Paris, le 17 février 2025 https://toute-la.veille-acteurs-sante.fr/files/2025/02/CP-UFMLS-Comment-comprendre-et-pourquoi-sauver-le-secteur-2.pdf

Comment comprendre et pourquoi sauver le secteur 2 ?
Autorisé à tout médecin libéral par l’économiste Raymond Barre en 1980, le secteur 2 a encouragé, alors que la France traversait une crise économique, le maintien d’une médecine de qualité, sur tout le territoire. Cet espace de liberté tarifaire a permis d’instaurer des conditions d’exercice, d’équipements, de formation, de possibilités d’emploi d’assistant pour aider à l’organisation du cabinet, d’aide-opératoire ou d’assistant de consultation afin d’optimiser le temps médical pour l’accès aux soins.
L’accès à ce secteur a été restreint depuis 1990 aux anciens chefs de clinique, assistants spécialistes et praticiens hospitaliers. Une surveillance des pratiques tarifaires a été instaurée en 2013 avec l’avènement du Contrat d’Accès aux Soins, puis de l’OPTAM Option de Pratique Tarifaire Maîtrisée en 2016. Il s’agit d’un contrat imposant une part variable, évoluant selon les décisions de la CNAM, de patients soignés au tarif opposable, incluant un système de tarification différentielle. Ainsi le patient supporte financièrement le choix du praticien qu’il consulte. En effet, les patients vus par un médecin secteur 2 non OPTAM subissent, dans le pays de l’égalité, une moindre valorisation des actes médicaux, et donc une prise en charge inférieure pour le patient, par la Sécurité sociale et les complémentaires. Ces remboursements différenciés restreignent ainsi pour le patient sa liberté de choix du praticien consulté, sanctuarisée par le code de santé publique (art. 1110-8 du CSP). Pour information, en Île-de-France, 43% des actes des praticiens en secteur 2 sont réalisés au tarif opposable (source ISPL).
Une inégalité plus grande encore s’impose aux patients qui font le choix de consulter un praticien en secteur 3, qui se voient dérembourser presqu’entièrement leur consultation. Ce déremboursement s’applique alors que le patient cotise de façon identique aux caisses de Sécurité sociale et aux complémentaires, rendues obligatoires pour les salariés depuis 2015 (et en augmentation de 40% du montant des cotisations depuis). La France est le seul pays où les cotisations d’assurances obligatoires n’ouvrent pas de droit à la prise en charge équitable des consultations délivrées par tous les médecins diplômés d’État.Aujourd’hui, avec le numerus clausus, la France connaît un marasme sanitaire jamais égalé, qui s’aggrave années après années, décisions politiques après décisions politiques. L’ultime décision contre-productive se prépare à l’Assemblée Nationale avec la proposition de loi transpartisane portée par le député Guillaume Garot qui propose, en plus d’une coercition à l’installation des médecins, un transfert de l’exercice en secteur 2 vers l’OPTAM.
Savez-vous que pour la première année, le nombre de médecins salariés dépasse celui des médecins libéraux (source CNOM 2024) ?
Savez-vous que le temps de soins est majoré selon la Sécurité sociale de 30 % dans l’exercice médical libéral par rapport à l’exercice salarié (56h versus 35h lorsque les législations sur le temps de travail des salariés sont respectées), 36% dans le dernier rapport IGAS ? Évaluation du modèle économique des centres de santé pluriprofessionnels | Igas
Savez-vous qu’il en coûte près du double à la nation et aux contribuables d’encourager une médecine salariée par rapport à une médecine libérale, dans l’exercice de laquelle le médecin assume son coût de fonctionnement, son outil de travail, ses locaux d’exercice, et ses charges ?
Le modèle économique de soins aux tarifs opposables ne fonctionne plus. Nous évoquons ici le triste sort récent vécu par des centres de santé subventionnés au modèle de tarification opposable déconnecté du véritable coût de pratique, notamment en Île-de-France : https://www.lefigaro.fr/conjoncture/fermeture-imminente-de-sept-centres-de-sante-d-ile-de-france-en-raison-de-difficultes-financieres-20240610#:~:text=En%20Île%2Dde%2DFrance%2C,un%20«plan%20de%20sauvegarde».
Sans compter les difficultés financières des centres mutualistes : À Paris, l’institut Mutualiste Montsouris menacé de redressement judiciaire – Le Parisien (https://www.leparisien.fr/paris-75/a-paris-linstitut-mutualiste-montsouris-menace-de-redressement-judiciaire-24-01-2025-FFN3MXJSEFH43JFCNXV6KRTUUY.php)
La décision d’imposer une restriction d’installation pour les médecins et l’OPTAM à tous les praticiens en secteur 2 n’a, dès lors, de sens ni économique, ni social.
Tous ces éléments confondus suggèrent qu’il convient au contraire d’encourager les installations dans l’ensemble du territoire français et de rendre plus autonome la médecine libérale. Si les finances publiques (maintenant un ONDAM déconnecté des coûts d’exercice) ne permettent pas un engagement d’envergure pour la santé des Français avec une valorisation des actes de consultations et des actes techniques en regard du coût de la pratique dans le pays le plus chargé d’Europe, il serait vital d’accorder un espace de liberté tarifaire étendu à tous les médecins, comme autorisé dans le secteur 2. C’est le moyen le plus efficient, à la fois économe pour les finances de l’État et des contribuables, et qui conserve la prise en charge des patients en difficulté pouvant maintenir et accroître une offre de soins par une dynamisation des installations et un maintien des praticiens dans les territoires.
Dans l’attente des effets du numerus apertus, il est devenu urgent, comme le demande depuis sa création en 2017 UFMLS syndicat, d’agir sur ce levier : l’accès, le maintien et le déploiement du secteur 2, renforçant l’accès aux soins, autorisant davantage d’économie, d’autonomie d’exercice pour retrouver des conditions attractives d’installation, éviter au maximum la médecine subventionnée qui majore le déficit public, et conservant le caractère social de cet exercice.
Le Bureau UFMLS
Commentaire Dr Jean Scheffer
Les spécialistes libéraux à les écouter nous feraient pleurer !
En réalité à part les généralistes et quelques spécialités (pédiatres, neurologues, certains dermatologues, leur revenus s’échelonnent de 10 000€/an à 400 000€
Il ya donc des revenus élevés mais surtout une énorme inégalité de revenus entre spécialités.
Les usagers le plus souvent n’ont pas le choix entre spécialiste ne faisant pas de dépassement et celui qui est en secteur II ou III. Je n’en veux pour preuve que mes concitoyens Albigeois qui sont confrontés à l’absence de plusieurs spécialités (Urologie, à l’hôpital public et donc soumis aux dépassements d’honoraires dans les cliniques lucratives de la ville.
1/3 des Français repoussent ou renoncent à des soins, ce n’est pas en généralisant les dépassements d’honoraires que l’on va améliorer l’accès aux soins.
Non la majorité des centres de santé avec médecins salariés n’est pas proche de la fermeture. Cependant leurs activités de prévention, d’éducation sanitaire…en dehors des consultations et petits actes ne sont pas rémunérés, et la consultation qui dure plus longtemps qu’en médecine libérale est notoirement sous cotée.
Non la généralisation du secteur II ne va pas améliorer la répartition des médecins sur le territoire et améliorer les déserts médicaux. C’est la remise en cause de la liberté d’installation, l’élargissement du « numerus apertus » et la création du « Clinicat-Assistanat pour Tous » obligatoire pour tous les futurs généralistes et spécialistes qui peuvent améliorer à court terme l’accès aux soins de tous les Français. Ces mesures sont urgentes sinon l’espérance de vie de nos concitoyens qui stagne depuis 2018 ne fera que s’aggraver comme aux Etats-Unis.