La course a l’Élysée, mon favori avance ses pions

François Ruffin lance « Debout ! » et avance ses pions à gauche pour l’élection présidentielle 2027

Le député de la Somme, candidat à une primaire de la gauche, restructure son mouvement « Picardie Debout ! » pour lui donner une envergure nationale. 

Par Publié hier à 23h19, modifié à 08h58 https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/06/26/francois-ruffin-lance-debout-et-avance-ses-pions-a-gauche-pour-l-election-presidentielle-2027_6616059_823448.html

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François Ruffin, à Dunkerque (Nord), le 1ᵉʳ mai 2025.
François Ruffin, à Dunkerque (Nord), le 1ᵉʳ mai 2025.  SAMEER AL-DOUMY / AFP

Il ne faut jamais dire jamais. François Ruffin s’est toujours tenu éloigné des appareils politiques. Tel était son mantra, lui l’électron libre revendiqué. Tout juste le député de la Somme a-t-il eu par le passé quelques accointances avec le Parti communiste, puis un pied au sein de La France insoumise (LFI) où il est devenu persona non grata après sa rupture avec Jean-Luc Mélenchon à l’été 2024. « Depuis vingt-cinq ans, je suis un agent d’influence à gauche. J’ai gagné des batailles culturelles sur des sujets qu’on disait interdits, comme le partage de la valeur ajoutée, la taxe aux frontières, etc. Ces combats, je les ai menés à travers mes livres et mes films, en ayant assez peu besoin d’une organisation politique », se justifie d’ailleurs l’intéressé qui n’avait lancé jusqu’alors qu’un microparti, « Picardie Debout ! », en 2019.

Désormais libéré de la tutelle mélenchoniste, celui qui ambitionne d’être le candidat commun de la gauche à la présidentielle de 2027 passe à la vitesse supérieure. Il lancera samedi 28 juin un nouveau mouvement, « Debout ! », lors d’une assemblée fondatrice dans le 13e arrondissement de Paris. Une émanation de « Picardie Debout ! » qu’il souhaite d’envergure nationale. Dotée d’un président – lui –, d’un parlement, d’antennes départementales, d’un conseil d’élus locaux, la structure compte aussi intégrer des instances où siégeront des représentants syndicaux, associatifs et sportifs, « des soignants, des enseignants et des policiers », renchérit François Ruffin. Aux municipales de 2026, le nouveau mouvement compte envoyer des forces vives au sein de listes de gauche dans des villes que le Rassemblement national pourrait remporter.

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Protectionnisme, critique de l’UE et de la mondialisation

« Debout ! » publiera samedi un manifeste, fruit d’un travail « commencé le 17 novembre 2018, quand nous étions sur les ronds-points et que le gros de la gauche se pinçait le nez », explique le parlementaire. On y lit les grandes lignes de la doctrine ruffiniste : protectionnisme, critique de l’Union européenne et de la mondialisation. Un manifeste aux échos du populisme de gauche, que M. Ruffin ne renie pas : « Je n’ai rien contre les élites mais les choix qu’elles ont faits depuis quarante ans ont cassé l’industrie et les services publics pour mieux les livrer à la finance. Elles ont encouragé la voracité et la rapacité. Elles ont l’argent, nous, on a les gens. »

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Ce texte fondateur d’une cinquantaine de pages devrait faire grincer des dents à gauche, et notamment au Parti socialiste. Sa condamnation de la construction européenne y est véhémente et assumée, et François Ruffin ne cache pas sa volonté d’aller à l’affrontement avec Bruxelles, quitte à désobéir aux traités. Une vieille antienne à gauche, qui avait été au cœur de débats lors des négociations de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) en 2022. « Je ne suis pas candidat à la présidence de l’Union européenne. C’est l’intérêt des Français d’abord que je veux défendre, tonne-t-il. L’acier français se fait ravager et nous continuons de signer des accords de libre-échange. Sans une France qui se fâche, qui désobéit, qui s’allie avec d’autres, l’Europe ne bougera pas. »

« Il faut de la lumière, de l’espérance »

Le réalisateur du documentaire Merci Patron ! (2016) compte publier d’ici l’automne « un plan de redressement budgétaire mais aussi de redressement social, industriel, diplomatique ou encore sur le logement ». Un texte qu’il mettra au pot commun de la gauche avant les élections municipales, en 2026, et la présidentielle, en 2027. « Ce n’est pas en agitant le spectre de l’extrême droite que l’on gagnera le combat mais en parlant du fond. Le pays est plein de colère et de jalousie. Si on nourrit cela, ça ne marchera pas. Il faut de la lumière, de l’espérance », prophétise-t-il comme une adresse à Jean-Luc Mélenchon, sans le nommer.

Le 2 juillet, François Ruffin se retrouvera autour de l’ancienne candidate du Nouveau Front populaire (NFP) pour Matignon Lucie Castets, la secrétaire nationale des Ecologistes Marine Tondelier et le premier secrétaire du Parti socialiste (PS) Olivier Faure lors de la journée de travail de la « plateforme unitaire » de la gauche à Bagneux (Hauts-de-Seine). Une initiative lancée par Lucie Castets à laquelle le PS, Les Ecologistes, Génération.s et L’Après (Association pour une république écologique et sociale) de plusieurs ex-« insoumis » ont répondu présents. Seuls LFI et Place Publique ont décliné l’invitation. Le Parti communiste, lui, ne devrait pas y participer non plus. Une structure commune avec les autres partis de gauche nécessaire aux yeux de M. Ruffin qui ne croit pas aux aventures individuelles de Jean-Luc Mélenchon ou de Raphaël Glucksmann : « Ils sont les deux faces d’une même pièce. Ils refusent une gauche qui fait du commun pour ne se partager que des parts de marché électoral. »

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Fin août, c’est avec Génération.s et L’Après des anciens de LFI Alexis Corbière, Clémentine Autain, Raquel Garrido et Danièle Simonnet que le président de « Debout ! » tiendra une université d’été à Châteaudun (Eure-et-Loir). Les trois partis ont longtemps hésité à faire bannière commune mais avec sa nouvelle écurie, François Ruffin avance ses propres pions sur le chemin de la gauche en vue de la présidentielle. Son mouvement doit l’aider à tirer son épingle du jeu pour compter tout particulièrement face aux machines électorales que sont le PS ou Les Ecologistes lors d’une primaire de la gauche encore bien abstraite.

*Raphaël Glucksmann pose ses jalons, et son programme, pour l’élection présidentielle 2027

Le député européen a présenté, lundi, à Paris, la « vision pour la France » de son mouvement, Place publique. Ce projet centré sur l’Europe, l’écologie et un « contrat social » doit permettre de relancer « la gauche pro-européenne et viscéralement démocrate ». 

Par Publié le 24 juin 2025 à 04h30, modifié le 24 juin 2025 à 08h47 https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/06/24/raphael-glucksmann-pose-ses-jalons-et-son-programme-pour-l-election-presidentielle-2027_6615544_823448.html

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Le député européen et fondateur de Place publique, Raphaël Glucksmann, lors de la conférence de presse « Notre vision pour la France », à Paris, le 23 juin 2025.
Le député européen et fondateur de Place publique, Raphaël Glucksmann, lors de la conférence de presse « Notre vision pour la France », à Paris, le 23 juin 2025.  THOMAS SAMSON/AFP

Dans un café branché du 10arrondissement de Paris, Raphaël Glucksmann a tenté, lundi 23 juin, de répondre à une question majuscule. « Que voulons-nous pour la France ? », s’est-il interrogé en brandissant un document jaune – la couleur de son parti, Place publique –, intitulé « Notre vision pour la France ». « La politique, c’est ça : travailler, travailler, travailler une vision qui se décline en projet », a-t-il martelé.

Dans cet « acte I » d’une centaine de pages, le fondateur de Place publique a balayé sur 42 chantiers sa fameuse « vision », fruit d’un travail de neuf mois avec 3 000 militants et d’un tour de France à bas bruit, sans caméras. Objectif non dissimulé, « que la gauche pro-européenne et viscéralement démocrate arrête de se faire marcher dessus et de foutre ses principes dans la poche », a-t-il résumé en référence à son adversaire à gauche, Jean-Luc Mélenchon, chez qui il puise, paradoxalement, de l’inspiration. Le triple candidat à la présidentielle avait fait de « L’Avenir en commun », épais programme construit avec les militants et régulièrement mis à jour, le socle de son mouvement, La France insoumise.

Alors que l’extrême droite n’a jamais été aussi forte en France, Raphaël Glucksmann souhaite « régénérer la démocratie » et « démonarchiser la France »« On touche à la fin d’un modèle. Une démocratie adulte, ce n’est pas juste tous les cinq ans », a fait valoir l’élu européen. Dans sa besace, la proportionnelle, l’investiture du premier ministre par un vote de confiance de l’Assemblée nationale et la possibilité pour les citoyens de flécher des fonds publics vers un parti politique au moment de leur déclaration d’impôts.

A rebrousse-poil

La ligne de force de son programme reste un saut dans l’Europe fédérale, avec une augmentation massive du budget de l’Union européenne, de l’aide à l’Ukraine ou encore la mise en place d’une défense européenne, grâce à un emprunt communautaire de 500 milliards d’euros.

L’écologie doit également devenir « le cœur des politiques publiques »« non pas par idéalisme mais par pragmatisme », a-t-il fait valoir, pour « retrouver souveraineté et puissance » et permettre notamment la réindustrialisation du pays. « C’est le contre-modèle au trumpisme, où vous pouvez dire “drill, drill, drill” [fore, fore, fore] », a poursuivi l’eurodéputé, qui avait, lors des dernières élections européennes, aspiré une grande partie des électeurs écologistes. Dans le répertoire de mesures proposées, figure notamment une « garantie universelle d’assurance climatique », l’objectif d’atteindre la neutralité climat en 2050, ou « un bouclier législatif pour la sobriété comprenant une loi contre la fast-fashion et un score carbone obligatoire sur les produits ». En revanche, il souhaite « conforter le rôle du nucléaire ».

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Par rapport aux européennes de 2024, l’essayiste a rajouté une thématique à son logiciel idéologique : « Le travail. » Il prône ainsi un nouveau « contrat social »« Il y a un lien consubstantiel entre la démocratie et le travail. Dans nos sociétés, la promesse qui était faite aux classes moyennes d’améliorer leur vie n’est plus tenue », a-t-il martelé. Il assure avoir compris « la colère justifiée des travailleurs qui ont le sentiment d’être spoliés » et souhaite une « politique ambitieuse sur les salaires, les conditions et le sens du travail ». Son programme préconise une augmentation du smic à 1 600 euros net à horizon 2029 ou encore l’indexation sur l’inflation du point d’indice des fonctionnaires.

Sur les retraites, le programme propose d’abroger la réforme d’Emmanuel Macron, qui a fait passer l’âge légal de départ à 64 ans, mais juge une réforme nécessaire. A l’opposé du reste de la gauche, qui se concentre encore sur les 62 ans, Raphaël Glucksmann veut « cesser la focalisation sur le seul âge légal »« Certains doivent pouvoir partir à 60 ans, d’autres devront travailler davantage », écrit-il. Pour l’instant, ce programme n’est pas financé, même si l’eurodéputé a déjà quelques idées. Il se montre prêt à prendre son électorat à rebrousse-poil en proposant, outre des mesures de gauche classiques comme la suppression de certaines niches fiscales, la taxation de superprofits, une plus grande fiscalisation des héritages, du capital ou des retraités les plus fortunés.

Conflit d’intérêts

Alors que Raphaël Glucksmann est, aujourd’hui, le seul rival à gauche de Jean-Luc Mélenchon dans les sondages, Manuel Bompard, le coordinateur national de La France insoumise, est monté au créneau en interpellant le reste de la gauche. Dans le programme de Place publique, il n’a trouvé que « neuf des trente mesures d’urgence du programme défendu par la gauche en juin 2024 »« Ceux qui veulent une primaire “de [François] Ruffin à Glucksmann” sont-ils d’accord pour déchirer le programme du Nouveau Front populaire ? », a-t-il fait mine de s’interroger sur X.

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Mais qu’on se le dise, pour l’instant, Raphaël Glucksmann « n’est pas candidat » à la présidentielle de 2027. Hasard du calendrier, sa compagne, la journaliste Léa Salamé, a annoncé le 19 juin qu’elle assurerait la présentation du « 20 heures » de France 2 à partir de septembre. De quoi jeter le trouble et nourrir la critique à un moment où la défiance envers le politique a rarement été aussi forte.

Interrogé sur le sujet, l’essayiste a préféré balayer tout conflit d’intérêts : « Elle, c’est elle, et moi, c’est moi. On est en 2025 et je ne me voyais absolument pas discuter avec elle du fait qu’elle devrait ne pas faire quelque chose d’aussi important pour sa carrière, parce que nous sommes engagés dans un processus politique. Donc, les choses sont posées, transparentes, très claires », a-t-il fait valoir, comme si seule une candidature officielle à une élection pouvait poser problème et que son statut actuel – un présidentiable assumé – n’en était pas un. D’ailleurs, s’il devait se présenter, la journaliste a annoncé qu’elle se mettrait en retrait.

Voir aussi:

**https://environnementsantepolitique.fr/2025/06/23/de-villepin-se-lance-pour-de-bon-en-creant-la-france-humaniste/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/03/14/comprendre-ce-que-nous-vivons-par-dominique-de-villepin/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/02/28/retour-en-politique-de-dominique-de-villepin-deja-favori-dans-les-sondages/

https://environnementsantepolitique.fr/2025/01/25/lettre-de-francois-ruffin-aux-socialistes/

https://environnementsantepolitique.fr/2024/11/08/francois-ruffin-envisage-de-se-presenter-a-lelection-presidentielle-2027-est-une-carte-qui-est-sur-la-table/

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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