DECRYPTAGE. Autoroute A69 Castres-Toulouse : pourquoi la justice a-t-elle annulé l’arrêté préfectoral autorisant le chantier ?
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Autoroute A69 Castres-Toulouse, Justice, Transports
Publié le 27/02/2025 à 13:35 , mis à jour à 14:25
La rédaction
l’essentiel
La justice a rendu son verdict ce jeudi 27 février : le chantier de l’autoroute A69 doit s’arrêter. Explications.
Le tribunal administratif de Toulouse a annoncé, ce jeudi 27 février à la mi-journée, l’annulation du projet de l’autoroute A69, censé relier Toulouse à Castres (Tarn). De fait, les travaux sont suspendus, mais l’Etat va faire appel de cette décision.
Ce que dit la décision
C’est dans l’article 2 de la décision que se situe la principale information : « L’arrêté du 1er mars 2023 par lequel les préfets de la Haute-Garonne et du Tarn ont délivré à la société Atosca une autorisation au titre de l’article L. 181-1 du code de l’environnement en vue de la réalisation des travaux la liaison autoroutière entre Verfeil et Castres, dite A69, ainsi que les décisions implicites de rejet des recours gracieux formés par l’association Renaissance du château de Scopont, la SCI du château de Scopont et l’association Sites & Monuments sont annulés ».
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Une demande d’associations et d’organisations syndicales
Cette décision fait suite à une demande conjointe de :
- l’association France Nature Environnement Midi-Pyrénées
- l’association Agir pour l’environnement
- l’association les Amis de la Terre Midi-Pyrénées
- l’association pour la taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens du Tarn
- l’association Groupe national de surveillance des arbres
- l’association Nature en Occitanie, l’association Union protection nature environnement du Tarn
- l’association Village action durable
- la commune de Teulat, la fédération syndicale Confédération paysanne
- la fédération syndicale Confédération paysanne de la Haute-Garonne
- la fédération syndicale Confédération paysanne Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon
- la fédération syndicale de la Confédération paysanne du Tarn
- la société Atelier Missègle et atelier Joly
Représentées par Me Terrasse, ces parties demandaient la suspension du chantier de l’A69 en raison d’atteintes environnementales.
Pas de « raison impérative d’intérêt public majeur »
Le 18 février, la rapporteuse publique Mona Rousseau avait préconisé l’annulation de l’autorisation environnementale de l’A69, en se fondant sur l’absence de « raison impérative d’intérêt public majeur » du projet autoroutier. Cette notion permet de motiver la dérogation aux textes du Code de l’environnement, notamment ceux concernant la protection des espèces protégées ou des habitats.
Le tribunal a donné raison à cet argument, entraînant l’annulation de l’autorisation environnementale qui permettait de construire l’A69. Le tribunal administratif estime en effet que les bénéfices économiques, sociaux et de sécurité publique, du projet sont trop limités. Par ailleurs, « la juridiction administrative estime que le coût élevé du péage du projet A69 est de nature à en minorer significativement l’intérêt pour les usagers et les entreprises. »
La justice a en revanche rejeté les demandes d’indemnisations des associations environnementales.
Cette décision est susceptible d’appel de la part de l’État et du Conseil départemental du Tarn. Selon nos informations, cet appel ne devrait faire aucun doute.
Des conséquences directes
Privés de cette base légale, les travaux de l’autoroute A69 doivent s’arrêter immédiatement, y compris pour l’A680 qui doit relier l’A68 à l’A69 au niveau de Gragnague en Haute-Garonne.

Avant que la décision en soit connue, l’État et Atosca avaient estimé qu’un éventuel arrêt des travaux sur les 53 km prendrait des semaines et serait coûteux. Il faudra, selon eux, stabiliser des ouvrages en cours de réalisation, protéger ceux déjà édifiés, surveiller des matériels entreposés ou encore installer des clôtures autour des bassins et fossés ouverts. Cette sécurisation du chantier, ajoutée à l’application des clauses de suspension du contrat, coûterait plusieurs millions d’euros.
REACTIONS. Autoroute A69 suspendue : « victoire historique », « je reprends goût à la justice »… les opposants au projet exultent
Autoroute A69 Castres-Toulouse, Transports, France – Monde
Publié le 27/02/2025 à 14:50 , mis à jour à 14:52 https://www.ladepeche.fr/2025/02/27/reactions-autoroute-a69-suspendue-victoire-historique-je-reprends-gout-a-la-justice-les-opposants-au-projet-exultent-12538959.php
ALC
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l’essentielLa décision du tribunal administratif de Toulouse était très attendue, tant par les partisans du projet autoroutier que par ses opposants. Voici les réactions de ceux pour qui cette suspension de chantier est « une victoire ».
Le tribunal administratif de Toulouse a annulé jeudi l’arrêté préfectoral autorisant le chantier de l’autoroute A69 Toulouse-Castres, a-t-on appris auprès des avocates des opposants et du concessionnaire, qui se sont vu notifier la décision.
Scènes de liesse pour les membres du collectif La Voie est libre
Au bar le Winger, rue Bayard à Toulouse, une trentaine de membres du collectif La Voie est libre est venue fêter bien plus qu’une décision de justice. « C’est une victoire !, s’exclame un combattant historique de l ‘A69, le Tarnais Bernard Cottaz-Cordier. Le droit environnemental a été respecté ».
Au milieu des larmes de joie, c’est aussi l’incrédulité qui domine, à l’image du militant-ecureuil, Thomas Brail venu saluer cette décision du tribunal administratif de Toulouse de stopper le chantier autoroutier entre Toulouse et Castres : « Je ne m’y attendais pas et avais un peu perdu foi en la justice… Comme quoi, il ne faut jamais perdre espoir ! ».
Une « victoire historique pour la justice environnementale », pour la députée écologiste Christine Arrighi
La députée écologiste de la 9e circonscription de Haute-Garonne, Christine Arrighi a salué la décision du tribunal administratif de Toulouse. Elle y voit « l’aboutissement d’années de mobilisation citoyenne et de démarches juridiques sans précédent, unies pour défendre le vivant, nos territoires et l’intérêt public face à un projet anachronique. » L’élue a rappelé que le projet de l’A69 avait suscité une opposition massive en raison de son incohérence environnementale et sociale ».
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« Le caractère écocide » reconnu, pour le député LFI François Piquemal
La justice reconnaît enfin le caractère écocide inadapté du projet d’autoroute A69 et en stoppe le chantier. Le droit s’applique à tous, y compris à l’État lorsque ses décisions sont manifestement illégales. C’est une victoire sociale et environnementale, a publié le député de la 4e circonscription de Haute-Garonne sur X.
« Victoire contre un projet aussi inutile que dévastateur » pour l’eurodéputée Marie Toussaint
La députée européenne Marie Toussaint (EELV) a salué, de son côté, une « victoire contre un projet aussi inutile que dévastateur ». Elle a également remercié « celles et ceux qui ont lutté sans céder au découragement, sous les mensonges, les insultes et les attaques ». Pour elle, « à l’heure où l’écologie est attaquée de toute part il est essentiel que la justice dise l’importance du vivant et de la nature ». Marie Toussaint conclue : « L’État doit en finir avec sa funeste obstination et ne doit pas faire appel de cette décision ».
Une « victoire » et un message ciblé, pour le député LFI Hadrien Clouet
Le député LFI de la 1e circonscription de Haute-Garonne salue une « victoire » et a une « pensée émue aux lobbies et à Carole Delga ».
Des tournesols pour Marine Tondelier
Republiant notre direct, la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier a simplement posté 4 emojis de tournesol, symbolisant, on peut l’imaginer la victoire de la nature sur un projet autoroutier décrié par les écologistes.
Une joie qui n’efface pas la répression pour les opposants
« Si la joie nous habite aujourd’hui, nous voulons revenir sur l’énorme répression judiciaire d’autant plus injustifiable », a écrit le collectif anti-repression de l’A69 dans un communiqué de presse. « En ce jour de célébration, les marques profondes de la répression, logées dans nos corps ou couchés sur les papiers du système judiciaire sont bien vivantes. Ce jour marqué aussi par la reconnaissance de la faute de l’État dans la mort de Rémi Fraisse par la CEDH, dix ans après son assassinat ; le bras armé de l’État n’a cessé ses actions mortifères », poursuivent-ils.
« Je reprends goût à la justice », réagit Thomas Brail
Thomas Brail, le fondateur du Groupe national de surveillance des arbres s’est également réjoui de la décision du tribunal administratif. Ce dernier a estimé que « les politiques nous doivent des excuses ».
« Ensemble, on peut nager à contre-courant » : sur la place du Capitole, 400 manifestants célèbrent l’arrêt du chantier de l’A69
ABONNÉS
Les défenseurs de l’environnement crient victoire. DDM – FREDERIC CHARMEUX
Autoroute A69 Castres-Toulouse, Toulouse, Haute-Garonne
Publié le 27/02/2025 à 19:32 , mis à jour à 19:45 https://www.ladepeche.fr/2025/02/27/ensemble-on-peut-nager-a-contre-courant-sur-la-place-du-capitole-400-manifestants-celebrent-larret-du-chantier-de-la69-12539844.php
Hocine Zaoui
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l’essentielCe jeudi soir, près de 400 militants anti-A69 ont célébré sur la place du Capitole la décision du tribunal administratif de Toulouse d’annuler le chantier d’autoroute entre Castres et Toulouse.
De part et d’autre de la place du Capitole, à Toulouse, des groupes de militants anti-A69 se forment. Ce jeudi, un homme sur un vélo arrive en criant et en agitant un drapeau de La Voie est Libre, un collectif opposé au projet autoroutier. Des applaudissements résonnent. Les défenseurs de l’environnement se rassemblent.
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Les 400 personnes rassemblées exultent. Certains se prennent dans les bras en se disant : « On a gagné. » Ce jeudi, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’arrêté préfectoral autorisant le chantier de l’autoroute A69, entre Toulouse et Castres. « No macadam » est scandé avec force. Un militant de La Voie est Libre prend le mégaphone : « Merci d’y avoir cru. On peut nager à contre-courant tous ensemble. On est à rebours de leur monde de merde, on a gagné. » Un autre assure qu’il y aura un « avant et un après A69 ». « N’oubliez pas cette date historique », lance-t-il.

Prise de parole politique
Anne Stambach-Terrenoir, députée LFI de la 2e circonscription de Haute-Garonne, se réjouit que « l’intérêt général » ait gagné « face aux intérêts économiques et politiques de quelques-uns ». La parlementaire salue le courage des écureuils et des grévistes de la faim, qui « ne sont pas des éco-terroristes comme l’affirmait Gérald Darmanin ».

Thomas Brail, fondateur du Groupe National de Surveillance des Arbres, est l’un des premiers écureuils, ces militants écologistes qui se sont installés dans les arbres. **Il est submergé par l’émotion.** « Il ne faut pas avoir peur de la garde à vue ou des gendarmes, mais du mur qu’on va se prendre demain si on continue les projets aussi dévastateurs », alerte-t-il.
A lire aussi : Autoroute A69 à l’arrêt : comment l’État compte faire redémarrer le chantier « au plus vite » en demandant un « sursis à exécution »
En traversant la place du Capitole, deux vieilles dames s’arrêtent à côté du rassemblement. « Tu le savais, toi, que l’A69, c’était fini ? C’est dingue », glisse l’une à l’autre.
Autoroute A69 à l’arrêt : pourquoi cette décision aussi tardive alors que le chantier est déjà réalisé aux deux tiers ?
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Autoroute A69 Castres-Toulouse, Transports, Politique
Publié le 28/02/2025 à 06:31 , mis à jour à 07:39 https://www.ladepeche.fr/2025/02/28/autoroute-a69-a-larret-pourquoi-cette-decision-aussi-tardive-alors-que-le-chantier-est-deja-realise-aux-deux-tiers-12539783.php
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l’essentiel
Le tribunal administratif de Toulouse a mis un coup d’arrêt hier à l’imposant chantier de l’autoroute A69 Castres-Toulouse, en annulant son autorisation environnementale, pourtant réalisé aux deux tiers. Une première pour une infrastructure routière de cette envergure en France, signant un revers pour l’État, qui fait appel.
C’est un coup de tonnerre qu’a déclenché hier en Occitanie le tribunal administratif de Toulouse en décidant d’annuler les autorisations environnementales de l’autoroute A69 Castres-Toulouse accordées en 2023. La conséquence est la mise à l’arrêt immédiat du chantier, pourtant réalisé aux deux tiers.https://www.scribd.com/embeds/833373304/content?start_page=1&view_mode=scroll&access_key=key-EYfySNPF8wJsmmlcC3GW&scribd_rebrand=true
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Une décision logique pour les opposants à cette autoroute de 53 kilomètres dont la genèse remonte aux années 90 ; un jugement ubuesque pour les partisans de cet axe censé désenclaver le bassin de Castres et assurer son développement économique.
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L’arrêté préfectoral ayant permis le début du chantier annulé
Les trois juges administratives ont suivi l’avis de la rapporteure publique, qui leur avait par deux fois demandé « l’annulation totale » de l’arrêté préfectoral ayant permis le début du chantier en 2023. À l’audience du 18 février, cette magistrate, Mona Rousseau, avait réaffirmé que les gains espérés de la future autoroute – environ 20 minutes de temps gagné – n’étaient pas suffisants pour établir une « raison impérative d’intérêt public majeur » justifiant les atteintes à l’environnement commises par le projet.
En 24 pages, le tribunal détaille sa décision. Il pointe l’insuffisance de l’étude d’impact, notamment sur les continuités écologiques et les zones humides et la sous-estimation des impacts cumulatifs liés aux centrales d’enrobage. L’évaluation des alternatives possibles (exploitation et amélioration des infrastructures existantes) a été jugée insuffisamment explorée.
Sur les dérogations pour les espèces protégées, le tribunal a estimé que l’argument du désenclavement économique du bassin de Castres-Mazamet était insuffisant pour justifier des atteintes significatives à la biodiversité. Et les mesures compensatoires proposées ont été jugées trop limitées et mal dimensionnées, en particulier pour la préservation des zones humides.

Le tribunal a également estimé que le projet ne respectait pas les protections applicables aux monuments historiques ; l’avis de l’Architecte des Bâtiments de France, censé être obligatoire, n’ayant pas été pris en compte de manière conforme. Enfin, le tribunal a jugé l’enquête publique irrégulière, soulignant un manque d’informations claires, un refus d’organiser certaines réunions et l’influence du maître d’ouvrage sur la commission d’enquête.
Au vu de tous ces éléments, le tribunal a annulé l’arrêté préfectoral du 1er mars 2023 retirant ainsi l’autorisation environnementale et empêchant de facto la poursuite des travaux sous leur forme actuelle.
Une décision tardive qui interroge
Pour nombre de juristes, cette décision était attendue compte tenu des fragilités du dossier et, dans un état de droit, elle doit évidemment être respectée. On peut toutefois déplorer qu’elle n’ait pas été rendue avant le commencement du chantier qui a par ailleurs fait l’objet d’une multitude de consultations, procédures et décisions judiciaires pendant de nombreuses années.
On ressent aussi un malaise sur la « raison impérative d’intérêt public majeur » qui peut recouvrir bien des réalités. Les magistrates ont estimé qu’elle était absente du projet d’autoroute. Mais les habitants, les citoyens, les entreprises ou les élus du territoire qui ont eu l’occasion de s’exprimer sur le sujet, peuvent avoir une appréciation très différente et juger qu’après des décennies d’enclavement, l’A69 constituait bien un « intérêt public majeur »…
« Les travaux ont démarré en mars 2023 à la suite de l’obtention de l’ensemble des autorisations prescrites par la réglementation et, jusqu’à ce jour, confirmées par toutes les décisions de justice, soit six décisions favorables au projet depuis le début des travaux. C’est globalement 300 M€, soit les deux tiers du coût de la construction, qui ont été engagés sur le chantier jusqu’à présent », relevait hier le ministère des Transports, qui a annoncé que l’État faisait appel en demandant à la Cour administrative d’appel (CAA) de Toulouse d’accorder un « sursis à exécution » pour espérer une reprise rapide du chantier sans attendre l’appel…
Une première en France qui pourrait faire jurisprudence
Au-delà, la décision des magistrates toulousaines crée un précédent. C’est la première fois en France qu’une infrastructure routière d’une telle importance est interrompue par un jugement – et non par une décision politique, comme l’abandon du projet d’A45 Lyon/Saint-Étienne en 2018 – surtout avec un tel avancement dans son chantier. De quoi inquiéter la réalisation d’autres chantiers.
Ce jugement, qui sera peut-être annulé en appel, devrait nous interroger sur l’équilibre à trouver entre des impératifs écologiques et patrimoniaux qui doivent bien sûr être préservés et les grands projets d’infrastructure qui aménagement le pays et sont nécessaires à la vie quotidienne des habitants.
Autoroute A69 suspendue : « gâchis », « situation ubuesque »… les défenseurs du projet ne cachent pas leur colère après la décision du tribunal
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Publié le 27/02/2025 à 15:19 , mis à jour à 18:15
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l’essentielTandis que les opposants au projet autoroutier de l’A69 exultent, ses défenseurs, eux, crient au « gâchis » et dénoncent une « situation ubuesque » après l’annonce de la suspension du chantier entre Toulouse et Castres.
Pour toutes les personnes qui attendaient l’arrivée prochaine d’une liaison autoroutière entre Castres et Toulouse, la décision du tribunal administratif a fait l’effet d’une bombe.
Pierre-Yves Revol, le président de la Fondation actionnaire des Laboratoires Pierre Fabre craint un « enclavement définitif » de Castres
Rappelant que les Laboratoires Pierre Fabre « sont le premier employeur et le principal investisseur privé du département du Tarn », Pierre-Yves Revol explique craindre un « enclavement ». « Si l’enclavement de Castres devait devenir définitif, notre politique future d’investissements serait amenée à évoluer pour privilégier des territoires d’accès plus rapide et mieux sécurisé et mieux profilé pour nous permettre d’attirer et de fidéliser nos talents », confie-t-il.
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Il souligne, entre autres, la concurrence de « géants multinationaux » situés dans des grandes métropoles mondiales ou « sur des territoires parfaitement desservis et reliés à de grands centres urbains. » « Ce n’est bien sûr pas le cas du Sud du Tarn. Nous ne nous battons pas à armes égales et cette situation n’est plus tenable », regrette-t-il.
Jean-Michel Baylet, ancien ministre de l’aménagement du territoire et président du groupe Dépêche du Midi
« Cette décision est proprement scandaleuse. Comment a-t-on pu en arriver là alors que les travaux sont engagés depuis longtemps ? C’est faire fi de toutes les conséquences économiques, tant en matière d’emploi que de réparations ! On parle de 2 milliards d’euros si tout devait être remis en état, et cela, alors même que l’État cherche par tous les moyens à faire des économies sur le dos des Français… C’est aussi une très mauvaise nouvelle pour le désenclavement du sud Tarn et pour les perspectives économiques de la ville de Castres.
La justice administrative ne se grandit pas en prenant de telles décisions. Espérons que l’appel viendra contredire ce jugement inique. Espérons également qu’il n’y ait pas de conséquences sur la réalisation de la LGV entre Toulouse et Bordeaux. »
« Immense peine pour Tarnais du Sud qui ont eu l’espérance d’une vie meilleure », pour le maire de Lavaur Bernard Carayon
Bernard Carayon, le maire de Lavaur, ancien député du Tarn déplore que la « décision du tribunal administratif donne raison à une poignée de militants ultra-violents d’extrême gauche et tort à l’écrasante majorité des Tarnais, des élus et des entreprises, comme à l’État ». Le Tarnais déplore aussi un « désastre » qui coûterait 2 milliards d’euros alors que nos services publics manquent déjà de tout ». « Je ressens une immense peine pour les Tarnais du Sud qui ont eu l’espérance d’une vie meilleure ; pour les travailleurs, comme les entreprises du Tarn, qui se sont dévoués corps et âme pour ce chantier, proche de son achèvement. Des entreprises sont aujourd’hui gravement menacées, comme la pérennité des financements bancaires », a-t-il également écrit, parlant de « gâchis humain, social et économique ».
Une décision « incompréhensible » pour le député de la 3e circonscription du Tarn, Jean Terlier
« Comment comprendre cette décision alors que le projet a été déclaré d’intérêt public national et trouve sa légitimité et son financement dans la loi d’orientation des mobilités votée en 2019 », s’interroge Jean Terlier dans un communiqué. « Comment accepter enfin que les juges n’aient pas pris en compte la situation du chantier avec près de 300 millions d’euros de travaux déjà engagés, 45 % des terrassements réalisés, 70 % des ouvrages d’art construits et plus de 1 000 salariés du concessionnaire qui se retrouveront demain sans emploi », a-t-il poursuivi.
A lire aussi : REACTIONS. Autoroute A69 suspendue : « victoire historique », « je reprends goût à la justice »… les opposants au projet exultent
Le député EPR parle de « folie économique et sociale qui coûterait près d’un milliard d’euros aux contribuables », au sujet de l’arrêt du chantier de l’A69. Demandant à l’État de faire appel de cette décision, il rappelle que « cette autoroute est vitale pour notre territoire, et son désenclavement ». Jean Terlier « continuera à se battre pour sa réalisation ».
« Atterré par cette situation ubuesque ! » au conseil départemental du Tarn
« On marche sur la tête ! », a commenté Christophe Ramond, le président du conseil départemental du Tarn, sur X. Rappelant que « plus de 300 millions d’euros ont été investis, que 70 % des ouvrages d’art sont réalisés, et que la fin des travaux est prévue en fin d’année », il dénonce ironiquement le « sens du timing » de la justice qui « sonne maintenant l’arrêt du chantier ». « Comment imaginer une telle gabegie financière à l’heure où les finances publiques sont dans le rouge ? », s’interroge Christophe Ramond.
« Avec les autres collectivités territoriales et les forces vives du territoire, le Département du Tarn viendra en appui de cet appel », annonce-t-il.
Honteux et inacceptable pour le sénateur du Tarn Philippe Folliot
« Honteux et inacceptable ! Le tribunal administratif de Toulouse suspend les travaux de l’A69, piétinant des années de concertation et l’intérêt général. Un projet crucial sacrifié sous la pression idéologique. Jusqu’où ira cette déconnexion avec la réalité ? », a fait savoir le sénateur centriste du Tarn, sur X.
L’A69 ? Une « bouée de sauvetage » pour le bassin Castres-Mazamet », pour le président de la CCI du Tarn Michel Bossi
Michel Bossi, le président de la Chambre de commerce et d’industrie du Tarn (CCI) a également commenté la décision du tribunal administratif de Toulouse. Il dénonce « une décision incompréhensible et dévastatrice ». Pour lui, « l’arrêt de l’A69 sonne le glas de tout projet d’infrastructures de mobilité en France ! »
Autoroute A69 à l’arrêt : « affligeant », « gabegie », « fiasco »… L’indignation des élus tarnais après l’annulation du chantier
Autoroute A69 Castres-Toulouse, Tarn, Politique
Publié le 27/02/2025 à 19:55 , mis à jour le 28/02/2025 à 15:46 https://www.ladepeche.fr/2025/02/27/chantier-de-la69-a-larret-affligeant-gabegie-fiasco-lindignation-des-elus-tarnais-apres-lannulation-du-chantier-12539818.php
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l’essentielL’annulation par la justice administrative de l’autorisation environnementale du chantier de l’A69 a suscité une vague d’indignation parmi les élus locaux, qui dénoncent une décision incompréhensible et un gâchis financier.
La mise en suspens par le tribunal administratif de Toulouse du chantier de l’autoroute A69 Toulouse-Castres a fait l’effet d’un séisme politique dans le Tarn, où les réactions se sont multipliées ce jeudi 27 février.
« Comment comprendre l’annulation de l’autorisation environnementale délivrée par l’État sur le fondement de ‘l’absence de raison impérative d’intérêt public majeur’ alors que le Conseil d’État a validé l’utilité publique du projet ? », s’interroge ainsi Jean Terlier, député de la 3e circonscription du Tarn, qui englobe le tracé de l’A69. « Comment accepter que les juges n’aient pas pris en compte la situation du chantier avec près de 300 millions d’euros de travaux déjà engagés, 45 % des terrassements réalisés, 70 % des ouvrages d’art construits et plus de 1 000 salariés du concessionnaire qui se retrouveront demain sans emploi ? », poursuit-il.
Une proposition de loi
Christophe Ramond, président du Conseil départemental du Tarn, ironise pour sa part sur ce « sens du timing » de la justice administrative. « On marche sur la tête ! », déplore l’élu. « Comment imaginer une telle gabegie financière à l’heure où les finances publiques sont dans le rouge ? Comment comprendre que des millions d’euros soient jetés dans les caniveaux et que mille emplois soient sacrifiés ? », ajoute le président du Département qui indique que sa collectivité « viendra en appui » de la procédure d’appel annoncée par l’Etat.
Le sénateur Philippe Folliot annonce qu’il déposera sous peu « une proposition de loi visant à encadrer la notion d’intérêt public majeur afin que l’on ne mette pas notre pays ‘sous cloche’ ». « Que les juges décident in fine à la place des élus détenant leur légitimité du suffrage universel nous apparaît dangereux et inquiétant », souligne le sénateur. Il estime, en outre qu’il n’y aura, pour les opposants, qu’une « petite victoire à la Pyrrhus » du fait de « l’annulation de toutes les compensations environnementales prévues ».
« Les parlementaires n’ont pas fait leur boulot », tacle, de son côté, Pascal Bugis : « Le législateur n’a pas apporté de précision et, du coup, ce sont les juges qui font la loi. Si la politique ne dit pas ce qu’il veut, c’est la porte ouverte à l’interprétation des juges et des citoyens qui ne sont pas d’accord », déplore le maire de Castres.
« Une immense peine »
« Cette décision donne raison à une poignée de militants ultra-violents d’extrême gauche et tort à l’écrasante majorité des Tarnais, des élus et des entreprises, comme à l’État », embraie Bernard Carayon, maire de Lavaur, qui exprime son « immense peine pour les Tarnais du Sud qui avaient l’espérance d’une vie meilleure, pour les travailleurs et les entreprises qui se sont investis dans ce chantier. «
« La responsabilité de ce fiasco revient d’abord à un gouvernement incapable de faire respecter sur le terrain une décision politique et d’éclaircir la notion de raison impérative d’intérêt public majeur laissant les juges faire la loi », dénonce pour sa part, l’ancien député Frédéric Cabrolier (RN).
Parmi les rares, dans le Tarn, à se réjouir de cette décision, la députée, Karen Erodi (LFI), « salue une victoire historique et collective » et « appelle le gouvernement à l’arrêt immédiat des poursuites, à l’abandon des procédures en cours et à l’amnistie des condamnés ». « L’annulation de l’autoroute A69 doit être l’occasion d’une réelle bifurcation écologique en termes de mobilité durable », poursuit l’élue qui demande un moratoire sur les « autres projets routiers et/ou écocidaires en prévision ».
Autoroute A69 à l’arrêt : comment l’État compte faire redémarrer le chantier « au plus vite » en demandant un « sursis à exécution »
Des travaux à Verfeil. DDM – LAURENT DARD
Autoroute A69 Castres-Toulouse, Justice, France – Monde
Publié le 27/02/2025 à 20:01 , mis à jour le 28/02/2025 à 07:18 https://www.ladepeche.fr/2025/02/27/autoroute-a69-a-larret-comment-letat-compte-faire-redemarrer-le-chantier-au-plus-vite-en-demandant-un-sursis-a-execution-12539231.php
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l’essentiel
Le tribunal administratif de Toulouse a annulé les autorisations environnementales de l’A69, mettant un coup d’arrêt immédiat au chantier de l’A69. L’État et Atosca espèrent que la Cour administrative d’appel accordera un sursis à exécution du jugement pour une reprise du chantier en attendant l’appel.
Après la décision du tribunal administratif de Toulouse qui a, ce jeudi 27 février, annulé les autorisations environnementales de l’A69, le chantier de l’autoroute Castres-Toulouse doit s’arrêter même si des appels sont interjetés, notamment par l’État et le concessionnaire Atosca. Devant la cour administrative d’appel, l’appel n’est, en effet, pas suspensif, ce qui signifie que le jugement doit être exécuté, quelle que soit sa portée jusqu’à l’appel, dont l’instruction varie en moyenne entre 12 et 18 mois.
Le seul espoir d’une reprise rapide du chantier réside dans la possibilité pour la Cour administrative d’appel (CAA) de Toulouse d’accorder un « sursis à exécution » du jugement au fond prononcé hier. Cette possibilité est prévue par l’article R.811-15 du Code de justice administrative.
Si le jugement du tribunal administratif annule une décision administrative – c’est le cas de l’A69 – ou si son exécution risque d’entraîner des conséquences difficilement réparables, il est possible de demander à la cour administrative d’appel d’ordonner le « sursis à exécution » du jugement, c’est-à-dire de décider que le jugement ne s’exécutera pas aussi longtemps que l’appel n’est pas jugé.
L’État « engagera toutes les voies de recours permettant la reprise du projet »
Pour que la CAA accorde ce sursis, le demandeur doit démontrer que l’exécution immédiate du jugement entraînerait des conséquences difficilement réparables et que les moyens soulevés en appel sont sérieux.
Réagissant jeudi à la décision du tribunal administratif, le ministère des Transport a précisé que l’État « va faire appel en demandant un sursis à exécution de la décision » et qu’ »il engagera toutes les voies de recours permettant la reprise du projet dans les meilleurs délais possibles et dans le respect de la réglementation ».
En attendant cet éventuel sursis, le projet de l’A69 « est suspendu à l’exception des seules opérations de mises en sécurité du chantier, conformément aux dispositions du code de l’environnement ».
Autoroute A69 : malgré l’arrêt du chantier, le ministre des Transports espère une reprise des travaux « dans deux mois au plus tard »
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Autoroute A69 Castres-Toulouse, Transports, Justice
Publié le 28/02/2025 à 08:19 , mis à jour à 09:10 https://www.ladepeche.fr/2025/02/28/autoroute-169-malgre-larret-du-chantier-le-ministre-des-transports-espere-une-reprise-des-travaux-dans-deux-mois-au-plus-tard-12540736.php
La rédaction
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l’essentielMalgré la décision du tribunal administratif de Toulouse, Philippe Tabarot espère que le chantier de l’A69 pourra reprendre « dans un mois et demi ou deux ». Des espoirs qui s’appuient sur la demande d’un sursis d’exécution adressé à la Cour administrative d’appel.
La décision du tribunal administratif de Toulouse d’annuler l’autorisation environnementale du projet A69 a stoppé net le chantier de l’autoroute. Pourtant jeudi 27 février, le ministre des transports, Philippe Tabarot, a déclaré sur franceinfo « espérer » voir celui-ci reprendre « dans un mois et demi ou deux mois au plus tard ».
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Aussitôt le verdict du tribunal, l’Etat a annoncé faire appel de la décision entraînant la suspension du chantier qu’ »il engagera toutes les voies de recours permettant la reprise du projet dans les meilleurs délais possibles et dans le respect de la réglementation ». Philippe Tabarot a qualifié la situation d' »ubuesque : un chantier avancé aux deux tiers est arrêté du jour au lendemain ».
L’Etat demande en outre un sursis d’exécution à la Cour administrative d’appel de Toulouse pour pouvoir reprendre le chantier de cet axe de 53 km entre Toulouse et Castres, dans l’attente de la décision au fond de la cour administrative d’appel. Cette possibilité est prévue par l’article R.811-15 du Code de justice administrative.
Si le jugement du tribunal administratif annule une décision administrative – c’est le cas de l’A69 – ou si son exécution risque d’entraîner des conséquences difficilement réparables, il est possible de demander à la cour administrative d’appel d’ordonner le « sursis à exécution » du jugement, c’est-à-dire de décider que le jugement ne s’exécutera pas aussi longtemps que l’appel n’est pas jugé.
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Pour que la Cour administrative d’appel accorde ce sursis, le demandeur doit démontrer que l’exécution immédiate du jugement entraînerait des conséquences difficilement réparables et que les moyens soulevés en appel sont sérieux.
REPORTAGE. Autoroute A69 à l’arrêt : « On frise l’incompétence… » À Verfeil, soulagement, colère mais aussi crainte d’un « chantier fantôme »
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Autoroute A69 Castres-Toulouse, Verfeil, Haute-Garonne
Publié le 27/02/2025 à 15:42 , mis à jour à 15:43 https://www.ladepeche.fr/2025/02/27/reportage-autoroute-a69-a-larret-on-frise-lincompetence-a-verfeil-soulagement-colere-mais-aussi-crainte-dun-chantier-fantome-12539208.php
Emmanuel Vaksmann
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l’essentiel
L’arrêt du projet de l’autoroute A 69 décidé ce jeudi matin par le tribunal administratif de Toulouse suscite de nombreuses réactions à Verfeil. Entre satisfaction et inquiétude, habitants et élus s’expriment.
L’annulation par le tribunal administratif de l’autorisation du chantier de l’A69 annoncé jeudi 27 février s’est propagée comme une traînée de poudre à Verfeil. « Je suis vraiment heureuse ! » Après un long soupir, la réaction de cette habitante est sans ambages. Elle poursuit : « Depuis le temps que nous dénoncions ce projet, on n’y croyait plus ! C’est rassurant, car ça veut dire que la justice fonctionne encore. »
Devant la vitrine du buraliste verfeillois, les réactions à l’arrêt du chantier sont majoritairement positives, même si cet ancien chauffeur routier regrette l’interruption du projet : « J’ignore si elle se fera finalement, mais je pense que cette autoroute aurait été une bonne chose pour la sécurité des usagers. » Un point de vue bien isolé, tandis qu’un riverain se réjouit : « Cette histoire, c’était un peu David contre Goliath. En tout cas, ça montre bien qu’il ne suffit pas d’avoir tous les pouvoirs pour gagner. Mais que vont devenir ces travaux à l’entrée de Verfeil ? Et la rocade (RD 20) va-t-elle rouvrir ? »
Des paysages défigurés ?
De fait, également interrompus, les travaux de l’échangeur voué à la jonction entre l’A 680 (depuis l’autoroute d’Albi) et feu-l’A69 vont s’arrêter net. Un chantier fantôme qui hantera le quotidien des riverains pendant des mois. Que ce soit sur la route de Toulouse (RD 112) ou la route de Saint-Pierre, les carcasses bétonnées des ouvrages d’art inachevés ne sont pas du meilleur effet, selon cet habitant venu acheter son journal : « Quel gâchis ! Tout ça pour ça ! En fait, ils ont mis la charrue avant les bœufs… Et ça ne va pas arranger la circulation. »
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Historiquement opposé à la construction de cette autoroute, Patrick Plicque, maire de Verfeil, ne cache pas son exaspération. « Nous respectons cette décision comme toutes les autres depuis des années concernant l’A69 », dit-il. Et de poursuivre : « Mais il est dommage que l’État n’ait pas voulu accorder en son temps une lecture plus sérieuse de la proposition d’aménagement de la RN 126 souhaitée par de nombreuses communes. On ne serait pas aujourd’hui devant une aberration administrative qui a autorisé des travaux à démarrer. Le risque est aujourd’hui de garder pour de longues années des paysages défigurés, des entrées de ville comme les échangeurs de Verfeil à l’abandon et une note à payer par les administrés. J’ai envie de dire que l’on frise l’incompétence, et le mot est faible, alors que l’on n’autoriserait pas au modeste maire que je suis le millième de ce qui s’est passé. »
A69 entre Toulouse et Castres : l’annulation de l’autorisation, un camouflet pour l’Etat et une décision majeure pour le droit environnemental
Le tribunal administratif de Toulouse a estimé que l’autorisation environnementale, forgée grâce à des « dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées et à leurs habitats », n’est pas légale. Jamais une telle infrastructure autoroutière n’avait été stoppée alors que le chantier est en cours.
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Une victoire pour les opposants, un camouflet pour le concessionnaire Atosca soutenu par l’Etat et une décision majeure pour le droit environnemental. Jeudi 27 février, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’autorisation environnementale de l’A69, un chantier autoroutier de 53 kilomètres entre Castres et Toulouse. Trente et un ans après l’approbation de cette idée par le gouvernement, sept ans après la publication du décret de déclaration d’utilité publique et deux ans après le début du chantier, les travaux, déjà bien commencés, sont arrêtés.
« La juridiction a jugé en droit, sans tenir compte des pressions de l’Etat ou du concessionnaire sur l’impact financier d’une annulation », se félicite Alice Terrasse, l’une des avocates des collectifs anti-A69. « C’est incompréhensible et nous sommes en colère, répond Jean Terlier, député (Renaissance) du Tarn. Il y a eu de multiples référés. Et pourtant, jamais le tribunal administratif n’a signifié à l’Etat ou au concessionnaire qu’il y avait des irrégularités. La justice cède à des pressions politiques au lieu de s’appuyer sur une réflexion de bon sens pour désenclaver le sud du Tarn. »
Dans le détail de son jugement, le tribunal administratif estime que l’autorisation environnementale, forgée grâce à des « dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées et à leurs habitats », n’est pas légale car le projet ne réunit pas tous les critères, notamment celui d’une « raison impérative d’intérêt public majeur ». « Les bénéfices économiques, sociaux et de sécurité publique sont trop limités », explique le tribunal administratif dans son communiqué. Ce dernier a suivi l’avis de la rapporteure publique, qui lui avait, par deux fois, demandé « l’annulation totale » de l’arrêté préfectoral.
Doutes sur les gains mis en avant
A l’audience du 18 février, la magistrate Mona Rousseau avait répété ses doutes sur les gains économiques et sociaux mis en avant par les promoteurs. Sur la même ligne, les juges déplorent le coût trop élevé du péage (17 euros, selon les opposants, même si le concessionnaire venait de promettre de faire un effort) et contestent l’argument d’un décrochage économique et démographique du sud du Tarn. « C’est une première pour une infrastructure aussi importante, qui avait franchi plusieurs étapes et dont le chantier est avancé, mais le jugement est extrêmement détaillé et remet le droit de l’environnement au cœur de la décision », affirme Arnaud Gossement, avocat spécialisé dans le droit de l’environnement.
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Jeudi, en milieu de journée, les opposants se sont réunis dans une salle exiguë du bar Le Winger à Toulouse où les cris de joie ont précédé une conférence de presse. « C’est une victoire pour les gens qui se sont engagés, qui n’ont jamais baissé les bras, malgré les souffrances et les défaites », lâche Geneviève Azam, économiste, rejointe par Thomas Digard, à la tête du collectif La Voie est libre : « La responsabilité de l’Etat, d’Atosca et des financeurs est engagée dans la mesure où ils ont sciemment décidé d’entamer le chantier alors que les autorisations environnementales étaient bancales. »
Pour les opposants, ce jugement est un aboutissement important. Alors que le Conseil d’Etat avait rejeté en mars 2021 les recours pour annuler la déclaration d’utilité publique, ils ont multiplié les actions sur le terrain avec la mise en place de plusieurs zones à défendre (ZAD) et le déploiement de militants installés dans les arbres.
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En parallèle, les collectifs avaient déposé de nombreux référés qui avaient été régulièrement rejetés. Quatre d’entre eux concernaient d’ailleurs l’autorisation environnementale. « Aujourd’hui, nous assistons à la victoire des collectifs qui se sont engagés dans ce dossier pour défendre la biodiversité, mais aussi à celle du droit environnemental qui se construit trop souvent après des infractions des constructeurs », se réjouit Christine Arrighi, députée (écologiste) de Haute-Garonne et ancienne rapporteuse de la commission d’enquête sur l’A69.
Le ministère des transports fera appel
La bataille juridique autour de ce chantier est loin d’être terminée. Dans la foulée de ce jugement, le ministère des transports a annoncé qu’il ferait appel. Cette procédure peut prendre encore au moins un an. Le ministère a également fait part de son souhait de demander un sursis d’exécution pour pouvoir reprendre le chantier.
Du côté des promoteurs de ce projet, c’est la consternation. Selon eux, 300 millions d’euros d’argent public et privé ont déjà été engagés sur un budget total de 450 millions d’euros. Près de 70 % des ouvrages d’art et 55 % du terrassement sont achevés. Le bitume devait être coulé en mars. Dans un communiqué, le constructeur Atosca a pris « acte de l’impossibilité de poursuivre les travaux » tout en s’engageant « à limiter les impacts de la décision de justice sur le millier de personnes (…) employées sur le chantier, en préservant avant tout leurs droits et leur sécurité dans un contexte exceptionnel au regard de l’ampleur des travaux déjà réalisés ».
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Aussitôt, les laboratoires Pierre Fabre, principal employeur de Castres et défenseurs acharnés de l’A69, ont menacé de « privilégier des territoires d’accès plus rapide et mieux sécurisé (…), si l’enclavement de Castres devait devenir définitif ». « C’est une situation ubuesque alors que cette autoroute, souhaitée par une majorité d’élus du Tarn, est un vrai projet d’aménagement de territoire », se désole Christophe Ramond, président socialiste du conseil départemental du Tarn. En cas d’abandon définitif après l’appel et un éventuel recours devant le Conseil d’Etat, M. Terlier affirme déjà réfléchir à une proposition de loi qui permettrait de poursuivre la construction.

Si ce n’est évidemment pas la première fois que la justice administrative annule un projet important (la ligne électrique à très haute tension dans le Verdon en 2006, le projet de retenue d’eau de Sivens en 2016), jamais une telle infrastructure autoroutière n’avait été stoppée alors que le chantier est en cours.
Deux autres projets conséquents, l’A45 Lyon-Saint-Etienne et l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), ont été abandonnés en 2018, pour des raisons politiques. « Ces grands projets pensés dans les années 1980 et 1990 ne correspondent plus aux impératifs climatiques et écologiques de notre époque », conclut Mme Arrighi. Si la suite de l’affrontement juridique se termine par un abandon définitif de l’A69, il faudra alors réfléchir à la déconstruction. Une éventualité qui pousserait peut-être le concessionnaire à se retourner contre l’Etat.
Matthieu Goar et Audrey Sommazi (Toulouse, correspondance)
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