Élections législatives : garantir que la solidarité continue de guider notre société (Communiqué de la Société Française de Santé Publique SFSP)
Émis par : FSPF
La dissolution de l’Assemblée Nationale par le Président de la République et l’annonce de nouvelles élections législatives les 30 juin et 7 juillet suscitent de vives inquiétudes parmi les acteurs de santé publique.
A la veille du choix que chaque électeur est appelé à faire, la Société Française de Santé Publique (SFSP) souhaite rappeler les principes fondamentaux qui sont au cœur de son projet associatif.
La SFSP fonde son action sur les valeurs de la République (liberté, égalité, fraternité) et le principe de solidarité. Elle rappelle qu’il ne peut exister de société humaine sans solidarité entre ses membres et que cette solidarité repose sur la conscience que le bien-être de chacun dépend de celui de l’autre quel qu’il soit, indépendamment de son origine ou de ses opinions.
Dans le champ de la santé publique, la SFSP met en avant les valeurs d’autodétermination, de bienfaisance, d’équité et de non-discrimination. La SFSP défend aussi la responsabilité professionnelle et la rigueur méthodologique, principes essentiels pour garantir des interventions efficaces, fondées sur des données probantes et éthiquement responsables, dans le but d’améliorer la santé et le bien-être des populations.
La SFSP continuera de plaider pour une société qui refuse l’exclusion et promeut la cohésion sociale, dans le souci constant de réduire les inégalités sociales, en prenant en compte les déterminants sociaux et environnementaux de la santé, en renforçant les liens sociaux, et en garantissant l’accès équitable aux services de santé pour toutes et tous.
A la veille de cette échéance décisive pour notre démocratie, nous encourageons chaque citoyenne et chaque citoyen, en particulier les membres de notre réseau, à participer au scrutin législatif afin de garantir que les valeurs de solidarité et de santé publique continuent de guider notre société.
Législatives : les médecins face au choix de l’engagement
Quentin Haroche | 24 Juin 2024 https://www.jim.fr/viewarticle/législatives-médecins-face-au-choix-lengagement-2024a1000boj?ecd=wnl_all_240624_jim_daily-pharma_etid6619983&uac=368069PV&impID=6619983&sso=true
Paris – A moins d’une semaine du premier tour des élections législatives, certains médecins décident de s’engager dans la campagne pour faire barrage à l’extrême-droite.
Qu’il semble loin ce printemps 2002 où la quasi-totalité de la société civile dont une grande partie de la communauté médicale (et la rédaction du JIM) s’étaient indignéees de l’arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle. Plus de vingt ans après ce choc politique et alors que le Rassemblement National est donné favori des prochaines élections législatives des 30 juin et 7 juillet prochain par les sondages, aucun « front républicain » de ce type n’a émergé au sein de la société française. Le RN ne semble plus faire peur, qu’on s’en réjouisse ou qu’on s’en désole et son processus de « dédiabolisation » semble avoir porté ses fruits.
Au sein de la communauté médicale, rares sont les syndicats ou les professionnels de santé qui ont pour le moment ouvertement pris position. La plupart se contentent d’alerter les trois grands blocs en présence (RN, coalition présidentielle et Nouveau Front Populaire) de l’importance de donner une place à la santé dans leurs programmes.
Les Dr Marty et Wargon font campagne contre le RN…et contre LFI
Mais au fur et à mesure que l’élection approche, les langues commencent à se délier. Parmi les médecins médiatiques qui prennent la parole, citons notamment le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML et le Dr Matthias Wargon, chef du service des urgences de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis. Tous les deux très actifs sur X, les deux praticiens critiquent régulièrement les prises de positions jugées xénophobes ou anti-républicaines du RN…mais ne sont pas non plus tendres avec les débordements de l’aile gauche du NFP et plus précisément de La France Insoumise (LFI).
« Les valeurs de la France ne collent pas avec l’extrémisme, je ne veux pas que mon pays se déchire et s’affronte dans les jours, semaines et mois qui vont venir. Or, l’extrémisme au pouvoir c’est l’affrontement assuré et la déchirure profonde de notre pays, de notre démocratie, de notre République » alerte ainsi le Dr Marty d’un ton grave dans une vidéo publiée sur son compte X jeudi dernier.
Si certains médecins font le choix, sans le dire ouvertement, de soutenir la coalition présidentielle, d’autres professionnels de santé au contraire se prononcent clairement en faveur du NFP, alliance regroupant le Parti Socialiste (PS), Europe Ecologie Les Verts (EELV), le Parti Communiste Français (PCF) et LFI.
Dans une tribune publiée ce samedi sur le site Médiapart, rédigée par le Dr Julie Chastang, médecin généraliste à Fontenay-sous-Bois et par le Pr Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie à l’hôpital Henri Mondor à Créteil, ce sont près de 3 600 professionnels de santé et du médico-social, chercheurs et usagers du système de santé qui appellent à voter à gauche aux prochaines élections législatives.
Les médecins mettent (de nouveau) en garde contre la suppression de l’AME
Dans cette tribune, cosignée notamment par le Pr Karine Lacombe, cheffe du service d’infectiologie de l’hôpital Saint-Antoine à Paris ou par le Dr Bernard Jomier, sénateur de Paris, les auteurs justifient leur rejet de l’extrême-droite par la nécessité de garantir « l’accès à la santé pour tous qui fait partie des droits humains fondamentaux et des principes essentiels de notre pacte républicain ». Sans l’évoquer explicitement, la tribune met en garde contre la proposition du RN de supprimer l’aide médicale d’Etat (AME), dispositif qui permet aux immigrés clandestins (sous réserve de conditions de revenus) de se soigner gratuitement en France.
« Toute politique xénophobe ou discriminatoire conduisant à supprimer des droits sociaux et à la santé sur des critères d’origine ou de nationalité est contraire à ces valeurs universelles ; elle mettrait par ailleurs en péril la santé publique et donc potentiellement la santé de toutes et tous » peut-on lire dans la tribune. Les auteurs insistent également sur « l’engagement et le dévouement » des professionnels de santé issus de l’immigration qui ont permis à l’hôpital de survivre aux différentes crises récentes.
Pour le Dr Chastang et le Pr Pelissolo, le rempart à l’extrême-droite ne viendra pas des candidats soutenant le gouvernement actuel qui a « décidé de réformes s’inspirant de la préférence nationale » (référence à la loi sur l’immigration voté en décembre dernier). Ils appellent donc à voter pour la gauche afin de « préserver l’accès universel à des soins de qualité pour tous ».
Force est de constater cependant que dans cette très courte campagne, les questions de santé, pourtant primordiales pour les Français si l’on en croit les sondages, n’ont pour le moment pas une place prépondérante. Un signe sans doute que les médecins ont moins de pouvoir d’influence dans la société civile.
Appel des professions et usagers de la santé à faire barrage contre l’extrême droite
Parce que l’accès à la santé pour tous fait partie des droits humains fondamentaux, et que l’extrême droite aggraverait l’état d’un système de soins et d’accompagnement médico-social fragilisé depuis déjà de nombreuses années, plus de 3600 professionnel·les de santé, du médico-social, du soin et de la recherche, ou usagers des services de santé « expriment solennellement notre opposition aux partis d’extrême droite et à leurs desseins mortifères ». Ils et elles appellent à voter pour le Nouveau Front Populaire.

Nous, femmes et hommes des professions de santé, du médico-social, du soin et de la recherche, ou usagers des services de santé exprimons solennellement notre opposition aux partis d’extrême droite et à leurs desseins mortifères pour notre République et la santé publique.
L’accès à la santé pour tous fait partie des droits humains fondamentaux et des principes essentiels de notre pacte Républicain, protecteur notamment des plus vulnérables. Toute politique xénophobe ou discriminatoire conduisant à supprimer des droits sociaux et à la santé sur des critères d’origine ou de nationalité est contraire à ces valeurs universelles ; elle mettrait par ailleurs en péril la santé publique et donc potentiellement la santé de toutes et tous.
Les maladies infectieuses et les épidémies ne reculent pas devant un passeport ou un arbre généalogique, elles touchent d’abord les plus précaires quand ils ne peuvent pas se soigner et se diffusent ensuite dans l’ensemble d’une population.
De même, ne pas pouvoir subvenir aux besoins les plus élémentaires au travers des aides sociales fragilise immanquablement la santé des plus exposés, en commençant par les enfants, les personnes âgées, et les personnes en situation de handicap, avec en particulier des conséquences bien établies sur la santé mentale de beaucoup d’entre nous.
Le système de soins et d’accompagnement médico-social est grandement fragilisé depuis déjà de nombreuses années. Il a survécu aux crises successives grâce à l’engagement et au dévouement de professionnels dont beaucoup sont issus de l’immigration, malgré tous les obstacles qu’ils peuvent rencontrer sur leur parcours. Se priver de ces compétences et contributions précieuses, dans des métiers essentiels et difficiles, ne ferait qu’aggraver les dysfonctionnements et les manques de notre système sanitaire et médico-social.
Le gouvernement en place depuis sept ans, qui se prétendait le meilleur rempart face à la menace du Rassemblement national, a totalement échoué dans cet objectif. Il a, tout au contraire, décidé de réformes s’inspirant de la préférence nationale et d’autres projets de droite voire d’extrême-droite.
La défense de la santé publique et de la solidarité universelle ne viendra pas de ces partis. Les politiques de préférence nationale, particulièrement dans un domaine aussi sensible que la santé, ne feront qu’accentuer les inégalités sociales avec le risque de fracturer encore davantage notre société, déjà fragile.
Les conséquences de telles politiques peuvent être dévastatrices, non seulement en termes de santé publique, mais aussi en termes de cohésion sociale. Ces principes indignes sont contraires à notre constitution et nous font courir le risque de provoquer des soulèvements sociaux.
Pour toutes ces raisons, il est impératif de se mobiliser contre les politiques d’extrême-droite et de soutenir des candidats qui défendent une vision inclusive, solidaire et égalitaire de la santé publique. Voter pour des partis de gauche, c’est choisir de préserver l’accès universel à des soins de qualité pour tous, et ainsi agir pour la stabilité et la paix sociale dans notre pays.
Dans la période grave et historique que traverse notre pays, nous appelons toutes les personnes attachées aux valeurs humanistes du soin et de la santé publique à faire barrage aux partis d’extrême-droite en votant pour les candidats rassemblés au sein du Nouveau Front Populaire pour les prochaines élections législatives.
https://www.antoinepelissolo.com/blog/appel-des-professions-et-usagers-de-la-sante-a-faire-barrage-a
Premier·es signataires :
- Dr Julie CHASTANG (co-rédactrice), médecin généraliste à Fontenay-sous-bois, MCU à Sorbonne Université, et Co-présidente l’Union Syndicale des médecins de centre de santé.
- Pr Antoine PELISSOLO (co-rédacteur), chef de service de psychiatrie au CHU Henri-Mondor (Créteil), et secrétaire national du Parti Socialiste.
- Dr Olivier MILLERON – Cardiologue hospitalier, Paris.
- Pr Karine LACOMBE, Cheffe de Service des maladies infectieuses et tropicales, Hôpital St-Antoine, Paris.
- Dr Rony BRAUMAN, médecin. Ancien président de Médecins sans Frontières.
- Sanaa SAITOULI, Co Fondatrice de Banlieues Climat.
- Dr Sophie DEMERET, neurologue, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris.
- Dr Anne GERVAIS, hépato-gastro-entérologue, hôpital Louis-Mourier, AP-HP, Colombes.
- Clément NALLIER, cadre supérieur de santé, Sceaux.
- Dr Marieke GEMINEL, Médecin des Centres Municipaux de Santé de Champigny-sur-Marne.
- Dr Jamal ABDEL-KADER, psychiatre, Paris.
- Dr Claude PIGEMENT, médecin gastro-entérologue, Aubervilliers. Membre du Conseil d’administration ARS-IDF.
- Dr Bruno RAMDJEE, médecin de santé publique, juriste, enseignant à SciencesPo Paris.
- Dr Bernard JOMIER, médecin, sénateur de Paris.
- Dr Frédéric VILLEBRUN, médecin généraliste, directeur de la santé (Villejuif), co-président de l’Union syndicale des médecins de centres de santé (USMCS).
- Mohammed GHADI Ghadi, Représentant des usagers du système de santé.
- Dr Alain BEAUPIN, président de l’Institut Jean-François Rey.
- Paul CHALVIN, directeur d’hôpital.
- Jérôme MARTIN, ancien président d’Act Up-Paris, co-fondateur de l’Observatoire de la Transparence dans les Politiques du Médicament.
- Pr Anne-Marie BOULDOUYRE-MAGNIER, Professeur honoraire de médecine générale à Sorbonne Université, Paris.
- Pr Yannick RUELLE, médecin généraliste (centres municipaux de santé universitaires de Pantin) et professeur associé de médecine générale (Université Sorbonne Paris Nord).
- Pr Jean-Daniel LELIEVRE, professeur d’immunologie, GHU Henri Mondor Créteil, Créteil.
- Pr Jean-Marc BALEYTE, pédopsychiatre, professeur de médecine, Université Paris Est Créteil.
- Dr Hector FALCOFF, médecin, fondateur et ancien président de la CPTS Paris 13.
- Dr Richard LOPEZ, médecin généraliste, Président de la Fabrique des centres de santé, ancien Président de la Fédération Nationale des Centres de Santé.
- Pr Loïc de PONTUAL, Chef de Service de Pédiatrie, Hôpitaux universitaires Paris Seine Saint Denis.
- Dr Frédéric VILLEBRUN, médecin généraliste, directeur de la santé (Villejuif), co-président de l’Union syndicale des médecins de centres de santé (USMCS).
- Dr Sophie CROZIER, neurologue, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris. Membre du Collectif Inter-Hôpitaux et du Comité Consultatif National d’Ethique.
- Pascal MARIOTTI, directeur d’hôpital, Lyon.
- Dr Pierre SUESSER, pédiatre et médecin de santé publique, ex-médecin de PMI.
- Dr Sylvain BOUQUET, Vice-président du Collège de la Médecine Générale, Paris.
Pour retrouver la liste des signataires exhaustive, voir ici :
L’Observatoire de la Transparence dans les politiques du médicament soutient et relaie l’« Appel des professions et usagers de la santé à faire barrage contre l’extrême droite»
publié ce 22 juin 2024 et signé à ce jour par plus de 3600 acteurs et actrices de la santé, soignant-es, chercheurs et chercheuses, usagères et usagers, etc.
Les signataires y expriment solennellement leur « opposition aux partis d’extrême-droite et à leurs desseins mortifères ». Ils et elles rappellent que « l’accès à la santé pour tous fait partie des droits humains fondamentaux et des principes essentiels de notre pacte Républicain »et que « ne pas pouvoir subvenir aux besoins les plus élémentaires au travers des aides sociales fragilise immanquablement la santé des plus exposés, en commençant par les enfants, les personnes âgées, et les personnes en situation de handicap, avec en particulier des conséquences bien établies sur la santé mentale de beaucoup d’entre nous. »
Rappelant le soutien du gouvernement et de sa majorité aux projets de restriction du droit à la santé pour les étrangers, les signataires indiquent que « la défense de la santé publique et de la solidarité universelle ne viendra pas de ces partis », soit Renaissance, LR, le RN ou Reconquête.
« Dans la période grave et historique que traverse notre pays, nous appelons toutes les personnes attachées aux valeurs humanistes du soin et de la santé publique à faire barrage aux partis d’extrême-droite en votant pour les candidats rassemblés au sein du Nouveau Front Populaire pour les prochaines élections législatives », concluent les actrices et acteurs de la santé signataires.
Voir aussi:
Le cordon sanitaire pour maintenir l’accès aux soins pour tous est bien timide: ex l’association des diabétiques, le souhait de ne pas voter RN est entre les lignes https://environnementsantepolitique.fr/?p=51240
https://environnementsantepolitique.fr/2024/06/18/programme-sante-du-rn/
https://environnementsantepolitique.fr/2024/06/16/le-medecins-bien-silencieux/