Les scientifiques et le Pr Salomon contredisent le premier ministre* à propos des variants qui progressent en France

Covid : les variants sud-africains et brésiliens gagnent du terrain en France

Les variants découverts au Brésil et en Afrique du Sud progressent eux aussi dans l’Hexagone, avec des disparités territoriales. Les chiffres le montrent, malgré une interprétation difficile. Une évolution qui inquiète les scientifiques.

Seul le séquençage permet de détecter avec assurance un variant, mais les résultats restent peu disponibles.
Seul le séquençage permet de détecter avec assurance un variant, mais les résultats restent peu disponibles. (ISA HARSIN/SIPA)

Par Florian MaussionPaul TurbanPublié le 26 avr. 2021 à 15:16Mis à jour le 26 avr. 2021 à 15:25

Dimanche, Jean Castex s’est montré optimiste. « Les variants brésiliens et sud-africains sont très peu nombreux sur le territoire national et ont même tendance ces dernières semaines à régresser », a affirmé le Premier ministre. Une déclaration qui a fait réagir.

Le professeur Rémi Salomon, président de la Commission médicale d’Etablissement de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, a signalé sur Twitter quelques heures plus tard une « inquiétante évolution » de ces variants, courbes à l’appui. Les données présentées montrent une hausse en France, et une hausse plus forte encore en Île-de-France.

Inquiétante évolution des variants brésilien (P1) et sud-africain en IdF. Il faut attendre le séquençage pour distinguer ces 2 variants dont on connait encore mal la transmissibilité relative face au britannique mais le P1 semble plus contagieux. Et l’indien, pas encore détecté. pic.twitter.com/f5ZIRWlFT2— Rémi Salomon (@RemiSalomon) April 25, 2021

Le graphique présenté par le Pr Salomon, comme il l’explique lui-même, repose sur les résultats de tests PCR de criblage. Cette analyse, réalisée sur des échantillons déjà identifiés comme positifs par un test PCR classique, permet de repérer une partie spécifique du virus. En l’occurrence, il s’agit d’identifier la mutation E484K, commune aux variants brésilien et sud-africain. Même si, selon le Pr Salomon, il est possible que cette variation soit détectée sur d’autres variants, comme le variant découvert récemment en Inde .

ANALYSE – Covid : Face aux variants, les labos cherchent la martingale

Si l’on observe donc les résultats de ces tests PCR par criblage, mis à disposition par Santé publique France, un constat s’impose : les variants britanniques et sud-africains représentent une part plus importante des tests de criblage actuellement qu’à la mi-avril. On constate une hausse de 1 point entre le 10 et le 22 avril. Ces variants représentent désormais près de 5 % des échantillons criblés par PCR.https://flo.uri.sh/visualisation/5967476/embed

Dans certains territoires, la situation semble toutefois plus critique. En Île-de-France, la part des variants sud-africains et brésiliens dans les PCR de criblages est passée de 4 % le 6 avril à 9 % le 22 avril. Cette part atteint 12,5 % dans le Val-de-Marne et 10,4 % en Seine-Saint-Denis.

D’autres territoires présentent des évolutions spectaculaires comme la Creuse (+ 12 points entre le 1er et le 22 avril) ou la Haute-Saône (+ 18 points). Mais pour ces derniers, la faible densité peut expliquer une apparente explosion, puisqu’un cluster, même limité, peut faire exploser la part des variants dans le nombre total des contaminations. La tendance est d’ailleurs à la baisse dans la Creuse. Elle l’est également en Moselle, où ces variants ont circulé très tôt .https://flo.uri.sh/visualisation/5569537/embed

Les données de séquençage attendues

Pour pouvoir être plus affirmatif, il faudrait se tourner vers les données de séquençage . Cette technique permet de déterminer avec précision l’ensemble des mutations portées par un coronavirus et donc de déterminer de quels variants il s’agit.

Toutefois, les séquençages sont peu nombreux en France, et les données peu disponibles. Ainsi, dans une analyse datée du 21 avril, Santé publique France présente les résultats de 4 « enquêtes Flash ». La dernière, datée du 30 mars, ne présente que des résultats préliminaires.

Covid : pourquoi le séquençage du virus est primordial dans la lutte contre l’épidémie

Ces quelques données de séquençage ne permettent pas de dégager une tendance claire. Le variant sud-africain représentait 6 % des échantillons séquencés à la mi-février et 6,6 % fin mars. Le variant brésilien, lui, représentait 0,6 % et 0,4 % des séquençages aux mêmes dates. Très difficile, donc, d’en tirer des conclusions.

Le Conseil scientifique inquiet

Dans un avis daté du 16 avril , le Conseil scientifique a toutefois appelé à se préparer à une éventuelle circulation accrue du variant brésilien. En effet, il semblerait que les vaccins contre le coronavirus aient un effet moindre face à la fameuse mutation E484K . Le recul du variant britannique induit par ces vaccins pourrait donc entraîner une extension des variants sud-africains et brésiliens.

Pour la prévenir, le Conseil scientifique a donc recommandé au gouvernement de suspendre les vols avec les pays où ce variant circule très fortement, notamment au Brésil. Il a également conseillé de précommander des vaccins spécifiquement fabriqués pour immuniser contre ce variant pour éviter une reprise de l’épidémie à l’été.

Notre sélection d’articles sur la pandémie :

INFOGRAPHIE ANIMEE – L’évolution du coronavirus en France

INFOGRAPHIE – Le tableau de bord de la vaccination en France

LONG FORMAT – La campagne de vaccination en France

SCIENCE – Comment l’ARN est devenu l’un des grands espoirs de la médecine

CHRONIQUE – Le monde merveilleux de l’après-Covid

Florian Maussion et Paul Turban

*Voir aussi:

*https://jeansantepolitiqueenvironnement.wordpress.com/2021/04/26/le-faible-sequencage-en-france-ne-permet-pas-dapprecier-correctement-levolution-des-variants-bresilien-et-sud-africain-augmentation-en-ile-de-france/

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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