MG France dit « NON » à la convention
Par Aveline Marques le 26-02-

Après avoir réuni son comité directeur, et consulté ses adhérents tout au long de la journée de dimanche, le syndicat a annoncé le verdict lors d’une conférence de presse ce soir. Première organisation représentative des médecins généralistes, l’organisation a décidé de rejeter » à l’unanimité » la proposition de la Cnam, qui conditionne la revalorisation du C à 30 euros au dispositif d’engagement territorial. Le SML annonce qu’il ne signera pas non plus.
C’est un vote qui pourrait bien être décisif. Comptabilisant plus de 36% des voix dans le collège des généralistes aux dernières élections URPS, le syndicat MG France pouvait à lui seul engager la profession en signant l’accord conventionnel. Mais ce sera finalement un grand « NON ». Ainsi en ont décidé le comité directeur et les adhérents, ce week-end, qui ont rejeté la signature « à l’unanimité »rapporte la Dre Agnès Giannotti, présidente du syndicat. Un vote « historique » pour MG France, soutient-elle.
Appelés à se prononcer jusqu’à 17 heures ce dimanche, les adhérents ont voté contre le texte dans tous les départements, « à 80-90% », précise-t-elle. Les 45 membres du comité directeur, répercutant ce rejet, ont voté non à « 100% ». « Un vote négatif à l’unanimité de MG France, un syndicat constructif, qui a porté toutes les évolutions professionnelles, je pense que vraiment, ça doit être de nature à faire réfléchir les politiques », a souligné Agnès Giannotti.
La proposition de la Cnam, transmise vendredi soir aux six syndicats au terme de 16 semaines de négociations, repose sur une revalorisation générale des consultations de base de l’ensemble des spécialités à hauteur de 1.5 euro à compter du 1er octobre 2023. Pour accéder à des niveaux de tarification supérieurs à compter du 1er octobre 2024 (niveau 1 à 30 euros pour les généralistes/35 euros pour les spécialistes, niveau 2 à 40 euros et niveau 3 à 60 euros), l’Assurance maladie demande aux libéraux d’adhérer au dispositif de l' »engagement territorial », qui leur impose de remplir des objectifs en faveur de l’accès aux soins (atteindre un certain niveau de patientèle ou de file active, participer à la PDSA ou au SAS, ouvrir son cabinet le samedi matin…).
« On nous dit ‘il faut travailler plus, vous bossez pas assez' »
Le syndicat MG France, qui réclamait quant à lui une revalorisation inconditionnelle à 30 euros pour rattraper l’inflation, déplore un « manque de reconnaissance de l’engagement de la profession, à qui l’on dit ‘il faut travailler plus, vous bossez pas assez' », développe sa présidente. « Dire qu’il faut qu’on s’engage, ça veut dire qu’on ne le fait pas, c’est absolument inaudible pour la profession. » « Pour nous, cette convention, c’est pas droits et devoirs, c’est devoirs et devoirs. Bosser 55 heures, ce n’est pas suffisant. Mais il en faut combien? C’est ce ressenti qu’exprime le vote à l’unanimité. »
Par ailleurs, le syndicat regrette la persistance des écarts de rémunération entre généralistes et spécialistes dans la proposition de la Cnam. « La ligne rouge est devenue écarlate », dénonce Agnès Giannotti. « A acte égal, tarif égal. Nous sommes tous des spécialistes », a-t-elle insisté.
Faute de l’accord de MG France, et alors que l’UFML a déjà annoncé qu’elle ne signerait pas le texte, la Cnam doit désormais obtenir l’adhésion de la CSMF et de la FMF, les deux autres syndicats représentatifs des généralistes, ainsi qu’un ou plusieurs syndicats réunissant au moins 30% des voix dans le collège des autres spécialistes pour espérer une issue favorable. Le SML, représentatif dans le collège des spés, vient d’annoncer qu’il ne signerait pas non plus, informe ce dimanche soir sa présidente, la Dre Sophie Bauer. Faute d’accord mardi 28 février au soir, l’arbitre Annick Morel entrera en fonction pour rédiger un règlement qui sera soumis au Gouvernement dans un délai de trois mois.
« Une fois le règlement arbitral passé, MG France répondra présent pour revenir autour de la table des négociations, mais ce sera pour négocier une convention qui donnera envie aux médecins de s’installer comme médecin traitant, et qui mettra comme priorité la prise en charge des patients âgés et des malades chroniques », a insisté Agnès Giannotti. « Pour aboutir, il faudra que les conditions d’un dialogue social soient réunies : pas d’irruption du législateur sur le contenu de la négociation, une lettre de cadrage ministérielle qui ne soit pas hors sol, et évidemment une enveloppe suffisante qui laisse entrevoir la possibilité de réparer l’absence d’investissement sur les soins primaires dans notre pays », a-t-elle poursuivi.
En attendant, le syndicat devrait appeler à poursuivre le mouvement « pas d’heures supplémentaires », qui incite les médecins à ne pas ouvrir leur cabinet le samedi matin et à ne pas participer au SAS. « C’est une bonne idée de continuer. Il va falloir protéger la profession, elle est en souffrance », a répondu la présidente de MG France. En revanche, le syndicat « ne peut adhérer au mot d’ordre du déconventionnement », ce qui « reviendrait soit à ne soigner que les plus riches, soit à se jeter dans les bras des assurances privées et autres fonds de pension ».
Pour les jeunes généralistes installés et remplaçants aussi, c’est « non »
Reagjir, syndicat de jeunes médecins observateur de ces négociations, a également consulté ses adhérents sur ce projet de convention. Sur les quelques 800 réponses reçues (44% de remplaçants, 56% de jeunes installés), 94% rejetteraient l’accord s’ils en avaient la possibilité. « On a soulevé les mêmes lignes rouges que MG France : inégalité des tarifs, incitation à toujours faire plus… », a expliqué la présidente du syndicat, la Dre Elise Fraih. « Il n’y a pas d’attractivité dans cette convention pour les jeunes. »
« Les médecins au bord de la rupture avec l’Assurance-maladie »
Date de publication : 27 février 2023



Marie-Cécile Renault remarque dans Le Figaro que« l’incompréhension entre l’Assurance-maladie et les médecins n’a jamais été aussi profonde. Après 4 mois de négociations tendues, ponctuées de grève et de manifestations, le fossé s’est encore creusé jeudi soir lors d’une ultime séance en vue d’établir la nouvelle convention médicale, qui fixe les tarifs de la profession pour les 5 prochaines années ».
La journaliste note ainsi que « les 6 syndicats représentatifs des médecins libéraux, qui ont profité du week-end pour consulter leur base, ont jusqu’à mardi pour se prononcer. MG France, premier syndicat de généralistes, a déjà indiqué dimanche soir qu’il ne signerait pas, de même que les spécialistes de l’union Avenir Spé-Le Bloc ».
« Il est plus que probable désormais que les 4 autres, moins importants, leur emboîtent le pas. La rédaction de la nouvelle convention serait dès lors confiée à un arbitre, l’ancienne inspectrice générale des affaires sociales Annick Morel. Avec possibilité pour les parties de relancer de nouvelles négociations dans les 2 ans », indique Marie-Cécile Renault.
Elle rappelle que la Cnam « propose aux médecins libéraux une augmentation générale de 1,50 euro, pour tenir compte de l’inflation. Cela porterait de 25 à 26,50 euros le tarif de la consultation chez le généraliste, et de 30 à 31,50 euros celle des spécialistes. La Sécu promet en outre des revalorisations ciblées aux médecins qui acceptent de prendre des engagements supplémentaires pour faire face à la désertification médicale ».
« La consultation passerait ainsi à 30 euros pour les généralistes signant le contrat d’engagement territorial (CET), qui oblige à augmenter le nombre de patients suivis, participer aux gardes, ouvrir leur cabinet 24 samedis matins par an minimum, etc. La consultation des médecins des autres spécialités qui signeraient le CET passerait, elle, à 35 euros », continue la journaliste.
Marie-Cécile Renault note que « pour l’Assurance-maladie, ces revalorisations représentent «un investissement massif» a affirmé vendredi [son directeur général], Thomas Fatôme, soit 1,5 milliard d’euros par an ».
La journaliste relève que « pour les médecins, ces propositions ont fait l’effet d’une douche froide. Leurs syndicats réclamaient un tarif de base de 30 euros minimum, sans contraintes supplémentaires ».
Le Dr Agnès Giannotti, généraliste à Paris, présidente de MG France, réagit : « On nous demande de travailler plus, alors qu’on fait 55 heures par semaine en moyenne et qu’on est déjà au bout du rouleau. Ils pensent qu’ils vont régler le problème de l’accès aux soins en nous forçant à travailler plus. Mais ils vont simplement dégoûter les jeunes de s’installer. On va vers la disparition du médecin traitant ».
Marie-Cécile Renault ajoute que « les spécialistes soulignent que les obligations inscrites dans le CET ne sont pas atteignables ».
Le Dr Bruno Perrouty (CSMF) remarque : « On nous demande d’aller dans des territoires peu peuplés en délaissant nos cabinets surchargés alors que nos villes moyennes se désertifient. (…) On nous demande de participer aux gardes, alors que beaucoup de lignes de garde ont été supprimées par les ARS ».
La journaliste évoque en outre le syndicat UFMLS, qui « suggère ni plus ni moins aux médecins de rompre le lien avec l’Assurance-maladie : ils pourraient dès lors pratiquer des honoraires libres, mais leurs patients ne seraient plus remboursés. Ce «secteur 3» reste très marginal mais pourrait attirer davantage, avec le risque de créer une médecine à deux vitesses ».
Le Monde indique également que « les deux principaux syndicats de médecins libéraux rejettent «à l’unanimité» un accord avec la « Sécu ». Les 6 syndicats de médecins représentatifs ont jusqu’à mardi soir pour dire s’ils acceptent ou non la nouvelle grille de tarifs des consultations et autres forfaits proposée par l’Assurance-maladie ».
Le journal souligne qu’« avec ce rejet des deux organisations qui pèsent plus de 30% chacune parmi les généralistes et les spécialistes, le projet d’accord soutenu par le gouvernement est en passe de tomber à l’eau. A défaut d’une improbable alliance entre au moins deux des quatre syndicats restants, les nouveaux tarifs seront fixés par un « arbitre » – en l’occurrence une haute fonctionnaire désignée par l’exécutif ».
Le Parisien titre pour sa part : « Prix de la consultation : le plus gros syndicat de médecins généralistes refuse l’accord ». Le journal indique aussi que « le comité directeur de MG France s’est prononcé […] à l’unanimité contre la proposition de nouvelle convention, qui a désormais très peu de chances d’entrer en vigueur ».
« L’espoir d’obtenir un accord semble désormais presque nul. Il faudrait qu’au moins deux autres syndicats de généralistes représentant ensemble plus de 30% des voix aux dernières élections professionnelles donnent leur feu vert d’ici mardi. Personne ne l’imagine vraiment, MG France étant jugé le moins «dur» », relève Le Parisien.