La Cour des Comptes avance plusieurs pistes pour éviter un dérapage des dépenses de santé dans les années à venir.

Assurance maladie : comment économiser 20 milliards d’euros d’ici 2029 ?

Quentin Haroche| 15 Avril 2025 https://click.email.jim.fr/?qs=eb37093681f52f09c0a2ee03af45ab7c22f787a19cca3f8be38873bc43b311e3aff93100ea2a18edf01e6bd6caf141506a887cfaf8feb4d8a072aebb9c4099c1

Dans son dernier rapport, la Cour des Comptes avance plusieurs pistes pour éviter un dérapage des dépenses de santé dans les années à venir.nullLISEZ LA SUITE CI-DESSOUS 

A peine la loi de financement de la Sécurité Sociale (LFSS) pour 2025 a-t-elle était adoptée fin février (dans la douleur, puisque son examen a abouti au vote d’une motion de censure fin 2024) que les autorités se tournent déjà vers l’exercice 2026. Alors que le gouvernement organise ce mardi une conférence sur les finances publiques, la Cour des Comptes a décidé d’être force de proposition, dans un rapport remis ce lundi.

Et comme à son habitude, les magistrats comptables souhaitent faire des économies, cette fois sur les dépenses de santé tout en déclarant que « ce n’est pas un plan d’austérité ». La Cour met ainsi en avant 15 propositions pour économiser « entre 19,4 milliards et 21,4 milliards d’euros d’ici à 2029 ». Le seul moyen, selon les auteurs du rapport, de faire face à la hausse structurelle des dépenses de santé (+ 2,9 % par an) sans occasionner un dérapage des dépenses publiques.

Sans mesures d’économie, le déficit de l’Assurance Maladie pourrait en effet atteindre les 20 milliards d’euros en 2028 et la dette cumulée entre 2025 et 2028 serait supérieur à 73 milliards d’euros. « L’objectif n’est pas de baisser le taux de l’Ondam mais de mieux maîtriser sa progression, il y a un chemin pour trouver des économies sans dégrader la Sécurité sociale » tente de rassurer Pierre Moscovici.null

La Cour vise plus de 5 milliards d’euros d’économie sur les médicaments

Certaines des mesures avancées par la Cour des Comptes sont assez classiques et consensuelles. Elle propose en premier lieu d’accentuer la lutte contre la fraude. Certes des efforts ont été faits ces dernières années (628 millions d’euros de fraude ont été évités en 2024) mais des progrès sont encore possible quand on sait que le niveau de la fraude est estimé à 4,5 milliards d’euros par an. La Cour note à ce titre des disparités dans la politique anti-fraude selon les territoires et la faiblesse de cette lutte dans la branche autonomie. nullnull

Autre proposition relativement classique : la Cour souhaite améliorer la pertinence des soins et mettre fin aux disparités entre les territoires. Elle note ainsi que les dépenses de santé standardisées par habitant varient presque du simple au double selon les départements. Les différents territoires sont donc priés d’aligner leur pratiques (si possible sur la politique la moins dépensière !).

Selon une rengaine habituelle, la Cour souhaite également mettre fin aux prescriptions inutiles, par exemple de dosages de vitamine D ou de certaines prescriptions d’inhibiteurs de la pompe à protons (IPP). La Cour estime ainsi pouvoir faire 5,3 milliards d’euros d’économie sur les dépenses de médicaments, notamment en définissant « une trajectoire pluriannuelle de baisse de leur prix ». Le rapport cite également les transports sanitaires et les arrêts de maladie comme sources d’économie potentielle.null

Si ces mesures sont relativement consensuelles, la Cour préconise également, de manière plus polémique, d’accélérer la restructuration de l’offre hospitalière. Elle note que de nombreux petits hôpitaux ont une activité trop faible et doivent faire appel à des intérimaires très couteux pour continuer à fonctionner.

« Dans cette perspective, une réorganisation territoriale des parcours de soins passe par des solutions fondées sur des regroupements au sein des groupements hospitaliers de territoire » écrit la Cour. Le rapport estime également nécessaire de continuer à « rééquilibrer la prise en charge des dépenses de santé », comprenez de transférer davantage de charges de l’Assurance maladie vers les complémentaires santé.

La Cour veut mettre le holà sur les revalorisations

Enfin, les dernières pages du rapport risquent d’être particulièrement mal accueilli par les professionnels de santé. La Cour considère en effet que « les professionnels de santé et les assurés doivent être associés à ces efforts, dans une logique de responsabilisation ».

Le rapport propose ainsi de « limiter l’ampleur des revalorisations concernant les mesures conventionnelles en soins de ville et les mesures salariales en établissements de santé et médico-sociaux » en espérant économiser ainsi 3 à 4 milliards d’euros par an. Une proposition que les médecins, qui réclament régulièrement des revalorisations et dénoncent le manque d’attractivité de leur profession, risque de ne pas apprécier !

S’agissant plus particulièrement de la médecine libérale, la Cour note que les revalorisations de la dernière convention signée en juin dernier vont couter 1,6 milliards d’euros par an à la CNAM. Elle estime donc qu’à l’avenir, les revalorisations devront être conditionnées à la « réalisation effective des économies envisagées pour les gager ». On se souvient que tel était l’intention de la CNAM dans le projet de convention qu’elle avait élaboré en 2023…texte qui avait été rejeté par les syndicats. 

Le Premier Ministre François Bayrou s’inspirera-t-il de ce rapport pour proposer, à l’automne prochain, un budget de rigueur pour la Sécurité Sociale ? Au vu de la situation politique particulièrement instable, cela semble peu probable.

Voir aussi:

https://environnementsantepolitique.fr/2025/04/15/apres-les-fermetures-de-maternites-les-centres-de-perinatalite-qui-devaient-continuer-a-assurer-le-suivi-des-grossesses-et-apres-les-accouchements-eux-aussi-nont-pas-les-moyens-de-fonctionner-corr/

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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