« Tensions aux urgences pendant l’été : “Notre crainte, c’est que ce fonctionnement dégradé se banalise” »
Date de publication : 24 juillet 2025 https://www.mediscoop.net/index.php?pageID=83000e2979e5dbd726d912ea64b50b02&id_newsletter=22304&liste=0&site_origine=revue_mediscoop&nuid=44baf5968540a6248a8065e80f2f7273&midn=22304&from=newsletter
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Mattea Battaglia et Camille Stromboni constatent dans Le Monde que « la saison estivale, pour les urgences, est une période tendue, parce que les bras manquent un peu plus, du fait des congés des soignants, et que des lits ferment à tous les étages de l’hôpital. Parce que, dans beaucoup de villes touristiques, aussi, la population s’accroît alors que les températures grimpent ».
Les journalistes relèvent ainsi que « des services [sont] sous forte pression. C’est le cas dans le département du Var, où, le 8 juillet, le premier niveau du plan blanc – ce système de crise permettant aux établissements de se réorganiser, de rappeler des soignants… – a été activé au centre hospitalier intercommunal de Toulon – La Seyne-sur-Mer et au centre hospitalier d’Hyères ».
Mattea Battaglia et Camille Stromboni expliquent qu’« à la mi-juillet, quelque 220 passages quotidiens étaient décomptés dans [le] service, contre 140 à 150 à la même période habituellement. Même envol précoce du nombre de sollicitations au SAMU, avec des «volumes d’appels», en 24 heures, qui dépassent ceux généralement atteints au 15 août ».
La Dre Muriel Vergne, porte-parole départementale du syndicat SAMU Urgences de France, souligne que « la situation est fragile. Notre crainte, c’est que ce fonctionnement dégradé se banalise. Qu’on cède à une forme de fatalité ».
Les journalistes précisent que « des tensions sont signalées dans le Var, mais aussi dans le Morbihan, le Cher, le Nord ou encore en Mayenne. Avec, certains jours, «zéro ligne de SMUR» dans ce dernier département, de source syndicale ».
« C’est l’un des points les plus alarmants d’une crise qui s’éternise : la fermeture, ponctuelle, de ces services mobiles d’urgence et de réanimation, envoyés pour répondre aux urgences vitales, intervient dans plusieurs départements depuis au moins deux étés », poursuivent Mattea Battaglia et Camille Stromboni.
Marc Noizet, président du syndicat SAMU Urgences de France, déclare ainsi que « la problématique des ressources humaines médicales est toujours aussi aiguë à l’échelle nationale. Sur le terrain, on a l’impression de se répéter, on est en surchauffe. C’est devenu tout le temps très dur ».
Les journalistes indiquent que « le syndicat préconise de revoir la carte des urgences, en concentrant au mieux les forces médicales, quitte à fermer de petits services en grande difficulté ».
Marc Noizet observe : « La répartition de nos 700 services a été dessinée il y a plus de 25 ans. Depuis, les difficultés de recrutement se sont généralisées, et on en reste, toujours, à 700 services, sans oser remettre en question le maillage territorial ».
Mattea Battaglia et Camille Stromboni relèvent qu’« au ministère de la Santé, on l’assure : «La situation est globalement identique, à date, à celle de [2024]», […] sans communiquer sur le nombre de services fermés ou les plans blancs activés ».
Le ministère poursuit : « Les tensions estivales que connaît chaque année notre système de santé nécessitent des ajustements et ont été anticipées ».
Les journalistes indiquent que « les années passent et les leviers restent les mêmes, telle la possibilité de recourir à une régulation (ou filtrage) à l’entrée des urgences par un appel au 15. Ou encore le déploiement des services d’accès aux soins (SAS) qui permettent aux SAMU de mieux s’organiser avec les médecins libéraux pour répondre aux urgences non vitales ».
Tensions aux urgences pendant l’été : « Notre crainte, c’est que ce fonctionnement dégradé se banalise »
De nombreux services sont sous forte pression depuis le début des vacances. A Toulon, le premier niveau du plan blanc a été déclenché, tandis que, à Rennes, la régulation par le 15 a été généralisée, une pratique mise en place pour la première fois à Digne-les-Bains et à Manosque.
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C’est devenu un exercice saisonnier : identifier, au fil de l’été, les hôpitaux dont les services d’urgences ferment – quelques heures, un jour, une nuit ou plusieurs d’affilée. Comparer avec l’année précédente, mais aussi avec l’avant-Covid, l’après-Covid…
La saison estivale, pour les urgences, est une période tendue, parce que les bras manquent un peu plus, du fait des congés des soignants, et que des lits ferment à tous les étages de l’hôpital. Parce que, dans beaucoup de villes touristiques, aussi, la population s’accroît alors que les températures grimpent.
L’été 2025 n’échappe pas à la règle, avec, depuis plusieurs jours déjà, des services sous forte pression. C’est le cas dans le département du Var, où, le 8 juillet, le premier niveau du plan blanc – ce système de crise permettant aux établissements de se réorganiser, de rappeler des soignants… – a été activé au centre hospitalier intercommunal de Toulon – La Seyne-sur-Mer et au centre hospitalier d’Hyères, deux établissements sous direction commune.
« [En 2024], c’étaient des hôpitaux de l’est du Var qui avaient dû diminuer leur accueil et nous renvoyer des patients,décrit l’urgentiste toulonnaise Muriel Vergne, porte-parole départementale du syndicat SAMU Urgences de France. Cet été, c’est à l’ouest que cela coince, et ça majore notre activité, même avec les heures supplémentaires qu’aucun de nous ne compte plus. »
Lire aussi (2024) | Article réservé à nos abonnés Tensions aux urgences pendant l’été : « On a fini par s’habituer à fonctionner en mode dégradé »
A la mi-juillet, quelque 220 passages quotidiens étaient décomptés dans son service, contre 140 à 150 à la même période habituellement. Même envol précoce du nombre de sollicitations au SAMU, avec des « volumes d’appels », en vingt-quatre heures, qui dépassent ceux généralement atteints au 15 août. « La situation est fragile, reprend Muriel Vergne. Notre crainte, c’est que ce fonctionnement dégradé se banalise. Qu’on cède à une forme de fatalité. »
« C’est devenu tout le temps très dur »
A ce jour, des tensions sont signalées dans le Var, mais aussi dans le Morbihan, le Cher, le Nord ou encore en Mayenne. Avec, certains jours, « zéro ligne de SMUR » dans ce dernier département, de source syndicale. C’est l’un des points les plus alarmants d’une crise qui s’éternise : la fermeture, ponctuelle, de ces services mobiles d’urgence et de réanimation, envoyés pour répondre aux urgences vitales, intervient dans plusieurs départements depuis au moins deux étés.
« La problématique des ressources humaines médicales est toujours aussi aiguë à l’échelle nationale, observe Marc Noizet, président du syndicat SAMU Urgences de France. Sur le terrain, on a l’impression de se répéter, on est en surchauffe. C’est devenu tout le temps très dur ; parfois, c’est juste un peu moins dur… »
Le syndicat préconise de revoir la carte des urgences, en concentrant au mieux les forces médicales, quitte à fermer de petits services en grande difficulté. « La répartition de nos 700 services a été dessinée il y a plus de vingt-cinq ans,rappelle Marc Noizet. Depuis, les difficultés de recrutement se sont généralisées, et on en reste, toujours, à 700 services, sans oser remettre en question le maillage territorial. L’enjeu politique est celui-là. »
Lire aussi (2022) : Article réservé à nos abonnés A l’entrée des services d’urgences, la régulation par le SAMU s’étend sur le territoire
Au ministère de la santé, on l’assure : « La situation est globalement identique, à date, à celle de [2024] », annonce-t-on dans l’entourage du ministre, Yannick Neuder, mercredi 23 juillet, sans communiquer sur le nombre de services fermés ou les plans blancs activés. « Les tensions estivales que connaît chaque année notre système de santé nécessitent des ajustements et ont été anticipées », ajoute-t-on Avenue de Ségur. La veille, le 22 juillet, en déplacement au SAMU de l’hôpital Necker, à Paris, Yannick Neuder s’est voulu rassurant : « La situation actuelle est plutôt maîtrisée », a-t-il dit.
Un message politique qui revient, été après été, depuis le déploiement du « pack Braun », soit ces 40 mesures décidées par le gouvernement et portées par l’ex-ministre de la santé François Braun (2022-2023), dans l’urgence, en juillet 2022, face à la crise, et pérennisées depuis. Les années passent et les leviers restent les mêmes, telle la possibilité de recourir à une régulation (ou filtrage) à l’entrée des urgences par un appel au 15. Ou encore le déploiement des services d’accès aux soins qui permettent aux SAMU de mieux s’organiser avec les médecins libéraux pour répondre aux urgences non vitales.
« Antenne de médecine urgence »
A 800 kilomètres à vol d’oiseau de Toulon, Louis Soulat, patron des urgences rennaises et membre du même syndicat, se plie lui aussi à l’exercice de comparaison. « Ce mois d’août s’annonce sans doute plus compliqué qu’il y a un an », dit-il. Avec deux évolutions désormais actées : une généralisation à la plupart des sites de la régulation, par le biais de l’appel au 15, la nuit – pour éviter aux patients de trouver porte close. Et l’expérimentation à Cesson-Sévigné (Ille-et-Vilaine) dans un hôpital privé, depuis le 20 juillet, d’une « antenne de médecine urgence », avec une amplitude horaire réduite à une douzaine d’heures par jour, contre, théoriquement, une ouverture vingt-quatre heures sur vingt-quatre précédemment. « Le flux des passages, sur les différents établissements, n’a pas baissé de tout le mois de juillet, relève-t-il encore, et les sollicitations du SAMU et du service d’accès aux soins ont bondi. Cela n’augure rien de bon. »
A Digne-les-Bains et à Manosque, dans les Alpes-de-Haute-Provence, le passage par le 15 a été décidé, pour la première fois, pour accéder aux urgences. « Le système fonctionne à l’entrée de nos deux services depuis juillet », rapporte Hugues Breton, délégué syndical de l’Association des médecins urgentistes de France. La situation est, pour lui, bien pire qu’en 2024 : « Nous sommes encore moins de médecins à Digne, en raison d’arrêts maladie, de congés maternité et de départs. » Cet été-là, déjà, des soignants s’étaient mis en grève – symboliquement, puisqu’ils sont assignés à travailler – pour alerter sur la situation.
Cette régulation n’empêche pas, pour autant, des fermetures au fil de l’eau. « Il arrive régulièrement la nuit que Digne soit le seul service ouvert du département. Avec deux médecins de garde, comment croire qu’on peut maintenir une prise en charge de qualité sur l’ensemble de notre territoire ? », questionne l’urgentiste. Et de citer des moments extrêmes, telle la fermeture, durant une nuit en juillet, des trois services du département (Digne, Manosque et Sisteron) en même temps. « On se raconte que l’hôpital tient… La question n’est pas de savoir si une mort évitable ou une complication va arriver, mais quand. »
Même dans d’autres hôpitaux où les plannings sont complets et tous les postes d’urgentistes pourvus, la pression s’avère très forte. « On a atteint 15 % de passages supplémentaires, depuis un mois », rapporte Pierre-Marie Tardieux, chef du pôle des urgences à Nice, l’un des plus gros services de France, où quelque 300 patients défilent au quotidien actuellement. « Chaque jour, on se retrouve avec une centaine de patients qui restent sur des brancards, nous n’avions jamais atteint ce chiffre, décrit l’urgentiste. La vraie difficulté, c’est de trouver des lits d’hospitalisation. Et on n’est encore qu’au milieu de l’été. »
Commentaire Dr Jean Scheffer
C’est triste de voir des responsables d’urgences de CHU ou de gros centres hospitaliers déclarer qu’ il faudrait fermer les petits services d’urgences pour concentrer les moyens sur les grosses structures.
C’est conforter le gouvernement sans son entreprise de destruction du service public avec fermetures d’urgences ou de lignes SMUR et dans l’aggravation de l’accès aux soins.
Par définition tout citoyen ne doit pas être a plus de 30 mn d’ un service d’urgence.
Ces urgentistes ne savent pas ce que c’est que de vivre sans des zones que j’appelle exception géographique, au fond de vallées ou loin de tout comme Bagnères de Bigorre, Lourdes, Lannemezan, Saint-girons, Saint-Affrique, Decazeville, Gourdon, Saint-Céret, Sarlat, Die, Moutiers, …