Psychiatrie : Neuder veut 100 internes en plus à partir de 2027
Le ministère de la Santé a présenté, ce mercredi 11 juin, un vaste plan comprenant 26 mesures pour « refonder » la psychiatrie. Parmi elles : former 600 internes en psychiatrie par an d’ici à 2027.
Par Sandy Bonin
L’idée est de « faire en sorte d’avoir davantage d’étudiants en psychiatrie », a déclaré le ministre chargé de la Santé et de l’Accès aux soins, Yannick Neuder, sur France Inter, ce jeudi 12 juin, au lendemain de la présentation du plan psychiatrie du Gouvernement. L’objectif est de passer de 500 à 600 internes en psychiatrie par an à partir de 2027, et de faire en sorte « que chaque étudiant en médecine et en paramédical puisse effectuer un stage durant son parcours de formation en psychiatrie ».
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Sans doute un peu âgé, et plus très vif, j’avoue avoir un peu buté sur le sens de la question. Le premier réflexe du vieux singe … Lire plus
« Il faut aussi que les 15 000 psychiatres puissent s’investir, s’ils le souhaitent, dans la formation. Donc il y a des valences universitaires qui leur seront proposées », a ajouté le ministre, souhaitant « construire l’attractivité de la filière psychiatrie ». « 60% des internes pensent que la psychiatrie est une sous-spécialité et 30% en ont peur. Je pense que nous avons des mesures à travailler sur l’attractivité de la filière [et] les conditions d’exercice en psychiatrie », a-t-il dit. Et d’insister : « La psychiatrie ne doit plus être le parent pauvre de l’hôpital. »
Le ministre est revenu sur son ambition de « supprimer le numerus apertus », jugé encore trop restrictif. La proposition de loi portée fin 2023 par Yannick Neuder, alors député, a été votée par l’Assemblée nationale en décembre 2023 et est « inscrite à l’ordre du Sénat » le 17 juin, a-t-il précisé. « On va le supprimer et on fera en fonction des besoins des territoires. […] On pourra aussi rapatrier tous les étudiants français qui sont partis étudier en Roumanie, en Belgique pour qu’ils reviennent en France. Il y a trop de besoins en France », a-t-il dit.
[Avec radiofrance.fr]
Santé mentale : le gouvernement dévoile (enfin) son plan…et déçoit tout le monde
Quentin Haroche | 12 Juin 2025 https://www.jim.fr/viewarticle/santé-mentale-gouvernement-dévoile-enfin-son-plan-2025a1000ftc?ecd=wnl_all_250615_jim_jim-pro_etid7494634&uac=368069PV&impID=7494634&sso=true
Le plan du gouvernement contient 26 mesures axés sur le repérage des troubles psychiatriques et la réforme du système de santé psychiatrique.
Mieux vaut tard que jamais. L’année 2025, pour laquelle la santé mentale a été érigée au rang de « grande cause nationale », a débuté depuis six mois maintenant et le gouvernement n’avait pour le moment annoncé aucune mesure concrète dans ce domaine. Tout au plus s’était-il contenté d’annonces vagues et de décisions symboliques, comme la désignation du judoka Teddy Riner comme parrain de la santé mentale.
Face aux critiques récurrentes de l’opposition sur cet immobilisme, le gouvernement a enfin réagi. Ce mercredi, le ministre de la Santé Yannick Neuder a dévoilé le plan du gouvernement pour aider un secteur de la santé mentale en crise profonde depuis plusieurs années, pris en étau entre d’une part la hausse des besoins en soins psychiatriques (notamment pour les jeunes, chez qui les troubles mentaux sont en augmentation) et de l’autre le manque de moyens et d’effectifs de la psychiatrie française.
L’exécutif ne nie d’ailleurs pas avoir trop tardé à réagir à cette crise : « depuis trop longtemps, la santé mentale a été reléguée au second plan de nos politiques de santé et ce déni collectif, nous le payons cher : dans la détresse des jeunes, dans l’isolement des personnes fragiles, dans l’épuisement des soignants » écrit le ministre de la Santé dans la présentation de son plan.
Mais il affiche l’ambition, peut-être un peu excessive, de résoudre cette crise. « Ce plan psychiatrie est un plan de sursaut et de refondation. Il n’ajoute pas quelques mesures à une liste déjà longue. Il change de logique » écrit le ministre sur un ton emphatique.
Priorité affichée à la santé scolaire
Les 26 mesures que contiennent ce plan obéissent à une logique triple : mieux repérer, mieux soigner et « reconstruire » la psychiatrie. S’agissant du repérage, l’accent est mis sur la santé scolaire. Le gouvernement souhaite que, dans chaque collège et lycée, deux personnels soient formés au repérage des troubles psychiatriques.
L’exécutif veut également que l’ensemble du personnel médical des établissements scolaires soient formés à ce repérage et qu’un « kit de repérage » soit distribué dans les écoles. Les étudiants en médecine seront mobilisés dans cette mission de repérage en milieu scolaire et la formation au « secourisme de santé mentale » sera promue.
S’agissant du soin, l’ambition du ministère de la Santé est d’améliorer l’accès aux soins psychiatriques, notamment en urgence…tout en évitant justement de saturer des services d’urgences déjà en difficulté.
Ici, les mesures structurelles sont nombreuses : ouverture de consultations sans rendez-vous dans les centres médico-psychologique (CMP), déploiement des services d’accès aux soins (SAS) psychiatriques dans au moins 30 territoires, désignation d’un infirmier référent en santé mentale dans chaque maison de santé et service d’urgence général etc.
L’exécutif continue également de compter sur le dispositif « Mon soutien psy » (pourtant très décrié) et souhaite passer de 6 000 psychologues concernés à 12 000 d’ici 2027. Le ministère de la Santé en profite pour inciter les soignants à avoir recours le moins possible à l’isolement et à la contention… mais sans interdire ces pratiques.
Enfin, le gouvernement ambitionne de « reconstruire » la psychiatrie française, souvent qualifiée de parent pauvre de notre système de santé. L’exécutif propose ainsi de renforcer la formation initiale des étudiants en médecine en psychiatrie et d’atteindre les 600 internes en psychiatrie (contre environ 500 actuellement) d’ici 2027. Le gouvernement entend également mieux lutter contre les pénuries de psychotropes, qui touchent notre pays depuis le début de l’année, mais sans solution précise pour résoudre ce problème.
A la lecture de ces mesures, on ne peut être qu’étonné par l’absence totale de précisions financières. Une absence remarquée par les syndicats de psychiatres, de professionnels de santé scolaire et des associations de patients qui sont presque unanimes dans leur critique d’un plan qu’ils ne jugent pas à la hauteur de la crise.
« On est encore sur des mesurettes, on dit priorité à la santé mentale, mais je constate que l’on renonce à mettre dans les écoles des nouveaux professionnels spécifiquement dédiés aux troubles psy » tacle auprès du Parisien le syndicat des infirmières scolaires (SNICS-FSU).
« Il y a des grandes lignes, mais il manque des éléments financiers majeurs, un échéancier et quantité de mesures : il n’y a rien sur la prévention, le repérage précoce, la recherche et la question des jeunes» abonde dans le même sens pour le Nouvel Obs l’Inter syndicat national des praticiens hospitaliers (INPH).
Créateur avec sa fille d’une application d’aide aux jeunes touchés par la dépression et l’anxiété, Guirchaume Abitbol regrette au micro de France info« l’absence totale de la prévention » dans ce plan. Le Pr Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie de l’hôpital Henri Mondor de Créteil, se montre à peine plus positif. « Tout est bon à prendre, et ce ne sont que des choses positives sur le principe, mais cela reste du saupoudrage » commente-t-il.
Mais Yannick Neuder assume l’absence de mesures financières dans son plan. « La psychiatrie dispose d’un budget de plus de 430 millions en 2025, on peut avoir toujours plus, mais on peut aussi mieux s’organiser avec ce qu’on a aujourd’hui » explique-t-il dans une interview au Parisien, tout en indiquant qu’il tentera (mais cela risque d’être difficile au vu du contexte budgétaire) d’obtenir des financements supplémentaires pour la psychiatrie dans le prochain budget. Il appelle en tous les cas les psychiatres à se montrer patients.
« C’est le début d’un vaste chantier, tout ne sera pas en place au 1er septembre et il va falloir plusieurs années » explique-t-il. « Je ne vends pas de solution miracle, mais il faut commencer à agir dès maintenant ».
LA REVUE DE PRESSE QUOTIDIENNE DE L’ACTUALITÉ MÉDICALE ET DE LA SANTÉ
Revue de presse du 12 juin 2025
« Santé mentale des jeunes : après le drame de Nogent, le gouvernement a un nouveau plan pour la psychiatrie »
Date de publication : 12 juin 2025 https://www.mediscoop.net/index.php?pageID=90aeb6d193a77a79d65876d40d16ef38&id_newsletter=22076&liste=0&site_origine=revue_mediscoop&nuid=44baf5968540a6248a8065e80f2f7273&midn=22076&from=newsletter
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« Le ministre de la Santé, Yannick Neuder, a présenté (…), un «plan d’action» santé mentale et psychiatrie, qui intègre des mesures de détection en milieu scolaire, poussées par sa collègue à l’Education, Elisabeth Borne », fait savoir Nathalie Raulin dans Libération. « C’est que la situation est alarmante. Depuis des mois, les instances sanitaires alertent sur le mal-être post-crise sanitaire de la population et particulièrement des jeunes », note la journaliste
« Tous les indicateurs sont au rouge. En 2023, les urgences hospitalières ont enregistré plus d’un demi-million de passages pour motif psychiatrique, soit une hausse de 21% au regard de la situation pré-Covid, particulièrement portée par les adolescents et les jeunes adultes », poursuit-elle.
« Cette même année, 936.000 jeunes de 12 à 25 ans ont bénéficié du remboursement d’au moins un psychotrope : 144.000 patients de plus qu’en 2019. Chez les 18-24 ans, la prévalence des épisodes dépressifs est passée de 11,7% à 20,8% entre 2017 et 2021… », souligne la journaliste.
« Entre fermeture de lits d’hospitalisation et manque de personnel médical et paramédical formé, «la capacité du système de soins psychiatriques à répondre aux nouveaux besoins de soins de la population se dégrade, engendrant dans un système de soins saturé des phénomènes d’éviction», [selon] le rapport sur les urgences psychiatriques des députées Nicole Dubré-Chirat et Sandrine Rousseau », rappelle Libération.
« Et la pédopsychiatrie est la première victime de la déliquescence de la filière », soulignent les élues. « En 2023, 123 enfants de moins de 15 ans s’étant présentés aux urgences du CHU de Nantes pour des idées suicidaires ou une tentative de suicide, ont dû retourner sans soins à leur domicile, alors même que la pédopsychiatre qui les avait évalués énonçait une indication formelle d’hospitalisation… », alerte la journaliste.
« Le plan présenté ce mercredi ne prévoit en effet «aucune mesure financière» de l’aveu même de l’entourage du ministre. En clair, les mesures préconisées devront être mises en place à moyens (au mieux) constants, par redéploiement de crédits », analyse Nathalie Raulin. « De quoi augurer des changements surtout cosmétiques », estime la journaliste.
« Les mesures préconisées se déclinent sur trois axes. En premier lieu, il s’agit d’«investir sur le repérage et l’intervention précoce» des souffrances psychiques, notamment chez les 12-25 ans, sur tout le territoire », détaille l’article.
« Conformément à l’annonce faite par Elisabeth Borne, deux «personnels repères» en santé mentale seront formés dans tous les établissements scolaires et circonscriptions du premier degré d’ici à la fin de l’année scolaire 2026 », complète-t-il.
« Neuder prévoit de mobiliser les étudiants en santé qui forment la réserve sanitaire : ils interviendront dans les écoles, collèges et lycées pour aider les jeunes à gérer leurs émotions et les sensibiliser au respect mutuel », révèle la journaliste.
Par ailleurs, « les services d’accès aux soins (SAS) devront intégrer un correspondant formé à la psychiatrie : en cas d’appel du numéro d’urgence, il sera dès lors possible d’orienter les patients vers les services et établissements adaptés », reprend-elle. « De même, un infirmier référent en santé mentale devra être désigné dans chaque service d’urgences, maison de soins pluri-professionnelle ou communauté professionnelle territoriale de santé pour faciliter les parcours de soins », ajoute-t-elle.
« Pour finir, le plan prévoit une série de mesures pour renforcer l’attractivité de la psychiatrie, souvent considéré comme le parent pauvre de la médecine. Objectif du gouvernement : porter à 600 le nombre d’internes formés en psychiatrie à partir de 2027 », précise-t-elle. « Reste que cet empilement de mesures ne suffira pas à ragaillardir une filière psychiatrique désenchantée », conclut Nathalie Raulin.
De son côté, Le Parisien fait savoir que « plusieurs professionnels de santé réagissent à l’arsenal de mesures dévoilé par le gouvernement ce mercredi. Et ils sont, globalement, très déçus ».
« Tout est bon à prendre, et ce ne sont que des choses positives sur le principe, mais cela reste du saupoudrage », réagit Antoine Pelissolo, chef de service en psychiatrie au CHU Henri-Mondor, à Créteil (Val-de-Marne). « On est encore sur des mesurettes », tacle Saphia Guereschi, secrétaire générale du syndicat d’infirmières scolaires SNICS-FSU.
« On sent une volonté d’apporter des réponses à la question de la santé mentale, mais une très grande partie des propositions repose sur les personnels existants », pointe Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat des enseignants du secondaire. « Il faut aussi un effort budgétaire conséquent pour recruter des personnels supplémentaires », insiste-t-elle.
« Les moyens de l’ARS, mais quels moyens ? Les fonds régionaux sont minimes, et ce n’est pas avec ça que l’on parviendra à ouvrir des consultations sans rendez-vous, car il faudrait deux ou trois professionnels en permanence », s’insurge le Pr Pelissolo.
« Pour mieux prendre en charge les cas les plus graves qui arrivent à l’hôpital, le gouvernement veut qu’un infirmier devienne «référent en santé mentale» dans chaque service d’urgence d’ici à 2026 », reprennent Nicolas Berrod et Juliette Pousson.
« Former des internes prend 5 ans, alors que l’on vit aujourd’hui une véritable pénurie de psychiatres, de psychologues et d’infirmiers spécialisés », prévient Rachel Bocher. « Pas convaincue, la cheffe du service de psychiatrie au CHU de Nantes «ne voit rien de possible à court terme sans nouveaux professionnels» », notent les journalistes.
« Une chose manque surtout dans ce plan, se désolent les acteurs de santé : l’argent », soulignent-ils. « Les moyens actuels sont notoirement insuffisants, en particulier aux urgences. Pour avoir davantage d’humains, il faut davantage d’argent », pointe Antoine Pelissolo.
Voir aussi:
https://environnementsantepolitique.fr/2025/06/13/un-plan-pour-la-sante-mentale-sans-moyens/