Covid-19 : des tests antigéniques dans les aéroports pour faire revenir les passagers
Le déploiement doit avoir lieu d’ici à la fin du mois dans certains aéroports français. L’initiative souhaitée par les professionnels du transport aérien n’est cependant pas la panacée.
Par Eric Albert, Sandrine Morel, Guy Dutheil et Chloé Aeberhardt Publié le 23 octobre 2020 à 09h38, mis à jour hier à 06h25

Les tests antigéniques vont-ils favoriser la reprise du trafic aérien ? Ces dispositifs de dépistage rapide du Covid-19 (quinze à trente minutes) devraient être déployés d’ici à la fin du mois dans les aéroports français de Roissy, Orly, Marseille et Nice.
Réalisés à partir de prélèvements nasopharyngés, ils seront proposés aux voyageurs « au départ vers des destinations comme les Etats-Unis ou l’Italie », expliquait le ministre délégué aux transports, Jean-Baptiste Djebbari, le 16 octobre sur CNews. Seront aussi testés les passagers « à l’arrivée des pays rouges », les régions les plus frappées par le virus. Une excellente nouvelle pour les acteurs du tourisme qui, le 14 octobre, réclamaient dans un communiqué « la mise en place urgente des tests antigéniques » dans les aéroports.
L’objectif est que « ces tests se substituent aux quarantaines », précise Thomas Juin, président de l’Union des aéroports français (UAF). « La plus grande erreur serait d’attendre que l’épidémie cesse pour que le trafic aérien reprenne. »
Les acteurs du transport aérien avaient été déçus à la sortie du confinement, « ils pensaient que le trafic intraeuropéen serait le premier à reprendre. Cela n’a pas été le cas » à cause des quarantaines. Air France espère que l’installation de ces tests sera rapide. Il en va du succès de la saison d’hiver de la compagnie, qui mise beaucoup sur les vacances de Noël et le retour des touristes aux Antilles et à La Réunion.Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le pilotage serré d’Air France pour éviter le pire
A Marseille, le centre de dépistage sera officiellement inauguré lundi. Le rythme est plus lent en ce qui concerne les aéroports parisiens. La direction de Groupe ADP, gestionnaire de Roissy et d’Orly, était encore, jeudi 22 octobre, en discussion avec les représentants de l’agence régionale de santé (ARS), qui tarde à accepter la mise en place des tests antigéniques ou PCR dans les aéroports.
« Un bon outil de dépistage »
Pour preuve : malgré un contrat avec un laboratoire, ADP a dû attendre plusieurs semaines les autorisations administratives de l’ARS pour pratiquer des PCR sur ses sites. Un feu vert finalement obtenu, vendredi 23 octobre.Article réservé à nos abonnés Lire aussi Covid-19 : les tests antigéniques, un espoir pour désengorger les laboratoires
Quoique moins performant que le RT-PCR, le test antigénique est « un bon outil de dépistage à grande échelle, dont le déploiement dans les aéroports est tout à fait indiqué », estime le virologue Jean-Michel Pawlotsky dont l’équipe, à l’hôpital Henri-Mondor, à Créteil, évalue la performance de différents tests rapides d’orientation diagnostique. « Ce test permet d’identifier des personnes contagieuses que l’on n’aurait pas forcément identifiées autrement ».
Mais si tester des passagers à l’arrivée devrait permettre d’empêcher de nouvelles chaînes de contamination, les tester au départ ne sert à rien, si la méthode n’est pas reconnue à destination.
Au Royaume-Uni, qui impose une quatorzaine aux passagers débarquant de France, le secrétaire d’Etat aux transports a déclaré que des tests réalisés à l’aéroport ne constitueraient pas une alternative à l’isolement
Largement utilisés aux Etats-Unis, les tests antigéniques sont de plus en plus déployés en Europe, mais les indications diffèrent d’un pays à l’autre. Certains comme l’Italie sont favorables à leur installation dans les aéroports. A Milan ou à Rome, on teste les voyageurs qui n’ont pas passé de test PCR ou antigénique avant leur départ.
Les quarantaines brident la reprise du transport aérien
L’Allemagne semble s’en inspirer : fin septembre, la Lufthansa a annoncé vouloir mettre des tests antigéniques à disposition de ses clients de business et de première classe. En revanche, au Royaume-Uni, qui impose une quatorzaine aux passagers débarquant de France, le secrétaire d’Etat aux transports, Grant Shapps, a déclaré le 14 octobre que des tests réalisés à l’aéroport ne constitueraient pas une alternative à l’isolement. Même défiance en Espagne, où ils sont absents des aéroports, alors que les régions utilisent des tests antigéniques depuis une dizaine de jours.
Dans ces conditions, quelle chance ont les tests français d’être reconnus à l’étranger ? Sollicité, M. Djebbari n’a pas apporté de réponse. De son côté, Thomas Juin, de l’UAF, appelle de ses vœux « la signature d’accords bilatéraux avec nos principaux partenaires commerciaux en Europe ». Ils permettraient la mise en place de « corridors sanitaires », et la levée des quarantaines qui brident la reprise du transport aérien moyen et long-courrier.
L’UAF réclame aussi l’instauration d’un « protocole européen qui pourrait entrer en vigueur fin novembre ». Préparé par l’Agence européenne de sécurité aérienne (EASA) et le Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC), le dispositif sera présenté dans les prochains jours à la Commission européenne. Toutefois, il n’a qu’une valeur de recommandation.