Covid-19 : comment contrer la cinquième vague ?
Par Marilyn Perioli – 23 novembre 2021156
https://www.vivamagazine.fr/covid-19-contrer-la-5eme-vague/
Le taux d’incidence du Covid-19 dépasse le seuil d’alerte dans de nombreux départements français (Ardèche, Haute-Corse…), où il franchit les 250 cas pour 100 000 habitants. Alors que nos voisins européens, comme l’Autriche et la Belgique, ont pris des mesures drastiques pour enrayer cette cinquième vague, qu’en est-il en France ?
Selon Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique, qui s’exprimait sur France-Inter, « la baisse des températures, le relâchement des gestes barrières, l’atténuation des effets du vaccin au fil des mois, expliquent l’arrivée en France de cette cinquième vague ». Résultat : on compte 8 338 personnes hospitalisées et 1 353 patients en réanimation à ce jour. C’est 14 % de plus que la semaine dernière pour la réanimation, mais beaucoup moins que lors des pics précédents.

Mais la bonne nouvelle est que nous serions mieux préparés à cette cinquième vague grâce à la vaccination qui continue de progresser (nous avons un des meilleurs taux en Europe). 126 000 doses de rappel de vaccin sont réalisées chaque jour.
La pandémie a fait plus de 5,4 millions de morts dans le monde.
OMS
La troisième dose
Outre les gestes barrières qu’il faut continuer à respecter, il s’agit pour les autorités sanitaires de généraliser la troisième dose. Les plus de 65 ans et les malades chroniques sont invités à effectuer leur rappel.
A partir du 15 décembre prochain, cette tranche d’âge devra, en effet, justifier d’une troisième dose pour prolonger la validité de son pass sanitaire.
Actuellement, 5,2 millions de personnes ont déjà reçu une dose de rappel.
Haute autorité de santé (HAS)
Dès le 1er décembre, les personnes de 50 à 64 ans seront éligibles. De son côté, la Haute Autorité de santé (HAS) demande d’abaisser le seuil à 40 ans et le scénario d’une généralisation à tous les majeurs est sur la table.
L’ensemble des mesures sera examiné lors d’un conseil de défense sanitaire qui se tiendra ce mercredi 24 novembre.
« Covid-19 : pourquoi la cinquième vague est aussi « fulgurante » »
Le Parisien
Le Parisien revient sur les propos du porte-parole du gouvernement, selon qui « les signaux épidémiques sont au rouge, et la cinquième vague du Covid-19, qui frappe actuellement l’Europe et qui n’épargne plus la France, «démarre de façon fulgurante» ».
Le journal remarque ainsi que les chiffres «attestent d’une très forte hausse des indicateurs épidémiques. Selon les autorités sanitaires, au dimanche 21 octobre, les cas positifs ont augmenté de 82% sur une semaine. 19.749 cas ont été recensés en 24 heures, contre 12.496 le dimanche précédent : depuis 2 ans, une telle hausse n’avait été observée qu’une seule fois, en juillet dernier ».
Le quotidien relève que « les hospitalisations ont quant à elles augmenté de près de 50% sur une semaine, et de près de 30% dans les services de soins critiques. Le taux d’incidence (nombre de nouveaux cas sur 7 jours), lui, est désormais de 180 pour 100.000 habitants en moyenne sur l’ensemble du territoire et atteint des niveaux particulièrement hauts dans certains départements. En Ardèche, il dépasse par exemple les 300 ».
Le Parisien souligne toutefois que « la situation épidémique est différente de celle observée lors des vagues précédentes, avance Jean-Stéphane Dhersin, directeur adjoint scientifique au CNRS et spécialiste en modélisation des épidémies. Lors des deux dernières vagues, la France s’était retrouvée face au variant Alpha à l’hiver 2020 et au variant Delta à partir de l’été 2021. Cette fois, la raison de la reprise épidémique est «multifactorielle» ».
Le chercheur évoque un « possible relâchement des gestes barrière, arrivée de l’hiver qui pousse les gens à se regrouper à l’intérieur et à moins aérer et érosion de l’efficacité vaccinale ».
« Les deux premiers facteurs sont par nature impossible à quantifier, et ce n’est pas beaucoup plus simple avec la baisse de l’efficacité vaccinale, puisque tout le monde n’a pas été vacciné au même moment et que le vaccin perd principalement en efficacité contre les formes bénignes du virus. Ce qui est inquiétant actuellement, c’est que l’épidémie s’accélère, avec une croissance exponentielle et un taux de reproduction au-dessus de 1,3 », continue Jean-Stéphane Dhersin.
Antoine Flahaut, épidémiologiste et professeur de médecine à l’université de Genève, indique ainsi que « selon nos modélisations à très court terme, dans 7 jours, nous aurons dépassé le pic de contamination du 10 août dernier ».
Jean-Stéphane Dhersin ajoute : « Il y a dix jours, nous tablions sur 30.000 à 50.000 cas à la période de Noël mais, au regard de la croissance de l’épidémie, ce sera sans doute plus que ça si rien n’est fait ».
Le Parisien observe que « grâce au taux élevé de vaccination en France, cette hausse significative des contaminations ne se répercute pas dans la même mesure sur les hospitalisations et les décès par rapport aux vagues précédentes ».
Antoine Flahaut remarque que « désormais, le critère qui va nous guider et éventuellement déclencher des mesures sanitaires fortes, ce sera la saturation des hôpitaux sur le territoire ».
Rester mobilisés contre la pandémie
ÉDITORIAL
Le Monde
Editorial du « Monde ». Le retour de la pandémie dissipe douloureusement l’optimisme alimenté par les campagnes de vaccination. La prise de conscience des limites inhérentes à cette parade indispensable est brutale.
Publié aujourd’hui à 10h48, mis à jour à 12h08 Temps de Lecture 2 min. https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/11/23/rester-mobilises-contre-la-pandemie_6103263_3232.html

La nouvelle vague de Covid-19 qui s’abat sur l’Europe dissipe douloureusement l’optimisme alimenté par les campagnes de vaccination du printemps et de l’été. Elles semblaient condamner la pandémie au reflux, ou du moins la placer sous contrôle, il n’en est plus question. Tourner au plus vite la page de confinements à répétition et de carcans réglementaires attentatoires aux libertés supposerait en effet que chacun prenne ses responsabilités en se vaccinant. On en est encore loin, malgré les avancées enregistrées en un temps record.Lire aussi Article réservé à nos abonnésCovid-19 : « Toute la campagne présidentielle risque être affectée par l’épidémie »
La prise de conscience des limites inhérentes à cette parade indispensable pour lutter contre le Covid-19, sans être une arme absolue, est brutale. Ce choc explique sans doute les protestations enregistrées ces derniers jours dans certains pays après le retour de contraintes. C’est le cas de l’Autriche, repassée sous le régime du confinement et qui se divise face à la perspective d’une obligation vaccinale, alors que 65 % de la population dispose d’un schéma de vaccination complet. Aux Pays-Bas (plus de 70 % de personnes totalement vaccinées) ou encore en Belgique (plus de 75 %), la contestation a même été accompagnée de violences.
A l’exception de ce dernier pays, déjà dramatiquement touché au début de la pandémie, la vague en cours met en évidence le contraste entre deux Europe. Entre un Sud débordé en 2020 mais qui parvient, plus d’un an plus tard, à maintenir le Covid-19 à une distance relative, et une Europe du Nord et de l’Est désormais à la peine, alors qu’elle était parvenue à mieux juguler la pandémie lorsqu’elle n’en était qu’à ses débuts. La situation qui prévaut en Allemagne (68 % de la population vaccinée) en témoigne, accentuée par la transition à la tête de l’Etat fédéral, qui rappelle le poids de la décision politique face au virus.
Respect des gestes barrières
Cette colère qui s’exprime en Europe, mais également à la Guadeloupe s’agissant de la France, peut s’expliquer. Elle ne doit pourtant pas aveugler. Deux ans ou presque après l’apparition du Covid-19, les Etats disposent désormais d’une boîte à outils face à la pandémie. La place de la vaccination et son extension au plus grand nombre possible de classes d’âge y sont centrales, mais ces dernières ne sauraient remplacer à elles seules toutes les autres formes de protection qui décuplent leurs effets. Les pays européens qui ont payé en 2020 les plus lourds tributs à la pandémie sont aussi ceux où les gestes barrières, dont le port du masque, restent aujourd’hui les mieux respectés. Il s’agit de l’Italie (où 73 % de la population dispose d’une vaccination complète) et de l’Espagne (80 %).Lire aussi Article réservé à nos abonnésGuadeloupe : le conflit social dans l’impasse après le maintien de l’obligation vaccinale des soignants
Même si un relâchement de la vigilance y a été constaté au cours des dernières semaines, la France se range encore pour l’instant dans le groupe des pays les plus résistants, assurément du fait de l’efficacité du passe sanitaire. Désormais banalisé, ce dispositif ne mobilise plus contre lui qu’une protestation sporadique et souvent prétexte à d’autres contestations plus idéologiques que sanitaires.
Le sentiment d’abattement doit d’autant moins l’emporter que la boîte à outils anti-Covid ne cesse de s’enrichir et de gagner en puissance grâce à la science. Le développement de traitements performants, en complément des vaccins et des mesures élémentaires de protection, est désormais à portée de main. Le mécontentement et la lassitude ne sauraient donc éclipser le renforcement continu de notre arsenal commun : la persistance de la pandémie n’est pas une fatalité.
Écouter aussi Covid-19 : la France peut-elle résister à la cinquième vague ?
Le Monde
Covid-19 : la France peut-elle résister à la cinquième vague ?
PODCAST
Si l’Europe est à nouveau l’épicentre de la pandémie de Covid-19, la France est, pour l’instant, relativement épargnée par la reprise épidémique. Mais pour combien de temps ? Delphine Roucaute, journaliste spécialiste des questions de santé au « Monde », fait le point dans ce podcast.
ÉCOUTEZ L’ÉPISODE DU 23 NOVEMBRE 2021
https://open.spotify.com/embed-podcast/episode/1i6NhAssATMqejubXsfUHF?theme=0
Combien de temps la France va-t-elle encore échapper à la cinquième vague de l’épidémie ? En Europe, plusieurs gouvernements ont annoncé le retour des mesures de restriction sanitaire ; en Autriche, le confinement a été remis en place et l’obligation vaccinale entrera en vigueur en février prochain.
En France, si la dose de rappel pour les plus de 65 ans sera intégrée au passe sanitaire, aucune autre nouvelle mesure n’a été annoncée. Pourtant, « la cinquième vague démarre de façon fulgurante », a prévenu le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal.
Dans cet épisode du podcast « L’Heure du Monde », Delphine Roucaute, journaliste Santé au Monde, fait le point sur l’état de l’épidémie en Europe et en France.
Un épisode produit par Garance Muñoz, réalisé par Amandine Robillard et présenté par Morgane Tual.
En savoir plus sur la cinquième vague de Covid-19 :
- Décryptage. Covid-19 : en rendant le vaccin obligatoire pour toute la population, l’Autriche brise un tabou
- Reportage. Aux Pays-Bas, des manifestations violentes depuis trois jours contre les restrictions sanitaires
- Infographie. Covid-19 : Autriche, Allemagne, Belgique, Pays-Bas… visualisez l’ampleur de la vague dans certains pays d’Europe

Écouter aussi Pilules anti-Covid-19 : que sait-on de ces nouveaux traitements ?
Garance Munoz
« Covid-19 : 3e dose, jauges, télétravail… quelles sont les mesures envisageables pour endiguer la 5e vague ? »
Date de publication : 22 novembre 2021
Yves Leroy s’interroge dans Le Parisien : « Que reste-t-il dans la boîte à outils pour contrôler la cinquième vague de l’épidémie de Covid-19 ? C’est tout l’enjeu du Conseil de défense sanitaire programmé mercredi 24 novembre ».
Le journaliste relève que « l’exécutif a donné un sérieux tour de vis, en conditionnant le passe sanitaire des plus de 65 ans à la validation de leur dose de rappel, 6 mois et 5 semaines après la finalisation de leur schéma vaccinal initial. Suffisant pour passer l’hiver ? Pas sûr ».
Le ministère de la Santé remarque : « On est dans un vrai démarrage de vague, similaire à celui de la quatrième, pas plus haut, pas plus bas. Grâce à un niveau de vaccination très élevé, on a retardé l’échéance. On se trouve dans une nouvelle situation, car on n’a jamais abordé de vague avec un fort taux de vaccination en situation hivernale. Nous sommes dans une phase d’observation pour voir quelle corrélation il y a entre la situation épidémique et ses conséquences hospitalières ».
Yves Leroy observe qu’« à l’heure actuelle, la cinquième vague de Covid-19 «démarre de façon fulgurante», a souligné [hier] le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, […] évoquant une hausse des contaminations de «quasiment 80%» en une semaine ».
Le journaliste indique que « dans l’éventail des options de freinage, les plus sombres (couvre-feu, confinement, fermeture de certains établissements etc.), actuellement mises en œuvre en Autriche, sont fermement écartées par le gouvernement, même si personne ne s’aventure à dire «jamais». Pour le reste, tout est ouvert ».
Yves Leroy fait ainsi un « tour d’horizon des options médianes à disposition », en commençant par « généraliser la troisième dose » : « C’est jusqu’ici l’axe prioritaire retenu, tout en cherchant à convaincre les réticents. […] Quelque 5,2 millions de personnes ont déjà reçu une dose de rappel. […] Dès le premier décembre, les personnes de 50 à 64 ans seront, elles aussi, éligibles, alors que la Haute Autorité de santé demande d’abaisser le seuil à 40 ans et que le scénario d’une généralisation à tous les majeurs, à terme, est sur la table ».
Le Pr Didier Lepelletier, coprésident du groupe de travail permanent Covid-19 au Haut Conseil de la santé publique (HCSP), souligne que « plus un nombre important de Français sont correctement vaccinés, meilleure est la protection ».
Yves Leroy poursuit : « Réimposer le port du masque ». Le Pr Lepelletier indique : « Si vous êtes dans un environnement aéré, et pas dans une file d’attente ou dans la fosse d’un concert, le risque est faible. Mais sur le marché de Noël de Nantes, j’ai croisé une foule impressionnante dans les allées, avec la moitié des personnes à visage découvert. Le masque n’y est pas obligatoire aujourd’hui, alors qu’il serait souhaitable de le remettre dans tous les lieux de regroupement ».
Le journaliste évoque en outre les « jauges » : « La piste ne semble pas d’actualité, mais plutôt considérée comme un deuxième seuil d’urgence par les autorités sanitaires, si l’hôpital montrait des signes de faiblesses, dans un contexte de forte tension et de risque de cumul avec les épidémies de bronchiolites et, éventuellement, de grippe ».
Yves Leroy aborde enfin le télétravail : « Le sujet est sensible dans un contexte de reprise économique, mais aussi de décrochage de certains salariés. Les entreprises, le gouvernement et les syndicats s’accordent pour repousser fermement l’idée d’un télétravail à 100%, comme le résumait cette semaine un conseiller ministériel, estimant «que le jour où les salles de spectacle, les restaurants et les centres commerciaux seront fermés, avec alors du télétravail à 100%, n’est pas en vue» ».
« Sans aller jusque-là, l’incitation à passer quelques jours chez soi, quand le message récent dans les entreprises a plutôt été de revenir pour recréer du lien, pourrait revenir sur la table en cas d’aggravation de la situation », continue le journaliste.
La cinquième vague de l’épidémie de Covid-19 en France oblige le gouvernement à agir
Un conseil de défense sanitaire, mercredi, doit éclairer Emmanuel Macron dans ses choix. A ce stade, il n’est question ni de confinement, ni de fermeture des commerces, mais la question se pose d’élargir l’accès à la dose de rappel du vaccin.
Temps de Lecture 6 min.
« Le maître du temps, c’est le virus, malheureusement », avait reconnu Emmanuel Macron, en mars. Huit mois plus tard, le scénario se répète, comme une malédiction. Si le Covid-19 n’a jamais véritablement disparu du paysage, le président de la République pensait avoir tenu la question sanitaire à distance grâce à la progression spectaculaire de la vaccination au cours de l’été. Le sujet semblait suffisamment éloigné pour permettre au locataire de l’Elysée de se projeter vers l’élection présidentielle d’avril 2022 en vantant un message positif fait de relance économique, de réindustrialisation et, plus globalement, d’« espérance ».En direct : suivez les annonces du gouvernement après le conseil de défense sanitaire
Las, à cinq mois du scrutin, le coronavirus, qui a contaminé jusqu’au premier ministre, Jean Castex et à la ministre de l’insertion, Brigitte Klinkert, dicte de nouveau l’agenda sanitaire et politico-médiatique. Mardi 23 novembre, 30 000 nouveaux cas ont été enregistrés lors des dernières vingt-quatre heures – soit un niveau qui n’avait plus été observé depuis le printemps –, et 6 000 classes ont dû être fermées.Tous les chiffres dans notre tableau de bord Covid-19
La cinquième vague de l’épidémie qui déferle sur la France de manière« fulgurante », selon les mots du porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, oblige l’exécutif à agir pour contenir la flambée et, surtout, éviter la thrombose des services hospitaliers. Mercredi 24 novembre, un nouveau conseil de défense sanitaire doit éclairer le chef de l’Etat dans ses choix. « Comme à chaque fois, on avance à la lumière de la science, avec pragmatisme », a prévenu Emmanuel Macron, lundi, lors d’un déplacement à Amiens.
« Vouloir remettre les gens en confinement, c’est comme essayer de reboucher une bouteille de champagne, cela ne marcherait pas » Bruno Bonnell, député LRM
Dans le détail, aucune mesure privant les citoyens de leur liberté de déplacement ou restreignant l’activité commerciale n’est à l’ordre du jour. Il n’est, à ce stade, question que de renforcer des mesures barrières qui avaient, ces dernières semaines, été relâchées, comme le port du masque en intérieur ou le rétablissement de jauges lors de rassemblements et de renforcer les contrôles. Difficile, pour l’instant, d’aller plus loin. « La limite de la tolérabilité, ce serait les masques à remettre dans la rue. Mais vouloir remettre les gens en confinement, c’est comme essayer de reboucher une bouteille de champagne, cela ne marcherait pas », résume le député La République en marche (LRM) du Rhône, Bruno Bonnell. Mais se pose la question d’élargir l’accès à la dose de rappel.
Un virus qui semble avoir décuplé de force
A ce jour, seuls les plus de 65 ans ont la possibilité d’effectuer cette troisième dose, sous peine de perdre leur passe sanitaire à compter du 15 décembre. Et au 1er décembre, les plus de 50 ans auront, à leur tour, accès à ce rappel vaccinal. Mercredi, le gouvernement pourrait annoncer un « agenda global » pour l’étendre aux autres classes d’âge, en décidant, ou pas, de l’inclure dans le passe sanitaire. En dépit des appels d’une partie de l’opposition à rendre de nouveau gratuits les tests dits « de confort », cette option reste écartée par l’exécutif.
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Voilà pour l’urgence. Mais ce léger coup de fouet sera-t-il suffisant pour affronter un virus qui semble avoir décuplé de force ? « La vague est venue d’Europe centrale. Puis elle a atteint l’Allemagne. On a dit au début : ça frappe ces pays car ils sont moins vaccinés que nous. Mais voilà que cela touche les Pays-Bas et le Danemark, qui ont aussi de forts taux de vaccination. La France a peut-être deux semaines de répit. Pas beaucoup plus », alerte Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale et professeur à la faculté de médecine à Genève. A ses yeux, le pays n’est donc pas à l’abri d’une saturation des services de santé, d’ici à la fin de l’année.
« Dans toutes les épidémies, on voit, à un moment ou un autre, surgir cette lassitude, qui peut se muer en violence »Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale
Que faire face à ce scénario tant redouté ? Si M. Macron peut se féliciter d’avoir stimulé la vaccination lors de son allocution du 12 juillet, aidé par la contrainte du passe sanitaire, l’exécutif doit composer avec l’extrême lassitude des Français. Après plus d’un an et demi de cohabitation avec le virus, la capacité de la population à respecter de nouvelles restrictions s’estompe. Le peu d’allant à effectuer la dose de rappel est un signal manifeste de cette fatigue. « Dans toutes les épidémies, on voit, à un moment ou un autre, surgir cette lassitude, qui peut se muer en violence », observe M. Flahault.
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Déjà, la Guadeloupe s’embrase dans la foulée d’une crise née de la contestation de l’obligation vaccinale imposée aux soignants et aux pompiers. Le gouvernement, qui se veut ferme face aux violences, en faisant du rétablissement de l’ordre public « le préalable à toute discussion », prend soin de préciser que le contexte de l’île est singulier. Cette situation explosive a beau avoir pour racine un sujet sanitaire, elle se greffe à des tensions sociales plus anciennes, souligne-t-on. Il n’empêche, alors que la crise s’étend au reste des Antilles, le ministre des outre-mer, Sébastien Lecornu, est accusé par la droite d’être invisible – celui-ci a jusqu’ici exclu de se rendre dans l’île – et par la gauche de n’apporter qu’une réponse sécuritaire à la crise.
Et si le président de la République refuse de « céder au mensonge, au détournement d’informations et à la manipulation par certaines et certains de la situation », il l’admet aussi : dans les territoires d’outre-mer comme en métropole, « la parole officielle n’est pas la plus efficace » pour « convaincre » des bienfaits de la vaccination, a-t-il regretté, vendredi, lors d’un déplacement dans le Nord. En plus d’user la capacité de résistance de la population, la durée de la crise sanitaire affecte la crédibilité du discours officiel. La flambée des contaminations et la nécessité d’une troisième dose ne vient-elle pas démontrer que le vaccin n’est pas aussi efficace qu’on a pu le dire ? Les scientifiques ont beau expliquer que l’ampleur des cas de contamination conduit mathématiquement à retrouver une partie des personnes à jour de leur vaccination dans les services de réanimation, le doute s’installe.
Le passe sanitaire contesté par l’extrême droite
L’annonce de la contamination du premier ministre, Jean Castex, lundi 22 novembre, en dépit d’un schéma vaccinal complet, n’a fait que renforcer ce trouble, abondamment exploité par une partie de l’opposition. « Rien manifestement ne peut empêcher la circulation du virus », a jugé la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, mardi sur France Inter, exigeant la « levée » de l’obligation vaccinale des soignants et du passe sanitaire. « Levons toutes ces contraintes qui commencent à devenir terriblement pesantes » , a-t-elle exhorté. Dans la même veine, le polémiste d’extrême droite Eric Zemmour, possible prétendant à la fonction présidentielle, s’était fait, la veille, le défenseur de la suppression du passe sanitaire, en estimant que les mesures prises pour enrayer l’épidémie allaient « trop loin ». Une manière de tirer profit de la grogne d’une partie de la population contre cet outil, que certains jugent « liberticide ». Face à ces critiques, le gouvernement et les médecins s’efforcent de défendre l’efficacité du vaccin, en répétant qu’il n’empêche pas d’attraper le virus mais réduit fortement le risque d’entraîner une forme grave de la maladie.
Écouter aussi Covid-19 : la France peut-elle résister à la cinquième vague ?
Pour l’heure, Emmanuel Macron, décrit par son entourage comme« vigilant », ne s’affole pas, observant qu’en France « la situation n’est pas aussi alarmiste » que dans d’autres pays. De fait, en Autriche, où le gouvernement a été contraint d’imposer un nouveau confinement, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue pour crier à la « dictature ». Des manifestations ont également eu lieu aux Pays-Bas et en Belgique, liées à l’instauration de nouvelles mesures de restrictions. Cet effet « Eurovision », tourne, pour le moment à l’avantage de l’exécutif, observe Frédéric Dabi, directeur général de l’institut de sondage IFOP. Et si le Covid-19 perturbe l’agenda présidentiel, poursuit-il, il a aussi le mérite de faire taire l’autre sujet du pouvoir d’achat, hautement inflammable pour le pouvoir en place.
Claire Gatinois et Alexandre Lemarié
Covid-19 : « Le passe sanitaire doit servir à accélérer les doses de rappel »
TRIBUNE
Miquel Oliu-Barton – Mathématicien
Bary Pradelski – Economiste
Face à la rapide propagation du virus, le mathématicien Miquel Oliu-Barton et l’économiste Bary Pradelski pressent, dans une tribune au « Monde », le gouvernement de rendre accessible sans attendre une troisième dose de vaccin pour tous et de renforcer les critères du passe sanitaire.
Publié aujourd’hui à 05h00, mis à jour à 13h04 Temps de Lecture 5 min. https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/11/24/covid-19-le-passe-sanitaire-doit-servir-a-accelerer-les-doses-de-rappel_6103359_3232.html
Tribune. La perte de contrôle sur l’épidémie en Autriche a amené un nouveau confinement et l’obligation vaccinale. Voulons-nous cela en France ? Certainement pas. Et pourtant, au rythme actuel, nous serons dans une situation similaire dans quelques jours. Comment éviter les retours en arrière qui s’annoncent déjà partout en Europe, des fermetures, des couvre-feux, voire des reconfinements ? La solution, nous l’avons pourtant sous les yeux : les doses de rappel et le passe sanitaire.
D’après une étude israélienne menée à grande échelle, les doses de rappel protègent très efficacement contre les formes graves de Covid-19 chez l’ensemble de la population adulte, et diminuent considérablement le taux de transmission. Les chiffres parlent d’eux-mêmes , surtout pour les 40 ans et plus : comparé à un schéma vaccinal complet de plus de cinq mois, la protection est de l’ordre de 92 % pour les hospitalisations et les admissions en réanimation, et de 81 % pour les décès.
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Et pourtant, aujourd’hui, 24 % de personnes entre 40 et 49 ans, 40 % des personnes entre 50 et 59, et 56 % des personnes entre 60 et 64 ont reçu leur schéma vaccinal complet depuis plus de cinq mois, sans pour autant avoir le droit à la dose de rappel. Soit 8 millions de Français qui seraient protégés bien plus efficacement en recevant ces fameuses doses de rappel. Les autoriser à le faire est urgent : 9 formes graves sur 10 et 4 décès sur 5 pourraient être évités dans les semaines à venir au sein de cette population.
Campagne de rappel massive
La priorisation sur un critère de risque était justifiable lorsqu’il y avait pénurie de doses, à l’entrée dans la campagne. Aujourd’hui, procéder par paliers en fonction des classes d’âge est strictement inacceptable. Il faut tout simplement accélérer, d’où la nécessité d’autoriser et d’organiser une campagne de rappel massive pour tous les adultes, comme suggéré dans le dernier avis du Conseil scientifique.
Cette campagne pourrait s’appuyer sur le nudge, une très idée simple qui consiste à proposer un rendez-vous à toutes les personnes éligibles, au lieu d’attendre qu’ils s’inscrivent eux-mêmes. Cette méthode s’est révélée particulièrement efficace en Espagne, où plus de 99 % de la population de 60 ans et plus est vaccinée. Elle vient d’être adoptée également en Autriche dans le but d’accélérer les doses de rappel.
Lire aussi Covid-19 : pourquoi les données plaident en faveur d’un rappel de vaccination chez les plus fragiles
Mais si vacciner est primordial, il faut encore que les personnes y adhèrent. D’où l’importance du passe sanitaire, un outil efficace pour encourager la vaccination et qu’approuve la majorité des Français. Les doutes qui persistaient quant à son efficacité ont été balayés pendant la quatrième vague. Car malgré sa mauvaise réputation initiale, ce sésame est rapidement devenu une mesure-phare de la lutte contre l’épidémie, notamment en raison du rôle majeur qu’il a joué dans la campagne de vaccination. Avant l’annonce de sa généralisation, le 12 juillet, le taux de vaccination commençait à stagner : avec 53,8 % des personnes vaccinées, la France était 4,9 points de pourcentage derrière l’Allemagne, 13,6 derrière le Royaume-Uni et 0,8 derrière la moyenne de l’Union européenne.
Aujourd’hui, la situation s’est inversée. La France compte plus de 76,4 % de sa population vaccinée, soit 6,5 points de plus que l’Allemagne, 2,2 points de plus que le Royaume-Uni et 7 points de plus que la moyenne de l’UE. Ce rebond spectaculaire n’est pas anodin, ni pour la santé, ni pour l’économie, ni même pour nos libertés individuelles. Car en augmentant le taux de vaccination de la sorte, non seulement le nombre de formes graves et de décès est réduit considérablement, on peut aussi contrôler la propagation du virus avec des mesures moins contraignantes.
Renforcer le passe sanitaire
Aujourd’hui, le passe sanitaire doit servir à accélérer les doses de rappel afin de protéger l’ensemble de la population contre les formes graves de Covid-19. L’équation est simple : pour tous les adultes, exiger soit un schéma vaccinal « complet » de moins de cinq mois, soit une dose de rappel, soit un test négatif récent. Prévu, déjà, pour les personnes de 65 ans et plus à partir du 15 décembre, ce renforcement devrait s’appliquer à l’ensemble de la population. Si nous avons bien appris une chose avec ce virus, c’est qu’il convient d’agir en amont si l’on veut éviter des dommages majeurs. Par ailleurs, il est peut-être temps de changer de terminologie : un schéma vaccinal complet nécessite une dose de rappel, comme c’est le cas pour d’autres vaccins.Lire l’éditorial du « Monde » : Face au Covid-19, la nécessité du débat démocratique
Le passe sanitaire peut aussi contribuer à réduire la circulation du virus, à condition que nous soyons prêts à étendre son usage ou à renforcer les critères d’attribution. L’adoption du passe sanitaire sur les lieux de travail, à l’université ou à l’école devrait ainsi être étudiée. Protéger les jeunes, ce n’est pas simplement éviter les formes graves, c’est aussi veiller à ce que leur scolarité ne soit pas interrompue. Quant aux critères exigés par le passé, force est de constater que le vaccin n’empêche pas la transmission du virus. Prenons le cas des rassemblements les plus à risque (des lieux clos, peu ventilés et à forte densité) : même vaccinés, on a des chances de s’y contaminer. Sécuriser davantage ces interactions, par exemple en exigeant un test négatif récent de tout le monde, vacciné ou non, est important pour assurer leur ouverture en période de pic épidémique.
Dans la situation actuelle, où le virus progresse de manière incontrôlée, chaque journée d’inaction aura pour conséquence des hospitalisations et des décès évitables et des pertes économiques colossales. C’est pourquoi nous appelons le gouvernement à agir au plus vite. Intégrer les doses de rappel dans une stratégie plus vaste de prévention et d’atténuation est le meilleur moyen d’assurer la protection de toutes les citoyennes et les citoyens tout en préservant notre économie et nos libertés. Qu’attendons-nous ?
Miquel Oliu-Barton est maître de conférences en mathématiques à l’université Paris-Dauphine et chercheur associé au centre de réflexion Bruegel ; Bary Pradelski est chargé de recherche en économie au CNRS et membre associé du centre de recherche Oxford-Man Institute.
Miquel Oliu-Barton (Mathématicien) et Bary Pradelski (Economiste)