Santé respiratoire : l’enjeu environnemental
Par Marie Ruelleux-Dagorne le 24-09-2021
https://www.egora.fr/actus-medicales/sante-publique/68794-sante-respiratoire-l-enjeu-environnemental?nopaging=1

L’augmentation de la pollution de l’air et le changement climatique ont un impact délétère sur la santé respiratoire et en particulier sur celle des enfants. Un état des lieux de la pollution, du changement climatique, et des effets des espaces verts a été présenté au récent Congrès de la Société européenne des maladies respiratoires (European Respiratory Society, ERS, 5 au 8 septembre 2021), en marge des nouvelles directives de l’Organisation mondiale de la santé qui viennent de paraitre.
La pollution de l’air ambiant peut affecter presque tous les organes du corps par des mécanismes directs ou indirects. Les enfants sont particulièrement concernés en raison de la croissance de leur système respiratoire qui n’est pas terminée. Ils sont par conséquent sujets à une inhalation plus importante de toxiques que les adultes. La pollution impacte leur santé respiratoire à court et à long terme. Ainsi, le nombre d’exacerbations d’asthme augmente durant les pics de pollution atmosphérique, entraînant logiquement une hausse des hospitalisations, des visites aux urgences mais aussi des traitements prescrits. Ces effets sont observés dès que la concentration particulaire (PM 2,5 ), de NO 2 ou d’O 3 s’accroît.
Autre observation, l’exposition chronique aux polluants s’accompagne d’une élévation de l’incidence de l’asthme chez les enfants préalablement sains. « La pollution atmosphérique est responsable de plusieurs centaines de milliers de cas d’asthme infantile en Europe chaque année » alerte Barbara Hoffmann, Professeur d’épidémiologie environnementale à l’Université de Düsseldorf en Allemagne.
De nouvelles directives européennes et mondiales
Par ailleurs, les résultats d’un projet de recherche européen, ELAPSE (Effects of Low-Level Air Pollution : A study in Europe) réalisé entre 2016 et 2019 et portant sur les effets de la pollution astmosphérique de faible intensité sur la santé, ont montré que le risque d’asthme chez l’adulte débute à des niveaux très bas de concentration de polluants, et même à des niveaux bien inférieurs aux limites fixées jusqu’à présent par les directives européennes et celles de l’organisation mondiale de la santé (OMS) concernant la qualité de l’air ambiant. Ce risque augmente même de manière linéaire avec la hausse des polluants.
En 2021, de nouveaux éléments de preuve sont venus confirmer que les effets délétères de la pollution atmosphérique débutent dès les concentrations les plus basses, ces effets ne se limitant pas à la sphère respiratoire.
Dans ce contexte, de nouvelles directives sur la qualité de l’air de l’OMS viennent de paraitre. Presque tous les seuils de référence- portant sur les particules en suspension, l’ozone, le dioxyde d’azote, le dioxyde de soufre et le monoxyde de carbone ont été abaissés.
Dans le cadre du Pacte vert européen, la Comission européenne prévoit de son côté de présenter en 2022, des révisions législatives nécessaires pour aligner plus étroitement les normes européennes en matière de qualité de l’air sur les conseils des scientifiques, y compris les recommandations de l’OMS.
Quel impact des espaces verts ?
A ce jour, peu de travaux ont permis de mettre en évidence l’effet des espaces verts sur la santé respiratoire. Pour le Dr Elaine Fuertes (Chercheuse à l’Imperial College de Londres), « la végétalisation des espaces verts peut être quantifiée sur une carte (« greenness ») ou évaluée par rapport à la distance aux espaces verts structurés ou non tels que des forêts, des parcs ou encore des cimetières ». Dans cette dernière forme de mesure, la quantité de végétation n’est pas prise en compte.
Quoiqu’il en soit, les études portant sur l’impact éventuel d’un environnement végétalisé sur l’asthme et la rhinite allergique ont démontré des résultats trop discordants pour que des conclusions puissent en être tirées (1 ; 2). Cependant, l’interaction entre espaces verts et fonction respiratoire semble se confirmer peu à peu. En effet, le suivi de la fonction respiratoire d’enfants britanniques jusqu’à leurs 24 ans a mis en évidence que les sujets vivant dans des zones végétalisées avaient une meilleure fonction respiratoire, et en particulier dans des zones plus polluées (3). Par ailleurs, le suivi d’enfants chinois trouvait des résultats similaires, mais uniquement dans les zones peu à moyennement polluées (4). Le Dr Fuertes a expliqué que les études peuvent sembler avoir des résultats contradictoires, mais qu’elles sont parfois difficilement comparables entre les pays.
En effet, l’évaluation de l’interaction entre les espaces verts et la fonction respiratoire peut s’avérer complexe en raison notamment des multiples outils de mesure utilisés ; et la pollution intervient comme un facteur confondant. Il est vrai que les zones végétalisées sont souvent moins polluées et que la pollution a un effet délétère connu sur la santé respiratoire. De plus, des travaux ont montré que les plantes présentes dans les zones à forte pollution atmosphérique ont tendance à libérer un plus grand nombre de grains de pollen, ce qui entraine des niveaux d’allergènes plus élevés. Et la pollution atmosphérique agit comme un facteur aggravant. Elle entraîne une hausse de la durée et de la sévérité
de la saison pollinique. Elle modifie, par ailleurs, la répartition géographique des végétaux, ce qui peut avoir pour conséquence d’entraîner une nouvelle sensibilisation chez des individus qui ne sont pas exposés habituellement.
Même si certaines études expérimentales ou de faible effectif confortent l’hypothèse de cet effet synergique entre pollution et allergènes, les résultats des études épidémiologiques sont quant à eux moins concluants (5). Pour le Dr Fuertes, « les raisons plausibles peuvent être les outils de mesure, la méconnaissance de certaines co-expositions et l’absence d’analyse de sous-groupes à risque notamment ».
Source : Congrès de la Société européenne des maladies respiratoires (European Respiratory Society,
ERS), du 5 au 8 septembre 2021. D’après les communications d’E. Fuertes (Royaume-Uni) et de B.
Hoffmann (Allemagne).
1- Lambert KA et al., Environ Res. 2017
2- Ferrante G et al., World Allergy Organization Journal. 2020
3- Fuertes E et al., Environ Int. 2020
4- Zhou Y. et al., Thorax. 2021
5- Lam HCY et al., Science of The Total Environment. 2020
Pollution de l’air : l’OMS durcit les seuils de qualité de l’air
L’Organisation mondiale de la santé a adopté de nouvelles recommandations plus strictes en matière de qualité de l’air. Ces nouveaux critères définissant un air « sain » devraient influencer la révision en cours de la réglementation européenne.
Risques | 23 septembre 2021 | Philippe Collet | Actu-Environnement.com

© PascalLes premières estimations montrent que la part de la population française exposée à des dépassements de seuils augmente significativement.
Mercredi 22 septembre, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a adopté de nouvelles lignes directrices mondiales sur la qualité de l’air et recommande le respect de nouveaux seuils de concentration de polluants atmosphériques plus strictes. Conséquence : la proportion de Français vivant dans une zone dont l’air n’est pas jugé sain selon les critères de l’OMS progresse.
Revoir les principaux seuils européens
Un alignement sur les recommandations de l’OMS entraînerait un durcissement des principales valeurs réglementaires européennes.
Concernant le NO2, l’Europe a fixé une valeur limite à 40 µg/m3, en moyenne annuelle. Un alignement sur la recommandation de l’OMS reviendrait à l’abaisser à 10 µg/m3.
Les PM10 font l’objet de deux valeurs limites : 40 µg/m3 en moyenne annuelle et 50 µg/m3 en moyenne journalière à ne pas dépasser plus de trente-cinq jours par an. L’OMS préconise 15 µg/m3 pour la première et 45 µg/m3 pour la seconde. Quant à la valeur limite européenne pour les PM2,5, elle devrait être réduite de 20 à 5 µg/m3 en moyenne annuelle.
L’ozone, enfin, fait l’objet d’une valeur cible de 120 µg/m3, en moyenne sur huit heures, à ne pas dépasser plus de vingt-cinq jours par an. L’OMS recommande 100 µg/m3.
En janvier dernier, la Commission européenne a lancé une consultation sur la révision de la réglementation relative à la qualité de l’air ambiant. Ce jeudi, l’exécutif européen lance, jusqu’au 16 décembre, une seconde consultation sur le sujet. Cette révision, que la Commission souhaite voir aboutir fin 2022, est inscrite dans le cadre du plan d’action « zéro pollution ». Bruxelles ambitionne notammant d’ « aligner plus étroitement » les normes européennes sur les recommandations de l’OMS (voir encart), comme le réclament depuis des années certains acteurs (Anses, Cour des comptes européenne, etc).
Abaissement des concentrations des principaux polluants
L’OMS explique que depuis la dernière édition de ses lignes directrices mondiales en 2005, « la quantité de données factuelles montrant que la pollution atmosphérique a une incidence sur différents aspects de la santé a sensiblement augmenté ». En conséquence, les seuils de référence de concentrations des principaux polluants atmosphériques ont été révisés, en particulier pour trois polluants critiques en Europe et en France : le dioxyde d’azote (NO2), les particules et l’ozone (O3).
Concrètement, concernant le NO2, la concentration moyenne maximale recommandée sur une année est divisée par quatre, passant de 40 à 10 microgrammes par mètre cube d’air (µg/m3), et un seuil à 25 µg/m3 est créé pour la concentration calculée sur vingt-quatre heures.
S’agissant des particules, les nouveaux seuils recommandés sur vingt-quatre heures sont abaissés de 25 à 15 µg/m3, pour les PM2,5, et de 50 à 45 µg/m3, pour les PM10. La concentration moyenne maximale recommandée sur une année est abaissée de 10 à 5 µg/m3, pour les PM2,5, et de 50 à 45 µg/m3, pour les PM10. En outre, l’OMS rappelle, qu’en 2013, les particules en suspension et la pollution de l’air extérieur ont été classées comme cancérogènes par son Centre international de recherche sur le cancer (Circ).
Quant à l’ozone, il voit son seuil sur huit heures maintenu à 100 µg/m3. Mais une nouvelle recommandation est créée pour les « pics saisonniers » : l’OMS recommande de ne pas dépasser une concentration moyenne de 60 µg/m3 (calculée à partir de la concentration moyenne quotidienne maximale sur huit heures au cours des six mois consécutifs où la pollution est la plus élevée).
L’OMS crée aussi un nouveau un seuil à 60 µg/m3 pour le monoxyde de carbone (CO). Le dernier polluant pris en compte, le dioxyde de soufre (SO2), voit son seuil relevé de 20 à 40 µg/m3 sur vingt-quatre heures.
La plupart des Français exposés à la pollution de l’air
L’OMS prévient que « le dépassement de ces nouveaux seuils relatifs à la qualité de l’air [est] associé à des risques importants pour la santé, tandis que le respect de ces seuils pourrait sauver des millions de vies ». Aujourd’hui, rappelle-t-elle, l’exposition à la pollution atmosphérique entraîne sept millions de décès prématurés et la perte de millions d’années de vie en bonne santé chaque année.
L’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) a réalisé une première analyse de l’impact des nouvelles lignes directrices de l’OMS sur l’exposition des Français à la pollution atmosphérique. « [Les] premières estimations montrent que les nouvelles valeurs proposées par l’OMS augmentent significativement la part de la population française et européenne exposée à des dépassements des nouveaux seuils. » Sur la base des données de 2019, deux points ressortent : l’ensemble du territoire est exposé à des dépassements de la nouvelles valeurs seuil annuelles pour les PM2,5 et les trois quarts des Français sont exposés à des dépassements du nouveau seuil annuel pour le NO2.
Airparif, l’association chargée d’assurer la surveillance règlementaire de la qualité de l’air en Île-de-France, a aussi analysé l’impact des nouveaux seuils sur l’exposition des Franciliens. Il ressort, qu’en 2020, tous les Franciliens ont été exposés à des niveaux de pollution à l’ozone et aux particules fines PM2,5 supérieurs aux nouveaux seuils. La situation était déjà à peu près identique avec les anciennes recommandations de l’OMS de 2005. Pour le NO2, la portion proportion des Franciliens surexposés est de neuf sur dix, alors que seulement 1 % est en situation de dépassement avec les seuils de 2005. S’agissant des PM10, ce sont les trois quarts des habitants d’Île-de-France qui subissent un dépassement (au lieu de la moitié avec la valeur de 2005).
Qualité de l’air : la France mise en demeure par la Commission
Risques | 23 septembre 2021 | Félix Gouty |
https://www.actu-environnement.com/ae/news/qualite-air-france-mise-en-demeure-commission-38222.php4#xtor=ES-6

La France a reçu, ce jeudi 23 septembre, une lettre de mise en demeure, dans le cadre des décisions régulières d’infraction prises par la Commission européenne à l’encontre des États membres. L’autorité européenne demande que les dispositions prévues par sa directive du 25 novembre 2015 intègrent la législation française. Pour rappel, cette directive fixe les valeurs limites de dioxyde de soufre (SO2), d’oxydes d’azote (NOx) et de poussière émis par des installations de combustion moyenne. Ces dernières, dont la puissance thermique est comprise entre 1 et 50 mégawatts, sont exploitées pour le chauffage et le refroidissement domestiques et résidentiels, mais aussi dans un cadre industriel afin de produire de l’électricité, de la chaleur ou de la vapeur.
Selon la Commission européenne, la France (ainsi que l’Autriche, la Grèce et Chypre) « n’a pas correctement transposé cette directive dans la législation nationale ». Pourtant, en août dernier, à l’occasion d’un décret relatif aux installations de combustion, le ministère de la Transition écologique affirmait travailler à transposer fidèlement la directive citée. L’État dispose d’un délai de deux mois pour prendre les mesures nécessaires. S’il ne le respecte pas, il s’expose à un avis motivé de la part de Bruxelles.
Un avis sur « Actualités sur la pollution de l’air: impact sur la santé des enfants, sur l’état respiratoire des adultes, l’OMS durcit les seuils de qualité de l’air »