Déserts médicaux, certains députés enfin agissent, mais les déserts sont partout, dans les hôpitaux, PMI, santé scolaire, CMP, médecine du travail…

Une patiente va chercher la clé USB contenant son dossier médical, à Billé. Comme 1500 autres personnes, elle doit changer de médecin traitant.
Une patiente va chercher la clé USB contenant son dossier médical, à Billé. Comme 1500 autres personnes, elle doit changer de médecin traitant. MATHIEU BLARD/PHOTOPQR/OUEST FRANCE/MAXPPP

En Ille-et-Vilaine, un village sans médecins

Billé, 1 047 habitants, a vu partir ses deux généralistes à un mois d’intervalle. Cette désertification médicale, que de nombreuses communes subissent, est au cœur de récentes propositions de lois à l’Assemblée. 

Par Claire Ané Publié aujourd’hui à 06h00  

Temps de Lecture 2 min. 

https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2021/12/02/en-ille-et-vilaine-un-village-sans-medecins_6104394_4500055.html

Une maison de santé désertée

Billé, 1 047 habitants, n’est pas le bout du monde : même aux heures de pointe, on rejoint Rennes en quarante minutes, Vitré en quinze, Fougères en moins de dix. Le village vient pourtant de devenir un désert médical : un des deux médecins généralistes de la commune, qui y exerçait comme remplaçant (par choix) depuis trois ans, a annoncé à la rentrée qu’il cesserait ses consultations fin septembre. Sa consœur a préféré partir elle aussi plutôt que de continuer seule, même si la vaste maison de santé du village, construite en 2015 par le syndicat intercommunal réunissant Billé et les villages de Parcé et Combourtillé, compte aussi sept infirmières et deux kinésithérapeutes. Leurs 1 500 patients se sont retrouvés sans médecin référent, et ont été invités à ­récupérer leur dossier médical sur une clé USB.

Des remplacements difficiles

Les patients les plus chanceux ont trouvé un autre généraliste acceptant de les suivre, « en moyenne à 20 kilomètres de Billé », explique le maire, Daniel Balluais. D’autres viennent le voir ou l’appellent, faute de solution. Remplacer deux praticiens s’annonce compliqué, malgré les conditions favorables, décrites dans un message sur le site SOS Villages : la commune « conviviale », la patientèle semi-rurale « très agréable et enrichissante », la maison de santé à l’équipe pluri­disciplinaire « dynamique », aux loyers « modérés » et aux charges partagées. Personne ne s’est manifesté. Avec les autres élus de l’intercommunalité, Daniel Balluais a réuni les acteurs locaux de la santé, posté une coûteuse annonce sur un site spécialisé : « On est prêts à étudier toutes les solutions, y compris des permanences ponctuelles de médecins, et à salarier un médecin qui s’installerait. » 

Une tendance générale

Si Daniel Balluais et ses administrés sont inquiets, c’est que leur village du centre de la Bretagne est loin d’être un cas isolé. « Une commune des environs cherche un médecin depuis cinq ans, pourtant elle aussi a investi dans une maison de santé. » A l’échelle nationale, 11 % de la population (7,4 millions de personnes) vit dans une commune sous-dotée en médecins généralistes, soit une hausse de 2,5 points en trois ans, selon une étude de la direction de la recherche, des études, de l’­évaluation et des statistiques (Dress) en février 2020. De nombreuses mesures tentent d’­inciter les médecins à s’installer dans ces territoires – primes, défiscalisation, facilitation du ­travail en réseau, création de ­maisons de santé… –, avec des résultats insuffisants. D’autant que la tendance générale se dégrade : plus de la moitié des médecins ­généralistes ont 55 ans ou plus et les installations ne suffisent pas à compenser les départs à la retraite.

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L’Assemblée s’en mêle

Pour le député Thierry Benoit (UDI), le départ des médecins de Billé, situé dans sa circonscription, a servi d’« élément déclencheur » : il a déposé le 30 novembre, avec 54 députés, une proposition de loi contre la désertification médicale.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4735_proposition-loi

A l’instar d’une proposition de loi du communiste Sébastien Jumel, qui devait être débattue le 2 décembre à l’Assemblée, elle vise à obliger les jeunes médecins à commencer leur carrière dans une zone sous-dotée. Jacques Battistoni, président du premier syndicat de médecins généralistes, MG France, prône pour sa part le développement du métier d’assistant médical, afin d’aider chaque praticien à suivre 1 500 à 2 000 patients, comme en Allemagne ou aux Pays-Bas. 
Il proposera aussi, lors du colloque de MG France ce week-end, de prolonger l’internat des futurs généralistes par une année dans des cabinets libéraux répartis sur tout le territoire. Pour susciter des vocations, mais sans contraindre.

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Claire Ané

Rencontre avec Jean-Pierre Descombes dans le Cher : la voix du « Juste prix » s’élève contre les déserts médicaux

CHRONIQUE

auteur

Frédéric Potet

« La France buissonnière ». Cette semaine, notre chroniqueur a retrouvé l’ex-présentateur des « Jeux de 20 heures » dans le nord du Cher, où il habite. Atteint de Parkinson, il a tourné dans un clip municipal visant à attirer un médecin généraliste.

Publié le 21 novembre 2021 à 07h00 – Mis à jour le 21 novembre 2021 à 16h59    Temps de Lecture 3 min. 

https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2021/11/21/la-france-buissonniere-la-voix-du-juste-prix-s-eleve-contre-les-deserts-medicaux_6103018_4500055.html

ALE GIORGINI

Petit instant de joie post-juvénile : on a retrouvé Jean-Pierre Descombes, l’inoubliable présentateur des « Jeux de 20 heures », l’ineffaçable voix off du « Juste prix » et d’« Une famille en or ». En mai, l’idole de nos 12 ans (et au-delà) avait dévoilé, sur la chaîne Non Stop People, qu’il souffrait de la maladie de Parkinson depuis une dizaine d’années. L’aggravation de son état de santé l’avait alors contraint à mettre entre parenthèses son activité professionnelle, consistant en de ponctuelles interventions télévisuelles (comme dans « La Grosse Rigolade » de Cyril Hanouna) et à animer des salons et des grandes surfaces. Agé de 74 ans, Jean-Pierre Descombes n’a pas dit son dernier mot. Il y a quelques semaines, il a participé – bénévolement – au tournage d’un clip destiné à encourager l’installation d’un nouveau médecin à Vailly-sur-Sauldre (650 habitants), dans le nord du Cher.

L’ancien acolyte de Maître Capello habite désormais à l’année une commune proche, Argent-sur-Sauldre, où il a transformé sa maison de campagne en demeure principale. Quand les professionnels de santé du territoire (infirmières, kinés, pharmacienne…) l’ont sollicité pour lui demander de faire l’acteur, Jean-Pierre Descombes a bondi sur l’occasion. « La pénurie médicale, explique-t-il, est un sujet qui me touche pour les raisons que vous imaginez. » Devant la caméra d’une société de production amateure, l’animateur a déclamé un texte de sa plume vantant les atouts de Vailly-sur-Sauldre à la manière d’une « radiographie imaginaire ». Un seul but : convaincre un généraliste d’ouvrir un cabinet sur place.

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Le village n’en finit pas, en effet, de pleurer le décès de l’un de ses deux médecins, le docteur Thierry Danancher, emporté à l’âge de 58 ans par une embolie pulmonaire, début août. Brutalement confrontée au fléau de la désertification médicale, la communauté de communes (CDC) « Pays fort – Sancerrois – Val-de-Loire » a voté un budget de 150 000 euros destiné à attirer un remplaçant. Toutes les pistes sont à l’étude, en plus de la réalisation de trois clips promotionnels : appels d’offres auprès des facs de médecine, organisation de week-ends « découverte » pour internes, recours à une agence spécialisée dans le recrutement de praticiens étrangers…

Contribution gracieuse

Jean-Pierre Descombes, à Vailly-sur-Sauldre (Cher), le 15 octobre 2021. FP

« Nous ferons tout ce qui est en notre possible pour trouver quelqu’un », appuie Régine Audry, la vice-présidente de la CDC chargée de la santé, également maire de Subligny et, elle-même, ancienne championne de jeux télévisés dans les années 1990. Ses principaux gains ? Un safari-photo au Kenya, à « La Roue de la fortune », et une voiture, remportée au « Bigdil ». Régine Audry a aussi participé aux « Jeux de 20 heures » dans leur version restaurée, lors d’un enregistrement à Sancerre. Il va sans dire que la contribution gracieuse de Jean-Pierre Descombes à l’opération « recherche médecin désespérément » n’est pas pour lui déplaire.

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L’auteur de Comment ne pas réussir à la télé (Adcan Edition, 2004) attend, lui, des jours meilleurs. Le téléphone a quelque peu arrêté de sonner depuis son coming out médical. « Je me force à espérer mais je sais que personne ne viendra proposer un job d’animation à quelqu’un qui sucre les fraises. Tout est rose dans ce métier quand ça marche bien. Mais quand ça ne marche plus… », soupire-t-il.

« Père Parkinson », comme il appelle sa maladie, ne l’a pas empêché, malgré tout, de tenir le micro lors d’une fête de la chasse et de la pêche à Sully-sur-Loire (Loiret), mi-septembre. Celui qui fut aussi chauffeur de salle (« Attention à la marche », « Fa si la chanter »…) a écrit un one-man-show, il y a deux ans, consistant à rejouer en public les principaux jeux auxquels il collabora (notamment le mythique « Schmilblic »). Las, son projet de tournée est resté dans les cartons, par la faute du Covid : « C’est pas de pot », philosophe-t-il avant de nous piéger magistralement au « ni oui ni non », en quinze secondes chrono.

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Frédéric Potet

Voir aussi:

Pénurie de médecins : « des mesures concrètes pour faire face à l’urgence »https://environnementsantepolitique.fr/2021/11/23/25057

https://environnementsantepolitique.fr/2021/11/22/eternelle-question-des-deserts-medicaux-et-toujours-le-gouvernement-sourd-aux-besoins-de-sante-et-a-lecoute-des-lobbies/

https://environnementsantepolitique.fr/2021/11/18/les-propositions-pour-regler-les-deserts-medicaux-rencontrent-une-forte-opposition/

https://environnementsantepolitique.fr/2021/11/12/apres-notre-depute-mme-muriel-roques-etienne-cest-notre-senateur-philippe-folliot-qui-monte-au-creneau-pour-lutter-contre-les-deserts-medicaux/

https://jeansantepolitiqueenvironnement.wordpress.com/2021/10/28/encore-une-proposition-pour-les-deserts-medicaux-mais-insuffisante-a-nos-yeux/

https://jeansantepolitiqueenvironnement.wordpress.com/2021/10/30/acces-aux-soins-associer-elus-locaux-et-collectivites-aux-decisions-nationales-et-des-ars-rapport-du-senat/

https://jeansantepolitiqueenvironnement.wordpress.com/2021/10/23/les-deserts-medicaux-a-la-une-de-la-depeche/

Déserts médicaux : le député de Dordogne Jean-Pierre Cubertafon veut mieux payer les médecins en zone rurale. tps://jeansantepolitiqueenvironnement.wordpress.com/2021/10/13/21767/

https://jeansantepolitiqueenvironnement.wordpress.com/2021/10/02/les-maires-ruraux-presentent-4-etudes-avec-le-pr-vigneron-esperance-de-vie-demographie-acces-aux-urgences-et-structures-de-soins-et-lancent-un-appel-avec-8-organisations-face-a-la-gravite-de-la/

https://jeansantepolitiqueenvironnement.wordpress.com/2021/10/07/nouvelle-tentative-de-deputes-lrem-pour-reguler-linstallation-des-medecins/

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

Un avis sur « Déserts médicaux, certains députés enfin agissent, mais les déserts sont partout, dans les hôpitaux, PMI, santé scolaire, CMP, médecine du travail… »

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