« Certains vont devoir licencier ou fermer »… Cette pharmacie albigeoise est en grève depuis plusieurs semaines contre la baisse du prix des médicaments
Publié le 16/07/2025 à 18:01 , mis à jour le 17/07/2025 à 11:05 https://www.ladepeche.fr/2025/07/16/certains-vont-devoir-licencier-ou-fermer-cette-pharmacie-albigeoise-est-en-greve-depuis-plusieurs-semaines-contre-la-baisse-du-prix-des-medicaments-12828116.php#=
Face à la réduction des marges sur les médicaments génériques, les pharmaciens tirent la sonnette d’alarme. À Albi, la pharmacie Sabrié est en grève des gardes depuis plusieurs semaines pour faire entendre sa détresse. Si rien n’évolue, elle songe à d’autres moyens d’action. Les détails.
« 2 000 pharmacies fermées, ça suffit, non ? » et « on n’avalera pas la pilule », sont les deux messages, suivis du #Trahis, qui sont affichés devant le comptoir de l’officine albigeoise de Julie Cabrol-Sabrié ce mercredi 16 juillet à Albi.
Pour cause, les récentes mesures gouvernementales visant à réduire les dépenses sur les médicaments suscitent une vive colère chez les pharmaciens et c’est peu dire. En effet, un arrêté du 6 mai dernier prévoit la réduction des remises commerciales sur les médicaments génériques, entraînant de facto une diminution des marges de 40 % à 20-25 %.
Ces remises représentent un manque à gagner de près de 600 millions d’euros que les professionnels estiment « indispensables pour le fonctionnement de leurs officines ».
De fait, depuis le 25 juin dernier, un peu partout dans le pays, les gérants d’officine ont répondu à l’appel du syndicat des pharmaciens USPO pour faire la grève des gardes (la nuit, le dimanche et les jours fériés) et le Tarn ne fait pas exception.
Depuis le 1er juillet dernier, la pharmacie Sabrié, située dans le quartier albigeois de Caussels, fait, elle aussi, partie des grévistes des gardes. Sa gérante a d’ailleurs récemment alerté sur une situation devenue invivable sur ses réseaux sociaux.

Seul moyen pour les officines de se faire entendre, des panneaux d’information sont apposés au comptoir. DDM – Marie-Pierre Volle
Elle témoigne : « Ce sont les médicaments génériques qui assurent la viabilité économique de nos officines. Nos marges sont déjà très fines et on veut encore nous les réduire tout en nous demandant de continuer à assumer des charges de personnel et de fonctionnement en hausse ? On va droit dans le mur. »
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Pour la pharmacienne de 40 ans installée dans la cité épiscopale depuis 2013, les conséquences de telles mesures pourraient aussi ruisseler jusqu’aux patients, chose inconcevable pour elle. « Si on baisse trop les prix, les labos vont retirer les médicaments non rentables de leurs catalogues pour les vendre ailleurs et on pourrait connaître des pénuries. »
Une grève des gardes, avant d’autres actions ?
Et le cas de Julie Cabrol-Sabrié n’est pas isolé dans le Tarn et encore moins à Albi. Bernard Champanet, président du conseil de l’Ordre des pharmaciens du Tarn, est formel. « Pratiquement tout le monde est en grève des gardes, mais l’ARS ne nous laisse pas le choix et nous sommes réquisitionnés. Personnellement, je suis inquiet, car si on réduit encore nos marges sur les génériques, certains vont devoir licencier ou fermer. On recense environ 11 officines fragiles sur les environ 120 du Tarn. Avec une telle mesure, je crains que ce chiffre n’augmente très vite. »
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Et la pharmacienne de Caussels de reprendre : « On envisage une grève du tiers payant partiel, des vaccinations ou des dépistages pour que notre voix soit entendue, voire une fermeture fin juillet. Malgré tout, nous aimons notre métier et rendre service aux gens. C’est très compliqué pour nous de tenter d’exister socialement sans impacter les gens qui n’ont rien demandé… »
En 10 ans, la France a perdu près de 2000 pharmacies, soit près de 10 % de ses 20 000 officines.