pharmaciens ont joué le jeu en promouvant le générique, ce qui a permis à l’assurance maladie de faire de grosses économies. En échange, une remise commerciale avait été accordée. Or, cette remise est aujourd’hui leur principale source de revenus. La diminuer fortement, c’est mettre en péril des milliers d’officines. Selon les syndicats, on pourrait aller jusqu’à 6 000 fermetures. Derrière, ce sont des licenciements, mais surtout une menace pour la santé de proximité. Une pharmacie c’est une garantie d’accès aux soins pour tous.

C’est-à-dire ?

On est bien plus qu’un distributeur de médicaments. Le pharmacien est devenu un professionnel de premier recours capable d’orienter, de conseiller et parfois de prendre en charge directement. Pendant le Covid, les pharmacies ont prouvé qu’elles étaient des centres de santé ouverts 7 jours sur 7, accessibles, fiables, présentes partout et pour tous. Encore aujourd’hui, les patients viennent spontanément pour un conseil, un soin ou pour être orientés. La pharmacie est une porte d’entrée rassurante dans le parcours de soins, surtout à une époque où il est de plus en plus difficile de trouver un médecin. Supprimer ce point d’accès, c’est fragiliser tout l’édifice et mettre en danger les patients.

Cette remise sur les médicaments génériques est-elle vraiment vitale pour les pharmaciens ?

Oui, elle est absolument essentielle. Je peux vous le dire en tant que pharmacien : mon officine repose en grande partie sur cette remise. Environ 80 % de notre chiffre d’affaires est lié au médicament, et plus particulièrement au générique. Ce sont les 40 % de remise sur les génériques qui ont permis, jusque-là, de maintenir un équilibre économique. Si on réduit cette marge, on réduit directement le pouvoir financier de l’officine. On a vraiment peur pour notre avenir.

Certains territoires sont-ils plus menacés que d’autres ?

Oui, très clairement. Les zones rurales sont les plus vulnérables. En ville, même si une officine ferme, d’autres existent souvent à proximité. Mais dans les campagnes, une pharmacie peut couvrir tout un secteur isolé. Et si elle disparaît, il va y avoir des déserts pharmaceutiques, en plus des déserts médicaux déjà bien installés. C’est une double peine pour les habitants. Aujourd’hui, dans certaines communes, il n’y a plus de médecin. Et quand une pharmacie ferme à son tour, les patients doivent parcourir des dizaines de kilomètres pour obtenir un simple conseil ou un traitement. C’est injuste et dangereux, notamment pour les personnes âgées, les malades chroniques ou les familles isolées. Il faut absolument préserver cette proximité qui fait la force du modèle français.

Que répondez-vous à ceux qui disent qu’il faut faire des économies ?

Ils ont raison. Il faut faire des économies, mais pas au prix de la santé publique. On parle ici de quelques millions d’euros que le gouvernement cherche à récupérer en risquant la fermeture de milliers d’officines. Cela n’a aucun sens. On ne peut pas considérer la santé comme une variable d’ajustement budgétaire. Si l’État veut réformer la rémunération des pharmaciens, alors qu’il engage une réflexion de fond. Pas un simple rabotage de pourcentages. Aujourd’hui, on applique un pansement sur une jambe de bois. Et on risque d’en payer très cher les conséquences demain, quand les officines auront disparu, et qu’on se rendra compte qu’on a cassé un pilier essentiel du soin en France.

Pharmacies en grève : menacés de faillites en cascade à cause d’une décision du gouvernement, les pharmaciens vont durcir leur mouvement

Les pharmaciens vont poursuivre leur grève.Les pharmaciens vont poursuivre leur grève. DDM – Marie-Pierre Volle

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Publié le 26/07/2025 à 06:46 https://www.ladepeche.fr/2025/07/26/pharmacies-en-greve-menaces-de-faillites-en-cascade-a-cause-dune-decision-du-gouvernement-les-pharmaciens-vont-durcir-leur-mouvement-12841723.php

Gil Bousquet

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Après l’échec des dernières négociations avec le gouvernement sur les médicaments génériques, les pharmaciens veulent faire grève tous les samedis à partir du 27 septembre. Ils assurent risquer les faillites en cascade.

Alors que l’été commençait à peine, une crise a éclaté entre les pharmaciens et le gouvernement. Depuis début juillet, les officines protestent contre une réforme de la délivrance de médicaments génériques qui risque de mettre en danger leur équilibre économique. La colère des pharmaciens tient à la décision du gouvernement de la baisse de la remise générique. Derrière ce terme un peu abscons, se cache en fait un des éléments de la rentabilité des pharmacies, dont des milliers sont en difficulté économique depuis plusieurs années.

Afin d’encourager la distribution de médicaments génériques, moins chers que les médicaments sous brevet, les remises consenties par les laboratoires aux pharmacies pouvaient atteindre 40 % du prix du générique. Le gouvernement souhaitait limiter ces remises à un taux compris entre 20 et 25 %, dans le cadre d’économies à réaliser dans les dépenses de santé en 2025. Une baisse qui rognera de facto la marge des pharmacies, déjà faibles sur les médicaments, menaçant de fait leur survie.

Pour protester, depuis le 1er juillet, de nombreux pharmaciens ont déclenché une grève des gardes le week-end, mais ils ont été réquisitionnés par les préfets, les obligeant à rester ouverts. La grève a donc été invisible pour les patients. Les dernières propositions du gouvernement qui a mis sur la table cette semaine un taux de remise réévalué à 30 %, ont été jugées « inacceptables » par la profession. Ils menacent aujourd’hui d’amplifier leur mouvement avec une fermeture de leur commerce tous les samedis à partir du 27 septembre prochain. Les organisations de pharmaciens (FSPF, Uspo, UNPF, Federgy, UDGPO), ont même annoncé une fermeture complète des pharmacies la journée du jeudi 18 septembre, ainsi qu’une « grève immédiate du tiers payant conventionnel pendant les réquisitions ».

Des milliers d’officines menacées de faillite

Cela obligera les patients à faire l’avance des frais pour payer leurs médicaments. Le pharmacien leur remettra alors une feuille de soins afin de se faire rembourser a posteriori par la Sécurité sociale.

Pour le syndicat des pharmaciens, si la baisse de la remise générique est vraiment mise en œuvre, elle fera peser un risque de faillite sur 3 000 à 6 000 officines en France (sur 19 000). Et « pour celles qui ne fermeront pas, elles devront licencier massivement. Entre 20 000 et 30 000 emplois seraient menacés en France » selon Christelle Quermel, la présidente du syndicat des pharmaciens de l’Hérault.

« Pour les petites pharmacies de proximité, les remises sont une ressource indispensable. Elles ne pourront essuyer la moindre perte et devront licencier, voire fermer définitivement », ont prévenu les représentants des pharmaciens devant Yannick Neuder, le ministre de la Santé et de l’Accès aux soins. En effet, beaucoup de pharmacies d’officine dépendent à 90 % de ressources issues de l’Assurance maladie, sauf celles qui tirent leurs revenus de la location de matériel médical ou de la vente de produits de parapharmacie.

Des missions élargies depuis 2022

Si l’État demande des efforts aux pharmaciens, c’est aussi parce que depuis 2022 ils se sont vus confier de nouvelles missions, dans le cadre de la Convention qui les lie à l’assurance-maladie. Ils ont été désignés “prescripteurs” dans le cadre de protocoles inscrits dans l’exercice coordonné avec les autres praticiens et notamment les médecins traitants. Après avoir été autorisés à vacciner contre le covid, leur mission de vaccination a aussi été élargie contre rémunération.

À présent, ils peuvent prescrire et administrer l’ensemble des vaccins mentionnés dans le calendrier des vaccinations chez les personnes âgées de 11 ans et plus. Au-delà des économies pour l’assurance santé, la possibilité de réaliser ces actes simples a aussi eu pour but de soulager la médecine de ville surchargée et d’augmenter la couverture vaccinale de la population.

Une perte chiffrée à 260 millions d’euros : pourquoi les pharmaciens sont en colère contre le gouvernement

Par   https://www.lefigaro.fr/conjoncture/une-perte-chiffree-a-260-millions-d-euros-pourquoi-les-pharmaciens-sont-en-colere-contre-le-gouvernement-20250723#:~:text=En%20cause%2C%20une%20décision%20du,tenter%20de%20trouver%20un%20compromis.


Pour Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, «cette mesure du gouvernement risque d’affecter le maillage territorial et l’accès aux soins». bnenin – stock.adobe.com

DÉCRYPTAGE – Les syndicats menacent d’une fermeture des officines le 18 septembre, puis de fermer tous les samedis dès le 27 septembre. Alors qu’ils seront reçus par le ministre de la Santé ce mercredi, ils protestent contre la baisse des remises sur les médicaments génériques.

La situation risque d’être tendue dans les pharmacies à la rentrée. Les syndicats de pharmaciens agitent la menace d’une journée de fermeture de leurs officines le 18 septembre, puis d’une fermeture tous les samedis, à compter du 27 septembre. Depuis début juillet, les pharmacies de garde sont déjà en grève et n’appliquent pas le tiers payant conventionnel pendant les réquisitions imposées par les préfets pour assurer ces gardes. En cause, une décision du gouvernement visant à raboter les remises sur les médicaments génériques, dans le cadre du plan d’économies pour redresser les comptes du pays. Les deux parties doivent se rencontrer ce mercredi 23 juillet au ministère de la Santé pour tenter de trouver un compromis.

À découvrir

Concrètement, l’exécutif souhaite abaisser le plafond des remises commerciales accordées aux pharmaciens lorsqu’ils achètent des médicaments génériques aux laboratoires, de 40 à 30%. Ces médicaments contiennent les mêmes principes actifs que les médicaments d’origine, les princeps ; seuls les excipients sont différents. S’ils agissent de la même manière, les génériques sont vendus moins cher dans les officines que ceux sous brevets. Ils sont ainsi moins onéreux également pour l’Assurance-maladie, qui règle des remboursements moins importants aux consommateurs.

Dans cette logique, le gouvernement a poussé les pharmaciens à délivrer davantage de médicaments génériques…

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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