Les finalistes de 2017 sont largement en tête du premier tour dans les sondages, les opposants sont éclipsés

Présidentielle 2022 : le duel Macron-Le Pen éclipse les opposants

Si la course à l’Elysée est encore lointaine, les finalistes de 2017 sont largement en tête du premier tour dans tous les scénarios envisagés par ce premier volet de l’enquête électorale réalisée par Ipsos-Sopra Steria en partenariat avec le Cevipof et la Fondation Jean Jaurès. 

Par Matthieu GoarPublié le 24 avril 2021 à 06h47 – Mis à jour le 24 avril 2021 à 11h55 https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/04/24/presidentielle-2022-le-duel-macron-le-pen-eclipse-les-opposants_6077893_823448.html 

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Difficile de se projeter vers l’élection présidentielle. Douze mois avant l’échéance suprême de la vie politique française, les Français ont bien d’autres interrogations en tête : le retour à une vie normale est-il possible à court ou moyen terme ? Les vaccins auront-ils raison des variants ? La crise économique sera-t-elle durable ou un rebond est-il envisageable si l’épidémie due au Covid-19 laisse un peu de répit à des finances publiques essorées ? De leur côté, les élus locaux préparent des élections régionales et départementales toujours prévues les 20 et 27 juin prochains.

Dans ce contexte très particulier, la course à l’Elysée paraît encore lointaine en ce printemps 2021, sauf pour les candidats déclarés, avides de capter l’attention, mais aussi pour un président déposant les premiers jalons sur la route de sa future campagne.

Dans notre première enquête électorale réalisée par Ipsos-Sopra Steria en partenariat avec le Centre d’études de la vie politique française de Sciences Po (Cevipof) et la Fondation Jean Jaurès, 63 % des personnes interrogées se disent certes déjà intéressées par cette élection, mais ce haut score comparé à d’autres scrutins est à relativiser. En mai 2016, il atteignait déjà 71 %. Signe que les courbes épidémiologiques continuent à occuper les esprits et à plomber la vitalité démocratique.

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Dans ce contexte sanitaire, à un an du premier tour, les intentions de vote ne reflètent bien sûr qu’un instantané des forces politiques en présence. Hors de question de les ériger en prédictions – les dernières échéances électorales semblent montrer que le résultat se joue en grande partie dans les dernières semaines de la campagne.

Impossible de les négliger pour autant. La plupart des opposants à Emmanuel Macron sont, en effet, entrés en précampagne et rodent leurs thèmes. Et certains, tel Xavier Bertrand, désireux d’échapper à une primaire, cherchent la validation des enquêtes d’opinion pour écarter toute concurrence.

Les réponses du très large panel constitué par Ipsos pour Le Monde (plus de 10 000 personnes seront ainsi interrogées jusqu’aux législatives de 2022) montrent en tout cas que le duel Emmanuel Macron-Marine Le Pen écrase pour le moment toutes les autres alternatives. Dans tous les scénarios envisagés, les finalistes de 2017 sont largement en tête du premier tour. L’actualité, anxiogène, permet au président sortant de rassembler un socle d’électeurs peu désireux de tout changer tandis que Marine Le Pen capte les colères.

Macron grignote à droite

Durement jugé pour sa gestion de la crise (64 % des sondés estiment que son bilan en la matière est négatif, 47 % affirmant que les dispositions prises pour protéger la santé sont « insuffisantes », 34 % les estimant appropriées) mais plutôt félicité pour ses mesures de soutien à l’économie (46 % les approuvent, 37 % les estiment « insuffisantes »), M. Macron est mesuré à chaque fois au-dessus de son score de 2017 (24,01 %), entre 25 % et 29 %.

Mais, contrairement à il y a quatre ans, il est derrière ou à égalité avec Mme Le Pen dans deux scénarios sur trois. Plus important que dans d’autres sondages récents, l’écart au second tour est tout de même bien plus resserré qu’en 2017, une des potentielles fragilités de la probable future candidature du président en exercice.

Dans le détail, l’électorat de M. Macron a évolué puisqu’il continue à grignoter à droite (face à Xavier Bertrand, 30 % des soutiens de François Fillon en 2017 disent vouloir voter pour lui, il avait rassemblé 17 % des électeurs de Nicolas Sarkozy il y a quatre ans, selon les estimations d’Ipsos). Et le président de la République, qui a investi à nouveau le thème de la sécurité en début de semaine, devra sans doute marcher sur une ligne de crête tant les préoccupations principales des Français sont diverses (l’épidémie, 41 % ; le pouvoir d’achat, 30 % ; l’environnement, 28 % ; le niveau de la délinquance, 25 %).

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L’autre fait majeur est le score très haut de Marine Le Pen, quel que soit le cas de figure. La présidente du Rassemblement national (RN) culmine même à 28 % si le sénateur (Les Républicains, LR) de Vendée Bruno Retailleau était candidat. La stratégie de dédiabolisation continue à produire des effets et le souvenir du débat raté d’entre-deux tours, en 2017, semble s’estomper dans une partie de l’électorat.

Le nombre de personnes qui se disent « inquiètes » par son éventuelle élection est toujours élevé mais en recul (51 %) tandis que 24 % trouvent qu’elle a l’étoffe d’une présidente (note moyenne sur ce critère : 3,6 points sur 10, + 0,4 point par rapport à avril 2017). Alors qu’elle n’avait recueilli que 14 % des votes des retraités au premier tour en 2017, elle approche, cette fois-ci, les 20 points (19,2 %) dans cette catégorie.

La participation ou l’abstention des seniors en 2022 sera un des éléments très importants de ce scrutin. Tout comme le fort désintérêt ou l’abstention en cas de second tour Le Pen-Macron (dans cette hypothèse-là, 74 % des électeurs du communiste (PCF) Fabien Roussel, 63 % de ceux de l’« insoumis » (LFI) Jean-Luc Mélenchon, 39 % de ceux de l’écologiste Yannick Jadot et 37 % de ceux de la socialiste (PS) Anne Hidalgo ne donnent pas d’intentions de vote). « Il est malgré tout possible qu’ils le fassent dans de plus grandes proportions le jour où ce qui n’est encore qu’une hypothèse lointaine et abstraite deviendrait une possibilité beaucoup plus réelle », tempère Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos

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Alors que Xavier Bertrand a annoncé sa candidature le 24 mars en espérant provoquer un sursaut dans l’opinion et en balayant ses potentiels rivaux, la droite est toujours menacée d’être écartée dès le premier tour. Le président des Hauts-de-France est, en effet, jaugé à 16 %. Loin devant la présidente de l’Ile-de-France Valérie Pécresse (11 %) et Bruno Retailleau (8 %). Ces différentes enquêtes vont sans doute peser dans le débat interne au sein de LR, parti dont les statuts prévoient toujours l’organisation d’un scrutin pour départager les candidats. M. Bertrand essaie de l’esquiver en affirmant qu’il n’y participera pas et sera quoi qu’il arrive candidat.

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Au-delà de ces considérations stratégiques, la droite, principale force républicaine d’alternance, est toujours en grande difficulté. Tous les candidats potentiels sont en deçà du score de François Fillon en 2017 (20,01 %). La faute principalement à Emmanuel Macron qui capte une partie de l’électorat du centre droit (40 % de l’électorat LR-UDI approuvent le bilan du président de la République).

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La gauche lourdement handicapée

Pourtant, les candidats de la droite essaient de défricher des thématiques très porteuses dans l’opinion. Alors que M. Bertrand ou encore Laurent Wauquiez évoquent souvent le sujet de la réindustrialisation, 85 % des sondés disent ainsi préférer que les produits soient fabriqués en France « même s’ils sont plus chers à la consommation ».

Sauf que la droite souffre encore d’un problème d’incarnation ; 21 % des sondés pensent que M. Bertrand ferait mieux qu’Emmanuel Macron (17 % pour Mme Pécresse, 10 % pour M. Retailleau, Marine Le Pen est à 28 %). L’espoir pour LR réside peut-être dans la volonté des électeurs de ne pas voir se reproduire un second tour similaire à celui de 2017, car la candidature de Xavier Bertrand semble, pour l’instant, plus solide face à l’extrême droite grâce à un meilleur report des voix.

La gauche a, elle aussi, de nombreuses thématiques à labourer lors d’une élection qui sera forcément marquée par la crise sanitaire et ses conséquences économiques. Ainsi 57 % du panel approuvent l’idée « d’augmenter les impôts des riches et des entreprises afin de financer plus de politiques de soutien aux ménages défavorisés » (43 % pensent le contraire) ; 54 % des personnes interrogées estiment que la France doit prendre des « mesures rapides et énergiques sur le plan économique, même si cela implique de mettre la question environnementale au second plan pour l’instant » (46 % pensent l’inverse). Des débats qui risquent de compter dans la campagne.

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Mais la gauche est lourdement handicapée par la multiplication des candidatures. Surtout qu’aucun profil ne semble capable pour le moment de créer une dynamique.

Dans notre enquête, Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot (qui doit encore emporter la primaire des Verts) ou encore la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui laisse miroiter l’idée d’une candidature, stagnent entre 8 % et 10 %, très loin du seuil de qualification.

Ce nouveau sondage devrait continuer à alimenter les discussions entre les partis de gauche une semaine après une première réunion organisée à l’initiative de M. Jadot et alors que certains ont réussi à créer les conditions d’une union. Par exemple dans les Hauts-de-France où Europe Ecologie-Les Verts (EELV), le PS, le PCF et LFI partiront ensemble, dès le premier tour, pour les élections régionales. Une élection où la tête de liste, la députée européenne EELV Karima Delli, affrontera… Xavier Bertrand.

Matthieu Goar

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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