Avertissement de l’ARS pour la source de Nestlé à Vergès dans le Gard

Source Perrier : pour Nestlé la solution est toute trouvée

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Constatant des contaminations bactériennes de plus en plus fréquentes à Vergèze, les autorités de santé encouragent Nestlé à s’interroger sur l’avenir de ses captages d’eau minérale. Or en lançant Maison Perrier, Nestlé a déjà avancé ses pions.

Née en 2023, la petite soeur de Perrier, baptisée Maison Perrier ressemble à son aînée. Les contraintes en moins.

© Capital – Née en 2023, la petite soeur de Perrier, baptisée Maison Perrier ressemble à son aînée. Les contraintes en moins. 

Angélique Vallez

Par Angélique VallezChef d’enquête CapitalPublié le 16/12/2024 à 19h03

Est-ce la fin de la marque Perrier, telle qu’on la connaît ? Ce lundi 16 décembre, Radio France et Le Monde ont révélé les conclusions d’un rapport de l’Agence régionale de santé (ARS) d’Occitanie jugeant que la source Perrier était ponctuellement altérée par des contaminations bactériennes, voire virologiques. Selon les termes du document rapporté par ces médias, l’autorité « invite » carrément Nestlé à « s’interroger stratégiquement sur un autre usage alimentaire possible de l’exploitation des captages d’eau minérale actuelle ».

C’est un véritable pavé dans la source Perrier. Noir sur blanc, l’ARS propose à la marque de recourir à des traitements capables de garantir la potabilité des eaux qu’elle embouteille à Vergèze (Gard) et donc d’accepter de perdre l’appellation «eau minérale» qui en découle. Voilà qui ne va pas arranger les affaires du géant suisse, déjà empêtré dans le scandale de l’eau depuis des mois et qui a officiellement annoncé le 19 novembre sa volonté d’explorer toutes les options possibles, les concernant… Jusqu’à leur cession. Nestlé s’est toutefois préparé une judicieuse porte de sortie, avec la création de la marque Maison Perrier. Un lancement un peu filou, mais vraiment très malin.

Eaux minérales naturelles Perrier : le rapport qui accuse le groupe Nestlé

Article rédigé par Cellule investigation de Radio FranceMarie Dupin

Radio France

Publié le 16/12/2024 06:22Mis à jour le 16/12/2024 07:27 https://www.francetvinfo.fr/enquetes-franceinfo/enquete-franceinfo-eaux-minerales-naturelles-perrier-le-rapport-qui-accuse-le-groupe-nestle_6956990.html

Temps de lecture : 10min

En janvier 2024, la cellule investigation et Le Monde révélaient que Nestlé et d’autres industriels cachaient la contamination de l’eau qu’ils pompaient. (FABRICE COFFRINI / AFP)
En janvier 2024, la cellule investigation et Le Monde révélaient que Nestlé et d’autres industriels cachaient la contamination de l’eau qu’ils pompaient. (FABRICE COFFRINI / AFP)

Un rapport de l’Agence régionale de santé d’Occitanie s’inquiète de la qualité des eaux exploitées sur le site de la marque Perrier à Vergèze (Gard) et d’un possible « risque viral ». Pour la première fois, les autorités invitent l’entreprise à arrêter sa production d’eau minérale naturelle sur le site.

La marque Perrier va-t-elle perdre son appellation d’eau minérale naturelle ? Après les révélations de la cellule investigation de Radio France et du journal Le Monde en janvier 2024 sur l’utilisation de traitements interdits sur ses marques Hépar, Vittel, Contrex et Perrier, le groupe Nestlé Waters avait assuré avoir supprimé tous ses traitements illégaux et mis en place des plans de transformation de ses usines pour faire cesser la fraude, tout en affirmant que « la sécurité sanitaire » de ses produits avait « toujours été garantie ». Un rapport d’inspection de l’Agence régionale de santé (ARS) d’Occitanie, daté du 30 août 2024, auquel nous avons pu avoir accès bat en brèche cette version. Ses conclusions sont accablantes.

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Ce document, établi après l’inspection inopinée, au printemps dernier, de l’usine Perrier de Nestlé dans le Gard, montre que la qualité des ressources en eau exploitées n’est toujours pas suffisante pour produire de l’eau minérale naturelle, qui doit être selon la réglementation « microbiologiquement saine » et « tenue à l’abri de tout risque de pollution ». Le rapport s’alarme d’un potentiel risque virologique pour les consommateurs, connu du gouvernement depuis 2022, et envisage pour la première fois « un arrêt de la production d’eau minérale naturelle sur le site de Vergèze ». Il invite la multinationale suisse, aussi courtoisement que fermement, à« s’interroger stratégiquement » sur un autre usage alimentaire possible de ses captages, « dans des conditions qui apporteraient des garanties de sécurité sanitaires, qui s’avéreront indispensables ».

Un risque de fraude qui perdure

C’est à la demande du préfet du Gard, Jérôme Bonet, que l’usine de Vergèze a été inspectée le 30 mai dernier par les agents de l’ARS Occitanie. Dans sa lettre de mission, que la cellule investigation de Radio France et Le Monde ont pu consulter, le préfet demande de « contrôler le bon démantèlement des traitements interdits » et de « vérifier la traçabilité et les pratiques de fabrication des produits ».

Jérôme Bonet, préfet du Gard, le 5 février 2024 à Nîmes. (MIKAEL ANISSET / MAXPPP)
Jérôme Bonet, préfet du Gard, le 5 février 2024 à Nîmes. (MIKAEL ANISSET / MAXPPP)

Le rapport de l’ARS Occitanie relève que, si certains traitements non autorisés ont bien été retirés, le risque de fraude perdure. En effet, les inspecteurs soulignent que « les conditions de réalisation de l’inspection n’ont pas permis de s’assurer qu’il n’y avait pas d’autre dispositif de traitement non autorisé dissimulé dans l’usine ».Ils notent également que « sur le plan technique, rien n’empêche le traitement de l’eau minérale naturelle par des procédés non autorisés utilisés pour d’autres types d’eaux ». Il s’agit notamment des traitements appliqués aux eaux de boisson qui ne bénéficient pas de l’appellation eau minérale naturelle.

Des contaminations « inacceptables »

Toujours selon le rapport de l’ARS, les contrôles qualité menés par le groupe Nestlé présentent des résultats microbiologiques « inhabituels pour une eau minérale naturelle », avec une « instabilité des eaux », et la présence de micro-organismes dans les eaux brutes, ce qu’interdit strictement la réglementation sur les eaux minérales naturelles.

En avril dernier, la production de l’un des puits de l’usine avait été stoppée à la suite d’un épisode de contamination par des germes fécaux, pouvant provoquer des maladies chez l’Homme, ce qui avait entraîné la destruction par Nestlé de trois millions de bouteilles de Perrier. Selon le rapport, une opération de nettoyage menée sur deux autres puits, à la même période, a révélé un nouvel épisode de contamination par ce type de germes. Les agents de l’ARS estiment que ces« contaminations bactériennes », bien que « ponctuelles », sont « inacceptables pour une eau minérale naturelle ».

Des filtres qui masquent la qualité de l’eau

Pour pallier la qualité insuffisante de sa ressource en eau et le retrait des filtres qui permettaient de la purifier, l’usine de Perrier a en contrepartie fortement renforcé son dispositif de traitement par microfiltration, c’est-à-dire grâce à des filtres dont le maillage est très resserré (jusqu’à 0,2 micron). Mais si ces microfiltres permettent aux bouteilles de Perrier vendues dans le commerce d’avoir un taux de conformité élevé, ils ne sont « pas réglementaires » pour autant aux yeux des agents de l’ARS, car leur effet désinfectant est « avéré ».

En clair, grâce à ces traitements par microfiltres, le groupe Nestlé continue, comme il l’a fait pendant des années, de masquer la contamination de ses eaux brutes pour pouvoir les commercialiser comme des eaux minérales naturelles, alors que ces dernières sont censées provenir de ressources souterraines préservées.

Entrée de l’usine Perrier à Vergèze dans le Gard, le 29 décembre 2023. (THIBAUT DURAND / HANS LUCAS)
Entrée de l’usine Perrier à Vergèze dans le Gard, le 29 décembre 2023. (THIBAUT DURAND / HANS LUCAS)

Les inspecteurs n’hésitent pas à parler d’« écart » à la norme, c’est-à-dire de « non-respect des obligations légales ou réglementaires juridiquement opposables ».

Un possible « risque virologique », des alertes négligées

Plus inquiétant, le rapport pointe également, pour les consommateurs, un possible « risque virologique » (adénovirus, norovirus, hépatite A). Car comme le détaillent les inspecteurs, les microfiltres toujours utilisés par Nestlé « n’ont pas d’effet de rétention sur les virus », tandis que « la mission [d’inspection] n’a pas été destinataire d’un plan de contrôle détaillé des virus ». Ce risque viral, déjà souligné par la cellule investigation de Radio France et Le Monde en janvier dernier, semble avoir été négligé par le gouvernement.

En effet, en août 2021, lors d’une réunion confidentielle à Bercy, Nestlé avait reconnu avoir recours à de nombreux filtres interdits (filtres UV, filtres à charbon, microfiltres avec maillage resserré). L’entreprise avait alors demandé au gouvernement s’il lui serait possible de continuer à utiliser les microfiltres. Questionnées à ce sujet, plusieurs administrations avaient clairement signifié aux autorités les risques que ce type de dérogation à la réglementation pourrait entraîner. Ainsi, dans un rapport remis au gouvernement en juillet 2022, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) expliquait que la mise en place de ces filtres non conformes pourrait constituer une « fausse sécurisation » et « exposer les consommateurs à un risque sanitaire en lien avec l’ingestion de virus »,en prenant pour exemple une épidémie de gastro-entérite en Catalogne en avril 2016. Plus de 4000 personnes avaient été touchées et six hospitalisées, après un épisode de contamination par un virus pathogène d’une eau traitée par microfiltration. Dans un autre document, daté de décembre 2022, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) avait également prévenu le gouvernement d’un possible risque viral.

Malgré ces avertissements, le 22 février 2023, le gouvernement d’Elisabeth Borne avait décidé, « en réponse aux demandes de l’industriel », d’autoriser la multinationale suisse à utiliser des microfiltres non conformes, comme en atteste le compte rendu d’une réunion interministérielle que nous nous sommes procuré.

Aujourd’hui, c’est donc l’Agence régionale de santé d’Occitanie qui tire la sonnette d’alarme, et qui envisage « un arrêt de la production d’eau minérale naturelle sur le site de Vergèze ». « Si ces informations sont avérées, ce que Nestlé a négocié avec les ministres, qui l’ont validé en catimini, n’était pas un plan de transformation, mais de manipulation. Un plan illégal et potentiellement dangereux pour la population à cause du risque virologique évoqué. Nous le vérifierons avec la commission d’enquête car nous en avons le mandat et le pouvoir », a réagi auprès de la cellule investigation de Radio France et du Monde Alexandre Ouizille, le sénateur socialiste de l’Oise à l’origine de la commission d’enquête du Sénat consacrée à cette affaire, et dont les travaux viennent de débuter.

L’avenir de Perrier et des 1000 salariés de son usine de Vergèze dépend désormais de la préfecture du Gard. Cette dernière doit en effet se prononcer sur la demande de renouvellement d’autorisation d’exploitation de la « source Perrier » pour produire de l’eau minérale naturelle, déposée en octobre 2023 par Nestlé. Contactée par Radio France et Le Monde, la préfecture indique qu’elle pourrait rendre sa décision lors du « premier semestre 2025 » après réception d’un « avis d’hydrogéologues agréés en matière d’hygiène publique », complémentaire au rapport de l’ARS.

Contacté, Nestlé indique « opérer le site de Vergèze conformément au cadre fixé par les autorités et sous leur contrôle ». Avant de préciser : « Nous pensons que vous faites référence à un rapport administratif préliminaire, développé suite à une visite des services de l’ARS et de la DDPP sur notre site. Lors d’un contradictoire, Nestlé Waters a par la suite apporté ses commentaires et précisions. Nous ne pouvons pas faire de commentaires, dès lors que nous n’avons pas connaissance du rapport final. »


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Perrier sous la menace d’un arrêt de sa production d’eau minérale naturelle

Un rapport confidentiel, que « Le Monde » et Radio France se sont procuré, conclut que Nestlé doit envisager la fin de la production d’eau minérale naturelle sur son site de Vergèze, dans le Gard, en raison de risques sanitaires. 

Par Stéphane MandardPublié hier à 06h00, modifié hier à 09h20 https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/12/16/perrier-sous-la-menace-d-un-arret-de-sa-production-d-eau-minerale-naturelle_6450951_3244.html

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Dans l’usine d’embouteillage d’eau minérale Perrier, à Vergèze (Gard), lieu de la source des Bouillens, en février 2019.
Dans l’usine d’embouteillage d’eau minérale Perrier, à Vergèze (Gard), lieu de la source des Bouillens, en février 2019.  LODI FRANCK/SIPA

Le coup pourrait être fatal pour Perrier. La plus célèbre des marques d’eau gazeuse est sous la menace de perdre son label d’eau minérale naturelle qui fait sa réputation depuis plus d’un siècle. Un rapport confidentiel de l’agence régionale de santé (ARS) d’Occitanie, que Le Monde et la cellule investigation de Radio France se sont procuré, ne laisse guère de place à une autre issue.

Bouclée, en août, après une inspection menée fin mai sur l’unique site de conditionnement de Perrier, à Vergèze, dans le Gard, la mission estime que Nestlé Waters, propriétaire de la marque, doit sérieusement envisager « un arrêt de la production d’eau minérale sur le site de Vergèze » en raison de la qualité sanitaire régulièrement dégradée de ses captages et, en particulier, d’un risque d’ordre virologique.

L’ARS « invite » ainsi poliment le groupe alimentaire suisse à « s’interroger stratégiquement sur un autre usage alimentaire possible de l’exploitation des captages d’eau minérale actuels », à condition d’apporter des « garanties de sécurité sanitaire complémentaires ». Sollicité par Le Monde et Radio France, Nestlé Waters indique ne « pas pouvoir faire de commentaires », n’ayant « pas connaissance du rapport final ».

Lire aussi |    Fraude aux eaux minérales : « On ne peut pas être sûr qu’il n’y a plus de tromperie sur le site de Perrier »

L’avenir de Perrier et de son site de production à Vergèze (un millier de salariés) est désormais suspendu à l’arbitrage de la préfecture du Gard, qui doit se prononcer sur la demande de renouvellement d’autorisation d’exploitation de la « source Perrier » déposée en octobre 2023 par Nestlé. Contactée, la préfecture indique que la décision pourrait être rendue lors du« premier semestre 2025 » après réception de « l’avis des hydrogéologues agréés en matière d’hygiène publique », complémentaire au rapport de l’ARS.

Le risque de fraude perdure

En avril, le préfet du Gard a déjà suspendu l’exploitation d’un des sept captages après un épisode de contamination par des bactéries d’origine fécale pouvant faire courir un risque pour la santé des consommateurs. Quelques jours plus tard, le groupe agroalimentaire suisse annonçait avoir détruit quelque 3 millions de bouteilles « par précaution ». Présentée alors par Nestlé et la préfecture comme un événement ponctuel lié à des pluies intenses, cette situation est en réalité la conséquence d’une dégradation générale de la qualité des nappes d’eau souterraines exploitées par Nestlé à Vergèze.

Comme l’ont révélé Le Monde et Radio France en janvier, et comme l’a reconnu Nestlé depuis, la firme a eu recours pendant plusieurs années à des traitements interdits – microfiltration, filtres UV et charbons actifs – pour faire face à ces contaminations, bactériennes ou chimiques, sur certains de ses puits, à Vergèze mais aussi sur son site des Vosges, où sont puisées les eaux d’Hépar, de Contrex et de Vittel. Depuis, elle a lancé en parallèle une autre gamme de boissons sous la marque Maison Perrier, qui ne bénéficie pas de l’appellation « eau minérale naturelle » et peut, elle, subir de nombreux traitements.

Lire l’enquête |  Eaux en bouteille : des pratiques trompeuses à grande échelleSelon le rapport d’inspection de l’ARS, le risque de fraude perdure : « Rien n’empêche le traitement de l’eau minérale naturelle par des procédés non autorisés utilisés pour d’autres types d’eaux. » Surtout, malgré les efforts déployés par la firme suisse, l’eau provenant d’au moins deux autres forages reste notamment marquée par des « contaminations bactériennes » jugées « inacceptables pour une eau minérale naturelle ». Les deux puits ont d’ailleurs fait l’objet d’« arrêts simultanés » au printemps, preuve que Nestlé ne parvient pas à maintenir la qualité de son eau sans traitement.

Si Nestlé a arrêté de recourir aux filtres UV et aux charbons actifs, à sa demande, le gouvernement a assoupli en février 2023 la réglementation sur la microfiltration pour lui permettre de poursuivre cette pratique controversée. Or, pour les inspecteurs de l’ARS, l’usage de la microfiltration sur le site de Perrier n’est « pas réglementaire ». Ils considèrent en effet que ces traitements ont « un effet désinfectant avéré et visent à pallier une qualité d’eau brute insuffisante ». Selon une source proche du dossier, cet « écart » à la norme est susceptible d’« entraîner des sanctions administratives ou pénales en cas de signalement au procureur ».

Feu vert de Borne

En matière de santé publique, la mission d’inspection évoque un « risque virologique » (adénovirus, norovirus, hépatite A) pour les consommateurs. « Les microfiltres n’ont pas d’effet de rétention sur les virus », notent les inspecteursqui déplorent de ne pas avoir été destinataires d’un « plan de contrôle détaillé des virus », tout en précisant que « l’exploitant n’a jamais mis en évidence la présence de ces virus dans l’eau ». Un risque viral qui semble avoir été négligé par le gouvernement.

Lire le décryptage |    La dégradation des ressources en eau menace la production de Perrier

Lors d’une réunion confidentielle organisée au ministère de l’économie en 2021, Nestlé avait reconnu avoir recours à des filtres interdits. Le leader mondial de l’agroalimentaire avait alors demandé au gouvernement de pouvoir continuer à utiliser des microfiltres avec des seuils de coupure inférieurs au 0,8 micron toléré par la réglementation.

Un an plus tard, un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) alerte sur le fait qu’un tel abaissement peut constituer une « fausse sécurisation » et, au bout du compte, « exposer les consommateurs à un risque sanitaire en lien avec l’ingestion d’un virus qui ne serait pas retenu par le filtre ». Les inspecteurs de l’IGAS se réfèrent alors notamment à une épidémie de gastro-entérite en Catalogne en 2016 : elle avait touché plus de 4 000 personnes, dont six avaient dû être hospitalisées. Son origine était la contamination par des eaux usées d’un aquifère dans lequel était prélevée de l’eau de source : un norovirus pathogène avait échappé à la microfiltration et s’était retrouvé dans les bouteilles.

En décembre 2022, l’Agence nationale de sécurité sanitaire indique au gouvernement qu’accorder à Nestlé la possibilité d’utiliser ces microfiltres ne serait « pas acceptable » et prévient qu’une telle autorisation « pourrait exposer la France à un risque de contentieux européen ». Pourtant, le 22 février 2023, contre l’avis de ses administrations, le gouvernement d’Elisabeth Borne donne son feu vert à ces traitements. Une commission d’enquête sénatoriale a été ouverte en décembre pour faire le point sur les pratiques de Nestlé et sur les responsabilités des pouvoirs publics dans les défaillances du contrôle de leurs activités et de la gestion des risques sanitaires associés.

Stéphane Mandard

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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