Le président de la mutualité Eric Chenut dénigre le régime d’Alsace -Moselle au 13/14h de Lundi 21 Octobre et justifie à sa manière l’augmentation à deux fois l’inflation des tarifs de cotisation 2023.

Eric Chenut président de la Fédération Nationale de la Mutualité Française

Eric Chenut président de la Fédération nationale de la Mutualité Française ©Radio France - CSC

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-du-13-14/13h30-invite-de-13h-du-lundi-21-octobre-2024-8636749

Commentaire Dr Jean Scheffer:

Très intéressante question d’un auditeur Niçois , (voir à 9mn) à propos du régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle qui gère aussi une complémentaire obligatoire pour les habitants des 3 départements avec une cotisation modeste, identique quel que soit l’âge et établissant une bien meilleure couverture à l’exception du 100% santé de Macron (lunettes, prothèses dentaires et auditives) que le gouvernement a empêché d’acquérir pour ce régime local.

Le Président de la mutualité bote en touche et le journaliste ne lui demande pas de répondre à cette question.

Il a aussi essayé d’expliquer de façon peu convaincante l’importance des frais de gestion des mutuelles qui s’échelonnent de 15 à 35%, contre 5% pour l’assurance maladie et l’augmentation des tarifs de l’année 2023 de 8 à 15%.

Par contre il mentionne la taxe imposée par l’Etat qui finance une partie de l’assurance maladie (complémentaire santé solidaire). En clair nous finançons à travers notre complémentaire une dépense qui devrait delà être financée par les cotisations salariales et patronales ou compensée par l’Etat.

Rapport sénatorial sur l’augmentation des cotisations de nos complémentaires avec un chapitre sur le régime local Alsace Moselle

Le chapitre sur le système local d’assurance maladie-complémentaire de l’Alsace Lorraine dans le tout récent rapport du Sénat à propos de l’augmentation bien supérieure à l’inflation pour les cotisations des complémentaires.

Le régime local d’Alsace-Moselle : quelle place pour les complémentaires santé ?

https://www.senat.fr/rap/r23-770/r23-7701.pdf  (Pages 76-80)

Héritier de l’histoire particulière des territoires annexés par l’Empire allemand à la suite de la guerre de 1870, où la législation bismarckienne laissait une fraction modeste des dépenses de soins à la charge des assurés, le régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle a été maintenu en vigueur à titre provisoire(1), après la Seconde guerre mondiale, « dans l’attente que le régime général s’aligne sur son haut niveau de solidarité »(2). Cette perspective ne s’étant pas réalisée, le régime a été pérennisé par le législateur en 1991.

(1) Le régime local complète les prestations de l’assurance maladie obligatoire Le régime local est une assurance complémentaire obligatoire qui relève du code de la sécurité sociale. Il a été décrit par son président, entendu par la mission d’information, comme la deuxième composante d’une « fusée à trois étages » (3 ): le régime général, le régime local et la complémentaire santé.

Ses bénéficiaires(4) sont les salariés assurés au régime général, ainsi que leurs ayants droit (enfants à charge jusqu’à 24 ans et conjoints à charge). L’affiliation concerne notamment les salariés du secteur privé exerçant une activité dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, quel que soit le lieu d’implantation du siège de l’entreprise ; les contractuels de droit public ; les agents titulaires à temps non complet de la fonction publique territoriale uniquement ; les titulaires d’une pension de retraite ; et les titulaires de revenus de remplacement ayant cotisé au régime local (pension d’invalidité, pension de réversion, indemnités et allocations de chômage, etc.)(5)

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1 Par un décret daté du 12 juin 1946. 2 HCAAM, Quatre scénarios polaire d’évolution de l’articulation entre Sécurité sociale et l’Assurance maladie complémentaires, janvier 2022. 3 Compte rendu de l’audition du président du régime local d’ assurance-maladie d’Alsace-Moselle, 10 avril 2024. 4 Source : réponses écrites du régime local au questionnaire du rapporteur. 5 Auxquels s’ajoutent les salariés d’un établissement implanté dans les trois départements concernés, qui exercent une activité itinérante dans d’autres départements (chauffeurs-livreurs, dépanneurs, commerciaux, chargés d’affaires, personnel naviguant des compagnies aériennes…).

Les fonctionnaires des trois fonctions publiques, les travailleurs indépendants et les assurés des régimes spéciaux ne sont donc pas couverts. L’affiliation au régime local est obligatoire pour les assurés qui ont relevé du régime local d’assurance maladie soit pendant les cinq années précédant leur départ en retraite, soit pendant dix années durant les quinze précédant ce départ en retraite. Elle est possible pour les assurés qui, ayant cotisé au moins 60 trimestres au régime local, exercent leur droit d’option dans un délai d’un an à compter de l’attribution de leur pension.

Le régime local compte 2 millions de bénéficiaires1 : 1,6 million d’assurés et 474 000 ayants droit. 63 % de la population des trois départements relève du régime local.

Le régime local offre un haut degré de solidarité interprofessionnelle, intergénérationnelle et envers les familles et les plus modestes. La cotisation ou de l’état de santé. Les retraités et les chômeurs les plus modestes en sont n’augmente ni en fonction de la composition familiale, ni en fonction de l’âge exonérés.

Le code de la sécurité sociale impose au régime local de laisser à l’assuré un ticket modérateur d’au moins 10 % pour les soins de ville. Ses ressortissants bénéficient de ce fait d’une prise en charge des actes médicaux à hauteur de 90 % de la base de remboursement de la sécurité sociale au lieu de 70 % et des actes des dentistes et auxiliaires médicaux au même niveau au lieu de 60 %. De plus, les frais de séjours hospitaliers, le forfait journalier hospitalier, le forfait patient urgences et les transports sanitaires sont intégralement couverts.

La C2S payante est compatible avec le régime local, la participation financière des bénéficiaires étant minorée pour tenir compte de l’apport du régime local : 10,50 euros par mois au lieu de 30 euros. Le contrat de sortie donne également lieu à une participation réduite (plafonnement à 21 euros par mois au lieu de 60 euros).

Le régime local laisse donc un champ d’intervention plus restreint à l’AMC. Celle-ci peut tout de même intervenir sur le ticket modérateur minoré, et sur la part des frais de santé excédant les bases de remboursement de la sécurité sociale, notamment les dépassements d’honoraires. Les affiliés au régime local paient en principe moins cher leur complémentaire santé.

En effet, l’article D. 911-1-1 du code de la sécurité sociale prévoit que, dans le cadre de la couverture collective à adhésion obligatoire, les prestations sont déterminées après déduction de celles déjà garanties par le régime local, et la complémentaire santé d’entreprise doit proposer une cotisation minorée aux bénéficiaires du régime local.

——————————————————————————–1 Source : réponses écrites du régime local au questionnaire du rapporteur.

(2) Un équilibre financier maîtrisé, notamment grâce à des frais de gestion particulièrement bas Les dépenses du régime local sont ainsi réparties – soins de ville : 73 %. – forfait journalier hospitalier : 10 % ; – frais de séjour à l’hôpital : 16 %.

99 % des cotisations sont restitués sous forme de prestations aux assurés ; les frais de fonctionnement du régime local correspondent à 1 % de ses charges.

Ce taux élevé de restitution tient notamment : – au caractère obligatoire du régime, qui le dispense d’engager des frais d’acquisition pour attirer des assurés ; – au fait qu’il soit adossé aux organismes de sécurité sociale pour son fonctionnement quotidien (les CPAM affilient les assurés et leur servent les prestations du régime, la Carsat Alsace-Moselle vérifie les droits des nouveaux retraités et prélève la cotisation sur leur pension du régime général, l’Urssaf centralise les cotisations du régime précomptées sur les salaires et autres revenus de remplacement).

Les recettes du régime local sont constituées à raison de 71 % par les cotisations calculées sur l’intégralité des salaires des assurés, à la charge exclusive de ces derniers. Les employeurs ne contribuent pas au financement du régime.

Les retraités acquittent des cotisations dont le taux est identique à celui des salariés en activité, comptant pour 21 % des recettes. Le taux de cotisation étant unique pour tous les assurés et restant le même lors de la liquidation des droits, l’âge est sans conséquence sur le taux d’effort des seniors.

En 2021, les confortables réserves du régime, qui atteignent neuf mois de prestations, ont permis au conseil d’administration du régime local de baisser le taux de cotisation de 1,50 % à 1,30 %. Cette décision a été prise par le conseil d’administration du régime local le 16 décembre 2021 et elle est entrée en vigueur le 1er avril 2022.

L’ANI et la généralisation de contrats collectifs obligatoires pour les salariés du privé ont soulevé la question de leur articulation avec le régime local, dans la mesure où le champ de prestations couvert par l’ANI est plus large que celui du régime local, notamment en optique et en prothèses dentaires, et où les contrats collectifs, contrairement au régime local, sont cofinancés par les employeurs. De manière générale, relever du régime local est un motif de dispense de l’obligation de souscrire au contrat de complémentaire santé collectif de son employeur. Au terme d’une mission confiée en 2015 à des parlementaires(1) par le Premier ministre, l’extension au régime local du panier de l’ANI a été écartée par les pouvoirs publics (et non par le régime local qui y était favorable), les organismes complémentaires intervenant pour compléter les prestations du régime local à hauteur des dépenses prises en charge dans le panier minimal de l’ANI.

Lors de la création du 100 % santé, la prise en charge par le régime local, demandée par celui-ci, des dépenses couvertes en matière d’optique, de soins dentaires et d’audiologie a également été écartée par les pouvoirs publics.

(3) Un système dont l’analyse doit être approfondie

Selon le HCAAM(2), les avantages du régime local tiennent à : – sa simplicité(3 ); – la « continuité des prestations tout au long de la vie, sans rupture par exemple au moment du passage à la retraite (si les conditions d’affiliation à la retraite sont remplies) » ; – son fort niveau de solidarité pour les salariés modestes, les retraités, les chômeurs et les familles ; – le bas niveau de ses frais de gestion, « grâce à une mutualisation des frais de gestion avec le régime de base ».

Les Alsaciens-Mosellans recourent à une couverture santé complémentaire en raison des dépassements d’honoraires, « très importants dans certaines localités »(4), et pour bénéficier d’une meilleure couverture des soins dentaires et optiques ainsi que des audioprothèses (le 100 % santé n’ayant pas été intégré au régime local).

Toutefois, le nombre de ressortissants du régime local qui recourent à une complémentaire santé n’est pas connu : ce point, évoqué par le HCAAM dans son rapport précité de 2022, a été confirmé par le régime local dans ses réponses écrites au rapporteur, qu’il s’agisse des salariés relevant des contrats collectifs, des assurés souscrivant des contrats individuels ou des bénéficiaires du régime local relevant potentiellement de la C2S à titre payant.

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1 MM. Philippe Bies, député du Bas-Rhin, Denis Jacquat, député de la Moselle, André Reichardt, sénateur du Bas-Rhin et Mme Patricia Schillinger, sénatrice du Haut-Rhin. 2 HCAAM, Quatre scénarios polaire d’évolution de l’articulation entre Sécurité sociale et l’Assurance maladie complémentaires, janvier 2022. Le HCAAM s’est posé la question, dans ce rapport, de l’expérimentation, dans d’autres territoires, de régimes locaux complémentaires comparables au régime local. 3 Selon les réponses écrites du régime local au questionnaire du rapporteur, « les flux de prise en charge des frais de santé sont générés par la carte vitale. Seul le taux de prise en charge diffère ». 4 Compte rendu de l’audition du président du régime local d’ assurance-maladie d’Alsace-Moselle, 10 avril 2024.

Cette lacune statistique empêche d’évaluer la place des complémentaires santé pour les ressortissants du régime local et de documenter l’intérêt que représente ce « troisième étage » pour le public concerné : il importe de faire un point précis sur cette question.

Par ailleurs, compte tenu des remboursements plus élevés perçusgrâce au régime local, les ressortissants de celui-ci bénéficient, de la part des organismes de complémentaire santé, de tarifs plus avantageux que le reste de la population (les primes sont ainsi inférieures de 30 à 40 % selon le HCAAM ; le régime local estime que dans le cadre de contrats individuels, la cotisation d’un bénéficiaire du régime local « correspond en moyenne à 60 % d’une cotisation d’un bénéficiaire du régime général »(1).

Le régime local estime cependant qu’il n’a « pas la certitude que tous les organismes complémentaires jouent le jeu »(2) en la matière. Citant le classement des départements en fonction du coût des cotisations aux complémentaires santé publié par un comparateur en ligne pour trois catégories d’assurés (jeune actif, couple actif avec deux enfants et couple de retraités), il note que l’écart par rapport à la moyenne nationale, pour les trois départements de Moselle, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, serait de 24 à 29 %.

Ainsi, il convient de mieux connaître les tarifs auxquels sont soumis les ressortissants du régime local souscrivant une complémentaire santé, afin d’évaluer précisément comment les Ocam tirent les conséquences de leur affiliation au régime local sur le montant de leurs cotisations et de s’assurer que les complémentaires santé minorent effectivement ces cotisations à hauteur des économies réalisées au titre du régime local.

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Recommandation. 

– Réaliser une étude approfondie du coût des complémentaires santé pour les ressortissants du régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle et documenter les tarifs de complémentaire santé supportés par les affiliés de ce régime.

-Évaluer le nombre de ressortissants du régime local : -ayant souscrit un contrat de complémentaire santé à titre individuel ou collectif ; – remplissant les conditions d’éligibilité à la C2S.

________________________________________________________________ 1 Source : réponses écrites du HCAAM au questionnaire du rapporteur. 2 Source : réponses écrites du HCAAM au questionnaire du rapporteur.

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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