L’injection de nanobilles métalliques dans des tumeurs, avant radiothérapie puis immunothérapie, a permis de les faire régresser en plus grande proportion

Oncologie : des nanoparticules pour renforcer les traitements

L’injection de nanobilles métalliques dans des tumeurs, avant radiothérapie puis immunothérapie, a permis de les faire régresser en plus grande proportion. Un espoir à confirmer dans un essai prospectif de grande ampleur. 

Par Florence Rosier  Publié le 10 novembre 2020 à 07h30

https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/11/10/oncologie-des-nanoparticules-pour-renforcer-les-traitements_6059186_1650684.html

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Vue d’artiste de nanoparticules d’oxyde d’hafnium composant le produit NBTXR3 utilisé pour renforcer certains traitements anticancéreux.
Vue d’artiste de nanoparticules d’oxyde d’hafnium composant le produit NBTXR3 utilisé pour renforcer certains traitements anticancéreux. Nanobiotix

Apparues en 2011, les immunothérapies des cancers ont été qualifiées de « révolution en oncologie ». Non sans raison : dans des cancers comme les mélanomes métastatiques, qui ne répondent pas aux chimiothérapies et dont le pronostic était naguère très sombre, la survie des patients peut désormais être prolongée de dix ans. Du jamais-vu. Pour autant, ces traitements ne fonctionnent que chez 15 % à 25 % des patients – jusqu’à 40 % de ceux atteints de mélanomes.

Comment renforcer leur effet thérapeutique ? Une stratégie innovante – en phase d’évaluation chez un tout petit nombre de patients – a été présentée sous forme de poster, le 10 novembre, lors du congrès de la STIC (Society for Immunotherapy of Cancer) – virtuel cette année. Son principe ? Il s’agit de doper l’effet de la radiothérapie par une injection préalable de nanoparticules métalliques dans la tumeur, puis de traiter les patients par une immunothérapie (un traitement « anti-PD-1 », le pembrolizumab ou le nivolumab).

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Cette approche est développée par une start-up française, Nanobiotix, créée en 2003. Les nanoparticules injectées sont des cristaux d’oxyde d’hafnium, riches en électrons. Les rayons X vont interagir avec ces électrons, ce qui accroît la formation de radicaux libres. Ce stress oxydatif plus intense tue plus efficacement les cellules tumorales.

Une radiothérapie rendue plus efficace

Ce couplage nanoparticules-radiothérapie est une stratégie évaluée depuis plusieurs années déjà dans des sarcomes des tissus mous. A la suite d’un essai randomisé de phase 2 publié en 2019 (Bonvalot S. et al., The Lancet Oncology), ces nanoparticules ont obtenu un marquage CE dans cette indication – elles sont considérées comme un dispositif médical. Autre indication pour laquelle l’intérêt du duo est exploré : les cancers ORL.

Mais avec l’étude présentée sur ce nouveau poster, « il s’agit d’associer, pour la première fois, le binôme nanoparticules-radiothérapie à une immunothérapie », explique le professeur Christophe Le Tourneau, oncologue, qui dirige le département d’essais cliniques précoces de l’Institut Curie (Paris-Saint-Cloud). Il n’a pas participé à cet essai, conduit dans plusieurs centres américains, mais déclare des liens d’intérêt avec Nanobiotix.

Résumons la stratégie. « Il s’agit de rendre la radiothérapie plus efficace, sans augmenter les doses de rayons qui brûlent tout sur leur passage, lymphocytes compris, explique la professeure Laurence Zitvogel, oncologue à Gustave-Roussy, à Villejuif (Val-de-Marne), qui n’a pas participé à cet essai et ne déclare aucun lien d’intérêt. En faisant appel à ces nanobilles métalliques, on démultiplie l’effet de la radiothérapie sans la rendre plus toxique. On provoque alors une mort des cellules tumorales qui active le système immunitaire (mort « immunogène »). La tumeur irradiée se transforme en vaccin anticancer, que l’immunothérapie va booster. Les lymphocytes mémoires, activés, vont cibler et détruire les cellules tumorales dans tout l’organisme. »

Un gain de survie à évaluer

Cette nouvelle approche a été explorée chez neuf patients atteints de cancers ORL ou du poumon en récidive. Parmi eux, quatre avaient des métastases au poumon et deux au foie. Par ailleurs, sept avaient déjà été traités par une immunothérapie et n’avaient pas répondu. Sur ces sept patients, cinq ont montré une régression immédiate de leurs tumeurs, de l’ordre de 30 % à 50 % de leur taille initiale, et un sixième une régression tardive. Le septième n’a pas répondu. Deux autres patients, par ailleurs, n’avaient jamais été traités par une immunothérapie : eux aussi ont montré une régression de leurs tumeurs (l’un immédiate, l’autre différée). « Mais chez ces deux patients, ce peut être l’immunothérapie seule qui a agi », admet Christophe Le Tourneau.

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Quatre des patients qui n’avaient pas répondu à l’immunothérapie seule, avant l’essai, avaient développé des tumeurs sur plusieurs sites. Fait remarquable : trois d’entre eux ont montré une régression des métastases situées à distance du site d’injection des nanoparticules – tumeurs qui n’avaient donc reçu ni nanoparticules ni radiothérapie locale. « Ce qui me convainc le plus, c’est cette régression des tumeurs éloignées de la zone traitée. L’effet est très net sur une des métastases hépatiques, qui sont des lésions difficiles à traiter », relève Laurence Zitvogel. Reste cette interrogation : ces régressions tumorales se traduisent-elles par un gain de survie ? « Il y a une corrélation entre les régressions même partielles des tumeurs et la survie des patients, observe Christophe Le Tourneau. Néanmoins, seuls des essais randomisés permettront de préciser le bénéfice de cette approche, en termes de pronostic. »

Ce travail ressuscite un concept ancien. « Dans les années 1950, les radiothérapeutes avaient fait ce constat : chez des patients atteints de lymphomes, on observait parfois, après avoir irradié un site tumoral, une fonte des sites tumoraux distants, non irradiés », relate Laurence Zitvogel. relate Laurence Zitvogel.Comment expliquer cet effet dit « abscopal » (loin de la cible) ? Une hypothèse avait été émise : la radiothérapie déclencherait une immunité anticancer dans tout l’organisme.

Effets indésirables et toxicité

L’observation est ensuite tombée dans l’oubli, mais l’arrivée des immunothérapies a réveillé l’intérêt pour le concept. Chez les premiers patients traités par l’ipilimumab, rebelote : il arrivait qu’une radiothérapie déclenche la fonte de tumeurs distantes. Impossible, cependant, malgré tous les efforts, de reproduire cet effet lors d’essais cliniques. Avec cet essai, l’espoir renaît donc enfin. Soulignons qu’un de ces patients a subi deux effets indésirables graves, une pneumonie et une hyperglycémie sévère, « liés à l’immunothérapie et peut-être aux nanoparticules », notent les auteurs.

Quid de l’élimination des nanoparticules injectées dans la tumeur ? « Le produit a été élaboré pour être le moins toxique possible, répond Nanobiotix. Une fois injecté, il ne peut pas se dégrader. Il reste dans la zone d’injection. A date, sur plus de 200 patients traités avec notre produit, nous n’avons pas observé de problème de tolérance à moyen et long termes. »

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Que retenir de ce travail, malgré le faible nombre de patients ? « Cette approche est réalisable. Sa toxicité ne semble pas plus importante que celle de la radiothérapie seule. Et elle livre quelques réponses encourageantes, même si l’on ne peut à ce stade conclure sur son efficacité », résume la professeure Caroline Robert, chef du service de dermatologie de l’Institut Gustave-Roussy, qui n’a pas participé à l’essai et ne déclare aucun lien d’intérêt. Des résultats qui invitent à monter des essais cliniques de plus grande ampleur.

Florence Rosier

Savez-vous ce qu’est un nanomédicament ?

De l’infiniment petit pourraient bien naître d’immenses espoirs ! Les nanomédicaments, 50 000 fois plus petits que l’épaisseur d’un cheveu, sont en passe de révolutionner la façon d’administrer un traitement à un patient. 

Publié le 11 juin 2014 à 17h07 – Mis à jour le 11 juin 2014 à 18h06

https://www.lemonde.fr/festival/article/2014/06/11/savez-vous-ce-qu-est-un-nanomedicament_4436253_4415198.html

De l’infiniment petit pourraient bien naître d’immenses espoirs ! Les nanomédicaments, 50 000 fois plus petits que l’épaisseur d’un cheveu, sont en passe de révolutionner la façon d’administrer un traitement à un patient. Focus sur ce médicament du futur qui pourrait bien bouleverser l’avenir de la médecine.

Définition ?

Un nanomédicament est composé deux choses : un principe actif (molécule qui va guérir la zone malade) et un véhicule (terme scientifique : vecteur) de taille nanométrique (milliardième de mètre).

Comment ça marche ?

Savez-vous ce qu'est un nanomédicament ?
Savez-vous ce qu’est un nanomédicament ? © Infographie Ouest-France

Ces médicaments du futur fonctionnent comme des missiles à tête chercheuse. Le véhicule du nanomédicament est capable de transporter la molécule jusqu’à la zone infectée : un gène, une protéine, une cellule, un organe… Plus précis, plus habiles, ils permettent de traiter directement les cellules infectées sans irradier et endommager les cellules saines autour. Une véritable révolution par rapport aux médicaments actuels. En effet, aujourd’hui seule unepetite partie des médicaments atteint la zone malade, le reste se perd dans l’organisme. Ils permettent ainsi d’augmenter l’activité thérapeutique et de réduire la toxicité de nombreux médicaments, annulant certains effets secondaires désagréables. Trois générations de nanovecteurs ont déjà été élaborées.

Savez-vous ce qu'est un nanomédicament ?
Savez-vous ce qu’est un nanomédicament ? MGEN

Quelles maladies les nanomédicaments peuvent ou pourront guérir ?

Les nanomédicaments nous permettront-ils un jour de soigner les maladies sévères comme le cancer, le choléra, le diabète, Alzheimer, la sclérose en plaques…? Loin d’être une utopie, il semblerait que le travail acharné de plusieurs chercheurs sur les nanotechnologies porte leurs fruits. L’un des pontes dans ce domaine, le Professeur Patrick Couvreur, chercheur au CNRS, directeur de l’unité chimie physique, pharmacotechnologie et biopharmacie de l’Université Paris-Sud renferme dans son laboratoire un flacon contenant un milliard de nanoparticules isolant des médicaments anticancéreux pour guérir le cancer du foie. Un grand pas en avant qui devrait permettre d’aller plus loin encore dans la recherche pour un jour utiliser ces nanomédicaments sur d’autres cancers aujourd’hui intraitables par les thérapies traditionnelles. Seul frein pour le moment, la question du financement. La recherche sur les nanomédicaments coûte cher et l’industrie pharmaceutique ne finance pas encore assez ces recherches innovantes.

Le Monde

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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