« Pénuries de médicaments : le plan a minima de Bruxelles »
Date de publication : 27 avril 2023 Le Figaro – Libération
C’est ce que titre Le Figaro, qui observe : « Mieux vaut tard que jamais. Attendue de pied ferme par les industriels et par les patients, guettée par les États membres et par les eurodéputés, mais repoussée à plusieurs reprises, la réforme de la législation pharmaceutique européenne a été présentée mercredi par la Commission ».
Le journal note que « le projet ne manque pas d’ambition. Il s’agit de «créer un marché unique des médicaments», c’est-à-dire un «environnement pharmaceutique pérenne et centré sur le patient dans lequel l’industrie de l’UE peut innover, prospérer et continuer à être un leader mondial» ».
Le Figaro indique que « la Commission met l’accent sur l’anticipation et le partage d’informations sur (les) ruptures de stock au niveau européen, entre les laboratoires, les autorités nationales et les agences européennes. À la clé, «des exigences de surveillance continue des pénuries». Les industriels seront ainsi tenus de signaler les éventuelles pénuries qu’ils anticipent 6 mois à l’avance, contre 2 mois actuellement ».
« Cela permettrait à Bruxelles d’identifier en amont les difficultés et de partager l’information disponible avec tous les pays de l’UE. Autre obligation pour le secteur pharmaceutique : l’élaboration de plans de prévention des pénuries pour tous les médicaments de leur portefeuille », continue le journal.
Il ajoute que « l’Agence européenne des médicaments va établir une liste de médicaments critiques dont l’approvisionnement est le plus difficile. Cette liste (…) devrait être prête en fin d’année. La constitution de stocks préventifs, au niveau de l’UE, est également envisagée via des marchés publics ».
Le Figaro constate cependant que « le secteur pharmaceutique se montre très critique. Il redoute de se retrouver inutilement noyé sous la paperasse tandis que les alertes inutiles sur des ruptures de stock de médicaments pourraient se multiplier en Europe ».
Nathalie Moll, directrice générale de l’EFPIA (Fédération européenne des associations et industries pharmaceutiques), déclare que « la situation est très différente entre les génériques et les médicaments innovants. Pour les produits innovants, 77% des ingrédients sont produits en Europe. Il est donc possible de trouver une solution en 6 mois, qui est un délai assez long. Ces alertes ne devraient porter que sur les médicaments critiques, anciens pour la plupart ».
Le Figaro continue : « En réalité, Bruxelles s’attaque moins aux pénuries qu’à un accès équitable aux médicaments des 27 États membres ». Stella Kyriakides, commissaire européenne à la Santé, a indiqué : « Nous ne pouvons pas avoir des citoyens de première et deuxième classes ».
Le quotidien observe que « le texte élaboré par la Commission réduit la période pendant laquelle une entreprise jouit de l’exclusivité sur un médicament, afin de rendre plus rapidement accessibles sur le marché les génériques et les biosimilaires ».
Le journal note que « si la période de protection d’un traitement dure 20 ans, il se passe en pratique 10 ans entre sa mise sur le marché et l’arrivée des génériques, les brevets étant déposés très en amont. Bruxelles souhaite réduire cette période de 10 à 8 ans. Tout en prévoyant un système de bonus de 2 ans si les labos lancent leurs médicaments dans l’ensemble des 27 États membres dans les 2 ans qui suivent son autorisation (ce qui est rarement le cas aujourd’hui) ».
Le Figaro relève que « pour les fabricants, cet aspect de la réforme est inacceptable au regard des investissements de R&D consentis. Il s’agit d’un «sabotage de la recherche en Europe» qui «pénalise l’innovation», déplore l’EFPIA ».
Le journal ajoute qu’« en toile de fond de cette réforme, c’est la nécessité pour l’Europe (17% du marché mondial) de retrouver son rang. L’industrie pharmaceutique y emploie 840.000 personnes. En 20 ans, le paysage a radicalement changé. L’Europe a été recalée à la deuxième place, derrière les États-Unis, et elle est désormais talonnée par l’Asie, Chine en tête, qui ne se cantonne plus de copier les médicaments ou de faire des génériques ».
Libération titre pour sa part : « Pénuries de médicaments : l’Europe lance sa grande réforme pour tenter de résorber les ruptures de stocks ». Le journal souligne que « les facteurs de ces tensions sont nombreux, et la réforme ne résoudra pas l’ensemble du problème ».
Le quotidien relève que « la résistance aux antibiotiques est l’autre défi avancé par la Commission. L’enjeu est de taille : cette «pandémie silencieuse» cause chaque année 35.000 morts sur le sol européen. Et pour y faire face, Bruxelles entend stimuler la fabrication de nouveaux antibiotiques ».
« Mais ces molécules sont peu lucratives et donc moins intéressantes pour les laboratoires pharmaceutiques. La Commission compte donc sur des «bons d’exclusivité transférables» pour les inciter à innover. En clair, cette mesure permettra à une entreprise qui développe un nouvel antibiotique d’allonger d’un an son exclusivité sur la vente d’un autre médicament plus rémunérateur, ou de le revendre à une autre compagnie », poursuit Libération.