2020 au deuxième rang des années les plus chaudes, juste après 2016 et avant 2019

2020 se classe parmi les trois années les plus chaudes jamais enregistrées

Les catastrophes climatiques se sont multipliées cette année, tandis que l’Arctique fait partie des premières victimes du réchauffement, selon l’Organisation météorologique mondiale. 

Par Audrey Garri

Publié le 02 décembre 2020 à 14h00 – Mis à jour le 03 décembre 2020 à 07h44  https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/12/02/2020-se-classe-parmi-les-trois-annees-les-plus-chaudes-jamais-enregistrees_6061928_3244.html

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Au sud de Bilwi, la ville principale de la côte nord du Nicaragua, le 28 novembre, quelques jours après le passage de l’ouragan Iota.
Au sud de Bilwi, la ville principale de la côte nord du Nicaragua, le 28 novembre, quelques jours après le passage de l’ouragan Iota. INTI OCON / AFP

Chaque année, inlassablement, le réchauffement climatique convoie son lot de catastrophes et de records. Ils illustrent une nouvelle normalité, celle d’une planète en surchauffe. Et 2020 ne déroge pas à la règle : elle devrait se classer parmi les trois années les plus chaudes jamais constatées, avec 2016 et 2019. La décennie 2011-2020 sera la plus chaude jamais observée et les six années écoulées depuis 2015 ont toutes atteint des records, indique l’Organisation météorologique mondiale (OMM), mercredi 2 décembre, dans son rapport provisoire sur l’état du climat – dont les données seront confirmées en janvier.

De janvier à octobre, la température moyenne à la surface du globe a été supérieure d’environ 1,2 °C à l’époque préindustrielle (1850-1900). Les cinq jeux de données mondiaux sur lesquels se base l’OMM (NASA, NOAA, etc.) placent tous actuellement 2020 au deuxième rang des années les plus chaudes, juste après 2016 et avant 2019. « La différence entre les trois années est cependant faible, et le classement exact établi par chaque jeu pourrait changer une fois que des données seront disponibles pour l’année entière », prévient l’OMM.

Ecart de la température moyenne annuelle à l’échelle du globe par rapport à la période préindustrielle (1850 –1900). Les données pour 2020 concernent la période de janvier à octobre. ORGANISATION MÉTÉOROLOGIQUE MONDIALE

« Des efforts supplémentaires »

Ce classement est d’autant plus inquiétant qu’il intervient alors qu’un épisode La Niñade forte amplitude est en cours, un refroidissement du Pacifique équatorial qui diminue la température globale de la planète. A l’inverse, l’année record 2016 avait été marquée par un épisode El Niño très intense, qui accentue le réchauffement. « S’approcher d’un record de température pendant un épisode La Niña majeur, c’est du jamais-vu », assure le climatologue (CNRS) Christophe Cassou.

« Il y a au moins une chance sur cinq que la température mondiale dépasse 1,5 °C d’ici à 2024 », a déclaré le secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas, dans un communiqué. Or, les Etats se sont engagés à limiter le réchauffement bien en deçà de 2 °C, et si possible à 1,5 °C, lors de la signature de l’accord de Paris sur le climat, en 2015, dont les cinq ans vont être fêtés le 12 décembre. S’il se félicite des engagements pris récemment – comme

l’objectif de neutralité carbone au milieu du siècle en Chine, au Japon et en Corée du Sud, ou encore la volonté des Etats-Unis de réintégrer l’accord de Paris –, Petteri Taalas appelle les gouvernements à réaliser « des efforts supplémentaires ».

Le ralentissement économique dû à la pandémie causée par le SARS-CoV-2 n’a pas freiné l’augmentation de la concentration de CO2 dans l’atmosphère, le principal gaz à effet de serre, émis lors de la combustion des énergies fossiles (pétrole, gaz naturel et charbon). Elle a atteint 410 parties par million (ppm), un niveau inégalé depuis plus de 3 millions d’années. Si les émissions de CO2, elles, ont bien baissé en 2020 – de l’ordre de 4 % à 7,5 %, selon des estimations préliminaires –, les activités humaines continuent d’envoyer plus de CO2 dans l’atmosphère que les puits de carbone (océans, végétation) ne peuvent en absorber.

Il faudrait ainsi reproduire cette diminution pendant des années pour stabiliser la concentration de CO2, qui résulte des émissions passées et actuelles cumulées. « Le COpersiste dans l’atmosphère pendant des siècles et dans l’océan plus longtemps encore », rappelle Petteri Taalas. Cet excédent de gaz à effet de serre entraîne un surplus d’énergie qui réchauffe l’atmosphère et les océans.

Anomalies de température par rapport à la moyenne à long terme 1981-2010 pour la période janvier-octobre 2020, selon le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme. ORGANISATION MÉTÉOROLOGIQUE MONDIALE

Jusque dans les abysses

Selon le rapport de l’OMM, l’Arctique fait partie des premières victimes du réchauffement, tout particulièrement en Sibérie, où les températures ont été supérieures de plus de 5 °C à la moyenne. Le thermomètre a grimpé jusqu’à 38 °C à Verkhoïansk le 20 juin, la température la plus élevée constatée au nord du cercle arctique. Cette hausse du mercure a entraîné la saison des incendies la plus active depuis dix-huit ans.

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Depuis le milieu des années 1980, l’Arctique se réchauffe à un rythme plus de deux fois supérieur à celui du reste du monde, du fait d’un cercle vicieux : en fondant, la glace et la neige, très réfléchissantes, sont remplacées par de l’océan ou de la végétation, plus sombres, qui absorbent davantage les rayons du soleil. Cela entraîne alors une hausse des températures de l’air et de l’eau qui, à son tour, accélère la fonte.

Conséquence : la disparition de la banquise arctique s’accélère. Elle a atteint en septembre sa deuxième superficie la plus basse jamais enregistrée, et elle peinait à se reformer à l’automne, de quoi affecter la biodiversité, les populations locales, et même le climat aux latitudes moyennes. Le Groenland, de son côté, a continué de perdre de la glace, aggravant l’élévation du niveau de la mer.

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Les océans se sont élevés à un rythme de 3,3 mm par an en moyenne depuis 1993, une vitesse jamais atteinte depuis la sortie de la dernière déglaciation entre − 25 000 et − 20 000 ans. L’accélération enregistrée depuis une vingtaine d’années s’explique principalement par la perte accrue de masse des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique, plus rapide que prévu. Les océans montent également en raison de leur expansion thermique sous l’effet du réchauffement et de la fonte des glaciers terrestres.

Le réchauffement océanique a par ailleurs battu de nouveaux records, et plus de 80 % des océans ont subi une vague de chaleur en 2020. Ce sont en effet les mers qui stockent plus de 90 % de l’énergie excédentaire liée à l’augmentation des concentrations de gaz à effet de serre. Ce monde marin, plus chaud jusque dans les abysses, est également moins riche en oxygène, plus acide, ce dont souffrent les poissons, les coraux ou les coquillages.

Inondations et sécheresses

Le réchauffement n’est qu’un aspect du dérèglement climatique, qui se manifeste aussi par la multiplication des événements extrêmes. De graves inondations ont touché, cette année, plusieurs millions de personnes en Afrique de l’Est et au Sahel, en Asie du Sud, en Chine et au Vietnam. A l’inverse, une importante sécheresse a affecté de nombreux pays d’Amérique du Sud, provoquant près de 3 milliards de dollars (2,5 milliards d’euros) de pertes agricoles au Brésil. Les incendies ont fait rage dans le pays, avec une déforestation en Amazonie brésilienne au plus haut niveau depuis douze ans.

 Les Etats-Unis ont aussi connu des feux d’une ampleur sans précédent à la fin de l’été et en automne.

Les destructions à Haulover, à 41 km au sud de Bilwi, dans la région autonome des Caraïbes du Nord, au Nicaragua, le 28 novembre, quelques jours après le passage de l’ouragan Iota. Les ouragans Eta et Iota, qui ont frappé le Nicaragua les 3 et 16 novembre, ont fait au moins 200 morts confirmés et autant de disparus. INTI OCON / AFP

L’Atlantique Nord a également connu une saison cyclonique record, avec trente cyclones tropicaux au 17 novembre, soit plus du double de la moyenne entre 1981 et 2010. En ce mois de novembre, au moment où, normalement, la saison se termine, deux ouragans de catégorie 4, Eta et Iota, ont frappé l’Amérique centrale en moins de deux semaines, provoquant des inondations dévastatrices et faisant de nombreuses victimes.

Lire l’entretien : « Désormais, aucun endroit ni aucun d’entre nous n’est à l’abri du changement climatique »

Ces impacts du changement climatique affectent la santé et le bien-être de millions de personnes, « amplifiant les menaces que la pandémie due au SARS-CoV-2 fait peser sur la stabilité économique ainsi que sur la santé et la sécurité humaines », prévient le rapport.

Environ dix millions de déplacements, en grande partie dus à des catastrophes hydrométéorologiques, ont été enregistrés au cours du premier semestre de 2020. L’insécurité alimentaire progresse – ainsi, 690 millions de personnes ont été sous-alimentées en 2019 – sous l’effet des conflits et du ralentissement économique mais aussi des sécheresses, qui réduisent les récoltes.

Audrey Garric

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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