L’utilisation des technologies numériques est associée à une réduction du risque de déficience cognitive

Déclin cognitif : l’étude qui crève l’écran

Frédéric Haroche| 06 Juin 2025 https://www.jim.fr/viewarticle/déclin-cognitif-létude-qui-crève-lécran-2025a1000faw?ecd=wnl_all_250615_jim_top-jim_

La première génération ayant utilisé les technologies numériques (ordinateurs de bureau et plus tard smartphones), les fameux « boomers », est arrivée à l’âge des risques de démence. L’exposition croissante à ces nouvelles technologies, a-t-elle eu un impact positif ou négatif sur les capacités cognitives des pionniers du numérique ? L’hypothèse de la « démence numérique » postule qu’une vie d’exposition à la technologie détériore les capacités cognitives. Une hypothèse inverse est que de telles expositions favorisent des comportements (communication, socialisation, jeux ‘intelligents’) qui préservent la cognition.

AUne vaste méta-analyse menée par les neuroscientifiques Jared F. Benge et Michael K. Scullin, récemment publiée dans Nature, penche en faveur de la seconde hypothèse, prenant à rebours les discours alarmistes bien connus sur les effets supposément délétères des écrans, et en particulier des smartphones, accusés de « ramollir le cerveau ».

Ces travaux ont consisté en une revue systématique de 136 études répertoriées dans huit grandes bases de données scientifiques (Medline, PsycInfo, Cochrane, etc.), portant au total sur 411 430 adultes âgés en moyenne de 68,7 ans.Parmi ces études, 57 ont pu être intégrées à une méta-analyse quantitative, permettant d’évaluer l’association entre l’usage des technologies numériques (ordinateurs, smartphones) et des marqueurs de déclin cognitif ou de diagnostic de démence.

Au total, l’utilisation des technologies numériques était associée à une réduction du risque de déficience cognitive (OR = 0,42, IC 95 % : 0,35–0,52) et à une réduction des taux de déclin cognitif en fonction du temps (HR = 0,74, IC 95 % : 0,66–0,84). Les effets restaient significatifs après prise en compte des variables démographiques, socio-économiques, de santé et des indicateurs de réserve cognitive.null

L’étude distingue par ailleurs les usages passifs (type visionnage de contenus) des usages interactifs (communication, résolution de problèmes, navigation, création), sans surprise, ces derniers étant les plus fortement corrélés à des bénéfices cognitifs.nullnull

Une piste pour la prévention du vieillissement cérébral ?

Ces recherches s’inscrivent dans le contexte d’un nouveau regard sur le numérique. Alors que les inquiétudes autour des effets délétères de l’exposition aux écrans, notamment chez les enfants, dominent souvent le débat public (jusqu’au sommet de l’état), cette méta-analyse nuance le discours : la technologie n’est ni bonne ni mauvaise en soi, tout dépend de son usage, de son intensité, de sa finalité (ce qui est d’ailleurs également dorénavant avancé par certains chercheur pour les enfants).

Les auteurs restent néanmoins prudents. Leur analyse, bien que rigoureuse, ne permet pas de déduire une relation causale directe : il est en particulier possible (probable ?) que les individus avec la meilleure capacité cognitive soient plus enclins à adopter les technologies numériques. Ils proposent aussi que soient menées des études longitudinales à visée interventionnelle pour affiner les mécanismes à l’œuvre et mieux caractériser les profils les plus sensibles aux bénéfices de cette « réserve technologique ».null

De quoi peut-être convertir les derniers réfractaires.


References 

Benge JF, Scullin MK. A meta-analysis of technology use and cognitive aging. Nature. 2025 Apr; [en ligne].

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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