Les premières auditions publiques dans le cadre de l’enquête sur la gestion par le gouvernement britannique de la pandémie de Covid-19, qui a fait au moins 220 000 victimes depuis mars 2020, devaient débuter mardi 13 juin, à Londres

Royaume-Uni: ouverture de la Commission d’enquête sur la gestion de la pandémie de Covid-19

Au Royaume-Uni s’ouvre aujourd’hui une enquête parlementaire sur la façon dont le gouvernement de Boris Johnson a géré la pandémie de Covid-19, il y a maintenant trois ans. Des dizaines de personnalités politiques et experts doivent être entendus pendant six semaines.

RFI

Publié le : 13/06/2023 – 14:57 https://www.rfi.fr/fr/europe/20230613-royaume-uni-ouverture-de-la-commission-d-enquête-sur-la-gestion-de-la-pandémie-de-covid-19

Des familles de victimes du Covid-19 se sont rassemblées devant Dorland House où se tient la commission d’enquête sur la gestion de la pandémie à Londres le 1RFI 3 juin 2023. AP – Belinda Jiao

En arrivant à la commission d’enquête sur la gestion de la pandémie, ce mardi 13 juin au matin à Londres, l’ancienne magistrate Heather Hallett a salué les familles des victimes, rassemblées sur le parvis, rapporte notre correspondante à Londres, Sidonie Gaucher. « Leur douleur était évidente pour tous », a-t-elle déclaré. Les familles ont regretté de ne pas faire partie des témoins auditionnés dans cette première partie de l’enquête, mais sur Sky News, on peut écouter en direct des témoignages des victimes.

« Je suis une ancienne infirmière, je sais ce que c’est de mourir dans la dignité, et je n’ai pas pu offrir ça à mon père. C’était tellement difficile pour tellement de gens. Je pense que tout le monde a souffert », raconte une femme. « On a attendu, attendu et attendu. Je m’attendais à voir arriver la médecin pour discuter du traitement. Mais elle est arrivée et a simplement dit : votre mère est décédée », témoigne une autre. 

Une procédure partie pour durer deux ans

Des dizaines de témoins doivent être entendus pendant les six semaines du premier volet de la procédure, qui devrait s’étaler au total sur plus de deux ans. Ouvertes au public, les auditions sont diffusées en ligne. « Fondamentalement, sur des aspects significatifs de la pandémie de Covid-19, nous avons été pris par surprise », a lâché Hugo Keith, le principal avocat de la commission d’enquête, dans sa déclaration liminaire.

« Aucun pays ne peut être parfaitement préparé, mais on peut sans aucun doute être insuffisamment préparé », a-t-il insisté, évoquant le financement des structures de santé, l’anticipation de l’impact d’une pandémie sur l’éducation, les frontières, l’emploi, etc. Près d’un quart de millions de personnes sont décédées des suites du Covid, dans ce qui est apparu comme un chaos social, sanitaire et politique. 

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L’heure est donc venue de demander des comptes. En ligne de mire, Boris Johnson, accusé entre autres d’avoir agi trop tardivement et laissé le virus se propager pour atteindre l’immunité collective. Et les gouvernements conservateurs l’ayant précédé se voient reprocher d’avoir affaibli le système de santé avec leurs politiques d’austérité. L’ambiance s’annonce tendue autour de cette enquête puisqu’en parallèle, une commission parlementaire enquête sur les fêtes à Downing Street pendant le confinement.  


Au Royaume-Uni, une enquête démarre sur la gestion de l’épidémie de Covid-19 par le gouvernement

Dotée de vastes pouvoirs, une commission ad hoc commence ses auditions mardi. Elle pourrait gêner le premier ministre, Rishi Sunak, qui fut chancelier de l’Echiquier durant la pandémie, ainsi que le Parti conservateur, au pouvoir depuis 2010. 

Par Cécile Ducourtieux(Londres, correspondante)Publié hier à 04h34, modifié hier à 09h13

https://www.lemonde.fr/international/article/2023/06/13/au-royaume-uni-une-enquete-demarre-sur-la-gestion-de-l-epidemie-de-covid-19-par-le-gouvernement_6177347_3210.html

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L’ancien premier ministre britannique Boris Johnson (au centre), l’ex-secrétaire britannique à la santé Sajid Javid (à gauche) et l’ex-chancelier de l’Echiquier Rishi Sunak (à droite), lors d’une visite au New Queen Elizabeth II Hospital, à Welwyn Garden City, au 
 nord de Londres, le 6 avril 2022.
L’ancien premier ministre britannique Boris Johnson (au centre), l’ex-secrétaire britannique à la santé Sajid Javid (à gauche) et l’ex-chancelier de l’Echiquier Rishi Sunak (à droite), lors d’une visite au New Queen Elizabeth II Hospital, à Welwyn Garden City, au nord de Londres, le 6 avril 2022.  FRANK AUGSTEIN / AFP

Les premières auditions publiques dans le cadre de l’enquête sur la gestion par le gouvernement britannique de la pandémie de Covid-19, qui a fait au moins 220 000 victimes depuis mars 2020, devaient débuter mardi 13 juin, à Londres. Mise sur les rails tardivement, en juillet 2022, par Boris Johnson, après des mois de lobbying de la part des associations de familles de victimes, cette enquête est la plus ambitieuse du genre jamais lancée au Royaume-Uni. On la compare déjà à celle sur le Bloody Sunday, le massacre par l’armée britannique de civils irlandais, à Derry-LondonDerry en 1972. Décidée en 1998 par Tony Blair, elle dura dix ans, coûta plus de 200 millions de livres sterling aux contribuables britanniques, mais constitua une étape importante dans le processus de réconciliation nord-irlandais.

Présidée par une magistrate respectée – la baronne Heather Hallett, ancienne juge de cour d’appel, qui avait dirigé l’enquête sur les attentats de Londres du 7 juillet 2005 –, cette commission d’enquête sur la gestion de l’épidémie de Covid-19 n’a pas le pouvoir de porter des accusations criminelles ou civiles contre des individus, et ses recommandations ne sont qu’indicatives.

Mais elle est dotée de pouvoirs considérables : elle peut convoquer des personnes pour témoigner sous serment, exiger tous documents « pertinents » dans le cadre de son travail, y compris les correspondances privées. Seront d’abord entendus cette semaine des experts, des juristes et des spécialistes du management des situations de crise, ou encore Sir Michael Marmot, grand spécialiste des inégalités face à la santé, le 16 juin.

Des investigations jusqu’en 2026

Mais dans le cadre des travaux de la commission sur l’état de préparation du pays quand la pandémie l’a frappé, en mars 2020, seront aussi probablement interrogés d’ici à la mi-juillet des décideurs politiques de premier plan : ceux qui présidaient au destin du Royaume-Uni dans les années 2010, quand le pays aurait dû se tenir en alerte. La commission ne publie son programme d’auditions que d’une semaine sur l’autre, mais tous les médias nationaux s’attendent aux convocations de l’ancien premier ministre (entre 2010 et 2016) David Cameron, de son chancelier de l’Echiquier, George Osborne, ou du ministre de la santé entre 2012 et 2018, Jeremy Hunt, l’actuel chancelier de l’Echiquier du premier ministre, Rishi Sunak.

Lors des trois modules suivants – processus de décision et gouvernance politique, impact de la pandémie sur les systèmes de santé et enfin campagnes vaccinales et traitements – défileront aussi probablement l’ex-premier ministre Boris Johnson, son ministre de la santé Matt Hancock, ou encore Rishi Sunak, son chancelier de l’Echiquier jusqu’à mi-2022. A l’été 2020, pour aider à la relance du secteur hôtellerie-restauration, complètement sinistré, M. Sunak avait promu le « Eat Out to Help Out », un système de réductions pour inciter les Britanniques à consommer qui avait été critiqué pour avoir contribué à une deuxième vague d’infections…

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L’enquête, qui durera au moins jusqu’en 2026, devrait donc animer le débat public pendant longtemps. « Elle va probablement interférer avec les élections générales de l’an prochain, les partis politiques piocheront peut-être dans ses recommandations intérimaires pour bâtir leurs programmes électoraux », suggère Emma Norris, directrice adjointe du cabinet d’études indépendant Institute for Government. Elle ne va en tout cas pas arranger les affaires du gouvernement Sunak ni celles du Parti conservateur, au pouvoir sans discontinuer depuis 2010, et à la traîne dans les sondages derrière les travaillistes. Boris Johnson a peut-être moins à perdre : une enquête parlementaire devrait conclure dans les jours qui viennent qu’il a menti au Parlement dans le cadre du « Partygate » (les fêtes organisées à Downing Street durant les confinements) ; il a bruyamment démissionné de la Chambre des communes le 9 juin.

La commission assignée en justice

Les controverses ont déjà commencé : la baronne Hallett exige du cabinet de Rishi Sunak qu’il lui communique les milliers de messages WhatsApp que son ex-collègue Boris Johnson a échangés avec ses ministres durant la pandémie. L’actuel premier ministre a refusé, assurant qu’une grande partie des messages « ne sont pas pertinents pour l’enquête »et invoquant des questions de principe : un gouvernement ne peut pas fonctionner de manière optimale si ses communications internes sont destinées à devenir publiques. Downing Street a même assigné la commission d’enquête Covid-19 en justice. Pour Sir Jonathan Jones, ex-chef du service juridique du gouvernement dans les années 2010, les juges devraient probablement trancher en faveur de la commission d’enquête.

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Les syndicats et les familles des victimes espèrent beaucoup de l’enquête : « Elle représente une occasion unique de demander des comptes à des gouvernements conservateurs dont les politiques d’austérité ont abouti à un pays absolument pas prêt pour la pandémie », assurait Paul Nowak, le secrétaire général du Trade Union Congress (la fédération britannique des syndicats), lors d’une conférence de presse, à Londres, le 5 juin.

« Comme beaucoup d’autres, je n’étais pas spécialisé en réanimation, mais j’ai dû aller y travailler pendant la première et la deuxième vague de coronavirus, car les personnels étaient largement insuffisants, ce qui disait déjà tout de notre niveau de préparation », raconte Stuart Tuckwood, un infirmier du NHS (l’hôpital public britannique) devenu responsable au sein du syndicat Unison, lors de cette conférence de presse.

« Le gouvernement refait déjà les mêmes erreurs »

« Nous avions très peur d’attraper le virus car nous n’avions pas assez de protections au début de la pandémie. Nous prenions très peu de pauses pour éviter d’avoir à changer d’équipements et les économiser. On était épuisés, ça a été une expérience traumatisante, ajoute le syndicaliste. Mais cette situation ne m’étonnait pas tant que ça : nous alertions depuis des années les autorités sur le manque de personnel au NHS, les personnels épuisés, les talents qui s’en vont. Il faudrait tirer le plus vite possible les leçons de ce dramatique épisode. Mais je suis inquiet : le gouvernement reproduit déjà les mêmes erreurs qu’avant. »

L’enquête sur l’épidémie de Covid-19 commence en effet alors qu’une partie des personnels de santé sont toujours en grève en Angleterre. Les infirmières ont obtenu une revalorisation d’un peu plus de 5 % au printemps 2023, mais toutes n’ont pas approuvé cet accord. Des milliers d’internes en médecine devraient cesser le travail entre le 14 et le 17 juin, réclamant jusqu’à 35 % d’augmentation de salaire pour rattraper des années de stagnation et faire face à une inflation restant élevée (8,7 % en avril sur un an).

Lire aussi :   Au Royaume-Uni, au-delà des grèves du NHS, le modèle de santé en questionCécile Ducourtieux(Londres, correspondante)

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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