Réquisitions, cellules de crise : le ministère anticipe des turbulences pour les urgences
19 NOVEMBRE 2021 PAR CAROLINE COQ-CHODORGE
De nombreux services d’urgences sont proches de la rupture, et le Covid n’est cette fois pas seul responsable. Olivier Véran a réactivé les cellules de crise et autorisé les réquisitions de soignants par les préfets.
Durant huit nuits du mois de novembre, les urgences de Laval, préfecture de la Mayenne, ont fermé faute de médecins. « On couvre un bassin de population de 100 000 habitants, on prend en charge 35 000 passages aux urgences par an, on a un IRM accessible 24 heures sur 24, une maternité de niveau 2. Nous ne sommes pas un petit hôpital, explique la cheffe de service, Caroline Brémaud. Mais aux urgences, nous ne sommes plus que cinq praticiens hospitaliers, quand nous devrions être au minimum seize. Et nous ne sommes plus que deux et demi à assurer les gardes la nuit. »
À Montaigu, une pancarte pour protester contre la pénurie de personnel soignant devant les urgences. © Mathieu Thomasset / Hans Lucas via AFPDepuis quelques semaines, l’urgentiste prend la parole publiquement, en publiant des vidéos diffusées sur Twitter pour alerter sur l’état de déliquescence du système de santé : « Il s’écroule, prévient-elle. Mes collègues sont partis, parce qu’ils sont épuisés par les conditions de travail, les interruptions de tâche en permanence, la bataille permanente pour trouver des lits pour nos patients. Regarder des personnes âgées passer des nuits sur des brancards, ça use. »
Pour combler les trous dans les plannings de garde, les urgences de Laval ont recours à des intérimaires, embauchés du jour pour le lendemain, qui ne se présentent pas toujours. Elles peuvent parfois compter sur la réserve sanitaire. Et quand aucune solution n’est trouvée, elles ferment la nuit, en ne maintenant une permanence que pour les urgences vitales.
« Quand j’étais jeune médecin, on parlait déjà d’une médecine à deux vitesses, je ne comprenais pas ce que cela voulait dire. Ces deux vitesses, je les vois désormais : il y a des gens qui parviennent à trouver un médecin, en allant dans les grandes villes ; et ceux qui attendent sept jours avec un mal de ventre. »
Laval n’est pas le seul service d’urgences en péril. Jeudi 18 novembre, le ministre de la santé Olivier Véran a organisé une visioconférence avec l’ensemble des établissements de santé, à laquelle étaient conviés les chefs de service d’urgences.
« Olivier Véran nous a dit qu’il fallait que l’on se considère en crise sanitaire », rapporte Caroline Brémaud.
La visioconférence a été l’occasion, pour le ministre, d’expliquer le « DGS-Urgent », un message d’alerte sanitaire envoyé mercredi aux établissements de santé, qui leur enjoint d’« engager dès à présent tous les leviers pour maintenir ouverts les services en situation critique, notamment les urgences ». Si Laval a fermé, faute de soignants, d’autres sont donc menacés de le faire.
Le ministère anticipe des fermetures de services d’urgences mais exige le maintien des SMUR, pour les urgences vitales.
Le ministère anticipe même des difficultés plus grandes encore au cours de l’automne et de l’hiver puisqu’il précise, en la soulignant, « l’importance de toujours maintenir une réponse territoriale pour les urgences vitales et/ou graves qui soit assurée par le SMUR [le Service mobile d’urgence et de réanimation, les ambulances des urgentistes – ndlr]. Ainsi l’ouverture d’un Smur doit être privilégiée à celle d’un service d’urgence dans les périodes de difficultés aiguës ». Si des urgences sont amenées à fermer, les urgences vitales, assurées par les camions des SMUR, doivent donc continuer à fonctionner.
Les cellules de crise qui ont fonctionné aux pires périodes du Covid pourront être réactivées « le cas échéant » par les agences régionales de santé (ARS) : celle chargée de réguler l’offre territoriale – trouver des lits d’hôpitaux sur le territoire quand un établissement ne dispose plus d’aucune place – et celle chargée de trouver des renforts en personnel.
Les établissements doivent faire appel à toutes les bonnes volontés pour renforcer les urgences. À l’intérieur de l’établissement d’une part, en faisant appel à des volontaires, internes dans d’autres services ou médecins juniors. Pour inciter les volontaires, les heures supplémentaires des personnels médicaux et paramédicaux seront majorées de 50 %, les jours de congés non pris indemnisés. Mais les internes sont exclus de cette majoration.
Les établissements doivent aussi chercher des renforts à l’extérieur, y compris des médecins libéraux et des retraités. La réserve sanitaire sera elle aussi mobilisée.
Et si les bonnes volontés manquent, le ministère autorise les « mesures plus coercitives », en passant par la réquisition de médecins de l’hôpital, mais aussi de médecins libéraux et intérimaires. Ces réquisitions passeront par les préfets. Ces réquisitions administratives de « tout professionnel de santé, quel que soit son mode d’exercice » ne sont possibles que « si l’afflux de patients ou de victimes ou la situation sanitaire le justifie, » indique le Code de la santé publique. Les médecins libéraux n’ont jamais été réquisitionnés, même pendant la crise du Covid.
Le président du syndicat de médecins généralistes MG France, Jacques Battistoni, prévient : « Cela va être très mal perçu. On ne peut pas être la variable d’ajustement des hôpitaux alors que nous ne sommes pas assez nombreux, très sollicités, également en souffrance. »
« Nous sommes dans un désert médical, nos médecins généralistes sont déjà très occupés, les spécialistes libéraux sont souvent seuls sur le territoire, je ne vois pas ce qu’on peut leur demander de plus », confirme Caroline Brémaud, la cheffe de service des urgences de Laval.
On est retombés dans le fonctionnement normal de l’hôpital. Les gens ne le supportent plus, partent. La situation est très inquiétante, il faut arrêter l’hémorragie
François Braun, président du syndicat Samu-urgences de France
Le syndicat Samu-urgences de France a été auditionné par le ministre avant l’écriture de cette circulaire. « Une des conséquences de la crise du Covid, qu’on n’avait pas anticipée, est que les gens ne veulent plus travailler la nuit et le week-end, analyse son président, François Braun. Pendant le Covid, on a beaucoup bossé, mais tout a été fait pour nous aider. Depuis, on est retombés dans le fonctionnement normal de l’hôpital. Les gens ne le supportent plus, partent, quittent parfois leur métier. La situation est très inquiétante, il faut arrêter l’hémorragie. Avec le Covid qui remonte, on n’est vraiment pas bien. Dans la situation actuelle, même une vaguelette m’inquiète. »
Chef du service des urgences de Metz, le docteur Braun subit lui aussi de nombreux départs : « Ces dernières semaines, pour la première fois, on a dû faire appel à de l’intérim, payé jusqu’à 2 500 euros les 24 heures. Des services d’urgences autour de Metz tournent à 80 % avec de l’intérim, c’est affolant. »
La loi Rist, adoptée le 26 avril dernier, prévoyait de plafonner les rémunérations de l’intérim médical. Le gouvernement a reculé devant les protestations de services d’urgences qui craignaient de perdre leurs intérimaires, qui représentent parfois la majorité de leurs médecins. Le ministre de la santé a confirmé jeudi que ce volet de la loi Rist ne serait pas appliqué tant que la situation ne se serait pas améliorée.
« Seulement, on ne voit pas quand et comment elle pourrait s’améliorer », tacle le docteur Laurent Maillard, chef de service des urgences d’Agen, préfecture du Lot-et-Garonne. Dans ce département, « il manque 200 urgentistes. Quarante sont formés chaque année, autant que le nombre de départs en retraite ».
À Agen, il n’y a que 24 médecins quand il en faudrait 32. Le renfort d’intérimaires ne suffit pas, les médecins doivent enchaîner les heures supplémentaires : « En période de vacances, on monte à 70 heures de travail hebdomadaires », estime le chef de service. Mais ce sont les plus petites urgences aux alentours d’Agen qui sont dans les plus grandes difficultés. Villeneuve-sur-Lot fonctionne avec une moitié d’intérimaires. Et à Marmande, il n’y a plus aucun médecin en poste. Aux urgences de cette ville de 20 000 habitants, « l’équipe a craqué, cinq médecins ont démissionné, une est en congé maternité, un autre en arrêt maladie », détaille Laurent Maillard.
Il décrit le désarroi des urgentistes, quand ils « arrivent le matin, et qu’il y a déjà 15 ou 20 malades dans les couloirs des urgences, aucune solution d’hospitalisation dans le département, à Marmande ou ailleurs, et même dans toute l’Aquitaine. Pendant qu’ils cherchent des solutions, de nouveaux malades arrivent… »
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Est en cause l’organisation des soins ces dernières années à l’hôpital, qui vise la plus grande efficacité, un taux d’occupation des lits de près de 100 %, en privilégiant les opérations programmées. Dans ce schéma, il n’y a pratiquement plus de places pour les malades des urgences : « Toutes les portes se ferment, explique le docteur Maillard. Les services d’hospitalisation, jusqu’aux réanimations, refusent nos patients parce qu’ils veulent continuer à faire du travail de qualité avec un nombre suffisant de soignants par patient. Mais pour nous, aux urgences, il n’y a pas de limites. Tout le monde finit par trouver normal que des dizaines de patients stagnent dans nos couloirs, parfois pendant des jours. »
Tout est surbooké. Dans la logique de l’ambulatoire, les malades ressortent plus vite de l’hôpital. Mais nous les voyons revenir aux urgences
Laurent Maillard, chef de service des urgences d’Agen
Les malades du Covid devenus bien moins nombreux, priorité est donnée aux opérations et aux hospitalisations programmées, en particulier celles qui ont été reportées. « Tout est surbooké, poursuit le docteur Maillard. Dans la logique de l’ambulatoire, les malades ressortent plus vite pour rentrer chez eux. Mais nous les voyons revenir aux urgences, quand les familles ne peuvent plus assumer des patients trop lourds, quand les malades du cancer des CHU “désaturent”. »
À Agen comme ailleurs, une bonne partie de l’activité des urgences relève en réalité de la médecine générale. À Laval aussi, les chefs de service n’incriment pas la population : les deux départements sont des déserts médicaux, où il est très difficile de trouver un médecin traitant.
À Agen, Laurent Maillard propose de « réguler les patients à l’entrée des urgences, pour en orienter une partie vers une maison médicale de garde ou le cabinet d’un médecin généraliste ». À Laval, Caroline Brémaud est sceptique : « On a déjà des consultations de soins non programmées, mais elles sont tenues par des urgentistes. »
Le nouveau Service d’accès aux soins (SAS) doit entrer en vigueur sur tout le territoire l’an prochain. Cette nouvelle organisation du 15 doit associer plus largement la médecine générale et apporter, 24 heures sur 24, une réponse médicale, qu’elle soit urgente ou non. L’objectif est de soulager les urgences.
Le SAS est déjà appliqué à Metz, où François Braun assure qu’il fonctionne. « Cela ne fonctionnera pas, parce qu’il n’y a plus de médecins de ville, tacle Wilfrid Sammut, urgentiste au SMUR de Versailles (Yvelines) et membre du syndicat Amuf. Aujourd’hui, dans notre centre de régulation de la permanence des soins, on fonctionne avec des médecins retraités. Le SAS, c’est du pipeau, ils réinventent la machine à vapeur. »
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La crise du système de santé, incarnée par l’hôpital public, paraît sans fin ni solution. À la crise des urgences en 2018, la ministre Agnès Buzyn avait répondu par un pacte de refondation avec 750 millions d’euros d’ici 2022. À la crise du Covid, son successeur Olivier Véran a répondu par le Ségur de la santé, 12,5 milliards d’euros en 2020 pour financer des augmentations de salaires et des investissements dans les hôpitaux.
« Pour la première fois depuis des lustres, aucune économie n’est imposée à l’hôpital », s’est félicité Olivier Véran lors de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2022 (lire notre article ici). En cours d’examen, celui-ci a dû être rallongé, de 2,2 milliards d’euros tout de même, pour compenser les surcoûts sous-estimés de la crise Covid en 2021 et 2022.
« Ça ne me dérangerait pas de remettre un coup de collier, s’il y avait une lueur d’espoir au bout du tunnel, poursuit l’urgentiste. Le vrai problème, c’est la dégradation insidieuse de la qualité des soins. Aujourd’hui, on met des heures à trouver une place pour un malade victime d’un AVC, en s’envoyant des noms d’oiseaux entre services. Et on finit par minimiser la gravité de l’état du patient pour se protéger. »
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L’an dernier, à la même époque, la possibilité d’utiliser le levier de la réquisition des libéraux pour pallier les tensions liées à l’épidémie de Covid-19 avait déjà suscité des craintes parmi la profession. Et voilà que cette mesure revient sur le devant de la scène… même si elle reste un dernier recours.
C’est une communication qui fait du bruit. Dans un “Urgent”, daté du 17 novembre, la Direction générale de la Santé émet une série de “recommandations relatives à l’anticipation et l’adaptation de la réponse de l’offre de soins aux situations de tensions”. En cause : des “difficultés à remplir les tableaux de garde ou à maintenir une offre de soins complète”, “rencontrées dès cet automne dans les établissements”. Et ce du fait des vagues successives de l’épidémie de Covid-19, de la recrudescence de celle-ci et d’une “circulation active et précoce des virus hivernaux”.
Le DGS-Urgent mentionne ainsi notamment des leviers pouvant être activés pour soutenir “spécifiquement les structures de médecine d’urgence”. Elle en distingue trois sortes. 1) des leviers à la main des établissements, avec des mesures relevant de la gestion interne des personnels, comme l’appel aux volontaires, “y compris chez les internes de dernier semestre, docteurs juniors…”. 2) des leviers sous la coordination des ARS, “relevant de la solidarité territoriale” : appel aux volontaires en externe – les médecins libéraux qui pourraient intervenir dans le cadre de contrat ou de mises à disposition -, mobilisation du CDOM pour l’organisation de la PDSA renforcée et la participation à la régulation du SAMU (week-ends et jours fériés compris).
3) Le DGS prévoit enfin, sous la coordination des ARS, des “mesures plus coercitives”, dans le cas où les mesures citées précédemment ne seraient pas “suffisantes”. Est ainsi prévue, notamment la réquisition des intérimaires…. et des libéraux, par demande de l’ARS auprès du préfet.
« Super timing »
Une annonce qui n’est pas du goût de nombreux praticiens, qui l’ont fait savoir sur les réseaux sociaux. “La médecine libérale dans son ensemble et la médecine générale en particulier est au bord du gouffre. Plein de médecins pensent à déplaquer. Et quelqu’un s’est dit que c’était un super timing pour menacer de réquisition pour colmater les trous de l’hôpital”, déplore par exemple le Dr Florian Zores sur Twitter.
La médecine libérale dans son ensemble et la médecine général en particulier est au bord du gouffre. Plein de médecins pensent à déplaquer.
Et quelqu’un s’est dit que c’était un super timing pour menacer de réquisition pour colmater les trous de l’hôpital.
— Florian Zores (@FZores) November 17, 2021
Dans un communiqué commun, Action Praticiens Hôpital, Jeunes Médecins et l’Isni, déplorent que, alors que “l’hiver arrive, l’hôpital public [n’ait] plus rien à se mettre sur le dos” et que, de fait, il “mendie pour trouver du personnel”. “Le ministère invoque la 5e vague Covid et les épidémies hivernales pour justifier de chercher tous azimuts des ‘faisant fonction de soignants’ : des plus jeunes aux retraités, que l’on va mettre comme des pions dans les urgences, de manière plus ou moins incitative (financière) ou coercitive (pour les plus jeunes) en favorisant des horaires de travail qui conduisent…
inexorablement à l’épuisement professionnel et personnel de tous”.
“On s’inquiète au niveau de l’exécutif. Réquisitions annoncées », commente également le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-S, sur Twitter. Qui soulève également une problématique économique : “On remarquera que les libéraux sont juste bons à être réquisitionnés (pas de primes et ou autres arrangements économiques pour eux). Ça va pas le faire », poursuit-il.
Fiches DGS urgent du jour, on s’inquiete au niveau de l’executif.
Requisitions annoncées.
On remarquera que les libéraux sont juste bon à être requisitionnés (pas de primes et ou autres arrangements economiques pour eux)
Ça va pas le faire…https://t.co/XpLqKo1dap— DrMartyUFML-S (@Drmartyufml) November 17, 2021
Ce DGS-Urgent a été annulé et remplacé hier en fin de journée… Une modification qui n’est pas passée inaperçue, puisqu’elle consiste en l’exclusion des internes de la majoration des indemnités de gardes. “C’est pire que du mépris”, fustige ainsi, notamment, la vice-présidente en charge de la médecine hospitalière de Jeunes médecins sur Twitter.
@DgsUrgent @JulienneKatia @olivierveran Jérôme Salomon:votre « ANNULE ET REMPLACE : DGS-URGENT N°2021-120» j’ai cru que vous vouliez vous excuser : non, vous avez exclus les internes de la majoration des indemnités de gardes. C’est pire que du mépris… @JeunesmedecinsF @ISNItwithttps://t.co/ODkctTN3s1 pic.twitter.com/DGj9Bsm4js
— TNT (@DrChamallo) November 17, 2021
Quelles différences entre le message #DGS-urgent de 13h et celui de 19h qui annule le précédent ?
Il y a 1 appli pour ça : La seule ≠ est l’exclusion des internes du paiement majoré des gardes.
Ces manants sont là pour apprendre, ils n’ont pas à bénéficier d’un effet d’aubaine ! pic.twitter.com/3jpl083GzI— Gouyou Beauchamps Xavier (@xgb_ucdf) November 18, 2021
« Parias », « nantis », « fainéants » : la FMF dénonce le mépris du Gouvernement pour les médecins libéraux et réclame un plan Marshall
Par Louise Claereboudt le 19-11-2021

Dénonçant le mépris du Gouvernement pour les médecins libéraux, la Fédération des médecins de France (FMF) réclame urgemment un plan Marshall de la santé, appelant l’ensemble des professionnels de santé à s’unir pour obtenir enfin une reconnaissance, y compris financière.
« Les médecins libéraux existent-ils aux yeux des politiques autrement que comme des parias des corporatistes, des malhonnêtes, des nantis et des fainéants ? » s’interroge la Fédération des médecins de France, dans un communiqué diffusé ce jeudi 18 novembre sur son site internet, qui dénonce un « haro » sur ces professionnels.
Le syndicat déplore un ensemble de mesures prises par les politiques, à commencer par le « dépeçage » de la médecine organisé par le PLFSS, qui vient d’obtenir le feu vert du Sénat. Le texte voté, qui doit repasser par l’Assemblée nationale, comprend en effet un certain nombre de transferts de compétence, intégrés « sans concertation avec les médecins » : accès direct aux kinés, aux orthoptistes, primo-vaccination des IPA…
En parallèle, pointe-t-il, on transfère des tâches administratives vers les médecins « diminuant » un peu plus « le temps médical », devenu si précieux.« L’heure est grave » : contre les transferts de compétence, le président de l’Ordre des médecins sonne la charge
Alors que l’on fait face sur l’ensemble du territoire à une reprise épidémique, et que l’on craint une 5e vague, la Fédération des médecins de France dénonce également la baisse « drastique et arbitraire de 25% des forfaits » dans les centres de vaccination, au moment même où le Gouvernement rend obligatoire la dose de rappel pour un certain nombre de personnes. « Ces forfaits étaient enfin payés à un tarif correct », juge la FMF.
Depuis le 8 novembre en effet, les vacations pour les médecins libéraux sont rémunérées 100 euros de moins. Une manière pour le ministère de la Santé d’inciter ces praticiens à vacciner dans leur cabinet. Mais une erreur stratégique de plus pour la FMF.
Stop à la coercition
La liste des déceptions ne s’arrête pas là : la fédération alerte sur les tentatives d’instaurer des mesures coercitives…
nombreuses à l’approche de l’élection présidentielle. Elle tacle notamment une proposition du président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Frédéric Valletoux, qui a récemment soumis l’idée de rétablir la permanence des soins obligatoire (PDSa), notant que « seuls 39% des généralistes font des gardes » à l’heure actuelle.
Mais aussi « l’acharnement sur nos jeunes confrères avec des obligations d’installation en zone désertique ». De nombreuses propositions en ce sens ont été faites récemment par des parlementaires afin d’améliorer le maillage territorial en médecins : six mois pour être conventionné, trois ans… Une surenchère qui n’est pas du goût de la fédération, dont la colère a atteint son paroxysme il y a deux jours avec la diffusion d’un DGS-Urgent agitant à nouveau le chiffon rouge des réquisitions des médecins libéraux.
Un « quoi qu’il en coûte sanitaire »
Assurant que la France manque de professionnels de santé de toutes professions « à force de voir la santé à court termine depuis plus de 30 ans », la fédération appelle à voir le secteur comme un « investissement » et non une « dépense », que ce soit en ville ou à l’hôpital. « C’est la faute des politiques s’il y a une crise sanitaire dans une crise sanitaire ! » dénonce-t-elle, réclamant un « quoi qu’il en coûte sanitaire » pour sauver le système.
Ainsi, la FMF appelle l’ensemble des professions de santé libérales et hospitalières à s’unir afin de réclamer un « plan Marshall de la santé » et des rémunérations au niveau européen.
Voir aussi: