Macron interrogé sur « Brut », souvent sur la défensive, en démineur des violences policières – la police française est au service du gouvernement et pas du citoyen

« La France n’est pas un Etat autoritaire. On n’est pas la Hongrie ou la Turquie » : Macron s’explique longuement et défend son bilan

Interrogé sur Brut, le président de la République, souvent sur la défensive, s’est efforcé de déminer les attaques, notamment sur les violences policières. 

Par Alexandre LemariéPublié hier à 23h34, mis à jour à 15h09  

https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/12/04/la-france-n-est-pas-un-etat-autoritaire-macron-s-explique-longuement-et-defend-son-bilan_6062254_823448.html

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Lors de l’entretien accordé par Emmanuel Macron à Brut, le 4 décembre.
Lors de l’entretien accordé par Emmanuel Macron à Brut, le 4 décembre. BERTRAND GUAY / AFP

C’est une petite rupture dans la stratégie de communication d’Emmanuel Macron. Ces dernières semaines, l’Elysée théorisait le bénéfice pour le chef de l’Etat de se faire plus rare dans ses prises de parole, en se concentrant davantage sur l’international et les commémorations officielles. « Chacun est à sa place », affirmait-on, avec un président au-dessus de la mêlée et un gouvernement dans l’action au quotidien sur le front de la crise.

Mais la pression était devenue trop forte. Après deux semaines de vives polémiques autour des violences policières, qui ont engendré une grave crise au sommet de l’Etat, le président de la République a été contraint de replonger les mains dans le cambouis.Ce qu’il faut retenir de l’interview d’Emmanuel Macron sur Brut : Violences policières, discriminations, laïcité

Lors d’un entretien « sans concession », comme il l’a lui-même reconnu, Emmanuel Macron a répondu aux questions de Brut, un site de vidéos prisé par les jeunes, vendredi 4 décembre. Laïcité, Turquie d’Erdogan, crise sanitaire… Interrogé pendant plus de deux heures sur de nombreux sujets, le locataire de l’Elysée s’est efforcé de déminer les attaques contre l’exécutif, face à des journalistes mordants, n’hésitant pas à lui couper la parole et à le relancer.

Le plus souvent sur la défensive, M. Macron a manifesté une volonté insatiable de « convaincre » ses contradicteurs sur chaque thème, n’hésitant pas à détailler longuement son argumentaire. Un échange aux faux airs de « grand débat », l’exercice qui avait réussi au chef de l’Etat après la crise des « gilets jaunes ».

« On n’est pas la Hongrie ou la Turquie ! »

Ce fut en particulier le cas sur les violences policières. Emmanuel Macron a récusé les attaques de l’opposition, qui lui reproche des « dérives liberticides ». « En France, les libertés sont réduites pour faire face à l’épidémie, oui, mais sur les autres sujets, je ne peux pas laisser dire cela », a-t-il affirmé. Avant de marteler : « La France n’est pas un Etat autoritaire. On n’est pas la Hongrie ou la Turquie ! »

Face au journaliste Rémy Buisine, récemment frappé par les forces de l’ordre lors de l’évacuation violente d’un camp de migrants, à Paris, M. Macron a refusé une présentation manichéenne, qui voudrait faire de la police l’unique coupable.Article réservé à nos abonnés Lire aussi  « Je fais le métier de ma vie » : Rémy Buisine, l’image à l’état brut

Il a préféré renvoyer dos à dos les auteurs de violences, quels qu’ils soient, jugeant qu’on ne peut « pas avoir qu’un regard ». Certes, « il y a des policiers qui sont violents » et « qu’il faut sanctionner » de manière « implacable », a-t-il estimé, faisant notamment référence à l’agression d’un producteur noir par plusieurs fonctionnaires, à Paris. Mais il a aussi dénoncé les violences commises par des « gens ensauvagés » – un terme polémique utilisé par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin – contre les forces de l’ordre.

Le président de la République s’est par exemple ému du lynchage d’une policière « attaquée par des fous », lors de la manifestation contre le texte de loi de « sécurité globale », samedi 28 novembre à Paris. Prônant l’apaisement, Emmanuel Macron a estimé qu’il devait y avoir « zéro tolérance des deux côtés ». 

Pas de sanctions contre Gérald Darmanin et Didier Lallement

S’il a assuré ne « pas avoir de problème à répéter » l’expression de « violences policières », il a toutefois regretté qu’elle soit devenue « un slogan pour des gens qui ont un projet politique ». Il a, en revanche, reconnu la réalité des contrôles au faciès, en regrettant de ne pas avoir réglé « le problème des discriminations ». « Aujourd’hui, quand on a une couleur de peau qui n’est pas blanche, on est beaucoup plus contrôlé. » Pour tenter de résorber la « fracture » entre la police et la population, il a promis le lancement d’une plate-forme nationale de signalement des discriminations, gérée par l’Etat, le Défenseur des droits et des associations, en janvier.

 Lire aussi  La police, du service de l’Etat à celui du citoyen

Alors que 80 défilés sont encore prévus samedi 5 décembre dans toute la France pour protester contre la loi de « sécurité globale », M. Macron a également tenté de rassurer sur l’article 24 de ce texte, que la majorité s’est engagée à réécrire. « Demain, les journalistes et les citoyens pourront continuer à filmer les policiers », a-t-il promis. Pas de réforme de l’inspection générale de la police nationale, ni de sanctions prévues à l’encontre de Gérald Darmanin et du préfet de police de Paris, Didier Lallement, en revanche. « Est-ce que les choix du préfet et du ministre sont en cause ? La réponse est non », a-t-il évacué.

Il a également justifié le projet de loi sur le séparatisme, qui sera présenté en conseil des ministres le 9 décembre, comme un moyen de « réarmer » la République face aux tenants de l’islam radical. Une idéologie, qui « prospère sur nos échecs : celui de l’intégration à la française », a-t-il encore reconnu. S’adressant directement aux jeunes Français issus de l’immigration, M. Macron a lancé : « La République vous reconnaît » et « vous êtes une chance pour elle ».

Un bilan défendu

Un ton rassembleur, qui tranchait avec son agacement manifeste sur la question écologique. Accusé de ne pas en faire assez en la matière, M. Macron s’est défendu de tout recul.

« Je n’ai pas de leçons à recevoir ! » a-t-il tonné, en tapant du poing sur la table. Alors que la mise en œuvre des propositions de la convention citoyenne sur le climat tarde, il a assumé d’en expertiser le contenu, avant de finaliser la loi. « Je ne veux pas dire que parce que les 150 citoyens ont écrit un truc, c’est la Bible ou le Coran », a-t-il tranché, concédant seulement un « échec collectif » sur sa promesse de sortir du glyphosate en trois ans

 Lire aussi  Avant la fin de la convention citoyenne pour le climat, de l’énervement, des accusations et des déceptions

Au terme de cette opération séduction en direction des jeunes, le chef de l’Etat a annoncé une nouvelle aide exceptionnelle pour les étudiants, en janvier. Mais il a surtout rappelé les multiples mesures mises en œuvre pour soutenir ceux qui font figure de principales victimes de la crise, en citant notamment le plan de 6,5 milliards d’euros destiné à favoriser les embauches. Pour justifier son refus d’élargir le bénéfice du revenu de solidarité active (RSA) aux moins de 25 ans, il a souligné vouloir privilégier « l’insertion économique ».

Lors de cet entretien-fleuve, M. Macron s’est mué en premier défenseur de son bilan, en donnant l’impression d’avoir les yeux déjà rivés sur la présidentielle de 2022. Il a pourtant refusé de dire s’il serait candidat lors de ce scrutin. « Si je me mets dans la situation d’être un candidat, je ne prendrai plus les bonnes décisions », a-t-il évacué, allant jusqu’à affirmer qu’il « n’excluait rien », y compris d’être en situation de ne pas se présenter. Un destin qu’a connu François Hollande, qui fait figure de contre-modèle absolu pour son successeur.

Alexandre Lemarié

La police, du service de l’Etat à celui du citoyen

La relation entre la police et la population s’est détériorée au plus haut point. Cela s’explique en partie par un contrôle de la violence légitime qui fait écho à un pouvoir pour lequel l’autorité s’impose et ne se discute pas. 

Par Jacques Follorou

Publié le 03 décembre 2020 à 06h15 – Mis à jour le 03 décembre 2020 à 15h35  

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/12/03/la-police-du-service-de-l-etat-a-celui-du-citoyen_6062001_3232.html

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Analyse. En janvier 2015, place de la République, à Paris, une foule émue applaudissait longuement les forces de l’ordre quelques jours après les attaques contre Charlie Hebdo et l’épicerie Hyper Cacher. En novembre de cette année, au même endroit, une intervention contre l’installation sauvage d’un camp de migrants a symbolisé, aux yeux d’une partie de l’opinion, la pire des violences policières. Une indignation qui est montée encore d’un cran après la diffusion des images du passage à tabac, survenu deux jours plus tôt, de Michel Zecler, un producteur de musique, par des policiers qui seront poursuivis pour ces faits.

Que s’est-il passé dans notre pays entre ces deux dates pour que la relation entre la police et la population se détériore à ce point ?

La France aurait-elle dérivé vers une pratique autoritaire et lâché la bride à des forces de l’ordre désinhibées confondant l’usage de la force et l’arbitraire ? Il semble, plutôt, qu’à la différence d’autres démocraties européennes l’État a conservé, chez nous, de nombreux traits absolutistes quand vient le moment de recourir à la force.

La culture française estime que la première mission de la police est de protéger l’État et que la priorité est l’obéissance à ses ordres

Il convient, tout d’abord, de souligner que la police française s’est professionnalisée au fil du temps. Il y a cinquante ans, on pouvait entrer sans concours dans la police, et le service militaire permettait en soi d’intégrer la gendarmerie. Depuis le XIXe siècle, de nombreuses luttes sociales et politiques ont été réprimées dans le sang. Le 17 octobre 1961, des policiers réprimaient la manifestation du FLN algérien, jetant des hommes à la Seine. Le bilan, encore discuté, s’élève à plusieurs dizaines de morts. Le 8 février 1962, neuf personnes trouvaient la mort, après avoir été étouffées contre les grilles de la station de métro Charonne, à Paris, en fuyant la violence des forces de l’ordre lors d’une manifestation contre la guerre d’Algérie. Et les passages à tabac à l’abri des regards dans les fourgons de police en marge des défilés étaient légion. Lire aussi dans les archives du « Monde » : La tragédie de Charonne

Si l’incompréhension demeure entre police et population, cela renvoie davantage à une conception très française de la force. Le contrôle de la violence légitime, en France, fait, en effet, écho à un pouvoir peu soucieux de la reconnaissance des citoyens, pour lequel l’autorité s’impose et ne se discute pas. Là où les pays nordiques, le Royaume-Uni ou l’Allemagne considèrent que le maintien de l’ordre est un contrat passé entre l’État et le citoyen, la culture française estime que la première mission de la police est de protéger l’État et que la priorité est l’obéissance à ses ordres. Pourtant, ces voisins européens ne sont pas épargnés par la violence, mais là-bas le citoyen se sent partie prenante des décisions publiques, y compris celles concernant la sécurité.

Une police isolée du corps social

Les tentatives d’inflexion de cette culture ont été vaines. Le 22 janvier 1982, le député (PS) Jean-Michel Belorgey écrivait au ministre de l’intérieur Gaston Deferre, dans un rapport sur « Les réformes de la police » qui a fait date : « Les policiers seront d’autant plus maîtres de leurs nerfs que les autorités qui disposent d’eux leur montreront l’exemple (…), ils doivent être en état de résister à la contagion de l’impatience ou de l’abus de pouvoir. » Le colloque de Villepinte, en 1997, organisé par la gauche de retour au pouvoir, entendait ouvrir cette nouvelle page de l’histoire des rapports entre police et population en privilégiant la négociation et son rôle social. Mais ce tournant ne résistera pas aux campagnes municipales de 2001 et présidentielle de 2002, focalisées sur la thématique sécuritaire. Le futur scrutin présidentiel de 2022 n’échappe pas, non plus, à ce type de calcul politique.Lire aussi*  Sebastian Roché : « En France, la démocratisation de la police n’est pas achevée »

Résultat, selon le criminologue Sebastian Roché, la police s’est isolée du corps social, « comme un fil électrique entouré d’une gaine, qui répond seulement à l’exécutif ». Or, comme l’écrivait, en 2017, l’ex-directeur de cabinet de ministres régaliens et conseiller d’Etat Christian Vigouroux, dans son ouvrage Du juste exercice de la force (Odile Jacob), « la force doit être, sinon légitime, du moins acceptée et reconnue comme “la nôtre, celle de chacun d’entre nous, les citoyens ».Il ajoutait, en connaisseur : « Combien de ministres ont eu la faiblesse de promettre avec componction aux syndicats de police un allégement, une réforme de la procédure pénale… Bien des catastrophes sont survenues parce que les ordres avaient été volontairement évasifs ou inexistants. »

Le 30 novembre, devant la commission des lois de l’Assemblée, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, se présentant comme « l’avocat, même dans les périodes difficiles, de policiers issus du peuple », a récusé l’idée du divorce avec la population. « Il y a à faire comprendre les difficultés des policiers et non à renouer un fil qui n’a jamais été rompu. » Il s’appuie, notamment, sur un paradoxe : la lutte contre le terrorisme a resserré le lien entre les forces de l’ordre et les citoyens, en confortant la police dans son seul rôle d’autorité.Lire aussi  Gérald Darmanin reconnaît des « erreurs » et des « problèmes », mais réaffirme son soutien aux forces de l’ordre devant les députés

Pour l’un de ses prédécesseurs, Pierre Joxe, dans la revue Après-Demain, consacrée, en juin, au rapport entre police et population, il existe, pourtant, « une nécessité absolue d’une formation continue des personnels et d’un contrôle rigoureux du pouvoir d’État à un usage maîtrisé de la force ». Dans leur ensemble, ajoute-t-il, « les bavures ne sont pas policières, ce sont des bavures de l’État, des bavures de commandement, d’organisation, de prévision et d’information ». Dans son discours à la jeunesse, en 1903, Jean Jaurès résumait déjà le défi que la France avait à relever : « Le courage, ce n’est pas de laisser aux mains de la force la solution des conflits que la raison peut résoudre ; car le courage est l’exaltation de l’homme et ceci en est l’abdication. »

Jacques Follorou

Sebastian Roché : « En France, la démocratisation de la police n’est pas achevée »

Pour le directeur de recherche au CNRS, la police française est au service du gouvernement et pas du citoyen, contrairement à d’autres pays d’Europe

Propos recueillis par Nicolas Chapuis(Service société du « Monde »)Publié le 30 janvier 2019 à 17h00 – Mis à jour le 01 février 2019 à 06h36 

 https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/01/30/sebastian-roche-en-france-la-democratisation-de-la-police-n-est-pas-achevee_5416837_3232.html

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Sebastian Roché, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), est un spécialiste de la police. Il a notamment publié De la police en démocratie (Grasset, 2016). Pour le chercheur, nier les violences policières comme le fait le ministre de l’intérieur Christophe Castaner est une conception contestable de la protection des droits fondamentaux. Et l’idée que le maintien de l’ordre « à la française » est un modèle dans le monde n’a pas de base sérieuse.

Le lanceur de balles de défense (LBD) est très critiqué en raison des nombreux blessés que son usage, par les forces de l’ordre, occasionne. Pourquoi le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, défend-il aussi ardemment son utilisation ?

Analysons la dimension morale des positions qu’il tient : peu de valeur est donnée au bien-être et à la sécurité des manifestants, peu de considération est accordée aux blessés graves, aux mains perdues, aux yeux détruits… L’égalité devant la douleur n’est pas reconnue. Il y a d’un côté les « mauvais blessés » – les manifestants – et, de l’autre, les bons blessés – les policiers et les gendarmes.

Il l’a dit, il n’y a « pas de violence » de la part des forces de l’ordre. Dire que l’emploi de cette force est nécessaire signifie que blesser est une chose utile et juste. Pourquoi chercher à empêcher une bonne chose ? C’est une conception contestable de la protection, par l’Etat, des droits fondamentaux, au premier rang desquels on trouve l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants.

Sa défense du LBD répond à la question « à quoi l’Etat a-t-il droit ? » Le choix de ce que le gouvernement s’autorise, ou non, à faire aux citoyens exprime les droits qu’il juge bon de leur reconnaître ou de leur dénier – droits qui sont ensuite codifiés par la loi. Le fait de tuer est clairement jugé comme étant une ligne rouge, et c’est un acquis précieux que la police s’en tienne à cette ligne, on ne doit pas l’oublier. Mais le fait de mutiler n’en est pas une. Ceci signifie que c’est moralement acceptable.

Selon les forces de l’ordre, le LBD 40 est indispensable pour se sortir de situations d’ultraviolence sans faire usage de l’arme à feu. L’usage de cette arme est-il un mal nécessaire ?

En Europe, beaucoup de pays gèrent les foules et les groupes radicaux sans arme à feu et sans arme intermédiaire, et ils ne tuent pas pour autant des manifestants.

De plus, plusieurs gouvernements ont révisé leurs positions : en Espagne, la Catalogne a par exemple banni le LBD après l’épisode de dispersion de la manifestation des « indignés » sur la Puerta del Sol, à Madrid.

Lire le décryptage : « On ne tire pas à la légère avec le LBD, si on s’en sert, c’est qu’il y a une raison »

Permettre de tirer sur la foule avec des armes à « létalité réduite » (LBD, grenades diverses, etc.) est une décision politique. Il ne s’agit pas pour autant de laisser penser que le système français est le pire du monde ou que nous vivons dans une dictature. Comparativement au Venezuela ou à l’Egypte, notre police est, évidemment, bien plus démocratique. Mais à qui veut-on se comparer ? A ces pays-là ou aux pays du nord de l’Europe, comme le Danemark ou l’Allemagne, qui font beaucoup mieux que nous sans les LBD ?

On doit reconnaître les limites de notre système sans le caricaturer excessivement. Malheureusement, cette approche nuancée a du mal à être entendue. Comme toutes les polices des pays où j’ai travaillé – la Turquie, l’Egypte ou l’Italie –, la police française pense qu’elle est la meilleure. L’idée que le maintien de l’ordre « à la française » est un modèle dans le monde n’a, pourtant, pas de base sérieuse : aucun classement n’a jamais été réalisé. C’est une légende, un imaginaire professionnel.

Quels sont les enseignements que l’on peut tirer de l’observation des techniques de maintien de l’ordre de pays du nord de l’Europe ?

Les pays du Nord ont mené une réflexion en profondeur à partir des années 2000 sur le maintien de l’ordre. Ils sont partis des prémices que le but n’est pas de s’armer plus pour la confrontation, mais de la prévenir. Non seulement ils ne veulent pas tuer, mais ils veulent éviter les blessures irréversibles. Dans ces démocraties qui sont plus approfondies que la nôtre, les standards policiers sont plus élevés.

Je suis frappé, au Danemark, par la nature du référent central de leur formation : dès le premier jour, la recherche de la confiance des citoyens est au cœur des enseignements, et ce pendant trois ans. L’idée est que le policier doit mériter la confiance, qu’il est redevable.

En France, en revanche, la démocratisation de la police n’est pas achevée. La durée de la formation est moins longue et nous insistons sur les gestes professionnels et sur les aspects légaux et techniques, sans prendre le temps nécessaire pour définir ce que devrait être la police dans une démocratie. Notre problème de fond, c’est que nous concevons la police comme une institution « régalienne ». Si la police est celle du roi, si elle est conçue pour répondre à l’exécutif, l’essentiel est qu’elle satisfasse le prince.

Lire aussi  Violences policières : « On est dans le mensonge d’Etat »

Si la police est, en revanche, celle du citoyen, la question des blessures qu’elle lui inflige, celle des outils dont on la dote et celle des doctrines qu’on lui enseigne deviennent pertinentes. Nous devons relever nos exigences : une police reflète une conception de l’exercice du pouvoir.

Nicolas Chapuis(Service société du « Monde »)

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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