Vaccination contre le Covid-19 : l’Allemagne envisage un vaccin obligatoire
Le futur chancelier Olaf Scholz s’est prononcé en faveur d’une telle mesure, mardi 30 novembre. L’opinion publique allemande s’y montre aujourd’hui beaucoup plus favorable qu’au printemps.
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La vaccination contre le Covid-19 pourrait devenir obligatoire en Allemagne : tel est en tout cas le souhait exprimé par le futur chancelier Olaf Scholz, mardi 30 novembre, lors d’une visioconférence à laquelle participaient Angela Merkel et les chefs des seize Länder du pays.
Interrogé par Bild TV à l’issue de cette réunion, Olaf Scholz a déclaré qu’un texte proposant la vaccination obligatoire contre le Covid-19 serait examiné par le Bundestag avant la fin de l’année pour une entrée en vigueur « début février ou début mars ». Précision politiquement importante : il souhaite que ce texte émane du Parlement et non de l’exécutif, et que chaque député vote « selon sa conscience », autrement dit sans discipline de groupe. « Je propose que ce ne soit pas nous qui prenions l’initiative en tant que gouvernement car il s’agit d’une question de conscience, mais plutôt que ce soient les députés eux-mêmes qui présentent une ou plusieurs propositions pour fixer les nouvelles règles », a expliqué le futur chancelier social-démocrate (SPD).
Revirement
Comme Angela Merkel, auquel il succédera à la tête du gouvernement dans la semaine du 6 décembre, Olaf Scholz s’était jusqu’à présent opposé à ce que la vaccination contre le Covid-19 devienne obligatoire en Allemagne. Interrogé sur son revirement, il s’est justifié de la façon suivante : « Nous avons toujours misé sur le fait que le plus grand nombre se laisserait convaincre. Si nous avions 80 % de la population déjà vaccinée, ou même davantage comme c’est le cas dans d’autres pays, la situation serait différente et je n’aurais pas changé d’avis. »
Avec 68,5 % de sa population adulte totalement vaccinée, l’Allemagne se situe dans la moyenne de l’Union européenne, devant les pays situés à l’est du continent mais derrière le Portugal, l’Espagne, le Danemark, la Belgique, les Pays-Bas, l’Italie, la France ou la Suède. Alors que le taux d’incidence dépasse 450 cas pour 100 000 habitants, ses hôpitaux sont aujourd’hui au bord de la saturation : dans les unités de soins intensifs, à peine 10 % des lits sont encore disponibles, et depuis quelques jours, l’armée de l’air est mobilisée pour transférer des patients d’un Land à l’autre faute de place dans les établissements de leur région d’origine. Du jamais-vu depuis le début de la pandémie.
La part des Allemands se déclarant favorables à une telle mesure est ainsi passée de 33 % à 69 % entre la mi-juillet et la fin du mois de novembre
Face à l’aggravation de la situation sanitaire, les appels à rendre obligatoire la vaccination contre le Covid-19 se sont multipliés ces dernières semaines outre-Rhin. L’opinion publique, sur ce point, a d’ailleurs nettement évolué. Selon le baromètre politique de la ZDF, la part des Allemands se déclarant favorables à une telle mesure est ainsi passée de 33 % à 69 % entre la mi-juillet et la fin du mois de novembre. Un bond spectaculaire dans un pays traditionnellement attaché à la liberté de choix en matière de vaccination, comme l’ont rappelé les vifs débats suscités par la décision prise par le gouvernement, fin 2019, de rendre obligatoire le vaccin contre la rougeole.
Une semaine après s’être résolue à imposer la vaccination contre le Covid-19 aux personnels des hôpitaux et des maisons de retraite, ainsi que pour les soldats de la Bundeswehr, l’Allemagne semble donc prête à étendre une telle obligation à l’ensemble de sa population. Au sein de l’Union européenne, seule l’Autriche, le 19 novembre, a franchi un tel pas, avec une entrée en vigueur prévue en février 2022.
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Critiqué pour son attentisme sur le front de la lutte contre le Covid-19, Olaf Scholz semble désormais prêt à assumer des décisions difficiles. Mardi, le futur chancelier s’est ainsi prononcé également pour la généralisation de la règle dites des « 2G » dans les commerces, autrement dit pour que leur accès soit réservé aux personnes vaccinées (« geimpft ») ou guéries (« genesen »), ainsi que pour la réintroduction du masque obligatoire dans les écoles, la fermeture des clubs et des discothèques et l’interdiction des grands rassemblements.
Accueillies favorablement par les conservateurs (CDU-CSU), désormais dans l’opposition à la coalition « feu tricolore » du chancelier social-démocrate et de ses alliés écologistes et libéraux, ces mesures doivent être actées, jeudi, lors d’une nouvelle réunion entre le gouvernement fédéral et les chefs des Länder. La dernière, selon toute vraisemblance, à laquelle participera Angela Merkel.
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Thomas Wieder(Berlin, correspondant)Contribuer