Budget 2026 : 5 milliards d’euros d’économies pour la santé, et des mesures sensibles
Pour freiner les dépenses sociales, le premier ministre, François Bayrou, a annoncé, mardi, un doublement, à 100 euros, du plafond des franchises médicales et ciblé le régime des patients en affection de longue durée.

On savait que le secteur de la santé serait mis à contribution dans le cadre des économies budgétaires promises pour 2026. Depuis des semaines, de l’Assurance-maladie au Medef, différentes pistes circulaient. Le suspense a pris fin, mardi 15 juillet : le gouvernement vise 5 milliards d’euros d’économies sur les dépenses sociales, sur les 43,8 milliards d’euros d’économies recherchés dans le prochain budget, a annoncé le premier ministre, François Bayrou, en dévoilant ses orientations pour redresser les finances publiques.
La dépense de santé « augmentera l’année prochaine de 10 milliards d’euros. Ce n’est pas soutenable. Je propose que nous fassions l’effort de limiter cette hausse de moitié », a déclaré le chef du gouvernement. La somme, pour ce secteur, est élevée, quand bien même elle correspond à l’objectif déjà évoqué lors de la présentation du précédent budget.
Les modalités particulièrement sensibles, pour y parvenir, ne manqueront pas de faire réagir, tant elles touchent directement les patients. C’est le cas du levier des « franchises médicales», ces sommes restant à leur charge quand ils achètent des médicaments : M. Bayrou a annoncé le doublement – de 50 à 100 euros par an et par assuré – du plafond annuel des franchises et des participations forfaitaires (sur les consultations chez le médecin, les examens de radiologie, les analyses de biologie…). Ce qui devrait correspondre à « 8 euros maximum par mois », pour chacun, a-t-il précisé.
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Inflammable, ce mode de déremboursement a déjà été décidé pour équilibrer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024. Le doublement de ces franchises, de 50 centimes d’euro à 1 euro sur chaque boîte de médicaments, mais aussi sur les actes paramédicaux et les transports sanitaires, avait été acté au terme de plusieurs mois de tergiversations politiques et de protestations des associations de patients.
« Responsabilisation » des assurés
Sans toucher, pour autant, au « plafond » annuel. « La notion de “c’est gratuit, j’y ai droit” est mortifère, rien n’est gratuit pour le système de santé », a défendu la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, Catherine Vautrin, dans son intervention dans la foulée du discours de M. Bayrou, en soutien de cette mesure de « responsabilisation » des assurés.
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Une autre annonce, sensible, concerne les malades chroniques, soit ces quelque 13 millions de personnes reconnues en affection de longue durée (ALD). Les concernant, le chef du gouvernement a repris à son compte des propositions émises par l’Assurance-maladie, en appelant de ses vœux un contrôle plus strict des remboursements de médicaments relevant – ou non – de cette affection, et une sortie du régime quand l’état de santé de la personne ne « justifie plus » cette prise à charge à 100 %. « Vingt pour cent des Français sont en affection de longue durée contre 5 % de la population allemande,a fait valoir M. Bayrou. Et je ne crois pas que les Français soient en plus mauvaise santé que les Allemands. »
Dans son rapport publié le 24 juin, l’Assurance-maladie, qui a prôné près de 4 milliards d’euros d’économies pour 2026, a ainsi évoqué une sortie du dispositif d’ALD pour des « personnes en situation de guérison ou de rémission de certaines pathologies », comme des « cancers en phase de rémission ». Une orientation là encore appuyée par la ministre de la santé : « La couverture des affections de longue durée mérite d’être revisitée dès lors que la plupart des pathologies sont devenues curables », a défendu Mme Vautrin.
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Derrière ces mesures touchant les ALD, il s’agira, en grande partie, d’un « transfert » de ces remboursements, pris en charge aujourd’hui par l’Assurance-maladie obligatoire, vers les complémentaires santé.
« On ne choisit pas d’être malade, diabétique, cardiaque…, réagit Jérôme Marty, président du syndicat de médecins libéraux UFML. Ce discours de culpabilisation est insupportable, et tout ça va encore se reporter sur les complémentaires, qui vont augmenter les cotisations des assurés. Si on veut tourner le dos au système solidaire, qu’on le dise clairement. »
Sur les arrêts maladie, M. Bayrou veut « mettre fin à une dérive »
Dans le secteur hospitalier, M. Bayrou a confirmé sa volonté d’un serrage de vis budgétaire, en réclamant une plus grande « efficience » aux établissements de santé, sur les achats de matériel notamment. Confrontés à des déficits inédits, évalués à près de 3 milliards d’euros en 2024, les responsables des hôpitaux publics s’inquiètent déjà d’un retour de la rigueur, alors qu’une circulaire budgétaire, envoyée fin avril par Matignon aux agences régionales de santé, a appelé à « relancer une démarche d’efficience et de performance ».
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Attendu sur la question des arrêts maladie, dont le nombre n’a cessé d’augmenter ces dernières années, le chef du gouvernement a assuré vouloir « mettre fin à une dérive ». Des « contrôles qui ont été exécutés sur les arrêts maladie de plus de dix-huit mois ont montré que, pour 50 % d’entre eux, ces arrêts de travail n’étaient plus justifiés », a-t-il souligné. Un salarié doit, selon lui, pouvoir reprendre le travail après plus de trente jours d’arrêt maladie sans voir le médecin du travail.
« Comme nous manquons cruellement de médecins du travail, comme d’autres spécialités, des dizaines de milliers de personnes qui souhaiteraient reprendre le travail en sont empêchées. (…) C’est absurde », a avancé M. Bayrou. Pour pallier cette pénurie, un médecin généraliste ou spécialiste pourrait décider du retour au travail (hors cas de maladies professionnelles et d’accidents du travail).