Quatre ans après avoir échoué à sa réélection face à Joe Biden, Donald Trump briguera finalement un second mandat à la tête des États-Unis. Le leader climatosceptique des Républicains compte déjà revenir sur les efforts écologiques de son prédécesseur.
Gouvernance | 06.11.2024 | https://www.actu-environnement.com/ae/news/donald-trump-reelection-president-etats-unis-climat-energie-45012.php4#ntrack=cXVvdGlkaWVubmV8MzY0Nw%3D%3D%5BNDExMDgz%5D

© Gage Skidmore from Surprise, AZ, United States of America, CC BY-SA 2.0 , via Wikimedia CommonsDonald Trump est réélu président des États-Unis, ce 6 novembre 2024.
« Drill, baby ! Drill ! » (ou « Fore, bébé ! Fore ! ») s’est exclamé Donald Trump, tout au long d’une interminable et tumultueuse campagne pour l’élection présidentielle américaine. Le signe, qu’une fois encore, l’environnement et l’action climatique ne seront assurément pas à son agenda. Car, si l’on en croit les plus récentes estimations, c’est bien lui qui a remporté l’élection du 5 novembre et reviendra s’installer à la Maison-Blanche.
La revanche du néoconservatisme antiécologique
D’après les premiers décomptes des voix et bien que le dépouillement dans certains États reste encore trop serré, Donald Trump a conquis le vote populaire et devrait obtenir le vote majoritaire du collège électoral (ou « grands électeurs »), qui se tiendra le 17 décembre. Le Congrès, dont l’entièreté de la Chambre des représentants et une partie du Sénat auront aussi été renouvelées ce mardi 5 novembre (a priori, en faveur du parti Républicain), décomptera officiellement les 538 voix de ce collège reflétant le vote populaire de chaque État, le 6 janvier prochain, et confirmera ainsi l’élection du nouveau président des États-Unis, qui prendra ses fonctions deux semaines plus tard.
Le retour au pouvoir du leader anti-immigration et néoconservateur des Républicains, précédemment en fonction de 2017 à 2021, risque de marquer un tournant dans l’histoire de la démocratie américaine. En décembre 2023, alors déjà en campagne, il promettait « de ne pas être un dictateur, hormis le premier jour ». Et, malheureusement, d’après ses quelques déclarations à ce sujet en tant que candidat, Donald Trump risque également de mener une politique encore plus antiécologique qu’à son premier mandat.
Le détricotage de l’action climatique
D’après le média spécialisé Grist (1) , en quatre ans, le gouvernement Trump était revenu sur 208 réglementations environnementales. Seulement un tiers d’entre elles avait été remise en vigueur par le gouvernement Biden. Celui pour qui le réchauffement climatique reste « une arnaque » s’est de nouveau engagé à sortir les États-Unis de l’Accord de Paris. Cette promesse, déjà tenue en novembre 2019, avait été renversée par un décret présidentiel (ou ordre exécutif) de Joe Biden dès le lendemain de son investiture, trois mois plus tard. Donald Trump envisage, en outre, de démanteler les agences fédérales de protection de l’environnement (EPA) et d’observation océanique et atmosphérique (NOAA).“ La crise climatique ne s’arrêtera pas car un climatosceptique a été élu à la Maison-Blanche ”Gaïa Febvre, RAC
Durant leur campagne, Donald Trump et son colistier et nouveau vice-président, J. D. Vance, autre climatosceptique notoire, ont en effet qualifié les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de « harcèlement » envers l’industrie pétrolière et la montée du niveau de la mer, issue du réchauffement climatique,« d’opportunité économique pour l’immobilier balnéaire ». Il est à noter que la candidate Démocrate, Kamala Harris, n’avait pas non plus fait de l’environnement sa priorité. Lors de son discours confirmant sa candidature devant la convention nationale du parti, elle s’était seulement contentée de plaider pour « la liberté de vivre sans pollution de l’air ou de l’eau ».
Réaffirmer le soutien aux fossiles, malgré des concessions
Du reste, Donald Trump compte avant tout faciliter la production de pétrole et de gaz naturel, y compris par fracturation hydraulique, de sorte à « diviser par deux les prix de l’énergie en un an » et alléger ainsi les factures des Américains. Cette promesse s’inscrit directement en opposition à la politique précédente de Joe Biden, lequel a interdit la construction de l’oléoduc canado-mexicain Keystone XL (extension d’un « pipeline » existant) et plusieurs permis de forage. De son côté, la candidate Démocrate ne s’opposait plus à la fracturation hydraulique, notamment dans l’État-clé de Pennsylvanie. « Nous pouvons croître et développer une économie florissante basée sur l’énergie propre sans interdire la fracturation hydraulique », avait concédé l’ex-vice-présidente en août.
Donald Trump entend également revenir sur la loi sur la réduction de l’inflation (IRA) d’août 2022, qu’il qualifie de « New Deal vert socialiste ». La loi en question, conçue pour redynamiser l’économie américaine après la pandémie de Covid-19 et portée notamment par Kamala Harris à son poste de vice-présidente, a autorisé 300 milliards de dollars de subventions en direction des « technologies propres ». Trump aura néanmoins besoin du Congrès pour abroger cette loi, ou même certaines de ses dispositions. De plus, une partie des fonds – environ 6,5 milliards, selon le Wall Street Journal (2) en août dernier – a déjà été versée et suscité des investissements privés (plus de 370 milliards), en particulier dans des États aux couleurs républicaines, pour construire des usines de batteries électriques.
Et sur la mobilité électrique, il s’agit justement d’un des rares sujets sur lesquels l’homme d’affaires new-yorkais a changé d’avis. Il était auparavant fermement opposé au déploiement des véhicules électriques, contrevenant selon lui à l’industrie automobile américaine et à la compétitivité du pays face à la Chine. L’apparition d’un soutien médiatique et financier affirmé de la part d’Elon Musk, P-DG de Tesla mais aussi de SpaceX et de X (ex-Twitter), semble avoir renversé la balance. S’amusant alors « qu’il n’avait plus le choix », Trump a finalement admis qu’il soutiendrait la vente de véhicules électriques à « au moins une petite part de la population ».
Une « mauvaise nouvelle », mais pas la fin du monde
Déjà félicitée par de nombreux chefs d’État, dont le président français Emmanuel Macron, la victoire revancharde de Donald Trump n’est absolument pas vue d’un bon œil par les organisations de protection de l’environnement. La qualifiant de « très mauvaise nouvelle », Gaïa Febvre, responsable des politiques internationales du Réseau Action Climat (RAC), n’entend cependant pas « céder au défaitisme » : « La crise climatique ne s’arrêtera pas car un climatosceptique a été élu à la Maison-Blanche. » Sébastien Treyer, directeur de l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri), partage ce sentiment. Pour lui, la poursuite de la lutte contre le réchauffement climatique et de la décarbonation de l’économie mondiale ne dépend pas seulement de la première puissance économique. « L’Accord de Paris tient notamment parce que l’Union européenne et la Chine y tiennent, et de nombreux acteurs économiques américains, même parmi les soutiens de Trump, développent déjà des technologies d’un monde décarboné. » L’atmosphère de la COP 29 sur le climat, qui s’ouvre le 11 novembre à Bakou, en Azerbaïdjan, et doit décider du financement à apporter aux pays du Sud, risque pourtant bien de s’alourdir.
1. Consulter le média Grist
https://grist.org/project/accountability/trump-rollbacks-biden-climate-tracker/
2. Consulter l’article du WSJ
https://www.wsj.com/politics/policy/white-house-races-to-lend-billions-in-climate-funds-before-election-9c5dce7a