Climat: il faut « prendre la mesure de l’urgence climatique et agir rapidement, mais surtout de manière ambitieuse et non seulement cosmétique.

Climat : la France fait mieux malgré un manque persistant d’efforts structurels 

Si la France confirme la baisse de ses émissions, toutes les variables ne sont pas au beau fixe : les puits de carbone restent insuffisants, les transports pèsent toujours autant et la part des énergies renouvelables n’augmente pas assez rapidement.

Gouvernance  |  Aujourd’hui à 12h34  |  F. Gouty

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Climat : la France fait mieux malgré un manque persistant d'efforts structurels

© AA+W Les transports restent le secteur le plus émissif, malgré une baisse des émissions liées à des facteurs conjoncturels.

En 2023, selon le suivi opéré par le Réseau Action climat (RAC), la France a rempli les trois quarts de ses objectifs climatiques et énergétiques. « En fin de compte, les chiffres font preuve d’une atteinte fragile des objectifs climatiques », souligne le collectif d’ONG dans la nouvelle édition annuelle de son « Observatoire climat-énergie (1)  », publié le 16 septembre. Celui-ci martèle ainsi qu’il faut « prendre la mesure de l’urgence climatique et agir rapidement, mais surtout de manière ambitieuse et non seulement cosmétique, ou par des mesurettes qui ne seraient que des pansements sur des plaies béantes ».

Du mieux, en dépit du manque de politiques structurelles

Sur le plan climatique, le pays a respecté les « budgets carbone » qu’il s’est lui-même fixés dans son actuelle Stratégie nationale bas carbone (SNBC2). Comme l’indiquait déjà les préestimations du Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa), les émissions « brutes » de gaz à effet de serre de la France se sont élevées à 373 millions de tonnes d’équivalent dioxyde de carbone (MtCO2e), contre un plafond de 395 MtCO2e. Le résultat reste également positif en comptabilité « nette », prenant en compte les estimations d’absorption du CO2 par les puits de carbone (forêts et sols non artificialisés) : 352 MtCO2e réalisés, contre 355 MtCO2e fixés.“ il faut repenser notre politique forestière pour privilégier la durabilité des forêts plutôt que leur rentabilité, mais aussi renforcer la baisse des émissions dans les autres secteurs ”RAC

Cela étant, ces performances cachent évidemment des nuances. Les plus fortes baisses d’émissions se concentrent sur deux secteurs : le bâtiment, avec un écart de 12,6 MtCO2e, et l’industrie, réussissant son objectif avec un écart de 6,2 MtCO2e. Cependant, comme l’explique le RAC, il s’agit surtout d’effets conjoncturels, observés depuis 2022. Les baisses ne se sont pas produites sous l’action de politiques publiques ciblées. D’une part, « les consommations d’énergie pour le chauffage ont baissé en 2023 du fait de prix de l’énergie élevés, d’actions de sobriété et de rénovations des bâtiments ». Tandis que, d’autre part, la réduction des émissions dans l’industrie« repose encore en grande partie sur la baisse de la production », observée à la suite d’une double crise de l’énergie et des matières premières. De même, le secteur de l’énergie continue, en partie en raison de la situation industrielle, de satisfaire les atteintes de la SNBC2 avec, cette année, un écart de 13,4 MtCO2e. En outre, « l’agriculture respecte son budget carbone à quelques tonnes près », notamment grâce la baisse progressive du cheptel bovin.

L’absorption du carbone toujours insuffisante

Du reste, les mêmes mauvais élèves ne parviennent toujours pas à améliorer leurs notes. Le secteur des déchets demeure dans le rouge depuis l’instauration de la SNBC2 (avec 12,4 MtCO2e de trop en 2023), tout comme le premier secteur émissif, les transports (avec 3,8 MtCO2e en excès), auquel il manque la « grande orientation »nécessaire, selon le RAC, pour inverser la tendance. Si les émissions dans ce domaine ont, malgré tout, baissé, cette réduction résulte, cette fois encore, de facteurs conjoncturels. « La hausse des prix des carburants a incité les automobilistes à modifier leurs habitudes et réduire leurs déplacements. »

Par ailleurs, les émissions liées à l’utilisation des terres, aux changements d’affectation des terres et à la foresterie (UTCATF) pèsent toujours, inexorablement, sur les puits de carbone français. D’après les estimations du Citepa, reprises par le RAC, l’écart entre l’absorption effective et le plancher fixé par la SNBC2 reste d’environ 20 MtCO2e chaque année – manquant près de la moitié de l’objectif (absorber 40 MtCO2e/an). « Un rappel qu’il faut repenser notre politique forestière pour privilégier la durabilité des forêts plutôt que leur rentabilité, mais aussi renforcer la baisse des émissions dans les autres secteurs », affirme le collectif.

Une sobriété salutaire

Pour ce qui est des objectifs énergétiques prévus par la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE2), les efforts continuels de sobriété entamés en 2022 ont payé. La consommation d’énergie finale a été légèrement inférieure de 13 térawattheures (TWh) aux 1 538 TWh prévus, notamment grâce à des réductions pour le gaz naturel et les énergies fossiles (hors charbon, planant juste au-dessus du plafond fixé, et produits pétroliers, en légère hausse). Si le poids du parc nucléaire dans la production d’électricité respecte encore les objectifs de la PPE, la part des énergies renouvelables, bien qu’en hausse, demeure insuffisante : 22,2 % au lieu des 25 % demandés.1. Accéder à la plateforme du RAC
https://www.observatoire-climat-energie.fr/

Félix Gouty, journaliste
Rédacteur spécialisé

Nouveau gouvernement : les acteurs de l’énergie attendent des garanties sur la planification écologique

Qu’ils soient professionnels ou opérateurs, tous espèrent que le gouvernement de Michel Barnier respectera les engagements de planification écologique. En outre, certains réclament le retour d’un ministère de l’Énergie « de plein exercice ».

Energie  |  16.09.2024  |  F. Gouty

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Nouveau gouvernement : les acteurs de l'énergie attendent des garanties sur la planification écologique

© lovelyday12

Mercredi 11 septembre, le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, a promis de nommer les membres de son gouvernement cette semaine. Si tel est bien le cas, cela marquera, à moins de l’adoption d’une motion de censure, la fin d’un feuilleton politique ouvert avec la dissolution de l’Assemblée nationale, le 9 juin dernier. D’anciens et de nouveaux dossiers législatifs et réglementaires pourront enfin être traités – en plus de celui, inextricable, du budget pour l’année 2025 et au-delà. Et, pour ce qui est du domaine de l’énergie, les attentes sont fortes.

Donner à la planification une certaine autorité

« Pour réparer la dette financière, il lui faudra retrouver l’équilibre budgétaire, mais pour ne pas entamer davantage notre dette écologique, il lui faudra respecter les dynamiques déjà engagées, prévient Jules Nyssen, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), en reprenant les termes du nouveau locataire de l’hôtel de Matignon. Procéder à des arbitrages budgétaires menant à reporter certains dossiers ou à sacrifier des outils, comme MaPrimeRénov’ ou le bonus écologique sur les véhicules électriques, tuerait le mouvement de progrès enclenché ces dernières années. » Pour être assuré de conserver cette dynamique malgré les prochains sacrifices budgétaires, le SER – et, avec lui, d’autres acteurs du secteur – demande plusieurs gages.

En premier lieu, « un ministère de l’Énergie de plein exercice », idéalement à l’image de celui précédemment piloté par Agnès Pannier-Runacher entre mai 2022 et janvier 2024, « permettrait de ne pas laisser la planification écologique entre les mains de la seule direction générale du Trésor ». La transition énergétique étant devenue, selon le SER, un sujet de second ordre lors de son plus récent séjour à Bercy. Ce nouveau ministère aurait comme première tâche, ou « premier marqueur » de sa bonne volonté, de délivrer sa réponse au débat public sur le renouvèlement des documents stratégiques de façade (DSF), lesquels détermineront l’avenir de l’éolien en mer. Pour rappel, le Gouvernement a eu un délai de trois mois, à partir du 26 juin, pour réagir aux attentes des citoyens consultés et prendre sa décision. À ce sujet, le SER, comme le syndicat France Renouvelables, demande que soient rapidement lancés, dans la foulée, les prochains appels d’offres (AO7 à AO10) attendus par la filière.“ Pour réparer la dette financière, il lui faudra retrouver l’équilibre budgétaire, mais pour ne pas entamer davantage notre dette écologique, il lui faudra respecter les dynamiques déjà engagées ”Jules Nyssen, SER

En cela, le nouveau Gouvernement ne saurait se dérober une nouvelle fois pour mettre en œuvre la nouvelle Stratégie française énergie-climat(Sfec). Accouchée en novembre dernier, puis adaptée en projet législatif abandonné avant d’être présenté et, enfin, retranscrite dans le Plan national intégré énergie-climat (Pniec) finalement délivré à la Commission européenne en juillet, cette Sfec doit encore faire l’objet d’une loi de programmation énergie-climat (LPEC), quel qu’en soit le contenu. Une obligation légale, fixée dans le Code de l’énergie depuis 2019, pour laquelle le Gouvernement accumule déjà un retard d’un an. Et cette loi est censée s’inscrire en cohérence avec les prochaines Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), Stratégie nationale bas carbone (SNBC) et le Plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc), posant des objectifs chiffrés à atteindre et les moyens nécessaires à engager pour mener à bien l’orientation théorisée par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE).

Trancher la question du « bouclage biomasse »

Autre attente que les organisations professionnelles partagent avec, notamment, les opérateurs du réseau gazier (GRDF, GRTgaz et Teréga) : une concertation nationale sur le « bouclage biomasse ». En mars dernier, quatre établissements publics s’étaient réunis pour former un groupement d’intérêt scientifique (GIS), afin de définir les usages prioritaires des biomasses agricoles ou forestières. La première réunion de cette nouvelle entité, sous l’égide du ministère de l’Agriculture, n’a néanmoins pas eu lieu. Or, les premières projections du SGPE (1) sur ce « bouclage » ne satisfont pour l’instant pas tous les acteurs. Produites en juillet dernier, celles-ci craignent un « déficit » en biomasse. Les attentes en termes de souveraineté agricole et alimentaire et les besoins croissants en bioénergies et en puits de carbone à l’horizon 2030 seraient bien supérieurs aux ressources existantes ou mobilisables.

En bois-énergie, par exemple, elles « ne prennent pas en compte l’efficacité énergétique croissante des nouveaux équipements, surestiment donc l’évolution future de la consommation et tendent ainsi à brider le potentiel de croissance de la production », regrette Frédéric Coirir, vice-président du SER. Laurence Poirier-Dietz, directrice générale de GRDF, prône, elle, plus de prudence pour ce qui est du bois-énergie, mais reste confiante sur les gisements de biomasse (déchets ou résidus agricoles) destinés à produire du biométhane. « L’écueil du SGPE est de parler de « la » biomasse plutôt que « des » biomasses, d’une part, et il sous-estime les capacités de certaines filières à réaliser le potentiel offert par les bioénergies, d’autre part, lesquelles dépendent avant tout de choix politiques. »

Du reste, les opérateurs gaziers réclament toujours le lancement d’un appel à projets pour soutenir les treize premiers projets de pyrogazéification ; tandis que les acteurs de l’électricité renouvelable anticipent la publication d’un nouveau Schéma décennal de développement du réseau (SDDR), formulant les investissements nécessaires à RTE jusqu’en 2040. Mais l’échelon national n’est pas le seul à cristalliser toutes les attentes des énergéticiens.

Maintenir l’ambition européenne

L’Allemande Ursula von der Leyen, reconduite au poste de présidente de la Commission européenne, devrait présenter la composition de son nouveau collège de commissaires, ce mardi 17 septembre. Ces derniers seront auditionnés au cours du mois d’octobre par le Parlement européen avant que celui-ci vote sur l’ensemble du collège. La nouvelle équipe exécutive pourrait ainsi prendre ses fonctions le 1ernovembre (ou le 1er décembre, si certaines candidatures sont retoquées) et lancer alors la nouvelle mandature bruxelloise, comme il se doit.

Avec un rapport assez sévère sur la compétitivité économique, signé de l’ancien président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi, déjà sur la table, cette nouvelle Commission von der Leyen risque également de revoir la transition écologique à la baisse dans l’ordre des priorités. Après tout, la précédente mandature est parvenue à faire passer près de la moitié des textes du Pacte vert, y compris une première loi européenne sur le climat (et son objectif de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030) et, notamment, une révision de la directive sur les énergies renouvelables (RED III), portant leur part à 42,5 % d’ici à 2030. Pourtant, certaines voix en attendent encore davantage.

« Il va falloir trouver un agenda commun, entre décarbonation et compétitivité, pour relancer les discussions sur la trajectoire à mener d’ici à 2040 », suggère Yves Marignac, porte-parole de l’institut Négawatt. Dans un rapport publié en février dernier, la Commission européenne tablait sur une baisse des émissions de 90 % en 2040 (en comparaison de 1990), pour respecter l’engagement de neutralité carbone en 2050 fixé par sa loi Climat. Mais cette orientation doit encore être actée par un véhicule législatif. « Avec le Pacte vert, l’Europe s’est positionnée comme le moteur de l’ambition climatique internationale, rebondit Yves Marignac. Il lui faut pérenniser cette place et ne pas se soumettre aux rétropédalages constatés à la fin de la mandature précédente. » Or, d’après un récent rapport sur l’état de l’union de l’énergie (2) , les projections soumises par les États membres (à travers leurs Pniecs) « présentent un certain écart avec l’ambition européenne », que ce soit en matière climatique ou énergétique.

La définition de l’« hydrogène renouvelable », de nature à lancer les dispositifs de soutien attendus de longue date par cette filière ; le devenir d’une éventuelle directive « bas carbone », proposée en décembre 2023 par plusieurs pays pronucléaire, dont la France, en opposition à la RED III ; ou encore l’issue de la clause de revoyure, prévue en 2027, sur l’interdiction de vente des véhicules thermiques en 2035 (et de possibles dérogations pour les biocarburants ou le BioGNV) sont, enfin, autant d’autres dossiers à trancher.1. Télécharger le focus du SGPE sur le bouclage biomasse
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-44707-sgpe-biomasse-juillet-2024.pdf2. Télécharger le rapport sur l’état de l’union de l’énergie
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-44707-rapport-etat-union-energie-2024.pdf

Félix Gouty, journaliste
Rédacteur spécialisé

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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